eJournals lendemains 46/181

lendemains
0170-3803
2941-0843
Narr Verlag Tübingen
10.24053/ldm-2021-0003
2021
46181

„Notre génération est consolée!“

2021
Wolfgang Asholt
Selon le Trésor de la langue française, le substantif ‚libertaire‘ apparaît pour la première fois dans l’essai philosophique de Pierre-Joseph Proudhon De la justice dans la Révolution et dans l’Eglise paru en 1858, dans lequel il revendique une société juste où les individus seraient des sujets libres. Mais l’œuvre de référence aurait pu aussi renvoyer à une revue qu’un „précurseur de l’anarchisme“ (Maricourt), Joseph Déjacque, édite à New York et qui s’appelle Le Libertaire (1858-1861), même si cette revue était certainement peu connue et lue dans la France du Second Empire (Asholt 1998: 351-363). Déjacque avait dû s’exiler en 1851 et l’étude citée a fait condamner Proudhon et l’a obligé à s’exiler. Vallès, grand lecteur de Proudhon, avait publié un an plus tôt une première œuvre avec laquelle il se fait remarquer: L’Argent (1857) qui est un hypertexte du Manuel du spéculateur de Bourse de Proudhon paru en 1856, où celui-ci revendique de remplacer „l’anarchie industrielle“ du capitalisme par la „République industrielle“, c’est-à-dire le fédéralisme et le mutuellisme (Asholt 1984: 5-15). Si deux représentants du début de l’anarchisme en France se servent de cette notion de ‚libertaire‘, elle doit faire partie de leur vocabulaire philosophique et idéologique. Mais, malgré ce contexte, cette notion ne devient véritablement une référence pour l’anarchisme que vers la fin du XIXe siècle où des auteurs comme Zola ou Anatole France s’en servent.
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DOI 10.24053/ ldm-2021-0003 19 Dossier Wolfgang Asholt „Notre génération est consolée! “ Jules Vallès, journaliste libertaire et anarchiste et la Commune Selon le Trésor de la langue française, le substantif ‚libertaire‘ apparaît pour la première fois dans l’essai philosophique de Pierre-Joseph Proudhon De la justice dans la Révolution et dans l’Eglise paru en 1858, dans lequel il revendique une société juste où les individus seraient des sujets libres. Mais l’œuvre de référence aurait pu aussi renvoyer à une revue qu’un „précurseur de l’anarchisme“ (Maricourt), Joseph Déjacque, édite à New York et qui s’appelle Le Libertaire (1858-1861), même si cette revue était certainement peu connue et lue dans la France du Second Empire (Asholt 1998: 351-363). Déjacque avait dû s’exiler en 1851 et l’étude citée a fait condamner Proudhon et l’a obligé à s’exiler. Vallès, grand lecteur de Proudhon, avait publié un an plus tôt une première œuvre avec laquelle il se fait remarquer: L’Argent (1857) qui est un hypertexte du Manuel du spéculateur de Bourse de Proudhon paru en 1856, où celui-ci revendique de remplacer „l’anarchie industrielle“ du capitalisme par la „République industrielle“, c’est-à-dire le fédéralisme et le mutuellisme (Asholt 1984: 5-15). Si deux représentants du début de l’anarchisme en France se servent de cette notion de ‚libertaire‘, elle doit faire partie de leur vocabulaire philosophique et idéologique. Mais, malgré ce contexte, cette notion ne devient véritablement une référence pour l’anarchisme que vers la fin du XIX e siècle où des auteurs comme Zola ou Anatole France s’en servent. 1. Les définitions d’un Réfractaire Vallès actualise et élargit pourtant une autre notion proche de ce champ sémantique à laquelle on l’identifiera plus tard: celle de ‚réfractaire‘. Selon le TLF, ce serait Sainte-Beuve en 1863 qui, dans un article consacré à Théophile Gautier, s’en sert pour la première fois dans un sens qui dépasse celui des objecteurs de l’époque révolutionnaire ou napoléonienne. Dans le dictionnaire d’Alfred Delvaux de 1867, celui-ci le définit comme un refus des „modes morales de son temps“. Mais Vallès avait déjà agrandi le champ notionnel d’une manière plus radicale. Le 14 juillet 1861, il publie dans Le Figaro un article intitulé „Les Réfractaires“ dans lequel il désigne avec ce mot un groupe social dont ni la littérature ni la sociologie ne prenaient note et qu’il décrit ainsi: „des vaillantes natures souvent, des esprits généreux, des nobles cœurs que j’ai vus […] mourir parce qu’ils ont ri, ces aveugles, au nez de la vie réelle“ (Vallès 1975: 139). 1 La série d’articles qui suivront seront réunis en 1865 sous ce même titre Réfractaires (Achille Faure) et, en 1869, Vallès publie également un journal qu’il intitule pareillement. À la fin des années 1860, il ne se distingue pas seulement à travers ces textes, mais il personnifie d’une certaine manière cette notion. En 1872, un an après la Commune, Jean Richepin publie un livre sur Vallès sous le titre 20 DOI 10.24053/ ldm-2021-0003 Dossier Les Étapes d’un réfractaire (Librairie Internationale) où il voit dans Vallès le Homère qui a „chanté l’Odyssée“ (Richepin 1872: 9) de ces déclassés révoltés. Après la Commune, il est clair qu’il ne s’agissait pas seulement de réfractaires aux modes morales de leur temps, mais de „ceux qui se sont mis en effet en quelque sorte hors de la société et que la société a, à son tour, mis hors la loi“ (ibid.: 10-11). Et de leur refus se développe un but que Richepin, encore sous le choc de la Commune, décrit ainsi: „Cette société où ils n’avaient pas eu de place, ils vont la refondre“ (12). Le titre de Richepin est aussi justifié par le fait que Vallès se sert de cette notion de ‚réfractaire‘ pendant son exil à Londres. Quand il publie en 1878 un article sur Zola et le champ littéraire de l’époque, il lui donne le titre „Notes d’un absent“ (dans Le Voltaire, 22.12.1878) et le signe avec „Un Réfractaire“ (Vallès 1990: s.p.), 2 un pseudonyme qui renvoie clairement à l’auteur Vallès. Celui-ci est le „représentant des ‚réfractaires‘“ et avec les connotations que comporte cette notion, le mot ‚réfractaire‘ remplace, au moins partiellement pendant cette époque, ce qui sera désigné comme ‚libertaire‘ plus tard. Ce n’est donc pas sans raison que Jacques Migozzi a pu donner à son article paru dans un ouvrage d’Alain Pessin et de Patrice Terrone sur Littérature et Anarchie le titre „Portrait d’un réfractaire dans tous ses états: L’Insurgé de Jules Vallès“ (Migozzi 1998: 65-81). 2. Les étapes d’un Réfractaire Dans l’article „Jules Vallès critique de l’État“, également une contribution à l’ouvrage Littérature et Anarchie qui est sorti d’un colloque à Grenoble en 1994, Roger Bellet donne une description/ définition du ‚réfractaire‘ à la Vallès en vue de sa relation et de ses correspondances avec le ‚libertaire‘. Vallès avait lu avec enthousiasme les Confessions d’un révolutionnaire (1849) de Proudhon, auquel il consacre un chapitre dans La Rue (Achille Faure 1866). Ce texte avait paru comme article en 1865 (L’Époque, 8.6.1865), l’année de la mort de Proudhon, et il s’ouvre et se termine par les exclamations: „Celui-là était un homme libre“ et „Oui, ce fut un homme libre“ (OC I: 808 et 823), et il ajoute: „tout gouvernement, comme tout État qu’il représente et qu’il sert, est autoritaire“. C’est dans cette perspective que Bellet situe le ‚réfractaire‘: „Il nie, par exemple, par la vie vécue, par l’écriture, la société plus que l’État, qu’il ignore. […] Il est un contre-exemple, sans se désigner comme tel. Il signifie une révolte existentielle, silencieuse, simplement parce qu’il est là“ (Bellet 1994: 52sq.). La fonction du journaliste (littéraire) qu’est Vallès à ce moment-là, mais aussi le rôle de la littérature telle qu’il la comprend, c’est de montrer avec „les réfractaires de Paris“ un nouveau type social, à la manière du ‚flâneur‘ de Baudelaire. „Entre eux [les réfractaires], du reste, et le pauvre banal existe la différence de l’esclave au vaincu. Ils n’ont point l’air de mendiants, mais d’émigrés“ (OC I: 140) - et les similitudes avec la situation marginale des „captifs“ et des „vaincus“ que sont les „exilés“ ridicules et sublimes que l’on retrouve dans „Le Cygne“ de Baudelaire (1860), qui date de la même époque, sont évidentes. Pour Bellet, „il [le réfractaire] ignore les pouvoirs - ceux-ci ne le reconnaissent pas“ (Bellet 1994: 52), mais on pourrait aussi DOI 10.24053/ ldm-2021-0003 21 Dossier échanger les deux verbes et la négation: „il ne reconnaît pas les pouvoirs, ceux-ci l’ignorent“. Le journaliste littéraire qu’est Vallès se donne pour tâche de mettre la lumière sur ces invisibles et de rendre un peu de justice à ces vaincus, presque dans le sens d’une histoire des vaincus comme Walter Benjamin l’a demandé dans sa VIIe thèse Sur le concept d’histoire (1940). Mais cela veut dire aussi que, dès le début, la notion de ‚réfractaire‘ ne signifie pas seulement un déni de la société mais inclut aussi un refus de l’État. Dans cet anti-étatisme, Vallès est en accord avec les conceptions de Proudhon, une position qu’on pourrait désigner comme ‚libertaire‘. Mais il va plus loin en tant que ‚réfractaire‘ conséquent: cet anti-étatisme n’a pas seulement de bonnes raisons d’être, sous le Second Empire, qu’on qualifie de ‚libéral‘ dans cette dernière phase, mais d’une manière générale. Dans un article consacré aux „Francs-Parleurs“ (Le Courrier français, 19.8.1866), Vallès s’exclame: „On a détourné le cours de la Révolution! Elle est partout centralisatrice, unitaire, c’est-àdire traditionnaliste et oppressive. Il faut à tout prix réagir et exalter la personnalité en haine de l’enrégimentation“ (OC I: 898). C’est un programme fédéraliste in nuce que Vallès formule dans cet article et dans d’autres, pour le moment limité en apparence à la littérature, mais visant plus qu’implicitement déjà aussi l’État. Dans Les Règles de l’art (1992), Pierre Bourdieu distingue trois pôles dans le champ littéraire de l’époque pour lesquels les journaux et les revues jouent un rôle décisif. Après le coup d’État du futur Napoléon III (2.12.1851), la presse est soumise à une censure rigoureuse à laquelle on peut partiellement échapper par des publications artistiques et littéraires, s’abstenant de tout positionnement politique direct. Bourdieu, qui renvoie à L’Argent de Vallès, voit d’un côté un „art bourgeois“, parfois dans la forme de l’„art industriel“, se positionnant plus ouvertement du côté du régime, mais „directement soumis aux attentes du public“ et conformes à celles du régime, et de l’autre côté un „art social“; „contre l’un et l’autre se définit, dans un double refus, une troisième position, celle de l’‚art pour l’art‘“ (Bourdieu 1992: 123). Si les positions de ‚l’art social‘ et de ‚l’art pour l’art‘ ont en commun leur opposition et leur dédain vis-à-vis de l’art bourgeois, cela permet un compromis temporaire et provisoire autour de la notion de ‚réalisme‘. Mais, de la même manière que les représentants de ‚l’art pour l’art‘ méprisent ‚l’art social‘, les tenants de ce courant rejettent ‚l’art pour l’art‘, comme le montre l’article nécrologique de Vallès sur Baudelaire: lui prédisant moins de dix ans „d’immortalité“, Vallès pose la question, essentielle pour lui: „Était-il, par quelque côté au moins, un révolté? Allons donc! Rien qu’un égoïste qui travaillait péniblement à sa gloire […] il posait en aristocrate de la pensée qui s’exile avec ses fidèles dans le pays des idées hautes“ (OC I: 972-973). Vallès et Baudelaire ne se connaissaient pas seulement depuis leur collaboration dans la revue Le Présent en 1857, mais ils fréquentaient dans les années 1850 aussi les mêmes brasseries et cafés: Andler, Tabourey, Robespierre ou Paradoxe. Mais ces lieux publics ou ces lieux où l’on essaie d’expérimenter avec l’opinion publique permettent à une certaine bohème littéraire d’évoluer vers le journalisme. La plupart de ces futurs journalistes sont passés par le lycée où ils ont acquis un capital culturel ‚classique‘ et leur innovation consiste souvent à accommoder cette ‚tradition‘ avec la 22 DOI 10.24053/ ldm-2021-0003 Dossier modernité de l’époque, un peu à la manière des opérettes d’Offenbach au même moment. Mais, selon Roger Bellet, il y a quelques exceptions qui renouvellent le journalisme, à la manière de Vallès: „Les meilleurs journalistes du Second Empire […] ne sont sans doute pas ceux qui ont le mieux diverti leur époque […] c’est au contraire, sans doute, la rupture vécue puis la négation proclamée d’une culture, l’‚échec social‘ ou le ratage universitaire, la faille d’une écriture, c’est cela qui fait Vallès“ (Bellet 1994: 15). Bellet a raison de compter Vallès parmi les (futurs) journalistes qui viennent comme dans Les Illusions perdues de la province, ce qui équivaut à un capital culturel spécifique. Cette spécificité ‚provinciale‘ est soulignée par Bourdieu qui constate chez les écrivains-artistes-journalistes de la brasserie Andler et de celle des Martyrs, comme Courbet, Champfleury, Duranty, Montégut et Vallès qu’ils „sont séparés […] par tout un ensemble de propriétés sociales, et en particulier par leur petite origine et leur faible capital culturel, des deux camps auxquels ils s’opposent sur le terrain des luttes symboliques“ (Bourdieu 1992: 154), donc de l’art ‚bourgeois‘ et de ‚l’art pour l’art‘, pour ne pas parler de Flaubert et de Baudelaire. Mais Bourdieu voit aussi que cet emplacement dans le champ littéraire et artistique a comme conséquence „le refus de toute hiérarchie dans les objets ou les styles qui s’affirme dans le droit de tout dire et dans le droit de toute chose d’être dite“ (ibid.: 155), ce qui est aussi bien le cas de Courbet que de Vallès. 3. Du Réfractaire au Libertaire Pendant plus de dix ans, de 1857 à 1867, Vallès aborde le journalisme comme réfractaire et privilégie les sujets réfractaires, mais tout en restant en général en deçà de la limite de la censure. Mais son journal La Rue, fondé en 1867, est interdit d’abord temporairement et ensuite définitivement à cause d’un numéro consacré, en janvier 1868, à Proudhon, mort deux ans plus tôt. Un mois plus tard, Vallès sera condamné à un mois de prison qu’il passera à Sainte-Pélagie, pour un article sur la police (dans Le Globe). Et, à la fin de l’année, pour un article (paru dans Le Courrier de l’intérieur) sur le 2 décembre, donc sur le coup d’État du futur Napoléon III en 1851, il est de nouveau condamné, cette fois à deux mois, qu’il passe aussi dans la prison qu’il connaît déjà, dans des conditions relativement privilégiées. 1867/ 68 représente donc une année charnière où le réfractaire se rapproche de positions libertaires. Le règlement du cautionnement oblige Vallès à fonder un journal ‚littéraire‘. La Rue, comme l’explique Vallès dans son „éditorial“ du 1 er juin 1867, est un entre-deux: „Celle qui mène au boulevard et celle qui aboutit au faubourg“, c’est ainsi que commence ce texte. Mais malgré l’auto-désignation de „journal pittoresque de la vie des rues“ (OC I: 936), le journal choisit son camp autant que c’est possible pour une publication ‚littéraire‘: „Nous écrivons l’histoire de la souffrance, mais nous écrirons aussi celle du travail“ (OC I: 937), et revendique également une position politique, pour ne pas dire idéologique: „Nous voulons peindre tout entière une époque, la plus étrange peut-être de l’histoire, et nous devons faire entendre, aussi bien que la complainte des pauvres ou le chant du travail, le cri de nos passions“ DOI 10.24053/ ldm-2021-0003 23 Dossier (OC I: 939). Une remarque de décembre 1867 montre à quel point il est difficile de lancer un journal ‚littéraire‘: „Le public ne s’habitue pas tout de suite aux allusions des écrivains indépendants et personnels“ (7.12.1867). Mais Vallès a aussi conscience des conditions matérielles de son journal, non seulement concernant sa survie économique, mais aussi du côté des lecteurs: „La Rue se vend à quatre sous; c’est trop cher pour les pauvres, au prix où est le pain“ (14.9.1867). Et, surtout, après les ‚visites‘ de la police pour le dessin de Gill, „L’Ours affamé“, un numéro avec le dessin de Courbet „Proudhon à son lit de mort“ est saisi, et le dernier numéro, en grande partie consacré à Proudhon, ne peut plus paraître qu’à quelques exemplaires pour les (rares) abonnés. Le programme que Vallès avait proclamé dans l’article „Au public“ du 16 novembre 1867, quand la fin du journal était déjà prévisible, sous la formule „Jette à l’opinion publique […] ton mot de mépris ou ton cri de douleur“, était impossible à réaliser à ce moment-là. Mais Vallès en tire un enseignement qui préfigure déjà celui de la Commune: „Parce que jusqu’ici ces révoltes de la pensée ont été écrasées sous le pied de la foule défiante […] il n’est pas sûr que nous n’aurons pas de revanche“ (OC I: 1006). C’est une position qui, en remplaçant les „révoltes de la pensée“ par les „révoltes“ tout court, laisse soupçonner la radicalisation future de Vallès. En 1869, il fonde de nouveau un journal, appelé Le Peuple, en souvenir de Proudhon et de son journal de 1848. Cette fois, le journal ne veut pas être une rue entre le boulevard et le faubourg, il déclare ouvertement son emplacement social et idéologique: d’un mécanicien-chauffeur d’une locomotive, en passant par un paysan, par un flotteur, un mineur, un couvreur (préfigurant le Coupeau de L’Assommoir), un verrier, un tourneur, une peintre de bâtiment jusqu’à un mitron, on est dans l’actualité sociale du monde ouvrier. Ce n’est pas encore le peuple en tant qu’acteur politique, mais c’est un peuple caractérisé par le monde du travail, et, dans ce sens, la conception de Vallès se rapproche de celles de l’Association internationale des Travailleurs et sa candidature aux élections législatives de mai 1869 au nom de la „démocratie socialiste“ (Bellet 1994: 361-319) confirme cette réorientation idéologique. Quand il participe à partir de janvier 1870 à La Marseillaise, fondée en décembre 1869 par Henri Rochefort, il rejoint une équipe de futurs membres de la Commune: Arthur Arnould, Gustave Flourens, Benoît Malon, Arthur Ranc et Raoul Rigault (dont la plupart appartiendront à la minorité), Rochefort lui-même et Prosper Lissagaray, le futur historien de la Commune, continuant tous deux à s’engager comme journalistes pendant la Commune. C’est dans ce journal que Vallès proclame sa nouvelle conception du ‚peuple‘, plus proche de Proudhon que de Blanqui et qui préfigure ses convictions pendant la Commune. Le peuple sait ce qu’il fait. Il a payé, et payé cher, pour connaître ce que coûtent les émeutes vaincues, ce que coûtent même les victoires. […] C’est donc au peuple à choisir son heure, seul il en a le pouvoir et le droit, et nous n’aurons, nous, qui depuis dix-huit ans, avons peur de passer pour des lâches, nous n’aurons qu’à remonter vers les faubourgs, si les faubourgs remuent. Il n’y a point à leur conseiller ni à leur défendre l’insurrection. Ils font ce qu’ils veulent et ils feront ce qu’ils doivent. (OC I: 1140) 24 DOI 10.24053/ ldm-2021-0003 Dossier Le temps de La Rue, une rue qui pouvait aussi bien mener au Boulevard qu’au Faubourg, même s’il ne faut pas oublier les contraintes d’une écriture de contrebande, est donc terminé moins de trois ans plus tard. Le contexte historique et les expériences ainsi que les convictions personnelles ont changé. Vallès, tout en restant ‚réfractaire‘, devient de plus en plus ‚libertaire‘. Au cours de l’année 1870, Vallès se politise de plus en plus. Et quand il collabore à l’Affiche rouge qui est placardée le 6 janvier 1871 à Paris, c’est pour appeler le peuple à descendre des faubourgs, comme en témoigne l’appel final: „Place au peuple! Place à la Commune! “ (Rougerie 1971: 63). 4. Un Libertaire pendant la Commune Le 28 mars, Vallès publie dans son journal, Le Cri du peuple, un article qui résume l’importance de la Commune pour lui et sa génération: „Le 26 mars“ (OC II: 49-50), consacré au jour de l’élection. Il commence avec le ‚cri‘ enthousiaste: „Quelle journée“, et on y trouve le ‚bilan‘ de sa génération, préfigurant le destin de la Commune: „Quoi qu’il arrive, dussions-nous être de nouveau vaincus et mourir demain, notre génération est consolée! - Nous sommes payés de vingt ans de défaites et d’angoisses“ (50). Pendant la Commune, Vallès appartient à la minorité, face à une majorité du Conseil formée par les blanquistes, les jacobins et les révolutionnaires indépendants que Vallès quitte pour rejoindre la minorité, dominée par les internationalistes. Vallès s’oppose surtout à l’instauration du Comité de Salut public, qui veut installer une dictature étatique pour défendre la Commune. Avec la plupart des autres membres de la minorité, il défend une position anti-autoritaire, par exemple dans le débat autour de l’interdiction de journaux d’opposition (comme Le Figaro, Le Gaulois ou Les Débats) et le déclare ouvertement dans un article publié dans Le Cri du peuple du 22 mars 1871: „J’ai écrit il y a bien longtemps, et je le répète aujourd’hui, que je suis pour la liberté de la presse absolue et illimitée. […] La liberté est sans rivages“ (OC II: 1454), faisant ainsi allusion à un article de 1867 (24 février) où il proclame: „Je suis pour la liberté sans rivages“ (OC I: 920). La formule a été reprise presque cent ans plus tard par un essai de Roger Garaudy, préfacé par Aragon: D’un réalisme sans rivages (1964). Vallès reprend cette exigence dans un article du 7 avril 1871: „Mais, encore une fois, nous réclamons la liberté absolue de la presse“ (OC II: 1461), ce qui montre que ce principe d’une liberté sans limites fait partie de ses convictions libertaires. Comme Courbet, lors de sa déclaration contre l’instauration du Comité de Salut Public, Vallès est d’avis que la réécriture de la Grande Révolution est non seulement un plagiat, mais une erreur grave: „Employons les termes que nous suggère notre révolution“ (Bernard 1971: 90). Et le „Programme“ de la „Commune de Paris“ que Vallès co-écrit avec Charles Delescluze et Pierre Denis fait preuve de la conviction d’être au début d’une nouvelle époque: „La Révolution communale, commencée par l’initiative populaire du 18 mars, inaugure une ère nouvelle de politique DOI 10.24053/ ldm-2021-0003 25 Dossier expérimentale, positive, scientifique.“ 3 Et si ce programme ‚communaliste‘ de la Commune désigne celle-ci comme le lieu de la „Révolution moderne“, cette révolution n’a plus besoin d’imiter d’autres époques, ce que Marx avait déjà critiqué dans Le 18 Brumaire. C’est dans cette situation que Vallès se révèle beaucoup plus ‚libertaire‘ que ‚réfractaire‘ et défend ce qu’il appellera plus tard une „littérature neuve“ qui est identique avec la conception de la littérature que Rimbaud proclame dans une lettre à Paul Demeny le 17 avril 1871: „Les choses du jour étaient Le Mot d’ordre et les fantaisies, admirables, de Vallès et de Vermersch au Cri du Peuple. Telle était la littérature - du 25 février au 10 mars“ (Rimbaud 1972: 266), et Kristin Ross a raison de souligner que „Rimbaud élargit le champ de la littérature à la propagande“ et que „[l]a littérature a moins pour fonction de signifier que de mettre l’accent sur une situation totalement révolutionnaire“ (Ross 2013: 196); nous allons y revenir. Roger Bellet, dans sa contribution, prudemment appelée „Jules Vallès critique de l’État“, a montré que la critique de l’État et de l’autorité commence chez Vallès par celle de la famille, surtout telle que le Code Napoléon l’a instaurée juridiquement, et va en passant par l’école jusqu’au jacobinisme et au culte d’une tradition aussi bien classique que révolutionnaire. Bellet cite un passage d’un article consacré au Salon de 1866, où le réfractaire Vallès déclare: „Tout corps établi, constitué, représente fatalement ce qui est“. Mais ce statut quo est un signe de „faiblesse“: „ CE QUI EST sera demain CE QUI FUT “ (OC I: 887). Mais Bellet aurait aussi pu citer l’article suivant, consacré aux „Statues“. Les statues signifient et idolâtrent l’autorité: „Idéaliser! […] on essaie de personnifier dans son héros sa supériorité! C’est affaire d’école et de sacristie! […] Moins de statues, plus d’hommes! “ (OC I: 895-896). Cet iconoclasme ne concerne pas seulement la monumentalisation historique, y inclus les lieux de mémoire, mais aussi l’appareil de l’État et son idéologie. Pendant l’époque du Second Empire, être contre cet État, sa „Gloire“ (titre de l’article suivant) et sa mise en scène allait de soi pour l’oppositionnel qu’était Vallès. Mais avec la candidature législative contre une figure représentative de l’opposition républicaine comme Jules Simon en 1869, il montre déjà que son anti-autoritarisme et son anti-étatisme ne connaissaient pas de limites. La Commune représente ainsi une sorte de test. Être ‚réfractaire‘ pouvait être lié aux conditions concrètes d’une situation sociale. Être ‚libertaire‘ revendique au contraire un engagement de principe qui n’admet pas d’exception, même lorsque la Commune est menacée. Mais pour Vallès, ne pas accorder la même liberté aux supposés ennemis de la liberté qu’à soi-même, tel que l’envisage le Comité de Salut Public, c’est une violation des principes révolutionnaires. Vallès précède ainsi le fameux principe de Rosa Luxemburg: „La liberté, c'est toujours la liberté de celui qui pense autrement“. Pendant l’exil qui suit la Commune et après l’amnistie de 1880 jusqu’à sa mort à Paris en 1885, Vallès défend ces positions ‚libertaires‘. Il est un ‚libertaire‘ qui rejette toutes les autorités, même celles des partis révolutionnaires. Il reste fidèle à la conviction, formulée à la fin du Second Empire. „Le peuple sait ce qu’il fait“ (cf. supra). Cette confiance dans le peuple a été confirmée et renforcée par l’expérience de la Commune et surtout par les rencontres, les situations et les 26 DOI 10.24053/ ldm-2021-0003 Dossier expériences au cours de la Semaine sanglante. À ce moment-là, les appartenances politiques et idéologiques perdaient leur emprise et leur importance: ce qui comptait était un engagement désespéré avec lequel le peuple de Paris donnait l’exemple aux membres de la Commune qui combattaient à ses côtés (OC II: 1054). Et à partir de ce moment-là, confirmée et augmentée par les dissensions idéologiques vécues en exil, l’appartenance à un parti est devenue impossible, malgré les sympathies pour des positions proudhonistes, l’admiration pour Blanqui ou une préface pour le „Nouveau Parti“ de Benoît Malon (OC II: 439). La position critique vis-à-vis des représentants ‚officiels‘ du ‚proudhonisme‘ qu’il publie sous le titre significatif „Théoriciens! “ (OC II: 1107-1109) est une illustration de cet anti-autoritarisme: „Soyons donc toujours avec le peuple, même s’il fait saigner nos idées, même s’il nous impose la solidarité de ses fautes et de ce qu’on appelle ses crimes, sous le feu et devant la mort“ (ibid.: 1109). Le point d’exclamation après „Théoriciens“ est donc aussi le signe d’une condamnation sans appel. Vallès est un anti-théoricien et ce refus de toute autorité théorique est une des composantes inabrogeables de ses convictions libertaires. Le développement idéologique de Vallès est représentatif de la partie des jeunes qui s’est enthousiasmée pour la révolution de 1848 et la Seconde République et a vécu ses défaillances, des journées de juin jusqu’au 2 décembre et les compromissions des hommes et des partis politiques. L’expérience du 2 décembre, telle que la raconte un chapitre du Bachelier (OC II: 524-530, surtout 528-29) est décisive: les représentants politiques ayant trahi le peuple en juin 1848, celui-ci refuse la résistance contre le coup d’État de Louis Napoléon. Comme d’autres, Vallès en tire la conclusion d’une méfiance presque illimitée à l’égard de la politique, surtout toute politique politique s’exprimant à travers les insitutions. Cette méfiance vis-à-vis des institutions et vis-à-vis d’une politique s’accommodant avec elles mène Vallès à se positionner comme ‚réfractaire‘, un positionnement qui s’explique aussi bien par la situation socio-culturelle à la fin du régime autoritaire et au début de l’Empire libéral que par la situation personnelle de Vallès, telle que l’évoque Bourdieu. Les limites auxquelles la censure soumet la presse littéraire ne tolèrent que partiellement les transgressions du ‚réfractaire‘ comme le montrent les nombreux changements de journaux ainsi que les condamnations et les interdictions dont Vallès est l’objet. Vers la fin du Second Empire, Vallès s’oriente de plus en plus vers des positions qu’on peut qualifier de ‚libertaires‘ mais c’est un positionnement qu’il n’a jamais proclamé tel. Son anti-autoritarisme et son refus de devenir un homme politique expliquent aussi sa position quand il participe au Conseil de la Commune. Dès que cette ‚institution‘ est en train d’abandonner son caractère anti-institutionnel, en installant le Comité de Salut Public, il doit s’opposer. Son rejet de ce que la déclaration de la minorité appelle „une dictature à laquelle on a donné le nom de Salut public“ (Rougerie 1971: 161) s’explique par le rejet d’une instance intermédiaire et autoritaire entre les membres de la Commune et le peuple. Comme pour Proudhon (dans Les Confessions d’un révolutionnaire), un gouvernement, et serait-ce celui de la Commune, „est par nature immobiliste, conservateur, réfractaire à toute initiative, disons DOI 10.24053/ ldm-2021-0003 27 Dossier même contre-révolutionnaire“ (Proudhon 1849: 19). La révolution sociale n’a donc pas besoin d’institutions politiques. Au contraire, pour Vallès comme pour Proudhon, ces institutions empêchent la société de s’auto-révolutionner. Vallès est partisan d’un fédéralisme à la Proudhon: l’essentiel, ce ne sont pas les positions politiques des uns et des autres, mais c’est la question sociale. Une des rares fois où Vallès se positionne lui-même et où il utilise la notion d’anarchie, c’est dans Le Cri du peuple du 12 mai 1884: „Au Cri du peuple, on est socialiste-révolutionnaire; on n’est ni anarchiste, ni blanquiste, ni possibiliste, ni guesdiste“ (Bellet 1994: 62). Face au socialisme ‚révolutionnaire‘ qui met la question sociale à l’ordre du jour, même l’anarchisme représente une position ‚politique‘. Roger Bellet a raison de constater qu’„il y a chez Vallès un esprit d’anarchie“, mais c’est un esprit ou une disposition critiques qui s’appliquent aussi à l’anarchisme. De cette manière, malgré l’engagement sans réserve de Vallès dans les luttes de son époque, on peut parler chez lui d’une „imagination libertaire“ dans le sens d’Alain Pessin (La Rêverie anarchiste). Pour lui, cette „rêverie anarchiste“ se situe „en deçà de toute conceptualisation“ et l’absence, on pourrait aussi dire le refus, de toute conceptualisation de l’État chez Vallès est éclatante. La „rêverie anarchiste“ se manifeste chez Pessin dans des „grandes constellations d’images“ (Pessin 1982: 28) et j’espère avoir montré quelques-unes de ces constellations imaginaires chez Vallès. La plus importante est certainement celle d’une confiance absolue dans le peuple qui a raison, même dans ses égarements et dans ses erreurs. Y correspond une méfiance sans réserve vis-à-vis de toute forme d’autorité, en premier lieu celle des institutions et de l’État. Et la troisième grande constellation d’images, étroitement liée aux notions de ‚réfractaire‘ et de ‚libertaire‘, est celle du rêve d’une „liberté sans rivages“ que Vallès tente de réaliser autant que possible, c’est-à-dire toujours avec d'énormes difficultés, à travers ses journaux, dont les titres seuls représentent déjà une constellation d’images: La Rue (1867-68), Le Peuple (1869), Le Réfractaire (1869), La Rue (1870), Le Cri du peuple (1871), Le Cri du peuple (1883-1885). Je ne me suis presque pas référé à l’œuvre de Vallès qui l’a fait connaître dans le champ littéraire proprement dit, c’est-à-dire la trilogie romanesque et autofictionnelle de Jacques Vingtras (L’Enfant [1878], Le Bachelier [1879], L’Insurgé [1883/ 84]), une œuvre qu’on pourrait analyser dans le sens d’une Esthétique anarchiste à la André Reszler (Reszler 1973) parce que dans ces romans existe réellement une homologie entre le mouvement social anarchiste et une esthétique de la rupture. Jacques Migozzi a proposé une telle lecture dans son „Portrait d’un réfractaire dans tous ses états“. 5. Épilogue: deux écrivains pendant la Commune Je préfère terminer avec l’évocation d’une controverse entre Vallès et Zola, représenté par son disciple Paul Alexis. Zola avait soutenu Vallès dans son exil, mais dans un compte-rendu de L’Enfant (Le Voltaire, 24.6.1879) il s’était déjà interrogé: „comment un homme du talent de M. Jules Vallès a-t-il pu gâter sa vie en se four- 28 DOI 10.24053/ ldm-2021-0003 Dossier voyant dans la politique? “. Au cours des années qui suivent se développe une discussion autour de l’engagement politique du naturalisme et de Zola, insuffisant selon Vallès. Ce conflit atteint son point culminant avec une nouvelle de Paul Alexis, „Jean Vingtrin“, dans Le Réveil du 3 septembre 1882. Chez Alexis, derrière le nom qui ressemble à celui du protagoniste de Vallès se cache Zola, et la nouvelle évoque la vie de celui-ci au moment de la Semaine sanglante. Après avoir observé les combats devant sa porte, Vingtrin-Zola se retire dans son cabinet de travail en s’exclamant: „Comme si l’action pouvait se substituer à la pensée! “ et finit le chapitre de son roman. Et „douze ans après“, le narrateur, identique à Alexis, à son tour substitut de Zola, commente: „La Commune aussi n’a servi à rien. Mais Jean Vingtrin a continué d’écrire La Faim […] Toute une école scientifique est sortie de terre. Les esprits ont fait un pas en avant vers l’étude de la nature, vers l’observation exacte et l’expérimentation.“ On reconnait le programme du Roman expérimental. En appelant les naturalistes „Ingrats! “ dans le titre d’un article (Le Réveil, 1.8.1882), Vallès avait déjà prévu cette accusation, mais dans un autre article du Cri du peuple du 14 novembre 1883, il reproche ouvertement au naturalisme de refouler les luttes sociales de son époque: „Passons par-dessus les tertres gonflés de cadavres, par-dessus les événements qui ont secoué le monde: tremblement de terre social! Quantité négligeable pour votre mathématique dédaigneuse, ces milliers de victimes! “ (OC II: 1101), en insinuant que les naturalistes ne voulaient que „s’abattre sur les sofas de la maison Magloire“ (ibid.). Pour Vallès, il y a donc deux littératures: une, y compris le naturalisme, qui joue le jeu de ce que Peter Bürger a justement appelé ‚l’institution littéraire‘ (contre laquelle vont se révolter les avant-gardes) et que Bourdieu désigne comme ‚champ littéraire‘, et une autre qui essaie de rester en dehors ou de sortir de cette ‚institution‘ en s’émancipant à la fois de l’autorité et des règles qu’elle comporte. Dans son éditorial pour le premier numéro du Cri du peuple en 1883 (28.10.1883), Vallès formule le souhait suivant: „Une littérature neuve doit sortir de terre sous ce souffle de fraternité large et derrière notre angoisse d’exactitude et de vérité“ (OC II: 1092). Cette littérature devrait donc être ‚réfractaire‘ et ‚libertaire‘ à la fois. Mais l’anarchie est impossible dans le ‚champ littéraire‘ et les avant-gardes vont montrer, un demi-siècle plus tard, que vouloir le quitter en ‚reconduisant l’art dans la vie‘ (Bürger) est impossible au XX e siècle, peut-être encore un peu plus qu’au XIX e . Asholt, Wolfgang, „Aux débuts d’une esthétique anarchiste: Ernest Coeurderoy et Joseph Déjacque“, in: Alain Pessin / Patrice Terrone (ed.), Littérature et anarchie, Toulouse, Presses universitaires du Mirail, 1998, 351-363. —, „La question de ‚L'argent‘. Quelques remarques à propos du premier texte littéraire de Vallès“, in: Revue Jules Vallès, 1, 1984, 5-15. Bellet, Roger, „Jules Vallès critique de l’État“, in: Alain Pessin / Patrice Terrone (ed.), Littérature et anarchie, Toulouse, Presses universitaires du Mirail, 1998, 51-63. Bourdieu, Pierre, Les règles de l’art. Genèse et structure du champ littéraire, Paris, Seuil, 1992. Migozzi, Jacques, „Portrait d’un réfractaire dans tous ses états: L’Insurgé de Jules Vallès“, in: Alain Pessin / Patrice Terrone (ed.), Littérature et anarchie, Toulouse, Presses universitaires du Mirail, 1998, 65-81. DOI 10.24053/ ldm-2021-0003 29 Dossier Noël, Bernard, Dictionnaire de la Commune, Paris, Fernand Hazan, 1971. Pessin, Alain, La rêverie anarchiste (1848-1914), Paris, Librairie des Méridiens, 1982. Proudhon, Pierre-Joseph, Les Confessions d’un Révolutionnaire, Bureau du Journal La Voix du Peuple, Gallica, 1849. Reszler, André, L’esthétique anarchiste, Paris, PUF, 1973. Richepin, Jean, Les étapes d’un réfractaire. Jules Vallès, Paris, Librairie internationale, 1872. Rimbaud, Arthur, Œuvres, Paris, Gallimard, 1972. Ross, Kristin, Rimbaud, la Commune de Paris et l’invention de l’histoire spatiale, Paris, Les Prairies ordinaires, 2013. Rougerie, Jacques, Paris Libre 1871, Paris, Seuil-Points, 1971. Vallès, Jules, Œuvres, vol. 1: 1857-1870, ed. Roger Bellet, Paris, Gallimard (Bibl. de la Pléiade), 1975. —, Œuvres, vol. 2: 1857-1870, ed. Roger Bellet, Paris, Gallimard (Bibl. de la Pléiade), 1990. 1 Dans ce qui suit, ce titre sera abrégé dans le texte comme OC, I. 2 Dans ce qui suit, ce titre sera abrégé dans le texte comme OC, II. 3 Cf. https: / / macommunedeparis.com/ 2016/ 06/ 03/ le-programme-de-la-commune.