Oeuvres et Critiques
oec
0338-1900
2941-0851
Narr Verlag Tübingen
10.24053/OeC-2024-0016
0217
2025
492
« Escalader les rochers baroques » : The Night of loveless night de Robert Desnos au prisme de la Solitude de Saint-Amant
0217
2025
Pauline Fabiani
oec4920007
1 Le propos est de Desnos lui-même (p. 909). Les éditions de références pour l’étude seront : Robert Desnos Œuvres , éd. Marie Claire Dumas, Paris, Gallimard, « Quarto », 1999, et Marc-Antoine Girard de Saint-Amant, Œuvres poétiques, éd. Jean Lagny, I, Paris, Société des Textes Français Modernes, 1967. 2 Arthur Rimbaud, Œuvres et lettres , Manuscrit autographe, Charleville, 15 mai 1871, Gallica, A-45ff, NAF 26499, Paris, Bibliothèque Nationale de France, Département des Manuscrits, Ff 20v. 3 Ibid ., Ff 24v. 4 Gautier qualifie l’auteur de «-viveur-», épicurien voire libertin ( Les Grotesques , éd.-Cé‐ cilia Rizza, Paris-Schena, Nizet, « Biblioteca della Ricerca. Testi stranieri », 1985, p. 161). Ce caractère grotesque a longtemps déteint sur l’appréciation de son œuvre, ne relevant pas de l’esthétique et du goût propres au « classicisme », cf . Guillaume Peureux, « Le rendez-vous des enfans sans soucy ». La poétique de Saint-Amant , Paris, Librairie Honoré Champion, « Lumières classiques », 2002, «-Introduction-», p.-9-13. «-Escalader les rochers baroques 1 -» : The Night of loveless night de Robert Desnos au prisme de la Solitude-de Saint-Amant Pauline Fabiani Université de Corse Université Paris-Nanterre La poésie moderne et la théorie qui la sous-tend seraient, au XIXe siècle, en rupture avec les modèles antérieurs. Voilà un lieu commun qui, aujourd’hui encore, se trouve entretenu par le discours traditionnel de l’histoire littéraire. Siècle de tumultes aussi bien politiques que littéraires, le XIXe connaît l’apogée d’une critique de l’héritage littéraire « classique ». Ainsi le jeune Rimbaud écrit sur « l’avenir de la poésie 2 » : vouant aux gémonies les « versificateurs » qui selon lui ont avili la poésie, il considère au terme d’une longue énumération Baudelaire comme « le premier voyant, rois des poètes 3 » - l’adjectif « premier » suggérant qu’avant l’auteur des Fleurs du Mal , nul poète, au sens noble du terme, ne mériterait d’être véritablement reconnu en tant que tel. Seulement, cette position ne saurait faire force de loi pour autant : Théophile Gautier n’a-t-il pas cherché de son côté à remettre au goût du jour les Grotesques 4 , Œuvres & Critiques, XLIX, 2 DOI 10.24053/ OeC-2024-0016 5 Sur la notion de Baroque comme catégorie structurante essentielle pour l’histoire littéraire du X V I Ie siècle, voir entre autres Jean Rousset, La Littérature de l’âge baroque en France , Paris, Corti, 1953 et concernant en particulier le rôle de l’anthologie poétique, Maxime Cartron, L’Invention du Baroque, les anthologies de poésie française du premier X V I Ie siècle, Paris, Classiques Garnier, «-Lire le X V I Ie siècle-», 2021. 6 Desnos écrit ledit texte entre 1926 et 1927. Sur « l’aventure surréaliste » du poète, voir Marie-Claire Dumas, Robert Desnos ou l'Exploration des limites , Paris, Klincksieck, 2000, p.-37-79. 7 Diana Vlasie, Invention du surréalisme et découverte critique du baroque , thèse de doctorat, Université du Québec à Montréal et Université Paris 7 Diderot, 2013, http s: / / archipel.uqam.ca/ 5727/ 1/ D2493.pdf. Dans une France encore hostile à ce qu’elle considère comme « abus de langage et d’imagination » chez les baroques, Desnos tente de légitimer cette poésie que l’on redécouvre et de défendre en même temps le surréalisme : baroque et surréalisme auraient en commun de donner, notamment, la préférence aux élans de l’imagination ou « fantaisie », de vouloir tout à la fois renverser l’ordre établi des choses et réconcilier des realia opposées ( Ibid ., p.-97). de Villon à Viau et Scudéry jusqu’à Saint-Amant ? La question se pose donc : la modernité (post-)romantique a-t-elle vraiment rompu avec les périodes anciennes ? Vraisemblablement non : au XXe siècle se trouve exhumée par la critique cette poésie qui était jusqu’alors dénigrée, et que l’on analyse à travers la notion de baroque, forgée dans le même temps 5 . Cette redécouverte fait fortune, de Jean Rousset à Gisèle Mathieu-Castellani en passant par Marcel Raymond, mais aussi du côté des poètes, qui pour certains se font même éditeurs de cette poésie - ainsi d’Albert-Marie Schmidt à travers son anthologie, L’Amour Noir : poèmes baroques, en 1959. Nous pouvons dès lors nous demander si l’intérêt à la fois critique et historique pour le «-baroque-» se retrouve dans des productions poétiques modernes. Précisément, les liens entre surréalisme et baroque ont été étudiés dans divers travaux, ainsi que la valeur que le surréaliste 6 Robert Desnos en particulier accorde à la poésie baroque 7 . Notre objectif ici est d’évaluer spécifiquement dans un poème de Desnos, « The Night of Loveless Night » l’influence baroque au prisme d’un poète, Marc-Antoine Girard de Saint-Amant, auteur de « La Solitude (à Alcidon) ». Il n’est pas question ce faisant d’envisager une parenté entre des auteurs que quelque trois siècles séparent. Les traitements formels, de Saint-Amant à Desnos, témoignent assez en eux-mêmes de ces différences : aux dizains réguliers d’octosyllabes du premier s’oppose l’alternance de prose, de quatrains classiques et de vers libre du second. Et s’il est mobilisé dans la poésie du premier (« Pan et ses Demy-Dieux », 8 Pauline Fabiani Œuvres & Critiques, XLIX, 2 DOI 10.24053/ OeC-2024-0016 8 Saint-Amant, Œuvres poétiques , v. 11, p.-34. 9 Ibid ., v. 45, p.-37. 10 «-C’est Bacchus renaissant de ses cendres et des braises-» (Desnos, Œuvres , p.-908.) Sur le mythe orphique de Bacchus et la combustion du charbon, voir Yun-Kyung Cho, « L’Écriture du corps dans la poésie surréaliste (Éluard, Desnos, Péret)-: vers le “surcorporel”-», thèse de doctorat, Paris, Université Paris 3 Sorbonne-Nouvelle, 2003, p.-277. 11 Cf . Maxime Cartron, « Transhistoricité et présentisme de l’histoire littéraire : les anthologies poétiques baroques », dans Fabula-LhT , n°23 : « (Trans-)historicité de la littérature-», dir. L. Forment et B. Tabeling, 2019, http: / / www.fabula.org/ lht/ 23/ cartron .html 12 Saint-Amant, Œuvres poétiques , v. 185, p.-47. 13 « L’amour cuit et recuit » des faux amants, (Desnos, Œuvres , p. 904.) Le participe passé à valeur adjectivale «-cuit-» est non seulement repris mais augmenté du préfixe « re- », signifiant ici la répétition stérile. Il y a là une allusion possible à un autre texte de Desnos, légèrement antérieur au poème considéré, Le Langage Cuit (1923), qui interroge le « pouvoir de signifier » des mots, cf . Marie-Claire Dumas, Robert Desnos ou l'Exploration des limites , op. cit. , p.-338-348. 14 L’injonction aux cris et le sommeil agité ( Ibid ., p.-921.) 15 Saint-Amant, Œuvres poétiques , v. 2, p.-33. 16 Ibid ., v. 111-114, p. 41. L’évocation de Phoebus, dieu du Soleil, constitue une hyperbole renforçant, par effet de contraste, les ténèbres sous cette voûte. 17 Desnos, Œuvres , p.-594. 18 Ibid ., p.-904. Jupiter 8 , le « gay Zéphyre 9 »), le fonds mythologique n’imprègne la poésie du second que de façon aussi sporadique qu’inattendue 10 . Pour éviter toute « déshistoricisation 11 » des pièces considérées, l’angle comparatif qui sera le nôtre pour cette étude sera le lyrisme de chacun des deux textes. Ce dernier engage une représentation du sujet solitaire, « tantost chagrin tantost joyeux 12 » chez Saint-Amant, désabusé 13 et inquiet 14 chez Desnos. Une solitude dont, tout d’abord, le cadre est une nature pour le moins étrange. De nuit-: une nature inquiétante et mortifère La lecture de ces deux poèmes entraîne, en effet, un premier et même constat : les espaces décrits se caractérisent par leur obscurité. Saint-Amant loue d’emblée « ces lieux sacrez à la nuit 15 », nuit ailleurs décrite à travers la « voûte si sombre » que Phoebus lui-même n’y verrait goutte 16 . La présence de la nuit se décèle également chez Desnos : au-delà du titre, d’ores et déjà éloquent (« The Night »), le premier mot du plus long poème desnosien 17 est en effet « Nuit ». Dénué de déterminant, sans ancrage référentiel qui viendrait l’actualiser, ce nom n’est qualifié que par trois épithètes : « putride », « glaciale », « épouvantable », adjectifs qui, dès les prémices du texte, donnent le ton d’ensemble 18 . Pourriture, froideur, épouvante se trouvent renforcées par l’image d’une nuit complète, celle «-Escalader les rochers baroques-» : The Night of loveless night de Robert Desnos 9 Œuvres & Critiques, XLIX, 2 DOI 10.24053/ OeC-2024-0016 des « ténèbres moroses 19 -». L’obscurité innerve de part en part le poème : non seulement elle l’ouvre, le parcourt - Desnos revient de fait plus loin sur cette idée-: « il fait trop sombre ! quelles ténèbres ! 20 -» - mais également le ferme sur l’anaphore, litanique, obsessionnelle : « Nuit des nuits sans amour étrangleuse de rêve/ Nuit de sang Nuit de feu Nuit de guerre sans trêve 21 ». Et même lorsque des lueurs apparaissent, l’aube se trouve « pareille/ À des papillons morts au pied des chandeliers 22 -». Notons que l’image, aussi macabre que prosaïque pour décrire le lever du jour, diffère de la manière avec laquelle Saint-Amant appréhende la nuit de son côté. A contrario , c’est le merveilleux qui étaie chez lui l’aspect inquiétant de cette nature : ainsi des « Sorciers qui y font leur sabat 23 », des « Demons follets 24 » qui s’y retirent, y mènent leurs « malicieux » ébats, font rire les « Lutins/ dans ces lieux remplis de ténèbres 25 ». L’atmosphère du lieu, saturée de magie noire, suscite l’angoisse. Si le printemps est certes associé momentanément à la rêverie du poète 26 , cette vision, sombre à tous les sens du terme, prédomine jusqu’à se prolonger dans l’évocation de la mort. Les « Monts pendants en precipices 27 », favorables au suicide des malheureux 28 , ne lui offrent ainsi pas moins de plaisir 29 et la présence de « vieux Chasteaux ruinez 30 », symbole de « decadence », évoque, de façon plus subtile mais non moins évidente, la mort. Le lieu du reste grouille de grenouilles qui, effrayées, se cachent sitôt qu’on veut s’en approcher 31 ou de limaces et de crapauds qui « souillent » l’espace « de venin et de bave 32 ». S’y nichent également « en mille troux/ Les Coleuvres et les Hyboux 33 », sans oublier « l’Orfraye », poussant 10 Pauline Fabiani 19 Ibid ., p. 905. L’adjectif «-moroses-», par le sème humain, témoigne d’une perception de l’environnement filtrée par l’instance subjective. 20 Ibid ., p.-919. 21 Ibid ., p. 920. L’anaphore est un trait d’écriture desnosien (voir à ce sujet Yun-Kyung, op. cit. , p.-280-290.) 22 Desnos, Œuvres , p.-921. 23 Saint-Amant, Œuvres poétiques , v. 75, p. 39. Sur le folklore populaire et les croyances païennes, voir Manon Velasco, « Ma trop crédule fantaisie » : l’esthétique de la vision chez Saint-Amant , Littératures , 2011, dumas-0060090, p.-16-22. 24 Ibid ., p.-40., v. 76. 25 Ibid ., v. 77. La malice étant considérée du reste comme attribut du diable. 26 Ibid ., p.-35, v. 24. Le printemps, saison des amours et du renouveau. 27 Ibid., v. 26. 28 Ibid ., v. 27-30, p.-36. 29 Ibid ., v. 25, p.-35. 30 Ibid ., v. 72, p.-39. 31 Ibid ., v. 48-49, p.-37. 32 Ibid ., v. 107 et 108, p.-42. 33 Ibid ., v. 79 et 80, p.-40. Œuvres & Critiques, XLIX, 2 DOI 10.24053/ OeC-2024-0016 « ses cris funebres 34 ». Tandis que, sous le chevron de bois maudit, résonnent les « mortels augures des Destins 35 », « branle [un] squelette horrible 36 », celui d’un mort d’amour. Ainsi, vieux ossements, lamentation « en longs gemissements 37 » emplissent le lieu et les esprits de rêveries macabres - la colère de Neptune, dieu des sept mers, entraînant une vision apocalyptique de «-monstres mors-» et de «-vaisseaux brisez du naufrage 38 -». De même chez Desnos, plusieurs images évoquent la mort 39 comme corrup‐ tion de toute chose terrestre : le «-ravin tenebreux-», associé à une «-immuable saison-», immobilisme pouvant figurer la mort 40 ; le vampire, créature nocturne qui, dans l’imaginaire populaire, vide les êtres de leur substance vitale 41 ; l’échafaud, dressé pour un condamné qui rêve de grands corbeaux 42 . La flore également se trouve placée sous le signe de la mort : les « feuilles jaunes » et les « fleurs flétries 43 », les églantines, quelques lignes plus haut, sont envisagées dans leur dégénérescence, à l’image des « boiseries pourries 44 -». Le « ravin » de Desnos ressemble aux vallons de Saint-Amant, sombres et inquiétants-: J’habite quand il me plaît un ravin ténébreux au-dessous duquel le ciel se découpe en un losange déchiqueté par l’ombre des sapins, des mélèzes et des rochers qui couvrent les pentes escarpées. Dans l’herbe du ravin poussent d’étranges tubéreuses, des ancolies et des colchiques […] le ciel, la flore et la faune où succèdent aux insectes les corneilles moroses et les rats musqués, que je ne sais quelle immuable saison s’est abattue sur ce toujours nocturne ravin, avec son dais en losange constellé que ne traverse aucun nuage. […] «-Escalader les rochers baroques-» : The Night of loveless night de Robert Desnos 11 34 Ibid ., v. 81, p. 40. Le poète surréaliste de son côté écrit avoir « rencontré le vautour et l’orfraie-» (Desnos, Œuvres , p.-912). 35 Ibid ., v. 82, p.-40. 36 Id ., v. 86. 37 Ibid ., v. 95 et 97, p.-41. 38 Ibid ., v. 157-158, p. 45. Sur le style de Saint-Amant lié à « l’étrangeté, l’incongruité, la laideur », voir Sophie Tonolo, « Saint-Amant pittoresque : l’éloquence du hideux, la beauté des choses muettes-», Dix-septième siècle , n°-245, 2009, p.-643-661, https: / / www .cairn.info/ revue-dix-septieme-siecle-2009-4.htm. 39 « S’il est un mot qui obsède toute la poésie de Robert Desnos, c’est assurément celui de “mort”-» (Marie-Claire Dumas, «-Moi qui suis Robert Desnos-»-: permanence d'une voix-: onze études , Paris, José Corti, 1987, p.-7.) 40 Desnos, Œuvres poétiques , p.-905. 41 Ibid ., p.-912. 42 Ibid ., p.-911. 43 Ibid ., p.-919. 44 Ibid ., p.-908-909. Œuvres & Critiques, XLIX, 2 DOI 10.24053/ OeC-2024-0016 La mare où les grenouilles nagent dans l’ombre […] reflète des étoiles immobiles et le marais que les crapauds peuplent de leur cri sonore et triste-[…] 45 . L’hypotypose que le lexique employé dans ce passage en prose met en œuvre, plonge le lecteur dans un environnement malsain, placé sous le signe de l’obscurité (l’ombre des arbres et des roches, le caractère sombre du ravin à travers les adjectifs épithètes «-ténébreux-» puis «-nocturne-», ce dernier étant antéposé de façon à insister sur cet aspect-là plus que sur le ravin lui-même), de la décrépitude (l’immobilisme caractérisant à la fois la saison, elle-même indéfinie, et le ciel, qu’aucun nuage ne traverse, connotent la mort) et de l’étrangeté (rats et corneilles, grenouilles et crapauds font de cet espace l’envers du locus amoenus ). La fin du poème constitue l’acmé de cette représentation mortifère : la nuit elle-même se trouve déchirée - image fort surréaliste 46 - pour laisser place au néant 47 ; l’oiseau, symbole de liberté, se heurte aux murailles et aux meubles 48 , l’univers lui-même, in fine, se trouve fissuré 49 . Cette nature, enfin, est d’autant plus étrange qu’elle a conservé, aussi bien chez Saint-Amant que chez Desnos, son caractère sauvage. La virginité d’espaces qui n’ont connu d’autre présence humaine que celle des poètes est effectivement une autre caractéristique des deux textes. Ainsi lisons-nous dans «-La Solitude-»-: Jamais l’esté ny la froidure N’ont veu passer dessus cette eau Nulle charrette ny batteau, Depuis que l’un et l’autre dure-; Jamais voyageur alteré N’y fit servir sa main de tasse-; 12 Pauline Fabiani 45 Ibid ., p.-917. 46 La nuit est caractérisée par un participe passé à valeur adjectivale a priori incompatible. « Déchiré » oscille dans son acception entre la pure matérialité et, au sens figuré, la souffrance morale, individuelle ou collective. Ainsi, sous cet angle réaliste, il est incon‐ cevable que la nuit puisse être ainsi qualifiée. Le rapprochement s’opère néanmoins car il ne relève pas de l’ordre de la réalité mais de celui du langage (voir note 47). 47 Ibid ., p. 920. La nuit étant comparée à une proie : « comme si quelque fauve aux griffes paresseuses/ Avait étreint la nuit et l’avait déchirée.-» 48 Ibid ., p.-919. 49 « Vois s’étoiler soudain l’univers imprécis/ La fissure grandir étroite et lumineuse » ( Ibid ., p.-920.). Œuvres & Critiques, XLIX, 2 DOI 10.24053/ OeC-2024-0016 50 Saint-Amant, Œuvres poétiques , v. 61-70, p.-38-39. 51 Ainsi les bois sont « encore aussi beaux et vers/ qu’aux premiers jours de l’Univers » ( Ibid ., v.-9-10, p.-34.) 52 Concernant Saint-Amant et sa propension, « capricieuse », à mêler des « topiques contradictoires », voir Guillaume Peureux, « Espaces capricieux et évidence chez Saint-Amant », Études littéraires , n o 34, 2002, https: / / www.erudit.org/ fr/ revues/ etudlitt/ 2002-v34-n1-2-etudlitt694/ 007562ar/ , p. 194. Voir également du même, « Le rendez-vous des enfans sans soucy ». La poétique de Saint-Amant, Paris, Librairie Honoré Champion, « Lumières classiques », 2002 ; et le sous-chapitre de Noluenn Cassaert sur la « diversité générique » du poète : « Saint-Amant et le baroque, entre licence et traditions », Mémoire de maîtrise sous la direction d’Alexander Roose, Universiteit Gent, Faculteit Letteren, Wijsbegeerte, 2019, https: / / libstore.ugent.be/ fulltxt/ RUG01/ 002/ 790/ 055/ RUG 01-002790055_2019_0001_AC.pdf (p.-13-18.) 53 Desnos, Œuvres , p.-909. Jamais chevreuil desesperé N’y finit sa vie à la chasse-; Et jamais le traistre hameçon N’en fit sortir aucun poisson 50 . L’anaphore de l’adverbe « jamais » et la récurrence de la négation (aussi bien sous la forme de l’adverbe, que sous celle du déterminant) renvoient à un état de pureté antérieur à toute civilisation 51 (les activités humaines que sont la chasse et la pêche et, dans un autre domaine, a priori non-utilitaire, le voyage). Nous soulignons, par ailleurs, le fait que la nature, dans ces vers-là, est décrite comme n’ayant jamais été souillée par la mort (celles, en l’occurrence hypothétiques, du chevreuil à l’agonie et du poisson pêché) : plutôt que d’y déceler une incohérence avec ce qui précède, nous pourrions y voir ce goût de la diversité propre à Saint-Amant, observant et transcrivant la réalité au prisme d’un véritable kaléidoscope 52 . Dans une portion de texte en prose, le poète surréaliste de son côté souligne, pareillement, que la nature décrite n’a jamais été fréquentée par l’Homme : « le vallon était désert quand j’y vins pour la première fois. Nul n’y était venu avant moi. Nul autre que moi ne l’a parcouru 53 -». L’on constate ici, comme chez Saint-Amant, la présence forte de la négation. La restrictive « Nul…que » met en avant la singularité du poète qui, au sein de cette nature, est absolument seul. Une solitude qui imprègne aussi bien le poème de Desnos que celui, éponyme, de Saint-Amant. Solitude du sujet lyrique, relation à l’Autre Au sein d’une nature dont nous avons décelé le caractère inquiétant, lié à la nuit et à la mort, se dessine la figure du poète en tant que sujet lyrique. Ce dernier «-Escalader les rochers baroques-» : The Night of loveless night de Robert Desnos 13 Œuvres & Critiques, XLIX, 2 DOI 10.24053/ OeC-2024-0016 54 Saint-Amant, Œuvres poétiques , v. 1, p.-33. 55 Ibid ., v. 191, p.-47. 56 Id ., v. 192. La solitude est jugée essentielle à l’exercice de « l’Art d’Apollon », soit par périphrase la poésie ( Ibid ., v.-194, p.-47.) 57 Ibid ., v. 3, p. 33. Cf . Bernard Beugnot, Le Discours de la retraite au X V I Ie siècle : loin du monde et du bruit, Paris, PUF, «-Perspectives littéraires-», 1996. 58 Ibid ., v. 132, p.-43. 59 Ibid ., v. 175-176, p.-46. Nous soulignons. 60 Selon l’ATLIF-DMF, « resver » possède trois sens : « Aller çà et là, se promener, rôder », « Divaguer, délirer, être fou », « Songer, rêver ». Furetière ajoute : « estre distrait, entretenir ses pensées » et « appliquer sérieusement son esprit à raisonner sur quelque chose, à trouver quelque […] invention » ( Dictionnaire universel contenant generalement tous les mots françois tant vieux que modernes & les Termes de toutes les sciences et des arts , la Haye et à Rotterdam, chez Arnout & Reinier Leers, 1690 [éd. posthume], 2 vol, in-fol, Paris, Bibliothèque nationale de France, Département Littérature et art, FOL-X-255, II, p.-471.). 61 Saint-Amant, Œuvres poétiques, v. 185, p.-47. 62 Ibid ., v. 4, p.-34. est effectivement marqué par la solitude : de l’œuvre de Saint-Amant à celle de Desnos, le sentiment d’être seul au monde se décline sous divers aspects, allant d’une solitude au sens propre du terme, matérielle, à une solitude plus symbolique, dont autrui se trouve être le vecteur. Déployant le sens du titre de son poème, Saint-Amant signale cette inclination à l’orée de son poème : « que j’ayme la solitude 54 -». Cette exclamative, accom‐ pagnée par le ô incantatoire lyrique, revient en guise de conclusion du poème 55 et fait de ce dernier une forme d’hymne à la solitude. Le poète justifie, d’ailleurs, à la fin même du texte, cette disposition peu mondaine - « c’est l’élément des bons esprits 56 ». La propension à la solitude va de pair avec un goût prononcé pour le silence : les lieux évoqués sont à ce titre « esloignez du monde & du bruit 57 ». Elle a également maille à partir avec le mouvement que le poète effectue : sortant des ruines, il «-monte au haut de ce Rocher 58 -». L’ascension, concrète, l’éloigne du reste des hommes. Ailleurs, la négation restrictive et l’adverbe « tout » mettent l’accent sur ce désir de solitude : il « ne cherche que les deserts/ Où resvant tout seul » il s’« amuse 59 ». Le verbe « resver », au-delà des sens de «-songer-» ou de «-divaguer-», peut s’entendre également comme «-penser 60 -». Nous reviendrons sur les rapports entre pensée, jeu et écriture : remarquons pour l’heure le lien explicite entre les lieux désertiques et la pensée créatrice. Le poète, solitaire, « tantost chagrin, tantost joyeux 61 », cultive ainsi son art. Le parallélisme de construction et l’antithèse des adjectifs qualifiant le poète en tant que sujet lyrique soulignent à la fois la joie procurée par la solitude et l’inquiétude 62 qui lui est mêlée - contradiction qui serait propre à chaque être humain. En même temps, le squelette évoqué supra est celui d’un pauvre amant. 14 Pauline Fabiani Œuvres & Critiques, XLIX, 2 DOI 10.24053/ OeC-2024-0016 63 Ibid ., v. 88-90, p.-40. 64 Ibid ., v. 123-124, p.-42-43. 65 Le mythe d’Écho, méprisée par Narcisse, est récurrent dans la poésie amoureuse dite « baroque ». Voir entre autres Gisèle Mathieu-Castellani , Mythes de l’Eros Baroque , Paris, PUF, « Littératures Modernes », 1981 et Carine Luccioni, « Les accents d’une nymphe plaintive : Écho, miroir du dire mélancolique dans la poésie de l’âge baroque (1580-1630)-», Dix-Septième siècle , n°239, 2008, p.-285-309. 66 Desnos, Œuvres , p.-916. 67 Ibid ., p.-915. 68 Ibid ., p.-914-915 69 Ibid ., p.-911. Notons le tour «-archaïque-» qui consiste à placer le complément avant le participe passé à valeur adjectivale. 70 Ibid ., p.-909. 71 Ibid ., p.-905-906. Ce dernier s’est pendu « pour une Bergere insensible/ qui d’un seul regard de pitié/ Ne daigna voir son amitié 63 -». La remarque souligne, non plus du point de vue du poète seulement mais également de celui de l’homme (l’amant étant, de manière générale, anonyme), les difficultés du rapport à l’autre. La figure d’Echo qui « ne cesse de brusler/ Pour son Amant froid & revesche 64 » est employée en corrélation avec Narcisse pour signifier la non-réciprocité des sentiments entre l’amant-poète et sa dame insensible 65 . Narcisse et Écho symbolisent deux postures extrêmes-: soit le refus de l’autre, soit l’oubli dans l’autre. S’il s’est débarrassé de cet appareillage mythique, le poète surréaliste n’en reconduit pas moins la problématique qu’il engage et dont il endosse l’énoncia‐ tion : le poète-amant infortuné, déchiré entre deux postures contradictoires - « las de te détester et las de te bénir 66 », écrit-il - n’a plus qu’une seule option, mourir : « Je mourrai si tu veux pour n’être en tes annales/ que l’écho finissant d’une inutile ardeur 67 -». La solitude exacerbe les aléas de la rencontre, difficile, avec l’autre, en particulier féminin. L’anaphore « être aimé d’elle 68 » martèle ainsi une espérance déçue, tout comme en témoignent en parallèle d’autres propos : « dure est la solitude à l’amour imposée 69 » ou encore : « la saison de l’amour triste et immobile plane en cette solitude 70 -». L’ensemble du poème desnosien dépeint à ce titre, de façon méticuleuse, la femme cruelle et enchanteresse-: Quel destin t’enchaîna pour servir les sévères/ celles dont les cheveux charment les colibris […] Une rose à la bouche et les yeux caressants/ elles s’acharneront avec des mains cruelles/ à torturer ton cœur, à répandre ton sang 71 . «-Escalader les rochers baroques-» : The Night of loveless night de Robert Desnos 15 Œuvres & Critiques, XLIX, 2 DOI 10.24053/ OeC-2024-0016 72 Ibid ., p. 911. Le cristal figure par métaphore la froideur de la dame. La beauté de la bouche est telle qu’elle en devient vénéneuse pour l’amant (« sa bouche a la saveur d’un fruit empoisonné-», Ibid ). Les « dents de carnassier » peuvent faire écho à l’imaginaire poétique amoureux, qui dans une veine « noire » assimile la femme à une bête sauvage, et ce d’ailleurs depuis Pétrarque (voir notamment le poème 22 du Canzoniere , trad. Pierre Blanc, Paris, Classiques Garnier, 2000, p.-73-74). 73 Ibid ., p. 911. Cet amant « d’aimer sans espoir deviendra pur comme un diamant » ( Ibid ., p. 914) : or, atteindre la pureté du diamant, n’est-ce pas également devenir aussi dur que lui, comme pétrifié, pour ne pas dire mort ? Selon Michael Sheringham, la mort est chez Desnos un « anéantissement du sujet dans les affres de l’écriture du désir » au cœur l’œuvre desnosienne, « l’écriture désirante est le lieu d'un conflit entre vie et mort, l’ouverture à l’autre et l’enfermement en soi-même […] (« Moi qui suis Robert Desnos-»-: permanence d'une voix : onze études , 1987, p.-70 et 79.) 74 Ibid ., p. 906. L’adjectif « merveilleux » qualifie ce « qui cause un vif étonnement par son caractère étrange et extraordinaire » comme ce « qui suscite l'étonnement et l'admiration en raison de sa beauté, de sa grandeur, de sa perfection, de ses qualités exceptionnelles ». De l’étrange au surnaturel, le pas est vite franchi comme en atteste le substantif, qui renvoie dans une œuvre de fiction à « ce qui est prodigieux, fantastique, féerique » ( cf. ATLIF en ligne, entrée « merveilleux »). Dans le contexte, l’amant se figure tel un héros d’épopée médiévale qui doit lutter pour prouver sa valeur physique et morale aux yeux de sa dame. 75 « Celles qui pour mentir gardent les yeux sincères […] Celles que tu suivis ne se retournaient pas […] » (Desnos, Œuvres , p. 905). Les quatrains de Desnos sont structurés en rimes croisées ou embrassées : il peut être intéressant de voir, à travers cette versification classique, le désir d’union, d’entrelacement, en dépit d’une réalité qui s’y oppose. 76 Ibid , p.-916. Avec son « cœur de cristal » et ses « yeux sans pitié », avec sa « belle bouche » et ses «-dents de carnassier 72 -», la femme incarne l’altérité et altère celui qui se confronte à elle, en l’occurrence l’amant. « Enfonce tes deux mains dans mon cerveau docile/ Mords ma lèvre en feignant de m’offrir un baiser 73 » peut-on lire sous la plume de Desnos. Ce rapport malsain à l’autre est d’autant plus pernicieux qu’il semble recherché par le poète lui-même, encourageant la dame, à travers le double emploi de l’impératif, à user de traitements cruels à son égard. Mais si l’amant parfait est disposé à se sacrifier, il ne manque pas de lucidité pour autant : « heureux s’il suffisait, pour se faire aimer d’elles/ d’affronter sans faiblir des dangers merveilleux 74 ». Le décalage entre l’hypothétique « s’il suffisait » (qui introduirait un acte de bravoure limitée) et la nature de ce qui suffirait (« affronter sans faiblir des dangers merveilleux », c’est-à-dire en réalité un acte que seul un héros pourrait accomplir) met en exergue l’impossibilité de nouer un lien avec l’autre - représenté par les femmes cruelles décrites à travers l’anaphore en « Celles 75 ». L’on reconnaît, en filigrane, le modèle de l’amour courtois avec ses épreuves qualifiantes (les « dangers merveilleux 76 »). Cet échec 16 Pauline Fabiani Œuvres & Critiques, XLIX, 2 DOI 10.24053/ OeC-2024-0016 de la rencontre entraîne inévitablement une opacité de soi à l’autre, comme le poète le reproche à la femme, « je valais mieux que ça mais tu l’as méconnu 77 -», avant de lui céder la parole-: Qui donc s’en est allé, j’ignore son visage Mais pourquoi s’en va-t-il seul vers sa liberté-? Il faut le retrouver, serviteur infidèle, L’enchaîner à mon bagne après l’avoir châtié Et qu’il me serve encore avec un cœur modèle Sans même pour sa peine éprouver ma pitié Car je suis impérieuse, et veux qu’on m’obéisse, Nul ne doit me quitter sans être congédié 78 […] Dans ce discours direct, l’être aimé critique sans ambages celui qui, désormais las d’aimer sans retour, est devenu à ses yeux un « serviteur infidèle ». Cet adjectif à la rime contraste de façon significative avec « modèle », qui qualifie le cœur de l’amant, lorsque celui-ci la servait encore. La notion de servage traverse bien ces vers : les verbes « enchaîner », « châtier », ou encore « obéir » renvoient à une logique de domination qu’alors la dame n’exerce plus, le poète-amant s’en allant « seul vers sa liberté ». Si la solitude est ici associée à la liberté comme horizon de vie, cette dernière ne semble pas si positive qu’elle pourrait l’être de prime abord : elle est ici la conséquence ultime, le choix par dépit face à l’amour déçu. Dans un tel contexte, le sujet désirant finit désabusé, ainsi que Don Juan. Héros baroque par excellence en raison de l’inconstance de ses mœurs, ce dernier ne serait plus le damné libertin défiant la statue du Commandeur mais un homme marqué par l’usure des jouissances 79 . L’anaphore autour des «-mains 80 -» ambivalentes, source d’amour comme de violence, cristallise ainsi à «-Escalader les rochers baroques-» : The Night of loveless night de Robert Desnos 17 77 Id . 78 Ibid ., p.-916. 79 « Ce n’est pas le Don Juan qui descend impassible », écrit en effet Desnos, « […] ni celui qui crachait aux versets de la Bible/ Et but en ricanant avec le commandeur » : il a plutôt le « cœur meurtri par de mortes chimères » ( Ibid ., p. 908.). Néanmoins l’allusion à « Bacchus renaissant des cendres et des braises » quelques vers plus loin, laisse entendre que, n’étant plus un damné « impassible », Don Juan, image de l’homme instable et démesuré («-baroque-»), n’est pas perdu pour autant. Tel le Phénix, il peut renaître de ses cendres à une vie meilleure. Ainsi, même si plus d’un continueront de porter leurs « lourdes chaînes », tout espoir n’est pas vain : « chaque an reverdira le feuillage des chênes » ( Ibid .). Sur les métamorphoses de la figure mythique de Don Juan, voir Jean Rousset, Le Mythe de Don Juan , Paris, Armand Colin, « Uprisme », 1978. 80 « Mains basses sur l’amour/ Mains mortes sur l’amour/ Mains forcées sur l’amour […] Mains tendues vers l’amour/ Mains d’œuvre d’amour/ Mains heureuses d’amour/ Mains Œuvres & Critiques, XLIX, 2 DOI 10.24053/ OeC-2024-0016 la fin du poème la désillusion régnant dans l’univers desnosien. « Y a-t-il encore une main que je puisse serrer avec confiance-? 81 -». Des poèmes réfléchissant (à) l’acte créateur Au sein d’une nature inquiétante, voire mortifère, qu’elle soit aimée ou redoutée, la solitude telle qu’exprimée par le sujet lyrique s’avère in fine un ferment nécessaire à la création. Les deux auteurs en effet font de leurs textes respectifs des creusets de réflexion et de réflexivité poétique. Saint-Amant clôt sa Solitude par une interpellation au dédicataire, remar‐ quable en ce qu’elle contient plusieurs éléments métapoétiques. Dans une sorte d’envoi, le poète fait en effet don de son texte, qu’il décrit simultanément : « reçois ce fantasque tableau/ fait d’une peinture vivante 82 ». Selon Furetière, l’adjectif «-fantasque-»-signifie «-capricieux, bouru ( sic ), qui a des manières ou des humeurs extraordinaires 83 » : ce serait l’une des caractéristiques majeures de la poétique de cet « enfant sans soucy » qu’est Saint-Amant 84 . D’ailleurs, lorsqu’il rêve seul, il s’« amuse/ À des discours assez diserts 85 » : la fabrication poétique est bien conçue comme un jeu. D’autres remarques émaillent cette dédicace finale : ainsi décrit-il « cette Poésie/ Pleine de licence & d’ardeur 86 ». Le déterminant démonstratif « cette » incarne au sein même de la syntaxe la prise de distance du poète vis-à-vis de sa production pour mieux la décrire. La volonté d’associer jeu et poésie trouve ici sa justification : la « licence », c’est-à-dire la liberté du poète et de l’homme. Dans le propos cité, il est également question d’ardeur, celle qui de ses « beaux rayons » éclaire la « fantaisie 87 ». Les noms « tableau » et « peinture » mettent en avant un autre aspect, relatif au 18 Pauline Fabiani à la pâte hors l’amour horribles mains/ Mains liées par l’amour éternellement […] Mains armées c’est le véritable amour-» ( Ibid ., p.-918.) 81 Id. 82 Ibid ., v. 173-174, p.-46. 83 Furetière, Dictionnaire universel contenant generalement tous les mots françois tant vieux que modernes & les Termes de toutes les sciences et des arts, I, p.-607. 84 Sans gommer les aspérités de cette œuvre aux thèmes et aux styles variés, Guillaume Peureux propose de déceler précisément dans ce caractère «-fantasque-», capricieux et plein de « gaieté », mêlant comique irrévérencieux, désir de variété, souci de décrire et d’instruire, un facteur unifiant l’écriture et l’esthétique du poète. Cf . Le rendez-vous des enfans sans soucy. La poétique de Saint-Amant, op. cit ., Première partie, chapitres 1 et 2. 85 Saint-Amant, Œuvres poétiques , v. 176-177, p.-46. 86 Ibid ., v. 181-182, p.-47. 87 Ibid. , v. 183-184. Œuvres & Critiques, XLIX, 2 DOI 10.24053/ OeC-2024-0016 précepte horatien du l’ ut pictura poesis 88 . Fantasque, la poésie de Saint-Amant se veut «-peinture vivante-», œuvre cherchant à représenter la nature de manière presque naïve, brute, saisie « au vif », voulant plaire à son lecteur par son esthétique picturale, plus que l’instruire à travers le récit d’ exempla à valeur d’édification morale. 89 La poésie est rapprochée de la peinture mais la veine lyrique, au sens étymologique du terme, celle du chant et de la musique, n’est pas ignorée pour autant. Ainsi cherche-t-il à soutenir la nymphe Écho dans sa souffrance amoureuse « par la celeste harmonie/ d’un doux lut 90 ». En s’adressant à son destinataire, Saint-Amant prend donc du recul sur sa propre pratique poétique. Il analyse le processus qui en est le fondement, mettant en exergue à la fois ce qui l’anime intérieurement, « la fureur » qui doit l’enflammer, et l’objet qui au sein du monde extérieur en est le support (ce « [qui] s’offre à [ses] yeux 91 -»). À la fureur poétique 92 s’ajoute une inspiration à la fois similaire et sensiblement différente, celle suscitée par le « Demon »: « les propos me naissent en l’ame/ sans contraindre la liberté/ Du Demon qui m’a transporté 93 -». «-Escalader les rochers baroques-» : The Night of loveless night de Robert Desnos 19 88 Horace, Epistulae, De Arte Poetica, v. 361, p. 221, Paris, Belles-Lettres, 1989. Sur la réception d’Horace entre Renaissance et âge classique, voir Nathalie Dauvois, Pour une autre poétique : Horace renaissant , Paris, Champion, 2001 et Zoé Schweitzer, «-Horace, un poéticien français du X V I Ie siècle ? », Fabula / Les colloques , « D’un siècle à l’autre, les auteurs Janus, Être de son siècle (Moyen-Âge- X V I I Ie siècle) », dir. Flavie Kerautret, Mathilde Bernard, Carole Boidin, Florence Tanniou, http: / / www.fabula.org/ colloques/ document10908.php. 89 Sur l’ut pictura poesis au X V I Ie siècle voir Rensselaer W. Lee, Ut pictura poesis : humanisme et théorie de la peinture, X Ve - X V I I Ie siècles , trad. Maurice Brook, Paris, Macula, « La littérature artistique-», 1991-; Patrick Dandrey, «- Pictura loquens . L’ekphrasis poétique et la naissance du discours esthétique en France au X V I Ie siècle », dans Olivier Bonfait et Anne-Lise Desmas (dir.), La Description de l’œuvre d’art. Du modèle classique aux variations contemporaines , Paris, Somogy, 2004, p. 93-120 ; Id. « L’écharpe du buste. Conventions et séductions de la description ecphrastique dans la poésie française du X V I Ie siècle », dans Christian Mouchel et Colette Nativel (dir.), République des lettres, république des arts. Mélanges offerts à Marc Fumaroli , Genève, Droz, 2008, p.-319-341. 90 Saint-Amant, Œuvres poétiques , v. 176-177, p.-46. 91 Ibid ., v. 187, p.-47. 92 Socrate, après avoir notamment abordé « l’art divinatoire » (Platon, Phèdre , 244 a-d), évoque la possession par les Muses (245 a), « Si elle trouve une âme sensible et préservée, elle l’exalte, et la fait s’exprimer en odes et en poésies de toutes sortes […] l’homme qui, sans le délire des Muses, arrive aux portes de la poésie en étant convaincu que le métier suffira pour qu’il soit bon poète, est un poète manqué » ( Œuvres complètes , trad. de Paul Vicaire, Tome IV, 3 e partie, Paris, Belles-Lettres, 1985, p. 30-31). Cf . Pierre de Ronsard, «-Hynne ( sic ) de l’Automne-», Œuvres Complètes , t. II, Paris, Gallimard, «-Bibliothèque de la Pléiade », 1950 : « Le jour que je fu né, Apollon qui préside/ Aux Muses, me servit en ce monde de guide/ M’anima d’un esprit subtil et vigoureux […] il me haussa le cœur, haussa la fantaisie/ M’inspirant dedans l’ame un don de Poesie » (v. 1-3 et v. 9-10, p. 239.) 93 Saint-Amant, Œuvres poétiques , v. 188-190, p.-47. Œuvres & Critiques, XLIX, 2 DOI 10.24053/ OeC-2024-0016 Dans son sens antique, et non chrétien, le « demon », entité intermédiaire, parfois douteuse mais féconde, entre divin et sublunaire, exerce son influence de manière plus subtile que le furor . Si ce dernier « enflamme » presque instantanément, le propos de Saint-Amant laisse entendre ici plutôt une forme de dialectique-: certes, le démon transporte l’âme du poète, mais les facultés de cette dernière semblent encore assez éveillées pour choisir de ne pas s’opposer à ce transport (« sans contraindre la liberté »). L’âme ne s’oppose pas, elle ne s’oublie pas non plus : siège des « propos », elle accompagne le transport suscité et permet l’accomplissement du processus poétique. Mettant l’accent sur le don au sein de la dialectique traditionnelle entre nature et technique, Saint-Amant esquisse une forme d’art poétique, celui du poète « solitaire », croyant en la liberté de son propre génie 94 créateur, mélangeant diverses traditions - et illustrant ainsi métapoétiquement sa pratique. Le texte de Desnos d’autre part réfléchit , comme un miroir, les principes surréalistes qui l’ont mis en forme. De façon immédiate, on note le mélange des polices d’écriture -le caractère italique étant ici réservé à la prose, le romain au vers 95 - et des formes - les quatrains classiques côtoyant sans solution de continuité la prose. Cette manière de composer le corps du texte comme unité organique composite, comprenant divers membres, figure une véritable « écriture de la dissection 96 ». Hybride, l’écriture serait le moyen de « disséquer » à travers la diversité une identité elle-même plurielle, transcendant les limites de la conscience que l’on peut appréhender selon la raison. L’on sait que les poètes surréalistes ont tâché par leur verbe de sillonner les contrées de l’inconscient 97 . S’il ne verbalise pas aussi clairement que Saint-Amant les modalités d’un processus poétique, Desnos n’en trace pas moins quelques linéaments. Lorsqu’il s’adresse par exemple à sa muse, il emploie ces termes : « L’univers de mon rêve exalte ton image 98 -». La poésie y est envisagée comme mimésis au troisième degré (le poète exaltant non la femme en tant que telle mais son « image »), cependant elle n’est plus contrainte par un quelconque respect dû au réel, nécessairement insaisissable : elle est le fruit d’un univers, celui du rêve propre au poète (le déterminant le soulignant). L’espace du rêve se 20 Pauline Fabiani 94 Saint-Amant évoque le « génie » discourant avec la Muse ( Ibid ., v. 178, p. 46.). Cette terme a pour étymologie le latin ingenium , disposition individuelle, créatrice, propre à chaque esprit. Cf. Nicolas Boileau, Art Poétique , Paris, NRF Poésie/ Gallimard, 2020, Chant IV, v. 77-80, p.-254. 95 Il s’agit de l’inverse dans les éditions anciennes. 96 Yun-Kyung, op. cit. , p.-290-299. 97 Cf . André Breton, Manifestes du Surréalisme , Paris, Folio Classiques, « Essais », 1990, p.-24 et p.-36. 98 Desnos, Œuvres , p.-915. Œuvres & Critiques, XLIX, 2 DOI 10.24053/ OeC-2024-0016 caractérise par l’association libre des images, pratique qui fait potentiellement écho aux adynata baroques 99 et, en l’occurrence, au caractère «-fantasque-» de la poésie de Saint Amant, mêlant volontiers une chose et son contraire 100 . Les visions du poète surréaliste rendent bien compte de cette « licence » accordée dans les songes : « […] Les étoiles, les mains, l’amour, les yeux, le sang/ Sont autant de fusées surgissant d’un cratère 101 -». Le premier vers est étayé par une énumération de thèmes, à la fois abstraits (l’amour) et concrets (les mains, le sang), chers à Desnos. Le second amène une métaphore attributive (« sont autant de-»), que l’enjambement met en relief. Cette métaphore lie de façon étroite les thèmes accumulés et une double image, insolite, celle de fusées qui ne traversent pas un ciel étoilé (image qui eût été banale, prévisible après l’évocation des « étoiles ») mais font irruption d’un « cratère », volcan dont aucun terme précédent ne justifie la présence. Conjuguant abstrait et concret, ciel et terre, le poète, conscient des limites du langage, crée des correspondances excédant toute représentation conventionnelle. Il déstabilise volontairement le lecteur de façon à le conduire vers une forme de surréalité . La conversion du regard de l’extérieur vers l’intérieur qui sous-tend cette rupture légitimerait bien la double postulation, paradoxale, à l’œuvre dans le poème : d’un côté, la conscience aigüe des apories du langage, notamment écrit, qui aboutit à une injonction au mutisme (« Tais-toi, pose la plume et ferme les oreilles 102 ») ; de l’autre, la prolifération anaphorique, démultipliant les facettes d’une parcelle du réel (la nuit, les mains, la femme) afin d’en saisir, ou plus exactement de tâcher d’en saisir, le foisonnement. Ainsi semble-t-on devoir entendre le cri final du poète, déchiré : « Ô Révolte ! 103 -». Visions surréalistes d’un Desnos halluciné et « fantaisie » d’un Saint-Amant se croisent en définitive, sans se confondre, pour dire la liberté du langage dans l’expression poétique d’un moi mobile, tourmenté, voire aimant sa tourmente - baroque . «-Escalader les rochers baroques-» : The Night of loveless night de Robert Desnos 21 99 Cf . Diane Vlasie, « Invention du surréalisme et découverte critique du baroque », 2013, p. 97. Voir également sur les rapports entre le merveilleux surréaliste et la meraviglia baroque p.-267-334. 100 Voir note 3, page 6. 101 Desnos, Œuvres , p.-915. 102 Ibid ., p.-921. 103 Id. Cette apostrophe se comprend bien au sens de la « révolution surréaliste » (du nom de la revue fondée en 1924). Il est tentant de voir, aussi bien dans sa brièveté que dans sa position, celle de clôture du poème, une pointe, concepto ou trait d’esprit (sur ce point voir Mercedes Blanco, Les Rhétoriques de la pointe-: Gracian et le scepticisme en Europe, Paris, Classiques Garnier, 2007) venant couronner l’ensemble du texte et en donner quelque part son argument-surréaliste. Œuvres & Critiques, XLIX, 2 DOI 10.24053/ OeC-2024-0016 Dans cette étude, nous avons tâché de mettre en exergue l’influence baroque au sein de la poésie moderne, à travers une étude comparative de « La Solitude » de Saint-Amant et « The Night of Loveless Night » de Robert Desnos. L’angle du lyrisme 104 nous a permis de considérer les poètes et leurs œuvres au sein de leurs contextes respectifs, avec leurs singularités notamment formelles, tout en les confrontant. Ainsi nous avons étayé la représentation du sujet au sein d’un espace reflétant, entre vallons et ravins, sa solitude, et une prise de position, explicite ou pas, à propos de la création poétique. Au terme de cette réflexion, il apparaît que ces poètes ne décrivent pas la nature en tant que telle, pour elle-même, mais en font le tremplin d’une exploration stylistique, que ce soit par le biais de la mythologie, ou par celui des associations libres d’images. La nature est d’ailleurs assimilée dans les deux œuvres à un « ouvrage » dont il s’agirait de déceler le code : Desnos « déchiffre difficilement les initiales identiques sur le tronc des mélèzes 105 » ; Saint Amant observe de son côté les « chiffres taillez » sur les arbres 106 . La métaphore du monde-livre, de Saint-Amant à Desnos, a certes été vidée de la symbolique cosmique que lui conférait l’édifice analogique. Pour autant, cette étude n’en serait-elle pas utilement prolongée par l’écopoétique qui éclairerait les-«-sens supplémentaire[s] 107 -» potentiels des métaphores-? Bibliographie - Sources Boileau, Nicolas. Art Poétique , éd. Jean-Pierre Collinet, Paris, NRF Poésie/ Gallimard, 2020. Breton, André. Manifestes du Surréalisme, Paris, Folio Classiques, «-Essais-», 1990. Desnos, Robert. Œuvres , éd. Marie-Claire Dumas, Paris, Gallimard, « Quarto », 1999. Furetière, Antoine. Dictionnaire universel contenant generalement tous les mots françois tant vieux que modernes & les Termes de toutes les sciences et des arts , À la Haye et à Rotterdam, chez Arnout & Reinier Leers, 1690 [éd. posthume], 2 vol, in-fol, 22 Pauline Fabiani 104 Nous avons pris le mot dans un sens dirions-nous premier, orphique, celui de l’expres‐ sion personnelle, solitaire, de sentiments au sein de la nature. L’étude du lyrisme a été renouvelée par les perspectives de la pragmatique, voir entre autres Gilles Guerrero, Poétique et Poésie lyrique. Essai sur la formation d'un genre , Paris, Seuil, « Poétique », 2000, et Benedikte Andersson, L’invention lyrique. Visages d’auteur, figures du poète et voix lyrique chez Ronsard , Paris, Librairie Honoré Champion, « Bibliothèque littéraire de la Renaissance-», 2011. 105 Desnos, Œuvres , p.-909. 106 Saint-Amant, Œuvres Poétiques , v. 101-104, p.-41. 107 Sur ces « enjeux esthétiques » de l’écopoétique, Sara Buekens, « L’écopoétique : une nouvelle approche de la littérature française », Elfe XX-XXI [En ligne], 8 | 2019, mis en ligne le 10 septembre 2019, consulté le 01 mai 2024. URL : http: / / journals.openedition. org/ elfe/ 1299. Œuvres & Critiques, XLIX, 2 DOI 10.24053/ OeC-2024-0016 Paris, Bibliothèque nationale de France, Département Littérature et Art, FOL-X-255, ark: / 12148/ bpt6k3413126b. Gautier, Théophile. Les Grotesques , éd. Cécilia Rizza, Paris, Schena, Nizet, « Biblioteca della Ricerca. Testi stranieri », 1985. Horace. Epîtres suivies de l’Art Poétique , trad. François Villeneuve, Paris, Belles-Lettres, 1935. Pétrarque, François. Canzoniere , trad. Pierre Blanc, Paris, Classiques Garnier, 2000. Platon, Phèdre . Œuvres complètes , trad. Paul Vicaire, Tome IV, 3 ème partie, Paris, Belles-Let‐ tres, 1985. Rimbaud, Arthur. Œuvres et lettres, Manuscrit autographe, Charleville, 15 mai 1871, Gallica, A-45ff, NAF 26499, Bibliothèque Nationale de France, Département des Manuscrits. Ronsard, Pierre. Œuvres Complètes , 2 vols., Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1950. Saint-Amant, Marc-Antoine Girard de. Œuvres poétiques, éd. J. Lagny, I, Paris, Société des Textes Français Modernes, 1967. - Études Andersson, Benedikte. L’Invention lyrique. Visages d’auteur, figures du poète et voix lyrique chez Ronsard, Paris, Champion, «-Bibliothèque littéraire de la Renaissance », 2011. Beugnot, Bernard. Le Discours de la retraite au X V I Ie siècle : loin du monde et du bruit, Paris, PUF, «-Perspectives littéraires-», 1996. Blanco, Mercedes. Les Rhétoriques de la pointe : Gracian et le scepticisme en Europe, Paris, Classiques Garnier, «-Bibliothèque littéraire de la Renaissance », 2007. Buekens, Sara. « L’écopoétique : une nouvelle approche de la littérature française », Elfe XX-XXI, n o 8, 2019, http: / / journals.openedition.org/ elfe/ 1299. Cartron, Maxime. L’Invention du Baroque, les anthologies de poésie française du premier X V I Ie siècle , Paris, Classiques Garnier, «-Lire le X V I Ie siècle-», 2021. Cartron, Maxime. « Transhistoricité et présentisme de l’histoire littéraire : les antholo‐ gies poétiques baroques », Fabula-LhT , n° 23, « (Trans-)historicité de la littérature-», dir. L. Forment et B. Tabeling, 2019, http: / / www.fabula.org/ lht/ 23/ cartron.html. Cassaert, Noluenn. «-Saint-Amant et le baroque, entre licence et traditions-», Mémoire de maîtrise sous la direction d’Alexander Roose, Universiteit Gent, Faculteit Letteren en Wijsbegeerte, 2019, https: / / libstore.ugent.be/ fulltxt/ RUG01/ 002/ 790/ 055/ RUG01-002790055_2019_0001_AC. pdf Dandrey, Patrick, «- Pictura loquens . L’ekphrasis poétique et la naissance du discours esthétique en France au X V I Ie siècle », dans Olivier Bonfait et Anne-Lise Desmas (dir.), «-Escalader les rochers baroques-» : The Night of loveless night de Robert Desnos 23 Œuvres & Critiques, XLIX, 2 DOI 10.24053/ OeC-2024-0016 La Description de l’œuvre d’art. Du modèle classique aux variations contemporaines , Paris, Somogy, 2004, p.-93-120. Dandrey, Patrick. «-L’écharpe du buste. Conventions et séductions de la description ecphrastique dans la poésie française du X V I Ie siècle », dans Christian Mouchel et Colette Nativel (dir.), République des lettres, république des arts. Mélanges offerts à Marc Fumaroli , Genève, Droz, 2008, p.-319-341. Dumas, Marie-Claire. Robert Desnos ou l'Exploration des limites , Paris, Klincksieck, 2000. Guerrero, Gustave. Poésie et poétique lyrique. Essai sur la formation d’un genre, trad. Anne-Joëlle Stéphan, Paris, Seuil, «-Poétique-», 2000. Lee, Rensselaer W. Ut pictura poesis : humanisme et théorie de la peinture, X Ve - X V I I Ie siècles , trad. par Maurice Brook (Ut pictura poesis : the humanistic theory of painting ), Paris, Macula, «-La littérature artistique-», 1991. « Moi qui suis Robert Desnos » : permanence d'une voix : onze études , Marie-Claire Dumas (dir), Paris, José Corti, 1987. Peureux, Guillaume. « Le rendez-vous des enfans sans soucy ». La poétique de Saint-Amant , Paris, Librairie Honoré Champion, «-Lumières classiques-», 2002. Peureux, Guillaume. «-Espaces capricieux et évidence chez Saint-Amant-». Études littéraires , n o 34, 2002, p.-191-200, https: / / www.erudit.org/ fr/ revues/ etudlitt/ 2002-v34 -n1-2-etudlitt694/ 007562ar/ . Rousset, Jean. La Littérature de l’âge baroque en France , Paris, Corti, 1953. Schweitzer, Zoé. « Horace, un poéticien français du X V I Ie siècle ? », Fabula / Les colloques , «-D’un siècle à l’autre, les auteurs Janus, Être de son siècle (Moyen-Âge--- X V I I Ie siècle)-», dir. Flavie Kerautret, Mathilde Bernard, Carole Boidin, Florence Tanniou, h ttp: / / www.fabula.org/ colloques/ document10908.php. Tonolo, Sophie. « Saint-Amant pittoresque : l’éloquence du hideux, la beauté des choses muettes-», Dix-septième siècle , n°245, 2009, p.-643-661 (https: / / www.cairn.info/ revue -dix-septieme-siecle-2009-4.htm). Velasco, Manon. «- Ma trop crédule fantaisie » : l’esthétique de la vision chez Saint-Amant, Littératures , 2011. 1 Mémoire en ligne, Université Stendhal (Grenoble 3) Vlasie, Diana. «-Invention du surréalisme et découverte critique du baroque-», thèse de doctorat, Université du Québec à Montréal et Université Paris 7 Diderot, 2013, https: / / archipel.uqam.ca/ 5727/ 1/ D2493.pdf. Yun-Kyung, Cho. « L'Écriture du corps dans la poésie surréaliste (Éluard, Desnos, Péret) : vers le “surcorporel” », thèse de doctorat, Paris, Université Paris 3 Sorbonne-Nouvelle, 2003. 24 Pauline Fabiani Œuvres & Critiques, XLIX, 2 DOI 10.24053/ OeC-2024-0016
