eJournals Vox Romanica 77/1

Vox Romanica
vox
0042-899X
2941-0916
Francke Verlag Tübingen
10.8357/VOX-2018-021
Es handelt sich um einen Open-Access-Artikel, der unter den Bedingungen der Lizenz CC by 4.0 veröffentlicht wurde.http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/121
2018
771 Kristol De Stefani

Gabriella Parussa/Maria Colombo Timelli/Elena Llamas-Pombo (ed.), Enregistrer la parole et écrire la langue dans la diachronie du français, Tübingen (Narr Francke Attempto Verlag) 2017, 187 p. (ScriptOralia 143).

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2018
Maxime  Cario https://orcid.org/0000-0002-3801-4120
Simon  Gabay https://orcid.org/0000-0001-9094-4475
vox7710316
316 Besprechungen - Comptes rendus Vox Romanica 77 (2018): 316-321 DOI 10.8357/ VOX-2018-021 Gabriella Parussa/ Maria Colombo Timelli/ Elena Llamas-Pombo (ed.), Enregistrer la parole et écrire la langue dans la diachronie du français, Tübingen (Narr Francke Attempto Verlag) 2017, 187 p. (ScriptOralia 143). Les éditrices de ce nouvel ouvrage ont voulu rassembler des contributions qui étudient les rapports complexes de la graphie et de la phonie du français, et plus largement la représentation des divers degrés de l’oral par l’écrit, à des époques pour lesquelles on dispose seulement de traces écrites. Une part des contributions s’attache à l’étude de la graphie au sens étroit du terme, l’autre à l’étude de la ponctuation. Il est appréciable que les différentes périodes de l’histoire du français soient représentées (ancien et moyen français, classique et moderne) hormis le XVI e siècle, et qu’il soit fait une place aux variétés régionales. Dans leur article «Sur les aboutissements rr et r de tr/ dr intervocaliques en ancien français» (on ne sait pas s’il est fait mention de graphies ou de phonies), T. Scheer et P. Ségéral (désormais TS&PS) étudient l’aboutissement aux afr. rr et r des lat. tard. [tr] et [dr] 1 primaires et secondaires (c’est-à-dire remontant aux lat. cl. tr [tr] et dr [dr], d’une part, {t [t] + voyelle + r [r]} et {d [d] + voyelle + r [r]}, d’autre part) en position intervocalique. L’étude aboutit à trois conclusions convaincantes: (i) les graphies de l’afr. doivent leur origine à l’opposition phonétique [rr] vs [r]; (ii) le lat. tard. [ δ r] intervocalique aboutit à [rr] ou [r] par amuïssement de [ δ ] et, après voyelle brève, allongement compensatoire de [r] (plutôt que par amuïssement ou assimilation de [ δ ] comme on l’enseigne traditionnellement), la voyelle en précession étant brève s’il s’agit d’une monophtongue non tonique, et longue s’il s’agit d’une monophtongue tonique (puisqu’elle est libre dans cette situation) ou d’une diphtongue; (iii) après les séquences correspondant aux afr. ie et uo/ ue, l’aboutissement est [r] ou [rr] selon que la prononciation se caractérisait par la conservation des diphtongues ouvrantes [i ẹ ] et [ uọ ]/ [ü  ] ou par leur réduction précoce aux séquences constituées d’une semi-consonne et d’une voyelle brève [y ẹ ] et [w ọ ]/ [ ẅ ]. Cette conclusion remet en cause la datation traditionnelle de la consonisation du premier élément des diphtongues ouvrantes (première moitié du XIII e siècle), et donc celle de la bascule des diphtongues (vers 1200), voire le fait que les diphtongues ouvrantes aient jamais été accentuées sur leur premier élément. Il est regrettable que n’ait pas été traité le cas du lat. tard. [ i̯δ r], c’est-à-dire de [ δ r] précédé d’une diphtongue de coalescence; ce cas est au contraire explicitement évacué (25 N7; 27 N8) - rappelons que la diphtongaison est dite par segmentation ou par coalescence selon qu’il s’agit de la déstabilisation d’une seule tenue vocalique ou de l’accolement de deux éléments vocaliques ([t  ct ŭ ] > [t  yt ŭ ] > [t i̯ t ŏ ]) et que c’est la diphtongaison par segmentation qui peut être spontanée ([m  l ĕ ] > [m í l ĕ ]) ou conditionnée ([p  ttya] > [p  t ’ a] > [pí  t  ’a]): le [ i̯ ] du groupe [ i̯δ r] étant le produit de la palatalisation de [ δ r] (fin du III e s. ou début du IV e s.), la diphtongue en précession est une diphtongue de coalescence et non pas une «diphtongu[e] conditionné[e]», comme il est dit deux fois (25 N7 et 27 N8). Bien que les formes concernées soient très peu nombreuses, on ne comprend pas ce qui justifie une telle exclusion, les diphtongues par coalescence de [ i̯ ] étant mises en place entre le II e et le IV e s., c’est-à-dire bien avant l’évolution [ δ r] > [rr]/ [r] entre le IX e et le XI e s. Si 1 Quel que soit l’alphabet phonétique qu’emploient les auteurs, nous emploierons toujours l’alphabet de Bourciez dans cette contribution. 316 321 021 317 Besprechungen - Comptes rendus Vox Romanica 77 (2018): 316-321 DOI 10.2357/ VOX-2018-021 arbitrium > arvoire et la racine verbale repatri- > repairconfirment l’hypothèse de TS&PS, ce n’est pas le cas de materiamen > mairrien et materiamentum > mairrement, pour lesquels la graphie avec rr serait la plus fréquente selon le relevé de TS&PS dans le T-L, AW. Or, aucune explication n’est avancée pour ces formes. Dans son article «Graphie et ponctuation du français médiéval. Système et variation», E. Llamas-Pombo (désormais ELP) propose une étude de l’ancien français écrit en diasystème (diachronie, diatopie, diastratie, diamésie et diaphasie). La question de la présence de l’oral dans l’écrit ne peut trouver de réponse simple du fait de l’extrême polysémie du terme oral. ELP s’attache donc à le désambiguïser, en distinguant l’oral comme substance de l’expression linguistique (§2: paramètre diamésique), comme modalité du discours (§3: paramètre énonciatif), comme registre de langue (§4: paramètre diastratique) et enfin comme conception ou style de langue (§5: paramètre conceptionnel). C’est donc à l’aune de ces quatre paramètres qu’ELP s’attache à retrouver l’oral derrière une composante essentielle de l’ancien français: la variation graphique, qui reste effectivement le parent pauvre de la grammaire française. Le point fort de cette étude est que la variation y est approchée tant au niveau de la graphie que de la ponctuation. Dans son article «La vertu ou la puissance de la lettre. Enquête sur les fonctions attribuées à certaines lettres de l’alphabet latin dans les systèmes graphiques du français entre le 11 e et le 16 e siècle», G. Parussa (désormais GP) pose le problème de la relation entre phonie et graphie en français médiéval, du fonctionnement de son code écrit, et des valeurs que les lettres sont susceptibles d’y avoir, en étudiant - enfin! - le cas des graphèmes u et n. Les séquences ou et on (en toute position) et eu, en et e (seulement en position non tonique et dans les monosyllabes) posent en effet le problème de sembler interchangeables quand u et n ne forment pas un seul graphème, comme c’est le cas dans certaines écritures tardives. La fréquence et la variété des graphies que ne justifie pas l’étymologie, le fait que les rimes de certains textes neutralisent l’opposition ou (< lat. on/ o) vs on (< lat. on) et, au contraire, le fait que certains copistes respectent la répartition attendue sont assurément de bons arguments pour ne plus négliger l’équivalence des deux graphèmes observables chez certains copistes ou dans certaines scriptæ (surtout orientales, nord-orientales et francoprovençales et, dans une moindre mesure, nordoccidentales) et ce qu’elle pourrait devoir à la phonie. GP fait l’hypothèse que le graphème n connaisse une valeur de modificateur de la lettre en précession. Il renseignerait la fermeture: c’est parce que le digramme on noterait un son fermé que les digrammes on et ou seraient équivalents. À quoi s’ajoute la proximité des sons [u] et [  ], laquelle est sans doute, selon GP, la cause de ce phénomène panroman qu’est la nasalisation spontanée (ex. it. lontra, montone), que ni l’influence à distance d’une consonne nasale ni l’analogie ne suffisent à expliquer. L’hypothèse est convaincante. Il est toutefois regrettable que n’ait pas été traitée la question de l’articulation ou non d’une consonne nasale: dans les cas du digramme on non étymologique, du préfixe con/ cou et du digramme on remontant au lat. {on + f/ s/ v}, la prononciation d’une consonne nasale est incertaine alors que, dans les autres cas du digramme on étymologique, elle est certaine en position intervocalique jusqu’aujourd’hui et en position implosive jusqu’à la fin du XVI e siècle ou le début du XVII e siècle. Cette question intéresse particulièrement les rimes, et sa résolution pourrait ne pas remettre en cause les conclusions de GP: en effet, à en croire les formes italiennes, il n’est pas a priori impossible que la nasalisation spontanée ait provoqué l’apparition d’une consonne nasale implosive, laquelle n’a pas laissé de trace en 318 Besprechungen - Comptes rendus Vox Romanica 77 (2018): 316-321 DOI 10.8357/ VOX-2018-021 français moderne contrairement à l’italien ‒ dans tous les exemples donnés, les séquences on et en non étymologiques apparaissent devant consonne ou en finale absolue: est-ce un hasard? Les digrammes eu et en seraient une tentative de distinguer le son [  ], fermé et centralisé, voire nasalisé, des sons [ ẹ ] et [  ]. Pour finir, quelques témoignages de grammairiens des XVI e et XVII e siècles sont invoqués à l’appui de ces thèses. On fera encore seulement deux remarques de détail. Tout d’abord, la lettre i renseignant l’ouverture de [e] en lorrain (peire, creite) est évoquée avec d’autres comme autre lettre fonctionnant comme modificateur (101). L’exemple n’est pas judicieux. La nature du ou des sons que note ce digramme fait débat. Dans le cas de creite, il s’agit vraisemblablement de [  ] (par allongement compensatoire de [  ] lors de l’amuïssement de [s] implosif). Dans le cas du lat. [á] libre, il peut s’agir du résultat commun [  ] (après fermeture de [  ] au XI e ou XII e s.), de [  ] (après ouverture devant consonne de [  ], phénomène non systématique avant l’époque moderne), ou de [ i̯ ] (> [  ]) (par diphtongaison de [  ], régionale et incertaine). On trouve aussi des graphies ei pour les résultats des lat. cl. [ ĕ ], [ ē ] et [ ĭ ] entravés 2 . Il aurait mieux fallu donner comme exemples de modificateur d’une lettre-voyelle le s devant lettre-consonne et le e devant ou après lettre-voyelle, renseignant l’un et l’autre la longueur de la voyelle, l’un après l’amuïssement de [s] implosif (XI e et XII e s.) et l’autre après l’amuïssement de [  ] en hiatus (XIV e siècle). Enfin, on regrette que soit reconduite la confusion entre français standard ou littéraire et français central, d’Île-de-France ou parisien (94 N4, 100 §1, 102 §3, 105 §4), même si n’est heureusement pas employé le terme de francien. Dans son article «L’automne d’une scripta», A. Wirth-Jaillard (désormais AWJ) livre une approche du déclin de la scripta lorraine: elle en étudie l’évolution entre 1324 et 1501 dans huit registres tirés des comptes des prévôts d’Étain (Meuse, Lorraine septentrionale), et elle la compare à celle observée par D. Trotter, «Ensuirre toutes les variétés: la variation au Moyen Âge, une approche quantitative», in: D. Lagorgette et O. Bertrand (ed.), Études de corpus en diachronie et en synchronie: de la traduction à la variation, Chambéry 2009: 15976 pour quatre-vingt chartes de Saint-Dié-des-Vosges (Vosges, Lorraine méridionale) rédigées entre 1280 et 1453. AWJ présente d’abord les particularités des documents comptables pour l’étude des scriptæ (rareté des éditions, contextualisation précise, limitation linguistique, cohérence linguistique, répétitivité). Les traits étudiés sont ceux de Trotter 2009 (lai/ la; mai, sai/ ma, sa; <-auble>/ <-able>; <-eir>/ <-er>; <-aige>/ -age>; lo(u)/ le) auxquels deux autres sont ajoutés (<nr>/ <ndr>; latin /  / + palatale <-ei> (fr. <-i>)). Il apparaît que la scripta d’Étain se dérégionalise plus rapidement que celle de Saint-Dié et que les deux traits qui résistent le mieux sont <-aige> et <nr>. AWJ tente, de façon hypothétique, de tenir compte de l’identité des clercs-jurés - pour trois registres successifs, le clerc-juré responsable de la mise au propre porte en effet le même nom. Pour l’analyse du trait <-ei>/ <-i>, il semble y avoir méprise. Dans le premier des trois registres susdits sont relevées 9 formes en -y; dans le deuxième, 5 formes en -y et 10 formes en -ei/ -ey; et dans le troisième, 37 formes en -i/ -y. Voici ce qui en est dit: 2 Pour P. Fouché, Phonétique historique du français, Paris 1969: 263 et G. Zink, Phonétique historique du français, Paris 1999: 196, le digramme ei pour le résultat du lat. [á] libre note une diphtongue alors que, pour C. T. Gossen, Grammaire de l’ancien picard, Paris 1976: §1 et L. Remacle, La différenciation dialectale en Belgique romane avant 1600, Liège 1992: 35-37, il note [  ]/ [  ]. Gossen 1976: 48 relève des graphies telles que teire, leitre (< lat. cl. [é] et [  ] entravés). 319 Besprechungen - Comptes rendus Vox Romanica 77 (2018): 316-321 DOI 10.2357/ VOX-2018-021 Si, suivant une des hypothèses formulées pour le trait <-aige>, on avance la possibilité de deux homonymes, il faudrait alors supposer que le premier aurait vu sa graphie évoluer vers le standard d’un registre à l’autre, tandis que le second adoptait une graphie se caractérisant par la présence des deux types de graphies. Les éléments manquent cependant pour aller au-delà de cette seule supposition, bien fragile. (127) Si nous comprenons bien AWJ, nous ne voyons pas comment accorder ses remarques avec les données: si le premier des deux clercs-jurés homonymes est responsable des deux premiers registres, sa graphie a évolué du standard vers le régional, et la graphie du deuxième se caractérise par l’emploi de la seule graphie standard; si le premier est responsable du premier registre, sa graphie se caractérise par l’emploi de la seule graphie standard, et le deuxième a vu sa graphie évoluer du régional vers le standard. Enfin, on lit dans la conclusion: Cette étude de cas semble également montrer que la scripta est finalement quelque chose d’assez individuel et globalement d’assez cohérent sous la plume d’un seul et même scribe. La comparaison des noms des prévôts et des noms des clercs-jurés nous amène à penser, dans notre cas, que, plus que le scribe qui effectue la mise au net dont les choix graphiques semblent parfois varier d’un registre à l’autre, c’est peut-être l’officier, responsable des documents préparatoires dont le registre n’est que la mise au net, qui est à l’origine des graphies. (127) Outre que les deux phrases semblent contradictoires, c’est beaucoup inférer des résultats de cette seule enquête, quand bien même le questionnement est valable théoriquement. Dans son article «Les dialogues dans les Cent nouvelles nouvelles. Marques linguistiques et (typo)graphiques, entre manuscrit et imprimé», M. Colombo Timelli (désormais MCT) compare deux témoins: un imprimé, qui est l’œuvre d’Antoine Vérard, et le seul manuscrit qui nous reste, aujourd’hui conservé à l’université de Glasgow (Hunter 252). Le cas est intéressant car les deux témoins ont été produits sensiblement à la même date (1486 pour le premier, c. 1480 pour le second), ce qui permet une comparaison entre les pratiques des scribes et des compositeurs dans leur traitement des dialogues pour un même texte à une même époque. MCT propose une argumentation en deux temps: elle regarde d’abord les marques linguistiques, puis les marques de ponctuation, ce qui lui fait constater des réactions similaires entre les deux copistes (c’est-à-dire le scribe du manuscrit et le compositeur de l’imprimé) devant les composantes du discours rapporté. La principale divergence entre les deux ne relève pas tant des signes à disposition pour baliser le discours rapporté, que d’une utilisation différente de ces signes. L’article est excellent; tout au plus pourrions-nous faire remarquer que le développement en N19 sur le rapport avec l’original des deux témoins mériterait d’être quelque peu étoffé, et probablement d’être mis en introduction. L’existence d’une source commune postulée par P. Champion, Les Cent Nouvelles Nouvelles, 1928: 271 et F. P. Sweetser (ed.), Les Cent Nouvelles Nouvelles, Genève 1966: ix permet en effet de mieux comprendre la proximité entre l’imprimé et le manuscrit, et donc de mieux saisir le rôle des copistes dans l’évolution du marquage des actes de parole. L’article «‹Ponctuation noire›, ‹ponctuation blanche› et ‹contes bleus›: l’évolution du codage des discours directs dans La Barbe bleue de Perrault (1695-1905)» de C. Badiou-Monferran 320 Besprechungen - Comptes rendus Vox Romanica 77 (2018): 316-321 DOI 10.8357/ VOX-2018-021 (désormais CBM) est en fait double: il s’intéresse d’abord en détail à la question du manuscrit de 1695, puis aborde les éditions des XVIII e et XIX e siècles. La thèse est donc aussi double: d’une part le faible codage du manuscrit de 1695 serait la preuve que ce manuscrit est «l’enregistrement d’une performance orale» (156), et d’autre part l’évolution du codage durant les deux siècles qui suivent montre que le genre du conte «re-présente artificiellement son oralité» (156) - cette évolution étant le lieu d’observation privilégié d’une tendance plus profonde, l’apparition d’un «patron d’oralité» (156). Si nous sommes assez convaincus par les thèses de CBM, la démonstration nous pose problème. Ainsi, en l’absence d’étude sur le sujet (148 N3), il est possible que le balisage lacunaire et non systématique du discours rapporté soit dû à la nature manuscrite du document, et non à sa vocation performative. On sait en effet que le système graphique des manuscrits diffère pour partie de celui, moins irrégulier et plus standardisé, des imprimés: il pourrait en aller de même avec le codage du discours rapporté. Les premières lignes de la lettre autographe de Madame de Sévigné donnée en annexe par CBM, montrent ainsi un balisage intraphrastique extrêmement faible, sans pour autant que la lettre ait eu vocation à être lue à haute voix. Cependant, l’utilisation de la virgule par Madame de Sévigné étant extrêmement particulier, la marquise n’offre pas un point de comparaison idéal: il conviendrait plutôt de se tourner vers les manuscrits autographes de Perrault (comme le B.N.f. fr. 23991). Si le codage y était plus développé que dans le manuscrit de 1695 (ce qu’un rapide sondage semble confirmer), cela signifierait que la rareté des signes de ponctuation de ce dernier ne serait ni liée à la nature manuscrite du document, ni à une pratique particulière de l’auteur qui survivrait en diasystème, mais bien à la vocation performative de ce témoin. Dans la seconde partie de l’article, l’exemple 12 (157) nous pose problème: si le cadratin est désémantisé, il ne peut s’agir d’une «bévue». Il faut choisir: il s’agit soit d’un exemple parfait de l’apparition du patron d’oralité, soit d’une coquille malheureusement reconduite sur des décennies (nous penchons pour la seconde hypothèse). Dans son article «Une pouce de largur et un pouce de profondur. Le français régional dans les manuscrits basques des 18 e et 19 e siècles», M. Padilla-Moyano (désormais MPM) apporte sa contribution à la connaissance du français régional du Sud-Ouest, et plus particulièrement du Pays Basque, par l’étude de textes dus à des scripteurs maîtrisant mal les codes graphiques du français et produisant par conséquent un français «fortement éloigné de la norme» (172). MPM a dépouillé de leurs passages en français huit (sept? ) pièces du théâtre populaire souletin des XVIII e et XIX e siècles, et a aussi tenu compte, d’une part, de la production en français du barde Pierre Etchahun (1786-1862) et de la correspondance en français de la missionnaire protestante Anna Urruty (1826-1900) pour le Pays Basque et, d’autre part, des lettres de soldats béarnais de la période révolutionnaire pour la comparaison avec le français du Béarn. Il faut remarquer que le corpus théâtral n’est pas tout à fait clair: quand, à côté de farces sont annoncées «trois pastorales ou tragédies», seules sont mentionnées Œdipe et Sainte Elisabeth de Portugal (171-72 N6). Par ailleurs, il est dit que les lettres des soldats béarnais sont retenues «Pour la comparaison avec le gascon béarnais» (172), ce qui est une formulation trompeuse, tous les passages cités étant en français: MPM voulait sans doute parler du substrat gascon. Après avoir présenté la situation sociolinguistique complexe du Pays Basque et, plus particulièrement, de la province de Soule, MPM présente la nature du français régional au Pays Basque. L’«idée que les variétés régionales du français sont issues du contact avec les autres 321 Besprechungen - Comptes rendus Vox Romanica 77 (2018): 321-323 DOI 10.2357/ VOX-2018-022 langues et dialectes de France» (170) n’est pas recevable sous cette forme exclusive: outre que les caractéristiques de la variété linguistique importée et les modalités d’importation doivent être prises en compte (par exemple, les Romains ont exporté un latin qui n’était pas celui de Cicéron et l’ont fait par différentes voies de communication), une variété linguistique régionale a sa vitalité propre et se caractérise non seulement par des emprunts (et des calques) aux substrats et aux adstrats, mais aussi par des innovations 3 . Les phénomènes relevés par MPM traversent la phonologie, la morphologie, la syntaxe et le lexique. Voici quelques remarques. - «Manque de distinction entre les phonèmes / œ/ et / y/ » (173). Le français a en fait deux phonèmes vocaliques antérieurs labialisés de moyenne aperture, à savoir /  / et /  / qui manquent tous les deux en occitan. - «Confusion des phonèmes / e/ , / ε / et / ǝ / » (174). Au lieu d’affirmer simplement qu’«On ne s’étonne pas du fait que les Basques, avec les Français du Midi en général, puissent confondre d’autres phonèmes vocaliques du français», on aurait pu préciser que, pour ce qui est de l’oc., l’absence du phonème /  / est propre au gascon oriental (Landes), dans lequel ce phonème se réalise / œ/ et que c’est tout le domaine de l’oc. qui méconnaît le phonème / ǝ / 4 . Maxime Cario https: / / orcid.org/ 0000-0002-3801-4120 Simon Gabay https: / / orcid.org/ 0000-0001-9094-4475 ★ Ian Short (ed.), The Oxford Psalter (Bodleian MS Douce 320), Oxford (Anglo-Norman Text Society) 2015, xvi+236 p. Preceduto da alcuni notevoli studi di I.S., talora in collaborazione (B. Woledge/ I. Short, «Liste provisoire de manuscrits du XII e siècle contenant des textes en langue française», R 102 (1981): 1-17; M. Careri/ T. Nixon/ C. Ruby/ I. Short, avec la collab. de P. Stirnemann, Catalogue illustré des manuscrits de la littérature française et occitane. Le XII e siècle, Roma 2011, N60; I. Short/ M. Careri/ C. Ruby, «Les Psautiers d’Oxford et de Saint Albans: liens de parenté», R. 102 (2010): 29-45), e del resto frutto di una pluridecennale intensa applicazione sui testi anglo-normanni, esce adesso una nuova edizione del Salterio contenuto nel manoscritto Oxford Bodleian Library Douce 320. Testo e manoscritto erano stati editi per la prima volta nel XIX secolo da Francisque Michel (Libri Psalmorum Versio antiqua gallica et cod. ms. in Bibl. Bodleiana asservato, Oxonii 1860, e Le Livre des Psaumes, ancienne traduction française publ. pour la première fois d’après les manuscrits de Cambridge et de Paris, Paris 1876): troppo lontani, ormai, e con troppo lavorio, di edizione e di teoria ecdotico-ermeneutica, intercorso nel tempo per non richiedere in ogni caso un intervento su questo testo per più aspetti notevole. L’Oxford Psalter è infatti la prima traduzione di un salterio (= raccolta dei Salmi) che si conosca - o sia rimasta - in anglo-normanno (dunque in francese), e lo stesso Douce 320 è tra i più antichi manoscritti della letteratura francese del XII secolo che siano giunti all’età 3 Voir, par exemple, A. Kristol, «Une francophonie polycentrique: lexicographie différentielle et légitimité des français régionaux», in: Y. Greub/ A. Thibault (ed.), Dialectologie et étymologie galloromanes. Mélanges en l’honneur de l’éméritat de Jean-Paul Chauveau, Strasbourg 2014: 275-90. 4 P. Bec, Manuel pratique de philologie romane, vol. 2, Paris 1971: 451. 321 323 022