eJournals Oeuvres et Critiques 49/2

Oeuvres et Critiques
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0338-1900
2941-0851
Narr Verlag Tübingen
10.24053/OeC-2024-0015
0217
2025
492

Introduction

0217
2025
Maxime Cartron
oec4920005
1 Bibliothèque de Genève, Ms. Rousset 101 (Chemise intitulée « Note pour Conclusion “Baroque”-»). 2 Voir aussi Marcel Raymond : « en 1942, la poésie militante d’un Pierre Emmanuel se référait à celle d’Agrippa d’Aubigné ; la découverte des sonnets de Sponde ne laissait pas indifférents les tenants de la densité poétique. La traduction du Baroque d’Eugenio d’Ors trouvait de nouveaux lecteurs. Au moins autant que les spécialistes de l’histoire littéraire, ce sont les écrivains, les poètes, qui ont parlé les premiers du baroque, et à propos de la poésie » (« Le Baroque littéraire français (état de la question) » [1961], Vérité et poésie. Études littéraires , Neuchâtel, La Baconnière, 1964, p.-163). 3 Bibliothèque de Genève, Ms. Rousset 101 (Chemise intitulée « Note pour Conclusion “Baroque”-»). Introduction Maxime Cartron FNRS-UCLouvain, GEMCA Dans une note d’archive datée du 24 octobre 1966, Jean Rousset évoquait la «-connivence que le 20 e siècle - guidé par bcp ( sic .) de ses poètes - s’est décou‐ verte avec le Baroque et sa propre sensibilité, le baroque ou ce que notre temps construit sous ce nom 1 ». Cette notation paraît de prime abord surprenante sous la plume de ce grand défenseur du baroque historique qu’était Rousset, puisqu’elle donne l’impression d’ouvrir la porte à une approche transhistorique, orsienne, du phénomène. Surtout, la remarque de l’auteur de La Littérature de l’âge baroque en France laisse entrevoir la dimension foncièrement idéologique du baroque, qui semble consister en un système de projections de certaines hantises, ou en tout cas de certains états émotionnels contemporains sur le passé. Or, fait significatif, la place des poètes du XXe siècle dans ce processus est mise de l’avant par Rousset 2 , ce qui nous amène au propos du présent numéro, dont l’objectif est d’interroger l’impact de l’idée de baroque sur les poètes modernes. Rousset ajoute à ce sujet que la notion de baroque « se trouvait correspondre en même temps à certaines aspirations contemporaines de notre art et de notre poésie 3 -». L’enjeu était par conséquent de mesurer à quel point cette affirmation se vérifie dans la poétique et l’esthétique des poètes du XXe siècle. C’est ce que proposent les articles réunis ici, qui en interrogeant le DOI 10.24053/ OeC-2024-0015 Œuvres & Critiques, XLIX, 2 4 « Ce n’est point un hasard si, à l’époque de la seconde guerre mondiale, sont parues plusieurs anthologies, préparées ou préfacées par Th. Maulnier, D. Aury, M. Arland, C.F. Ramuz, A.M. Schmidt, André Blanchard, et aussi par le poète Paul Eluard, où la poésie baroque était assez largement représentée, et quelquefois appelée par son nom. On a assisté ensuite à des résurrections ou réhabilitations partielles, par le moyen d’échantillons ou de copieux extraits tirés des éditions originales » (Marcel Raymond, «-Le Baroque littéraire français (état de la question)-», art. cit., p.-163). rapport de poètes comme Desnos (Pauline Fabiani), Mambrino (Florent Libral), Bonnefoy (Angelos Triantafyllou, Iulian Toma), Sacré (Nicolas Servissolle), Green (William Barreau), Roubaud (Antoine Bouvet) et Bigongiari (Michele Bordoni) au baroque en révèlent l’importance cruciale pour l’élaboration de leurs poétiques respectives, et ce sous différents angles : celui de la confrontation (Desnos et Saint-Amant par Pauline Fabiani, James Sacré et Sponde par Nicolas Servissolle), celui de la dimension matricielle du baroque pour l’écriture, qui va de pair avec une réflexion critique et théorique (William Barreau, Michele Bordoni), et ce jusque dans le rejet du terme (Angelos Triantafyllou, Iulian Toma), mais aussi avec une pratique de l’anthologie 4 (Antoine Bouvet, Florent Libral). À ces textes, qui éclairent avec brio le rapprochement initié par Rousset s’ajoute un entretien avec Eugène Green réalisé par William Barreau, qui jette un nouvel éclairage sur la pratique théâtrale, critique et poétique du cinéaste d’origine américaine. 6 Maxime Cartron DOI 10.24053/ OeC-2024-0015 Œuvres & Critiques, XLIX, 2