lendemains
0170-3803
2941-0843
Narr Verlag Tübingen
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2020
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lendemains Transfuge, transfert, traduction: la réception de Didier Eribon dans les pays germanophones 180 45. Jahrgang 2020 Sommaire Editorial .................................................................................................................... 3 Dossier Elisabeth Kargl / Bénédicte Terrisse (ed.) Transfuge, transfert, traduction: la réception de Didier Eribon dans les pays germanophones Elisabeth Kargl / Bénédicte Terrisse: Quelques hypothèses et scénarios interprétatifs en guise d’introduction ........................................................ 5 Joseph Jurt: Portrait de Didier Eribon en transfuge de classe ................................11 Joseph Jurt: Note au sujet des mécanismes de la réception transnationale. L’exemple de Didier Eribon et d’Annie Ernaux....................................................... 22 Christoph Oliver Mayer: „Dreifach hält besser“. Zur indirekten Rezeption Didier Eribons über die Werke von Édouard Louis und Annie Ernaux ................... 27 Jan Rhein: Didier Eribon im Kontext des Buchmesseschwerpunkts Francfort en français auf der Frankfurter Buchmesse 2017................................... 38 Gregor Schuhen: Erfolgsmodell Autosoziobiografie? Didier Eribons literarische Erben in Deutschland (Daniela Dröscher und Christian Baron) .......... 51 Christoph Schaub: Autosoziobiografisches und autofiktionales Schreiben über Klasse in Didier Eribons Retour à Reims, Daniela Dröschers Zeige deine Klasse und Karin Strucks Klassenliebe.............................................. 64 Christina Ernst: ‚Arbeiterkinderliteratur‘ nach Eribon. Autosoziobiographie in der deutschsprachigen Gegenwartsliteratur ..................... 77 Delphine Edy: Transfuge(s) de classe, de genre, de culture… Pour Thomas Ostermeier, tous les détours mènent à Reims ................................ 92 Raffael Hiden: Das Theater als For(u)m der Darstellung soziologischer Erkenntnisse: Didier Eribons Autosozioanalyse als künstlerisches Reenactment? ........................................................................ 105 Maiwenn Roudaut: Le transclasse et la reconnaissance. Proposition de lecture de Retour à Reims ............................................................118 Sommaire Marion Biet: (Re)penser Retour à Reims avec un accent: la mobilité de classe au prisme des langues et de la mobilité géographique ...... 128 Traduire, lire et étudier Retour à Reims dans les pays germanophones. Table ronde avec Bernard Banoun, Tobias Haberkorn, Yasmin Hoffmann et Christoph Reinprecht ....................................................................................... 140 DOI 10.2357/ ldm-2020-0040 3 Editorial Editorial Am Ausgangspunkt des Dossiers von Elisabeth Kargl und Bénédicte Terrisse (Universität Nantes) Transfuge, transfert, traduction: la réception de Didier Eribon dans les pays germanophones, das das Thema des vorliegenden Hefts ist, stand die Überraschung der Herausgeberinnen über den großen Erfolg von Eribons Werk, insbesondere von Retour à Reims (2009) / Rückkehr nach Reims (2016), in deutschsprachigen Ländern. Genauer gesagt handelte es sich um eine doppelte Überraschung, bedenkt man den zeitlich versetzten Erfolg der Übersetzung eines Titels, der bereits sieben Jahre zuvor in Frankreich im Original erschienen war. Was hat die deutsche Gesellschaft von 2016 mit der aus dem Frankreich des Jahres 2009 gemeinsam? Das vorliegende lendemains-Dossier begibt sich auf Spurensuche und ergründet die Ursachen für diese insgesamt ungewöhnliche Rezeptionsgeschichte. Dabei beschränkt es sich nicht auf traditionelle Rezeptionsstudien allein, die sich lediglich auf Eribons Werk beziehen, sondern erweitert das Spektrum möglicher Untersuchungsansätze deutlich, indem es umfassende Kontextualisierungen und Gruppierungen vornimmt, die allein in der Lage scheinen, das große Echo dieses Autors sowie die von seinen Texten erzeugten soziokulturellen und politischen Resonanzen zu erklären. So wird etwa die Wahrnehmung der Arbeit Didier Eribons im Zusammenhang mit der Aufnahme des Werks von Annie Ernaux und Édouard Louis in deutschsprachigen Ländern erörtert. Auch wird die literarische Produktivität und der Wirkungsgrad von Eribons Werk im deutschsprachigen Raum u. a. am Beispiel seiner Weiterverarbeitung in anderen Medien, À l’origine du dossier de ce numéro, Transfuge, transfert, traduction: la réception de Didier Eribon dans les pays germanophones d’Elisabeth Kargl et Bénédicte Terrisse (université de Nantes), fut la surprise des éditrices face à l’ampleur du succès rencontré par l’œuvre d’Eribon dans les pays germanophones, notamment Retour à Reims (2009) / Rückkehr nach Reims (2016). Cette surprise était même double compte tenu du décalage temporel du succès de la traduction de ce titre déjà paru en France en version originale sept ans auparavant. Qu’a donc la société allemande de 2016 en commun avec celle de la France de 2009? Ce dossier de lendemains mène l’enquête et explore les causes de l’histoire de cet accueil, dans l’ensemble, inhabituel. À cet effet, il ne se cantonne pas uniquement à des études de réception traditionnelles, qui ne se réfèrent qu’à l’œuvre d’Eribon, mais il élargit considérablement la gamme des approches possibles en entreprenant de vastes contextualisations et des regroupements, qui, à eux seuls, semblent pouvoir expliquer l’importance de l’écho rencontré par cet auteur tout comme la résonance politique et socioculturelle exercée par ses textes. Ainsi, la perception du travail de Didier Eribon est analysée en relation avec la réception des œuvres d’Annie Ernaux et d’Édouard Louis dans les pays germanophones. La productivité littéraire et l’impact de l’œuvre d’Eribon dans l’espace germanophone se mesurent également, entre autres choses, par son adaptation dans d’autres disciplines, par exemple au théâtre par Thomas Ostermeier, et par l’analyse d’„héritiers littéraires“ (Gre- 4 DOI 10.2357/ ldm-2020-0040 Editorial z. B. durch Thomas Ostermeier im Theater bzw. durch die Analyse „literarische[r] Erben“ (Gregor Schuhen) gemessen, Autorinnen und Autoren, die in ihren Arbeiten von Eribon popularisierte Themen, gesellschaftskritische Perspektiven oder autofiktionale bzw. ‚autosoziobiographische‘ Schreibweisen aufgreifen. Fragen sprachlicher Differenz von den Soziolekten in Eribons Werk bis hin zu Übersetzungsfragen spielen in diesem Dossier ebenfalls eine wichtige Rolle. Seine wissenschaftlichen Beiträge werden dabei durch die Wiedergabe einer Diskussion mehrerer Spezialistinnen und Spezialisten bzw. Übersetzerinnen und Übersetzer ergänzt, deren Unterredung u. a. das Potenzial, aber auch die Schwierigkeiten der Übertragung von Eribons Texten in unterschiedliche Kulturräume thematisiert. Am Ende vermittelt dieses Dossier am Beispiel des nunmehr transnational gedachten Werks von Didier Eribon wertvolle Einsichten in Gemeinsamkeiten und Unterschiede gesellschaftlicher Krisenwahrnehmung in Frankreich, im deutschsprachigen Raum und in Europa. gor Schuhen), des auteurs et des autrices dont les travaux reprennent des thèmes popularisés par Eribon, des perspectives socio-critiques ou autofictionnelles ou des écritures ‚autosociobiographiques‘. Pareillement, les questions de la différence linguistique des sociolectes dans l’œuvre d’Eribon tout comme celles liées à sa traduction jouent un rôle essentiel dans ce dossier. De surcroît, ses contributions scientifiques sont étoffées par la retranscription d’un entretien de plusieurs spécialistes et/ ou traducteurs et traductrices, dont la teneur révèle le potentiel mais aussi les difficultés inhérentes au transfert des textes d’Eribon dans d’autres sphères culturelles. Finalement, à l’exemple même de l’œuvre désormais conceptualisée au niveau transnational de Didier Eribon, ce dossier procure des renseignements précieux sur les points communs et les différences dans la perception sociale des crises en France, dans l’espace germanophone et en Europe. Andreas Gelz DOI 10.2357/ ldm-2020-0041 5 Dossier Elisabeth Kargl / Bénédicte Terrisse (ed.) Transfuge, transfert, traduction: la réception de Didier Eribon dans les pays germanophones Quelques hypothèses et scénarios interprétatifs en guise d’introduction Ce dossier, qui a vu le jour dans le contexte de la pandémie de COVID-19 , est le fruit d’un dispositif particulier. Ce qui aurait dû être un colloque organisé à l’université de Nantes du 19 au 20 novembre 2020, avec la collaboration des universités de Düsseldorf et de Vienne, et la participation de chercheuses et chercheurs venant d’Italie, de Suisse, d’Allemagne, d’Autriche et de France, s’est transformé en un projet de publication préparé et nourri par des rencontres scientifiques en ligne sous différents modes et formats, selon diverses temporalités: capsules vidéo ou audio préenregistrées, café ‚zoom‘, table ronde en ligne réunissant en direct traducteurs et traductrices, et enseignant.e.s-chercheurs/ chercheuses devant un public d’étudiant.e.s et d’universitaires. 1 Le projet résulte de l’étonnement devant l’écho rencontré par la figure de Didier Eribon et ses textes dans l’espace germanophone. La parution de la traduction de Retour à Reims (Eribon 2009) en allemand par Tobias Haberkorn en 2016 aux éditions Suhrkamp joue un rôle central dans cette réception (Eribon 2016). Sept ans après la parution du texte original en français, Rückkehr nach Reims est devenu un best-seller dont les ventes s’élevaient à 90 000 exemplaires au bout d’un an. On ne compte plus les interviews de son auteur dans la presse allemande, ainsi que les tables rondes et conférences organisées autour de son œuvre en Allemagne et en Autriche. L’adaptation en série que Thomas Ostermeier en livre pour la scène depuis juillet 2017, dans des versions anglaise, allemande et française, mais aussi italienne 2 et suédoise (à venir en septembre 2021), 3 fonctionne comme une caisse de résonance venant amplifier cette réception. Nous avions alors émis plusieurs hypothèses pour décrire et interpréter le phénomène (Kargl/ Terrisse 2019). La première hypothèse était que le modèle du ‚transfert culturel‘, 4 c’est-à-dire de l’appropriation d’une production issue d’une culture donnée par une autre culture engendrant resémantisations et décalages, pouvait livrer un cadre d’analyse adapté à ce cas de la réception de Didier Eribon outre-Rhin. Nous lisions le triple, et désormais quadruple, voire quintuple spectacle de Thomas Ostermeier, Returning to Reims / Rückkehr nach Reims / Retour à Reims…, comme une réflexion sur les mécanismes d’appropriation en tant que tels, interrogeant dans sa forme même les processus de la comparaison et du transfert. La deuxième hypothèse portait sur le medium. Notre intérêt s’est dirigé vers la très grande transposabilité du texte d’Eribon, le disposant pour ainsi dire à ‚être traduit‘ dans ces autres 6 DOI 10.2357/ ldm-2020-0041 Dossier média que sont le théâtre ou le film. Nous émettions alors l’idée que cette extrême capacité d’adaptation était imputable au statut générique ambigu du texte séminal Retour à Reims, entre autobiographie, ‚auto-sociobiographie‘, ‚auto-analyse‘, analyse sociologique et analyse politique. Cette écriture de l’entre-deux, qui caractérise la plupart des textes d’Eribon, nous apparaissait comme l’un des signes permettant de reconnaître en eux les derniers avatars de la ‚théorie‘, comprise comme forme d’écriture du savoir volontairement distincte des disciplines académiques que sont la sociologie ou la philosophie. La thèse du mode de lecture particulier, ‚emphatique‘, favorisant la circulation, l’usage intensif, l’investissement existentiel de ce type de texte, développée par Philipp Felsch (Felsch 2016) permettait de comprendre la forme „d’identification projective“ dont Eribon, à l’instar d’Annie Ernaux, fait l’objet (Charpentier 2009). Un troisième paramètre important qu’il s’agissait de prendre en compte dans ce mécanisme d’appropriation outre-Rhin était la dimension politique et sociologique de la classe sociale et la question du ‚transfuge de classe‘. Comment interpréter l’adaptation au paysage politique allemand des analyses livrées par Eribon dans Retour à Reims au sujet de la montée de l’extrême droite en France? S’agissait-il d’un malentendu culturel ou au contraire d’une extension au domaine international de la compréhension de la fonction du ‚transclasse‘ - selon la terminologie de Chantal Jaquet (Jaquet 2014) - comme figure paradigmatique de l’intellectuel, et plus précisément: de l’„intellectuel-traducteur nous donnant accès à la partie de la société qui nous est devenue étrangère“, comme l’écrivait Carlos Spoerhase? (Spoerhase 2017: 35). En tout dernier lieu, enfin, nous nous interrogions sur les éventuelles conséquences que ce „voyage“ (Bal 2002) du texte de Eribon à l’étranger et dans d’autres média pouvait avoir sur son retour en France, y voyant un phénomène parent ou héritier de ce que François Cusset a identifié pour le poststructuralisme français: le processus à l’œuvre de la constitution d’une théorie par le détour de l’étranger (Cusset 2005). Les propositions présentées dans ce dossier de lendemains s’inscrivent dans ce champ de questions tout en ouvrant des perspectives inédites. Elles adoptent une méthode tantôt sociologique, tantôt esthétique, philosophique ou traductologique. La notion de ‚transfert culturel‘ cède la place à celle de ‚réception transnationale‘ (Jurt, Rhein), selon la définition qu’en a donnée Pierre Bourdieu (Bourdieu 2002); la réception de Didier Eribon en Allemagne y apparaît intriquée avec celle d’Annie Ernaux (Jurt, Mayer) et son étude inséparable de celle de la réception d’Edouard Louis (Mayer); enfin, le sentiment de la honte (Schaub, Schuhen, Ernst), la question du genre, au sens de Gender (Mayer, Schaub, Ernst, Edy), l’intersectionnalité (table ronde), mais aussi le genre littéraire de l’autofiction (Schaub, Ernst, Hiden) constituent les termes récurrents autour desquels s’articulent les différentes approches représentées dans ce numéro. Le dossier dessine un parcours que nous avons organisé en quatre parties, précédées d’un préambule sous la forme d’un portrait de Didier Eribon en transfuge par Joseph Jurt. La première partie explore les mécanismes, agents et contextes de la réception de Didier Eribon en Allemagne (Jurt, Mayer, Rhein), par-delà le rôle crucial DOI 10.2357/ ldm-2020-0041 7 Dossier joué par le médiateur franco-allemand, et plus largement européen, qu’est Thomas Ostermeier (Pasic 2015). La deuxième partie traite des héritières et héritiers germanophones de Didier Eribon dans le champ de la littérature allemande, comme Daniela Dröscher, Christian Baron, Karin Struck et Bov Bjerg (Schuhen, Schaub, Ernst). La troisième partie présente diverses actualisations allemandes, au théâtre et en philosophie, du lien entre forme et (re)connaissance, inhérent au texte Retour à Reims (Edy, Hiden, Roudaut). Enfin, la quatrième partie du dossier étudie le transfert sous l’angle du passage en langue étrangère, à partir d’une analyse de l’usage des langues chez Didier Eribon lui-même (Biet) et d’une discussion avec Bernard Banoun, Tobias Haberkorn, Yasmin Hoffmann, Christoph Reinprecht que nous avons retranscrite et qui porte notamment sur la traduction allemande de Retour à Reims. Ce dossier est cependant loin de mettre un point final au sujet de la réception d’Eribon dans les pays germanophones, tant l’actualité de cette dernière est en perpétuel renouvellement, prolongeant ses ramifications, trouvant de nouveaux ressorts. 5 Ainsi, la série d’adaptations de Retour à Reims par Ostermeier se poursuit, dessinant un portrait de l’Europe à travers l’histoire de ses inégalités, des violences et conflits sociaux qui l’animent. Confirmant son rôle de passeur dans l’espace germanophone et européen de cette littérature française nourrie de sociologie, articulant les questions de ‚domination‘ et de ‚stigmatisation‘, 6 Ostermeier a adapté pour la scène en 2020 à la Schaubühne de Berlin le roman d’Edouard Louis Histoire de la violence, traduit par Hinrich Schmidt-Henkel sous le titre Im Herzen der Gewalt, ainsi que la même année, en français, au Théâtre de la Ville à Paris, Qui a tué mon père, du même auteur. En juin 2021 à la Schaubühne, il met en scène le premier volume de la trilogie romanesque Vernon Subutex de Virginie Despentes, traduit par Claudia Steinitz. Cette actualité concerne également les domaines scientifique et artistique (Klimpe/ Fellmann 2020) où plusieurs ouvrages témoignent de la réception dans le champ académique germanophone (Ernst) de Retour à Reims (Reuper/ Gamper/ Möller/ Blome 2020) mais aussi des écrits d’Eribon ressortissant aux études sur le genre (Kalmbach/ Kleinau/ Völker 2020). Un autre fil qu’il serait possible de dévider est celui des dynamiques et stratégies à l’œuvre dans les champs éditoriaux nationaux et transnationaux, du rôle des éditeurs, ‚lecteurs‘, au sens allemand du terme, et maisons d’édition dans le passage des textes d’Eribon d’une sphère culturelle à l’autre (Jurt). 7 De même, l’étude et la comparaison des traductions des différents textes de D. Eribon vers l’allemand fourniraient un prolongement intéressant à ce dossier. Enfin, en écho à une remarque d’Eribon, 8 les contributions mettent au jour et commentent davantage la fortune littéraire de Retour à Reims que l’adaptation au contexte allemand ou autrichien de l’analyse politique de la progression du Front National en France, sur laquelle Retour à Reims débouche. Pourtant, analyser, par exemple, la réception est-allemande particulière de Retour à Reims pourrait constituer un développement fertile de ce dossier. Ainsi, une recension parue sous le titre „Rückkehr nach Rostock“ (Schuster 8 DOI 10.2357/ ldm-2020-0041 Dossier 2020) de l’ouvrage Lütten Klein. Leben in der ostdeutschen Transformationsgesellschaft du sociologue Steffen Mau utilisant „sa propre expérience biographique“ pour écrire son „portrait de la société est-allemande“ (Mau 2020: 19) dresse un parallèle explicite avec l’ouvrage d’Eribon. 9 Dans la conversation qu’il mène avec Jana Hensel au lendemain des élections de 2017 qui virent l’entrée de l’ AfD au Bundestag, Wolfgang Engler, sociologue connu pour ses ouvrages sur la RDA , livre ainsi une interprétation supplémentaire du succès de Retour à Reims en Allemagne: Wolfgang Engler: […] In seinem Buch geht es nicht um Ostdeutschland, aber die Erklärungsversuche zur politischen Lage Frankreichs, die er darin offenbart, lassen sich auch in Hinblick auf die Verhältnisse im Osten lesen. Ich traf ihn übrigens am Mittag des Wahltags, und wir redeten über den außerordentlichen Erfolg seines Buches in Deutschland. Ich glaube, der war hier sogar größer als in Frankreich. Das überraschte ihn. Jana Hensel: Vor allem war es ein nachgeholter Erfolg, so etwas gelingt ja nur sehr wenigen Büchern. Wolfgang Engler: Ja, sieben Jahre nachdem es im Französischen erschienen war, kam es im Deutschen heraus. Und war, denke ich, deshalb bei uns so erfolgreich, weil darin ein Prozess verhandelt wurde, der in Frankreich viel früher in Gang gekommen war, nun aber auch Deutschland erreicht hatte. In einem seiner Aufsätze rund um das Buch brachte er das Thema auf den Punkt: „Wie aus Linken Rechte wurden“. Das interessierte die Leute natürlich nach Pegida und dem Aufschwung der AfD. Ein Buch zur rechten Zeit, am richtigen Ort, im Osten, aber auch im Westen. Deshalb wurde das binnen kurzem zum Beststeller. Das ging von Mund zu Mund und von Hand zu Hand. Weit über den Kreis der erwartbaren Leserschaft hinaus, nicht zuletzt aufgrund der persönlichen Note, soziologischen Analyse und Familiengeschichte in einem. […] Die Adaptation des Materials für die Berliner Schaubühne passte zeitlich perfekt zum Wahlgeschehen hierzulande, das war auch so gewollt. Der Abend ist seither komplett überbucht […] (Engler/ Hensel 2018: 12-13). Baillet, Florence / Colin, Nicole / Consolini, Marco, „Édition théâtrale et transferts culturels. Introduction“, in: Florence Baillet / Nicole Colin (ed.), L’Arche Editeur. Le théâtre à une échelle transnationale, Aix-en-Provence, Presses Universitaires de Provence, 2021, 5-13. Bal, Mieke, Travelling Concepts in the Humanities: A Rough Guide, Toronto, University of Toronto Press, 2002. Blome, Eva, „Rückkehr zur Herkunft. Autosoziobiografien erzählen von der Klassengesellschaft“, in: Deutsche Vierteljahresschrift, 94, 2020, 541-571. Bourdieu, Pierre, „Les conditions sociales de la circulation internationale des idées“, in: Actes de la recherche en sciences sociales, 145, décembre 2002, 3-8. Charpentier, Isabelle, „Les réceptions ‚ordinaires‘ d’une écriture de la honte sociale: les lecteurs d’Annie Ernaux“, in: Idées, 155, mars 2009, 19-25. Colin, Nicole, Deutsche Dramatik im französischen Theater nach 1945. Künstlerisches Selbstverständnis im Kulturtransfer, Bielefeld, transcript, 2011. Cusset, François, French Theory. Foucault, Derrida, Deleuze & Cie et les mutations de la vie intellectuelle aux États-Unis, Paris, La Découverte, 2005. Engler, Wolfgang / Hensel, Jana, Wer wir sind. Die Erfahrung, ostdeutsch zu sein, Berlin, Aufbau, 2018. DOI 10.2357/ ldm-2020-0041 9 Dossier Eribon, Didier, Rückkehr nach Reims, trad. Tobias Haberkorn, Berlin, Suhrkamp, 2016. —, „Klassenverhältnisse als Phantoms of Perception. Politik und die Rolle von Kunst in der Gesellschaft. Didier Eribon im Gespräch mit Hanna Klimpe und Benjamin Fellmann“, in: Benjamin Fellmann / Bettina Steinbrügge (ed.), Klassenverhältnisse. Phantoms of Perception, London, Koenig Books, 2021, 227-245. Felsch, Philipp, Der lange Sommer der Theorie. Geschichte einer Revolte 1960-1990, Frankfurt/ Main, Fischer, 2016. Jaquet, Chantal, Les transclasses ou la non-reproduction, Paris, PUF, 2014. —, Zwischen den Klassen. Über die Nicht-Reproduktion sozialer Macht, trad. Horst Brühmann, mit einem Nachwort von Carlos Spoerhase, Paderborn, Konstanz University Press, 2018. Kalmbach Karolin / Kleinau, Elke / Völker, Susanne (ed.), Eribon revisited - Perspektiven der Gender und Queer Studies, Wiesbaden, Springer, 2020. Kargl, Elisabeth / Terrisse, Bénédicte, „Appel à contributions: transfuge, transfert, traduction. La réception de Didier Eribon dans les pays germanophones (Nantes)“, https: / / crini.univ-nantes. fr/ appels-a-communications-call-for-papers/ appel-a-communications-colloque-internationaltransfuge-transfert-traduction%C2%A0-la-reception-de-didier-eribon-dans-les-pays-germa nophones (publié le 4 juin 2019, dernière consultation le 29 juillet 2021). Lagrave, Rose-Marie, Se ressaisir. Enquête autobiographique d’une transfuge de classe féministe, Paris, La découverte, 2021. Lüsebrink, Hans-Jürgen, „Kulturtransfer und Übersetzung. Theoretische Konfigurationen und Fallbeispiele (aus dem Bereich des Theaters)“, in: Ewald Mengel / Ludwig Schnauder / Rudolf Weiss (ed.), Weltbühne Wien - World Stage Vienna, vol. 1: Approaches to Cultural Transfer, Trier, WTV Wissenschaftlicher Verlag Trier, 2010, 21-35. Macheret, Mathieu, „Cannes 2021: Retour à Reims [fragments]: Jean-Gabriel Périot fouille dans les archives de l’inconscient collectif“, in: Le Monde, 12 juillet 2021, www.lemonde.fr/ culture/ article/ 2021/ 07/ 12/ cannes-2021-retour-a-reims-fragments-jean-gabriel-periot-fouille-dansles-archives-de-l-inconscient-collectif_6088034_3246.html (dernière consultation: 29 juillet 2021). Mau, Steffen, Lütten Klein. Leben in der ostdeutschen Transformationsgesellschaft, Berlin, Suhrkamp, 2020 [2019]. Pasic, Patricia, „Ostermeier, Thomas“, in: Nicole Colin / Corinne Defrance / Ulrich Pfeil / Joachim Umlauf (ed.), Lexikon der deutsch-französischen Kulturbeziehungen nach 1945, Tübingen, Narr Francke Attempto, 2015 [2013], 374. Paul, Morten, „Theorieübersetzungen. Die frühen Bücher Jacques Derridas im Suhrkamp Verlag“, in: Internationales Archiv für Sozialgeschichte der deutschen Literatur, 43, Jun 2018, 1, 198-233. Reuper, Julia / Gamper, Markus / Möller, Christina / Blome, Frerk (ed.), Vom Arbeiterkind zur Professur. Sozialer Aufstieg in der Wissenschaft. Autobiographische Notizen und soziobiographische Analysen, Bielefeld, transcript, 2020. Schuster, Nina, „Rückkehr nach Rostock. Rezension zu Steffen Mau (2019): Lütten Klein. Leben in der ostdeutschen Transformationsgesellschaft. Berlin: Suhrkamp. Zusammengelesen mit Didier Éribon (2016 [2009]): Rückkehr nach Reims. Berlin: Suhrkamp. (Übers. aus dem Französischen Tobias Haberkorn)“, in: sub/ urban. zeitschrift für kritische stadtforschung, 8, 1/ 2, 2020, 293-301, DOI: 10.36900/ suburban.v8i1/ 2.562. Spoerhase, Carlos, „Politik der Form. Autosoziobiographie als Gesellschaftsanalyse“, in: Merkur, 71, Juli 2017, 818, 27-37. 10 DOI 10.2357/ ldm-2020-0041 Dossier 1 Une discussion avec la réalisatrice du documentaire autrichien INLAND, Ulli Gladik (non présentée dans ce dossier) clôturait la manifestation en ligne https: / / inland-der-film.at, site consulté le 6 avril 2021. Le sous-titrage en français a été effectué par les étudiant.e.s en master MCCI et APC de l’université de Nantes. 2 www.teatrionline.com/ 2019/ 11/ roma-europa-festival-ritorno-a-reims (consulté le 21 juillet 2021). 3 www.dramaten.se/ repertoar/ tillbaka-till-reims (consulté le 21 juillet 2021). 4 Sur l’adaptation de cette notion au domaine du théâtre, cf. Lüsebrink 2010 et Colin 2011. 5 La relance de la réception française de Didier Eribon à qui, sur France Culture, Antoine Ravon consacre cinq entretiens de l’émission „à voix nue“ en février 2021, n’est peut-être pas sans lien avec cette inépuisable réception germanophone. Le texte de présentation du premier épisode s’ouvre par cette phrase: „Sociologue et philosophe de reconnaissance internationale, Didier Eribon est né à Reims, fils d’ouvrier et de femme de ménage“, www.franceculture.fr/ emissions/ a-voix-nue/ didier-eribon-ecrire-les-vies-deviantes-15-je-mefantasmais-comme-un-futur-philosophe (consulté le 21 juillet 2021). La réception du texte d’Eribon est réactualisée par le succès de l’auto-socioanalyse féministe de la sociologue Rose-Marie Lagrave qui s’inscrit dans et se distancie de l’héritage de Retour à Reims (Lagrave 2021: 8). Enfin, le réalisateur Jean-Gabriel Périot présente au festival de Cannes 2021, dans la „Quinzaine des Réalisateurs“, son film Retour à Reims [fragments] qui „prolonge le texte fondateur du philosophe et sociologue“ (Macheret 2021). 6 Cf. le colloque junior du CIERA intitulé „Les rapports de pouvoir en littérature“, organisé en mai 2021 par Sarah Carlotta Hechler, Claire Mélot et Claire Tomasella en collaboration avec le Centre Marc Bloch à Berlin, www.ciera.fr/ fr/ manifestation/ 16048 (consulté le 21 juillet 2021). 7 L’article de Morten Paul en livre un exemple particulièrement intéressant (Paul 2018). 8 Eribon citant précisément un article allemand: „Retour à Reims a produit de la littérature. Dans un journal allemand, un article a dit que j’avais ouvert des serrures. Depuis, il y a une efflorescence de romans autobiographiques ancrés dans des démarches sociologiques qu’on pourrait appeler - c’est ce que dit le journal! - le ‚genre Eribon‘. Je suis très content d’avoir créé un genre, mais ce qui me frappe, c’est que c’est un genre littéraire“, www. franceculture.fr/ emissions/ a-voix-nue/ didier-eribon-ecrire-les-vies-deviantes-55-je-nestpas-moi (consulté le 29 juillet 2021). 9 Eva Blome (Blome 2020: 542), dans son article très complet, mentionne l’ouvrage de Steffen Mau parmi les exemples récents de traitement de la mobilité sociale par ce qu’elle appelle des „Bildungsaufsteiger“, traduction adaptée au contexte culturel allemand du vocable „transclasse“ ou „transfuge de classe“. DOI 10.2357/ ldm-2020-0042 11 Dossier Joseph Jurt Portrait de Didier Eribon en transfuge de classe Didier Eribon, né en 1963, fait des études de philosophie, comme Pierre Bourdieu, d’abord à Reims et ensuite à Paris. Il travaille ensuite comme critique littéraire à Libération de 1979 à 1983 et puis, à partir de 1984 jusqu’au milieu des années 1990, au Nouvel Observateur. Il fait la connaissance de Pierre Bourdieu en 1979 (Eribon 2013: 45), comme l’auteur de ces lignes (Jurt 2005: 377-385); il n’est pas un disciple du sociologue, mais un interlocuteur avec lequel il reste en contact jusqu’à sa mort („au fil de nos rencontres ou de nos conversations téléphoniques quasi quotidiennes pendant une vingtaine d’années“, Eribon 2013: 45). Il mène plusieurs entretiens avec Pierre Bourdieu qui paraissent dans le Nouvel Observateur, à propos de Homo academicus (Bourdieu 1984: 86-90), La Noblesse d’État (Bourdieu 1989: 80-82), Les Structures sociales de l’économie (Eribon 2000a). En 1992, Didier Eribon publie dans le Nouvel Obs un compte rendu très positif des Règles de l’art. Il relève que pour Bourdieu, „l’explication par l’origine sociale est le contraire d’une bonne sociologie, pour la simple raison qu’elle oublie le plus fondamentalement les choix d’un écrivain: le milieu littéraire qu’il rencontre quand il commence à écrire et dans lequel il lui faut se situer à tout moment de sa carrière, de son travail et de son œuvre“ (Eribon 1992a: 50-51). „Livre majeur, livre inaugural, conclut-il, ces Règles de l’art que nous offre aujourd’hui Bourdieu ne vont pas manquer d’alimenter les débats théoriques dans les années à venir […] il ne sera plus possible de contester à Bourdieu la place qui lui revient dans le cercle très fermé des grands penseurs français d’aujourd’hui“ (ibid: 51). 1 L’activité journalistique permet à Didier Eribon d’avoir un revenu pour se consacrer à des livres portant sur les grands intellectuels de l’époque (Eribon 2009: 234). En 1987, il a publié ses Entretiens avec Georges Dumézil (Eribon 1987; cf. Eribon 1992b), suivis en 1988 des Entretiens avec Lévi-Strauss (Eribon 1988). C’est notamment sa biographie de Michel Foucault (avec lequel il était également lié d’amitié), publiée en 1989, qui fait date et connaît plus de 20 traductions 2 (Eribon 1989), ouvrage suivi de Michel Foucault et ses contemporains (Eribon 1994). En juin 1997, il organise au Centre Georges Pompidou un colloque consacré aux études gays et lesbiennes et à la théorie queer, auquel participe à côté de Monique Wittig également Pierre Bourdieu (Bourdieu 1997: 7-8). 3 Les actes paraissent en 1998 sous le titre Les Etudes gays et lesbiennes (Eribon 1998b). 4 À partir de 1998, Didier Eribon anime un séminaire à l’École des hautes études en sciences sociales sur les études gays, lesbiennes et queer et contribuera ainsi à installer en France ce nouveau champ de recherche. Il publie en 1999 Réflexions sur la question gay, suivi d’Une morale de minoritaire (2001). Il sera professeur invité dans des universités de renom aux États- Unis comme Berkeley ou Princeton et y sera distingué en 2008 par le Brudner Prize de l’université de Yale qu’il décide de rendre en 2011 car le jury a décerné le même prix à l’un de ses plagiaires. 12 DOI 10.2357/ ldm-2020-0042 Dossier Au moment de la mort brutale de Pierre Bourdieu en janvier 2002, il consacre un texte important au grand sociologue sous le titre „L’anti-héritier“ (Eribon 2002: 42- 44). Il y dégage la question clé de la sociologie de Bourdieu: „Qu’est-ce qu’un individu? et comment peut-il conquérir sa liberté contre les mécanismes sociaux qui l’enserrent? “ „On pourrait alors éclairer, écrit-il, de cette lumière ses deux concepts fondamentaux: la théorie de l’habitus, pour appréhender comment l’individu a incorporé les déterminismes sociaux qui le guident, comme un système de dispositions acquises, ses actions, ses choix, ses goûts, et la théorie des ‚champs‘, pour montrer que, dans la mesure où il y a, dans tous les espaces sociaux, des forces qui s’opposent, des luttes, et donc du jeu, il existe toujours de la place pour que naisse quelque chose qui ressemble à ce qu’on appelle d’ordinaire la ‚liberté‘“ (ibid: 44). Eribon a été un des rares à évoquer dans son texte de commémoration l’„intérêt passionné de Bourdieu, autant personnel que scientifique, pour l’art, la musique et la littérature […]. Il vouait […] une véritable dévotion à la littérature: admirateur de Francis Ponge, de Claude Simon et de Thomas Bernhard, il suivait avec ferveur la recherche la plus actuelle et lisait l’Autrichienne Elfriede Jelinek ou les Français Antoine Volodine et Olivier Cadiot“ (ibid.: 43). Eribon ne manque pas de revenir dans son texte à la thématique de la trajectoire des transfuges de classe: „Il m’a souvent dit à quel point la ‚honte sociale‘ lui semblait analogue au sentiment de décalage qu’éprouvent les homosexuels à l’intérieur d’un ordre institué qui les exclut. Dans les deux cas, il est nécessaire de trouver les moyens de penser le malaise pour être en mesure de le dépasser […]. La honte endurcit les caractères, et donne envie à la fois de comprendre et de dénoncer“ (ibid.). 5 Pierre Bourdieu communique à Didier Eribon le manuscrit de son „Esquisse de socio-analyse“ qu’il a écrit entre octobre et décembre 2001, peu avant sa mort. Il confie quelques pages portant sur le passage de Bourdieu au lycée de Pau au Nouvel Observateur. Elles y paraissent comme inédit sous le titre „J’avais 15 ans…“ (Bourdieu 2002b: 46-47, 2004: 117-127). 6 À côté du texte très positif d’Eribon et celui d’un bourdieusien de Berkeley, Loïc Wacquant, 7 il y a dans ce numéro de l’hebdomadaire tout une série de textes de collaborateurs nettement négatifs sur Bourdieu qui à travers une psychanalyse sauvage diagnostiquent chez le sociologue une „névrose de classe“ (Poncet 2002), 8 datant de son origine sociale et s’exprimant par des réactions de ressentiment. Laurent Joffrin cherche ainsi dans son texte intitulé „Celui qui disait non“ à trouver la clé et de l’œuvre et de l’attitude de Bourdieu en évoquant les souvenirs d’„un Petit Chose teigneux cherchant dans ses livres la revanche de ceux que l’on dédaigne“: Entre ces murs trop hauts, il y a le jardin secret d’un mandarin rouge; dans l’étoffe rêche de l’uniforme des pauvres, l’obsession d’un penseur révolté. Cette obsession porte un nom qui fait de l’universitaire péremptoire, du chef de clan calculateur, du philosophe si porté au dogmatisme, du polémiste raide, un homme émouvant, un combattant humain. Ce nom c’est l’humiliation (Joffrin 2002: 40). DOI 10.2357/ ldm-2020-0042 13 Dossier Les propos de Joffrin renvoient aussi à la réaction négative de Jean Daniel qui reproche à la presse une „honteuse vénération“ (Daniel 2002: 38) à l’égard du sociologue. ‚L’explication‘ du destin de Pierre Bourdieu par Jacques Julliard a été encore plus brutale: „Et la jalousie sociale est un vilain défaut“ (Julliard 2002: 39). 9 Sept ans après la mort de Pierre Bourdieu, Didier Eribon revient à son tour à sa jeunesse, à son origine dans un milieu ouvrier dans son livre Retour à Reims. Comme chez Annie Ernaux ou dans Antoine Bloyé de Nizan (Eribon 2009: 26, 2013: 183-202), c’est la mort de son père (ouvrier) qui suscite la réflexion auto-socio-graphique chez Didier Eribon qui thématise la „honte sociale“ - après avoir évoqué et dépassé „la honte sexuelle“ qui pèse sur les homosexuels stigmatisés par l’ordre institué -: „‚[…] Ton père est mort il y a une heure‘. Je ne l’aimais pas. Je ne l’avais jamais aimé […] Je n’ai pas assisté aux obsèques de mon père“ (Eribon 2009: 15, 19). L’auto-sociographie de Didier Eribon est, par sa dimension analytique (ibid.: 22), 10 plus proche de l’Esquisse de Bourdieu que des ouvrages littéraires d’Annie Ernaux portant sur son milieu d’origine. 11 Dans ces trois évocations du trajet de transfuges de classe, il y a pourtant aussi des différences. Si Eribon est sorti d’un milieu ouvrier, les pères de Bourdieu et d’Annie Ernaux avaient déjà effectué une certaine ascension sociale, celui de Bourdieu de métayer à receveur des postes et celui d’Annie Ernaux celle d’ouvrier agricole au propriétaire d’un petit magasin. 12 L’image de la famille d’origine n’est pas négative chez ces deux auteurs, on sent seulement le fossé qui s’est creusé entre le milieu d’origine et le nouveau milieu intellectuel des deux auteurs, un fossé qu’on cherche à combler par l’écriture ou par des recherches. S’il y a chez Eribon une certaine tendresse pour sa mère 13 avec laquelle il est resté en contact, le rapport au père (et aux frères) est nettement négatif: „Rien ne nous attachait l’un à l’autre. […] Il ne m’inspirait aucun sentiment, pas même de compassion. […] Il m’avait engendré, je portais son nom, et pour le reste, il ne comptait pas pour moi“ (Eribon 2009: 15, 16, 18). Cette opposition se fonde sur une méconnaissance de l’option pour les études et notamment la philosophie par le père, ensuite sur l’homophobie et enfin sur un différend politique profond. Les parents et les autres membres de la famille qui se disaient autrefois de gauche votent désormais à l’extrême droite et à droite. Les frères „revendiquaient leur appartenance à la droite - après avoir longtemps voté à l’extrême droite - ne comprenant même pas qu’on puisse s’en étonner: dès qu’ils eurent l’âge de voter, leurs suffrages s’opposèrent à la gauche“ (ibid.: 155). Eribon généralise ce constat familial en déclarant: „Des régions ouvrières, autrefois des bastions de la gauche et notamment du Parti communiste, ont assuré, et continuent d’assurer, une présence électorale significative à l’extrême droite“ (ibid.). Il y a là certainement une évolution historique. Alors que le père de Bourdieu, ayant pourtant grandi dans un milieu rural, vote „très à gauche“ et est inscrit dans un syndicat, la famille d’Eribon évolue dans une direction opposée. Cela est certainement dû au démantèlement d’une culture ouvrière, assurée souvent 14 DOI 10.2357/ ldm-2020-0042 Dossier par les organisations du Parti communiste qui se désagrègent avec la désindustrialisation (Jandi 2006). 14 Même si le jeune Eribon, à travers son engagement gauchiste, doit se solidariser en principe du ‚prolétariat‘, il déteste son ancrage dans le monde ouvrier de ses parents. „Me situer dans le camp du ‚peuple‘ eût sans doute suscité en moi moins de tourments intérieurs et de crises morales si le peuple n’avait pas été ma famille“ (Eribon 2009: 73). 15 En quittant sa famille, Eribon a pu rejoindre à Paris des milieux gays et trouver par eux le contact avec le monde intellectuel et y rencontrer „tous les grands noms de la pensée contemporaine“ (ibid.: 234). Il a su ainsi dépasser la „honte sexuelle“ par cette reconnaissance et l’affronter en plus par le travail théorique. Il parle ainsi de „deux trajectoires interdépendantes de réinvention de [s]oi-même: l’une en regard de l’ordre sexuel, l’autre en regard de l’ordre social“ (ibid.: 28 ). 16 Il se demandera plus tard pourquoi il n’a pas trouvé la même stratégie pour dépasser la „honte sociale“. „Pourquoi moi, qui ai tant éprouvé la honte sociale, la honte du milieu dont je venais quand, une fois installé à Paris, j’ai connu des gens qui venaient de milieux sociaux si différents du mien, à qui souvent je mentais plus ou moins sur mes origines de classe, ou devant lesquels je me sentais profondément gêné d’avoir ces origines, pourquoi n’ai-je jamais eu l’idée d’aborder ce problème dans un livre ou un article? “ (ibid.: 21). 17 Si Eribon s’affronte à la „honte sociale“ relativement tard - il a 56 ans lorsqu’il publie en 2009 Retour à Reims, 18 c’est dû au moment déclencheur de la mort du père; quant aux catégories dont il se sert pour analyser l’ordre social, il les doit surtout à Pierre Bourdieu, qu’il cite, entre autres (ibid.: 123, 124, 184). Mais c’est aussi le récit personnel de Bourdieu au sujet de son expérience de transfuge social qui a inspiré le projet de l’auto-socio-analyse d’Eribon: „J’ai retrouvé dans […] Esquisse pour une auto-analyse une image grossie de ce que j’avais vécu“ (ibid.: 164). Mais en même temps, il reproche à Bourdieu de dire trop peu: Il tait plus de choses qu’il n’en confesse […], 19 il n’explique pas comment il est parvenu à gérer cette tension ou cette contradiction entre l’inaptitude sociale à se conformer aux exigences de la situation scolaire et l’envie d’apprendre et de réussir […]. Il ne mentionne aucun des livres qu’il lisait, ne donne aucun renseignement sur ceux qui comptèrent pour lui ou lui donnèrent le goût de la culture, de la pensée quand il aurait pu sombrer dans un rejet complet de celles-ci, comme semblaient l’y destiner les valeurs populaires sportives et masculinistes auxquelles il ne cache pas qu’il adhère pleinement […]. Quid de la sexualité? L’hétérosexualité va-t-elle de soi au point qu’il serait inutile de la nommer […]? (ibid.: 164-167). Et Eribon s’étonne que Bourdieu se serve inconsciemment du couple binaire ‚sportif‘ vs. ‚esthète‘, classant Foucault dans cette dernière catégorie, sans se rendre compte de la connotation homophobe de cette classification (Eribon 2013: 49). 20 Dans La société comme verdict, Eribon revient plus longuement à l’Esquisse de Bourdieu et lui reproche d’y rester un peu dans la dimension psychologique: „[…] dans Retour à Reims, je pars de ‚moi‘ pour aller vers l’analyse des déterminismes sociaux, lui, dans Esquisse…, n’évoque les déterminismes sociaux que pour aller DOI 10.2357/ ldm-2020-0042 15 Dossier vers lui-même, et vers lui-même en tant qu’auteur […] s’install[ant], selon l’expression d’Assia Djebar, dans la position d’un ‚monarque absolu‘ dans sa propre vie“ (ibid.: 67-68). Mais Eribon ne met nullement en doute le rôle capital qu’une œuvre comme La Distinction a joué, à l’instar de l’Histoire de la folie, pour sa libération: „[…] mes liens avec Bourdieu, et avec son œuvre, m’aidèrent à surmonter, en me permettant de la penser, la honte sociale comme mes liens avec Foucault, et avec son œuvre, m’aidèrent à dépasser, en la thématisant, la honte sexuelle“ (ibid.: 108). Lorsque Retour à Reims paraît en 2009, Le Nouvel Observateur écrit dans un entrefilet: „Philosophe et militant gay, Didier Eribon a longtemps occulté ses origines ouvrières“. 21 Pierre Bourdieu m’a affirmé au cours d’une conversation que la sexualité et l’orientation sexuelle ne constituaient plus un tabou, que l’on pouvait en parler librement. L’origine sociale (‚basse‘) en revanche reste toujours stigmatisée et les gens auraient du mal à en parler. Pierre Bourdieu a cependant dévoilé dans ses analyses les mécanismes de la domination et l’arbitraire de l’ordre social institué. Il a permis ainsi de libérer les gens de l’auto-culpabilisation liée à l’origine sociale. Il m’a expliqué dans ce contexte que beaucoup de personnes s’étaient adressées à lui pour lui dire que grâce à ses analyses ils avaient osé en parler ou écrire. C’est le cas pour Didier Eribon, mais également pour Annie Ernaux, qui a salué chaleureusement Retour à Reims dans les colonnes du Nouvel Observateur. 22 „Plus facile, confirme-t-elle, au sein du monde intellectuel et journalistique dans lequel il est entré, de se dire gay que fils d’ouvrier“ (Ernaux 2009). Et elle constate que „dans un va-et-vient constant entre récit et analyse, Didier Eribon se livre à un admirable déchiffrement socio-historique de son histoire familiale, restituant avec précision toute la réalité ouvrière […]“ (ibid.). Elle relève en même temps toute l’importance de la dimension analytique du livre: „Eribon offre ici un exemple magnifique de la vie éclaircie - affranchie du même coup - par des outils théoriques, dans une démarche d’écriture qui lie étroitement l’intime, le social et le politique“ (ibid.). Les œuvres d’Annie Ernaux, parues dès les années 1980, notamment La place (1983), Une femme (1988), La honte (1997), ont encouragé en effet Eribon à oser son coming out social: J’ai reconnu très précisément ce que j’ai vécu à ce moment-là en lisant les livres qu’Annie Ernaux a consacrés à ses parents et la ‚distance de classe‘ qui la séparait d’eux. Elle y évoque à merveille ce malaise que l’on ressent lorsqu’on revient chez ses parents après avoir quitté non seulement le domicile familial mais aussi la famille et le monde auxquels, malgré tout, on continue d’appartenir, et ce sentiment déroutant d’être à la fois chez soi et dans un univers étranger (Eribon 2009: 28). 23 Didier Eribon ne connaissait pas Annie Ernaux personnellement et c’est seulement après le compte rendu de Retour à Reims dans le Nouvel Obs qu’ils devaient se voir. 24 Par la suite, plusieurs débats publics réunissant les deux auteurs ont eu lieu, dans le contexte du Festival „Paris en toutes lettres“ au ‚Centquatre‘ à Paris, le 12 juin 2010, jusqu’à la rencontre lors de la Foire de Francfort consacrée à la France, 16 DOI 10.2357/ ldm-2020-0042 Dossier le 12 octobre 2017. Le petit livre Retour à Yvetot, évoquant la première conférence qu’Annie Ernaux a prononcée en octobre 2012 dans son lieu d’origine, sonne un peu comme un écho à Retour à Reims (Ernaux 2013). Retour à Reims a rencontré en même temps une grande résonance auprès de la jeune génération, notamment auprès de son élève et doctorant à l’université d’Amiens, Édouard Louis, né en 1992. Après avoir lu Retour à Reims, il évoquera à son tour son trajet de transfuge de classe, n’idéalisant pas non plus son milieu d’origine ouvrier (cf. Meizoz 2014), dans son roman En finir avec Eddy Bellegueule (Louis 2014). 25 Mais auparavant, il a organisé, alors jeune étudiant, le 4 mai 2012, à l’occasion des dix ans de la mort de Pierre Bourdieu, un colloque à l’Odéon-Théâtre de l’Europe, consacré au sociologue, colloque dont il publie les actes l’année suivante sous le titre Pierre Bourdieu. L’insoumission en héritage (Louis 2013). Annie Ernaux y contribue un texte, mais aussi Didier Eribon et - pour la deuxième édition de 2016 - Pierre Bergounioux. Edouard Louis enchaine avec l’affirmation de Bourdieu selon laquelle le sociologue entend, comme l’écrivain, vivre toutes les vies: „Je crois, écritil, qu’un transfuge de classe a de toute façon, à différentes étapes de sa vie, cette sensation d’avoir tout vécu, trop vécu. En tout cas je l’ai eue, car la fuite est longue“ (ibid.: 6-7). 26 Ce n’est pas un hasard si Gisèle Sapiro évoque dans le chapitre „Bourdieu et les écrivains“, dans le Dictionnaire international Bourdieu récemment paru, que sa sociologie a trouvé un écho notable chez des écrivains contemporains transfuges de classe, à commencer par Annie Ernaux, mais aussi Olivier Adam et enfin les écrivains-sociologues Didier Eribon et Édouard Louis (Sapiro 2020: 520-521). Bourdieu, Pierre, „Université: les rois sont nus“ (entretien avec D. Eribon), in: Le Nouvel Observateur, 2-8 novembre 1984, 86-90. —, „‚Le pouvoir n’est plus Rue-d’Ulm mais à l’ENA‘…“ (entretien avec D. 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Weill, Nicolas, „Pierre Bourdieu, sujet du dernier cours de Pierre Bourdieu“, in: Le Monde, 30 mars 2001, 1. 1 Didier Eribon rendra également compte du petit livre Contre-feux dans le même hebdomadaire (Eribon 1998a). 2 Sur ce livre suggéré par Dumézil conçu comme un hommage à Foucault cf. aussi Eribon 2009: 238; cf. en plus Jurt 1990, 1994. 3 Pierre Bourdieu avait cosigné auparavant avec Jacques Derrida, Didier Eribon, Michelle Perrot, Paul Veyne et Pierre Vidal Naquet un texte paru dans Le Monde du 1 er mars 1996 sous le titre „Pour une reconnaissance du couple homosexuel“. Lors de la Marche pour la visibilité homosexuelle fut lu sur le podium, place de la Nation, un message de Bourdieu „En soutien à la Marche de la visibilité homosexuelle“ (Bourdieu 2002a). En octobre 1998, Pierre Bourdieu participa, à côté de Didier Eribon, à une manifestation d’Act Up; cf. la photo dans Les Inrockuptibles, 323, 29 janvier - 4 février 2002, 25. 4 Cf. aussi sur ce sujet Eribon 1999, 2000b. 5 Sur l’expérience de transfuge de classe de Pierre Bourdieu et d’Annie Ernaux cf. Jurt 2017. 6 Sur la polémique suscitée par la pré-publication de cet extrait cf. aussi Eribon 2004. 7 „Bourdieu a su allier la rigueur de la méthode scientifique à l’inventivité de l’artiste, une culture théorique incomparable [...] à une pratique inlassable de la recherche dans laquelle il investissait une libido sciendi sans fin ni fond“ (Wacquant 2002: 44). 8 L’auteur se réfère au livre de Vincent de Gaulejac, La névrose de classe (de Gaulejac 1995). Si Vincent de Gaulejac avait décelé comme source de l’œuvre d’Annie Ernaux „une névrose de classe“, ce terme semble à l’écrivaine „‚figer‘ des conflits et des conduites, qui évoluent, en fait dans le temps“. L’explication freudienne à partir du complexe d’Œdipe ne lui semble pas non plus pertinente: „je ne la nie pas, mais elle ne m’‚intéresse‘ pas: elle n’est pas objet d’expériences, je n’en ai pas ‚souvenir‘ (mais peut-être des images, des DOI 10.2357/ ldm-2020-0042 19 Dossier rapprochements permettent de saisir les conflits œdipiens, au cœur de l’écriture)“ (Lettre d’Annie Ernaux, in: de Gaulejac 1995: 296, 297). 9 Sur l’ensemble des réactions de la presse en 2002 cf. Jurt 2001. Pierre Bourdieu ne comptait pas parmi les ‚amis‘ du Nouvel Observateur. Son œuvre n’a pas suscité de discours de célébration comparables à ceux dont bénéficiaient Roland Barthes, Michel Foucault ou François Furet. Cf. Pinto 2020. Cf. aussi Didier Eribon: „Dès les premiers jours, je me sentis mal à l’aise au Nouvel Observateur. C’est un euphémisme. Et pourtant mon nom allait être associé pendant plusieurs années à ce journal que tout en moi me portait à exécrer […]. Et je considérai dès lors que ce ‚travail‘ ne serait rien d’autre qu’un gagne-pain et j’allais profiter de mon salaire pour écrire des livres“ (Eribon 2009: 235-236). 10 Eribon définit son projet comme une „analyse historique et théorique ancrée dans une expérience personnelle“ (ibid.: 22). Quant à l’Esquisse de Bourdieu, elle est née de son dernier cours professé au Collège de France, auquel j’ai pu assister, où il cherchait, à travers un processus d’objectivation, à appliquer ses concepts à lui-même parlant de lui à la troisième personne („P.B.“), cf. Bourdieu 2001: 184-220). Cf. en plus Weill 2001. 11 La dimension littéraire n’est pourtant pas absente dans le livre d’Eribon qui s’était, selon son témoignage, consacré au cours de la deuxième moitié des années 1980 à deux projets de roman (cf. Eribon 2009: 236-238). „L’écriture d’Eribon, estime Fabien Granjon, est plus littéraire que celle de Bourdieu et, ainsi, s’avère peut-être plus à même de rendre sensiblement compte des violences et des souffrances qu’elle décrit et analyse“ (Granjon 2020). 12 Fabrice Thumerel distingue ainsi transfuges de première génération (Didier Eribon) et transfuges de deuxième génération (Thumerel 2011). 13 Sur son projet d’écrire un livre sur sa mère décédée seule dans un EHPAD en 2018 cf. l’entretien avec Didier Eribon, „Ich will für meine Mutter sprechen“ (Eribon 2019). Cf. aussi dans un entretien récent: „[…] je voudrais étudier dans ce livre [qui sera consacré à la mère] ce qu’est la réalité de la vieillesse, du vieillissement d’une femme qui a été ouvrière, dont le corps a été détruit par la pénibilité et la dureté des conditions de travail. Le vieillissement, le corps souffrant, la maladie, la perte d’autonomie, l’hôpital, la maison de retraite, la mort, ce sont des questions hautement politiques“ (Eribon 2020). 14 En 2002, Le Pen avait totalisé le plus haut pourcentage de voix parmi les ouvriers et les chômeurs. Mais une très grande partie de la classe ouvrière s’était abstenue. Cf. en revanche la réaction de Gérard Mauger: Cette „stigmatisation du peuple mal votant […] renoue - peut-être sans le vouloir et sans le savoir - avec la philosophie conservatrice de la fin du XIX e siècle et sa méfiance des foules et de la démocratie.“ Si l’on intègre dans l’analyse les non inscrits et les abstentionnistes, seule une petite minorité (un sur sept) aurait voté lors des derniers scrutins pour le FN; cf. Mauger/ Pelletier 2016: 37. 15 Cf. à ce sujet aussi Fabien Granjon: „La lecture de Retour à Reims, ne nous renseigne toutefois […] que peu sur ce que son auteur a malgré tout conservé de sa socialisation primaire. Si Eribon décrit fort bien son statut de transfuge de classe, très peu de détails nous sont livrés quant à ce qu’il conserve comme trace active de son passé. Ce manque dit en creux ce qu’il en coûte à l’auteur d’avoir à se désaligner, ne serait-ce que momentanément, d’avec sa classe de ralliement“ (Granjon 2020). Dans un entretien récent, Eribon insiste sur le fait que le trajet d’un transfuge de classe ne relève pas du miracle, mais est loin d’aller de soi: „Je n’ai pas obtenu le CAPES ni l’agrégation, j’ai été obligé d’abandonner ma thèse parce que je n’avais pas d’argent… Mon parcours de transfuge de classe est scandé par une série d’échecs qui m’ont obligé, à chaque fois, à recomposer mes aspirations, à réorienter mes choix […]. Il est important de comprendre en quoi la trajectoire de 20 DOI 10.2357/ ldm-2020-0042 Dossier transfuge de classe n’est pas linéaire, mais plutôt une série d’étapes dans lesquelles des difficultés, des échecs, des troubles de l’inscription sociale se présentent et imposent de réagir différemment, de se positionner différemment… C’est tout cet ensemble de phénomènes complexes que j’ai essayé de déplier et d’exposer dans Retour à Reims“ (Eribon 2020). 16 Pour des auteurs homosexuels comme Eribon et Édouard Louis, le coming out sexuel a permis ou facilité le coming out social. Dans les récits de transfuges hétérosexuels, la dimension du genre n’est cependant pas prise en compte. Rose-Marie Lagrave souligne que pour des transfuges de classe féminins, la dimension du genre ne permet pas une libération mais implique une double domination: „Doublement dominées en raison de leur genre et de leur classe sociale, elles [les femmes transfuges] ne peuvent défier ni même entrer en concurrence avec des ‚doublements‘ dominants“. Et l’auteure cite l’exemple de la sociologue Yvette Delsaut qui ne pouvait à l’époque évoquer sa propre trajectoire de transfuge que sous un pseudonyme (cf. Delsaut 2020). Et Rose-Marie Lagrave continue: „Introduire la perspective de genre m’a permis d’avancer à visage découvert, et d’ouvrir enfin la catégorie des transfuges de classe, en montrant que le travail sur soi et sur sa trajectoire est lui aussi divisé: il faut reconnaître une division du travail sexuée, sexualisée, différenciée selon la classe d’origine, et marquée par l’empreinte de l’âge“ (Lagrave 2021: 17-18). 17 Sur le sujet de la honte cf. aussi l’excellente thèse d’Agnieszka Komorowska, Scham und Schrift. Strategien literarischer Subjektkonstitution bei Duras, Goldschmidt und Ernaux, (Komorowska 2017); cf. aussi Martin 2017. 18 2009 est également une date importante dans la carrière universitaire de Didier Eribon. Il obtient l’habilitation à diriger des recherches à l’université de Paris I Panthéon-Sorbonne, pour être nommé la même année professeur à la Faculté de philosophie et de sciences humaines et sociales de l’université d’Amiens. Il y revient à la fin de Retour à Reims: „il m’avait semblé tout naturel d’entreprendre les démarches nécessaires pour entrer dans l’université française. Mes livres et mes enseignements américains m’y donnaient droit. Après un long détour, je retrouvai donc ces espaces que j’avais dû quitter à la fin des années 1979 […]. J’y suis aujourd’hui professeur […] ma mère […] me demanda, émue: Et tu vas être prof de quoi? De philosophie? - De sociologie, plutôt“ (Eribon 2009: 247-248). 19 On pourrait objecter que Bourdieu ne suivait nullement la volonté rousseauiste de „tout dire“. D’autre part, il était très sceptique à l’égard du genre autobiographique, construisant une vue linéaire. Ce qui lui importait beaucoup plus, c’était l’insertion dans le champ. Pour cette raison, il ne suivait pas un ordre chronologique dans son Esquisse. Cf. à ce sujet sa position: Pierre Bourdieu, „L’illusion biographique“, in: Actes de la recherche en sciences sociales, 62-63, juin 1986, 69-72. 20 Bourdieu aimait le rugby, il avait même écrit une „Introduction“ au Grand livre du rugby français 1981-1982 (Belleville [Rhône], F.M.T. Éditions, 1981, 7) et il s’intéressait au foot ; cf. Bourdieu 1994: „J’ai pratiqué un peu tous les sports, mais je suis plus rugby que foot…“. Cf. aussi „Les enjeux du football“, in: Actes de la recherche en sciences sociales, 103, juin 1994. Mais cette prédilection pour le rugby chez Bourdieu était due à son origine béarnaise et ne traduisait, me semble-t-il, guère une attitude ‚masculiniste‘, d’autant plus qu’il était également ‚esthète‘ aimant la musique et rêvant à une carrière de directeur d’orchestre. Cf. aussi la réaction critique d’Eribon face à l’empathie de Bourdieu avec deux garçons d’une cité de banlieue qui n’hésitaient pas à user d’une certaine violence à l’égard de femmes blanches jugées racistes. „Il reconnaissait en eux quelque chose de sa jeunesse. Moi non, DOI 10.2357/ ldm-2020-0042 21 Dossier au contraire! “ (Eribon 2013: 49). Au sujet de la sociologie du sport de Bourdieu en général cf. Schotté 2020. 21 Le Nouvel Observateur, 22 octobre 2009. 22 C’est notamment dans un entretien accordé à Isabelle Charpentier qu’Annie Ernaux a expliqué tout ce qu’elle devait à la sociologie de la domination de Pierre Bourdieu. Après avoir rencontré dans Les Choses de Perec en 1965 „une autre idée de la littérature“, elle lut en 1972 les deux ouvrages de Pierre Bourdieu et de Jean-Claude Passeron, Les Héritiers (1964) et La Reproduction (1970) ainsi que L’Ecole capitaliste en France (1971) de Christian Baudelot et Roger Establet. Avec Les Héritiers elle avait le sentiment de „découvrir quelque chose de l’ordre de la vérité ontologique, vitale, une parole qui se fonde sur presque toute votre vie.“ La lecture exerce une „violence libératrice“ et produit „un vrai arrachement à soi“: „Toutes les croyances sur lesquelles on a fonctionné avant, sur lesquelles on a bâti sa vie, son avenir, son projet d’existence, tombent brusquement. C’est un voile qui se déchire“ (Ernaux 2005). 23 Cf. aussi p. 55, 85 (à propos d’Une femme), p. 243 (à propos des Armoires vides), p. 244 (à propos de Les années). Dans La société comme verdict, il consacrera tout son chapitre II à l’auteure de La Place: „En lisant Ernaux“ (Eribon 2013: 103-180). 24 „C’est vrai que Annie Ernaux m’a beaucoup aidé à écrire mon livre [Retour à Reims] (Je vais dire: ses livres car je ne la connaissais pas jusqu’à présent et je viens de la rencontrer après le compte rendu qu’elle a publié sur Retour à Reims.“ (Lettre personnelle de Didier Eribon à l’auteur, 20 janvier 2010). 25 Cf. la publication récente du livre sur sa mère, Combats et métamorphoses d’une femme (Louis 2021). L’auteur y montre comme Annie Ernaux qu’une première distance s’est créée lorsqu’il se servait, lycéen, à dessein d’un langage bourgeois qui n’était pas celui de sa mère. 26 Édouard Louis relève „l’apparition d’une parole de plus en plus prolixe de transfuges dans la littérature depuis la fin du XX e siècle, depuis Bourdieu en passant par Toni Morrison, Didier Eribon ou Justin Torres […]“ (ibid.: 18-19). 22 DOI 10.2357/ ldm-2020-0043 Dossier Joseph Jurt Note au sujet des mécanismes de la réception transnationale L’exemple de Didier Eribon et d’Annie Ernaux En 1989, Pierre Bourdieu prononce à Fribourg lors de l’inauguration du Frankreich- Zentrum sa conférence „Les conditions sociales de la circulation internationale des idées“, qui eut une grande résonance 1 (Bourdieu 1990). Dans ce texte, Bourdieu se sert à bon escient d’une terminologie économique - un peu comme les chercheurs se réclamant du paradigme du transfert culturel - quand il parle de l’importation ou de l’exportation des idées afin d’échapper à une vision idéalisatrice. Il s’oppose à l’idée que la vie intellectuelle serait spontanément internationale. Comme tous les autres espaces sociaux, elle est, à ses yeux, travaillée par des nationalismes ou des impérialismes se fondant sur des préjugés, des stéréotypes, des idées reçues, des représentations sommaires. L’échange international des idées est, selon lui, soumis à un certain nombre de facteurs structuraux qui sont générateurs de malentendus. D’abord les textes circulent souvent sans leur contexte. Comme les chercheurs en transferts culturels, Bourdieu constate que les textes sont interprétés selon la logique du champ d’accueil. Le fait que les textes circulent sans leur contexte, qu’ils n’importent pas avec eux le champ de production […] dont ils sont le produit et que les récepteurs, étant eux-mêmes insérés dans un champ de réception, les réinterprètent en fonction de la structure du champ de réception, est générateur de formidables malentendus (Bourdieu 2004: 23). La forme et la fonction de l’œuvre importée sont déterminées au moins autant par le champ d’accueil que par le champ d’origine. Car le transfert d’un champ à l’autre est marqué par toute une série d’opérations sociales: d’abord par un processus de sélection (Qu’est-ce qu’on traduit? Qui traduit? Quelle maison d’édition publie le texte? ), ensuite par un processus de marquage (dû à la renommée de la maison d’édition, du traducteur, du préfacier), enfin par un processus d’interprétation (les lecteurs appliquent à l’œuvre des catégories de perception et des problématiques propres à leur champ). Bourdieu montre ici que les importations d’œuvres externes sont parfois instrumentalisées pour des desseins internes: „Très souvent, avec les auteurs étrangers, ce n’est pas ce qu’ils disent qui compte, mais ce qu’on peut leur faire dire. C’est pourquoi certains auteurs particulièrement élastiques circulent très bien“ (ibid.: 26). La lecture sur la base de critères internes peut conduire à des altérités ou oppositions purement fictives: Les différences sont si grandes entre les traditions historiques, tant dans le champ intellectuel proprement dit que dans le champ social pris dans son ensemble, que l’application à un DOI 10.2357/ ldm-2020-0043 23 Dossier produit culturel étranger des catégories de perception d’appréciation acquises à travers l’expérience d’un champ national peut créer des oppositions fictives entre des choses semblables et des fausses ressemblances entre des choses différentes (ibid.: 28). Les champs nationaux et leurs catégories ont souvent, lors du processus de réception, la fonction d’un „prisme déformant“ (ibid.: 29). Afin d’éviter les malentendus, les méconnaissances ou les instrumentalisations, il importe, selon Bourdieu, de rendre conscient à travers une anamnèse historique la genèse des catégories de perception et d’interprétation à partir de l’histoire des systèmes d’enseignement et de disciplines universitaires respectifs: à travers un tel travail d’Aufklärung, on pourrait contribuer au dépassement d’un nationalisme intellectuel et à un dialogue qui ne sera plus déterminé par les seuls intérêts du champ d’accueil. La théorie du champ se révèle être un instrument théorique précis pour saisir les formes et les intérêts de l’introduction de telle ou telle œuvre littéraire ou philosophique. Bourdieu se consacre aux processus de réception de l’après-guerre et de l’ère actuelle, et il est convaincu que le nationalisme intellectuel est loin d’être totalement dépassé. À partir des hypothèses de Bourdieu, on peut s’interroger sur les facteurs qui ont contribué à la réception si intense de Retour à Reims en Allemagne qui y paraît en 2016, sept ans après la parution de la version française. La réception n’a donc pas été immédiate. Ce qui a pu jouer un rôle, c’est certainement la maison d’édition, Suhrkamp. Cette maison jouit en Allemagne d’un capital symbolique très élevé. La maison édite les représentants importants de la pensée critique. Pierre Bourdieu dont les catégories d’analyse ont joué un rôle important pour Eribon a été également édité par Suhrkamp. Il faut cependant se demander qui a été le gate-keeper dans la maison d’édition. Qui a proposé à l’intérieur de la maison la traduction du livre paru en France chez Fayard (cf. Jurt 2009, 2020)? D’abord, les conditions historiques spécifiques en Allemagne ou plutôt les prises de conscience des structures sociales n’y sont pas identiques. Le sociologue allemand Franz Schultheis souligne ainsi qu’Annie Ernaux avait développé dès les années 1980 - parallèlement aux analyses de Bourdieu, dans La Distinction - une vue littéraire de la société de classes en France. Alors que ces deux auteurs faisaient partie du répertoire standard de la vie intellectuelle en France, la sociologie du mainstream allemande célébrait la fin d’une société de classes et l’idée de l’ascenseur social pour tous. Ce n’est que de nos jours, quatre décennies plus tard, selon lui, que l’on se rend compte en Allemagne de l’inégalité sociale croissante ainsi que de l’inertie des mécanismes de la reproduction sociale (Schultheis 2020). Dans un entretien accordé à Pascal Jurt, Didier Eribon défend une thèse similaire: Je crois qu’il y a deux raisons à cet écho rencontré par mon livre en Allemagne. La première, c’est que je décris comment des secteurs entiers des classes populaires françaises qui votaient autrefois pour la gauche se sont mis peu à peu à voter à droite et à l’extrême-droite. C’est un phénomène qui avait commencé de se dessiner dans les années 1980 et 1990 - et qui s’est amplifié par la suite - et j’ai voulu relier ce que je pouvais constater dans ma propre 24 DOI 10.2357/ ldm-2020-0043 Dossier famille à ce qui passait de manière de plus en plus insistante et de plus en plus massive à chaque élection. Cela m’a permis d’en proposer une analyse plusieurs années avant que des processus similaires ne se développent dans d’autres pays, et notamment en Allemagne. La deuxième raison, imbriquée dans la première, c’est que la question des „classes sociales“ avait largement disparu du débat politique mais aussi du débat intellectuel et que beaucoup de lecteurs ont senti que c’était une dimension nécessaire à toute compréhension non seulement du fonctionnement du monde social en général, mais aussi de la constitution des subjectivités individuelles, des subjectivités collectives, des subjectivités politiques - j’ai reçu de nombreux témoignages en Allemagne ou en Autriche comme cela a été le cas en France me disant: „Je me suis reconnu dans ce que vous écrivez“, „C’est de ma famille et de mon histoire que vous faites le portrait“. Mon livre a beaucoup été lu en Allemagne, en Autriche aussi, comme un livre avant tout politique. Je ne veux surtout pas démentir cette lecture. Bien au contraire. Mais il convient cependant d’entendre „politique“ en un sens très large de regard sur le monde social, sur les modes de domination, les formes d’oppression, etc. 2 Pascal Jurt relève qu’on ne trouve pas dans le champ littéraire allemand de représentants d’une littérature évoquant la ‚honte sociale‘ comme c’est le cas chez Annie Ernaux ou François Bon ou Pierre Bergounioux. Aussi interroge-t-il Eribon sur les raisons qui expliquent l’absence d’une telle littérature en Allemagne. „Disons que c’est une ‚évidence‘ redécouverte par les lecteurs, après avoir été longtemps occultée“, répond Eribon, „ou même niée par les discours conservateurs de droite et de gauche. Quand on redécouvre une évidence cachée, cela produit un effet d’illumination. On comprend des choses que l’on percevait confusément mais qu’on avait du mal à saisir. C’était également le cas en France: j’ai entrepris d’écrire ce livre comme une ‚auto-analyse‘ à travers laquelle je pourrais, à partir de mon histoire personnelle et celle de ma famille, élaborer un cadre de pensée qui soit à la fois théorique et politique. Ce livre est une intervention dans le champ de la théorie et dans le champ de la politique contemporaines. Quand il est sorti en France, il y a quelques années, l’accueil a été à peu près le même qu’en Allemagne. Mais il est vrai qu’il y avait déjà une tradition de textes ‚socio-biographiques‘ ou ‚socio-analytiques‘, par exemple les romans d’Annie Ernaux en effet, ou le petit livre posthume de Pierre Bourdieu. Et si aujourd’hui Retour à Reims donne envie à des auteurs d’écrire des textes, des livres, des romans, des essais, des pièces de théâtres, auto-analytiques, j’en serai ravi (ibid.). C’est vrai qu’Annie Ernaux n’est pas très connue en Allemagne avant la parution de Retour à Reims. La place (1983) est publié chez Bertelsmann en 1986 sous un titre peu adéquat (Das bessere Leben) (Jurt 1987). Plusieurs livres d’Annie Ernaux paraissent chez Goldmann, maison d’édition qui ne se distingue pas nécessairement par la qualité littéraire, parfois avec des sous-titres destinés à un public de masse: Gesichter einer Frau (2007) pour Une Femme (1988), Eine vollkommene Leidenschaft. Die Geschichte einer erotischen Faszination (2004) pour Passion simple (1991), Sich verlieren: die Geschichte einer Obsession (2003), pour Se perdre (2001). Ce n’est qu’en 2017 qu’une première œuvre d’Annie Ernaux paraît chez Suhrkamp: Die Jahre pour Les années avec une nouvelle traductrice (Sonja Finck). Depuis, Suhrkamp réédite chaque année dans une nouvelle traduction l’un des livres DOI 10.2357/ ldm-2020-0043 25 Dossier de l’auteure parus en France au cours des années 1980. Annie Ernaux connaît aujourd’hui une réception tout à fait différente. La traduction des Années chez Suhrkamp a été publiée un an après Retour à Reims. J’ai formulé l’hypothèse que c’est Eribon qui a suggéré à sa maison d’édition allemande de s’intéresser à Annie Ernaux. „Je ne me souviens plus des détails“, m’écrit-il au sujet de mon hypothèse, avant de poursuivre: „Et je ne sais plus comment la publication des Années et la réédition de livres plus anciens d’Annie Ernaux se sont faites“. 3 Mais c’est certain que le succès de Retour à Reims a eu un impact non négligeable sur la deuxième réception d’Annie Ernaux en Allemagne: Mais c’est en effet après la publication de Retour à Reims en Allemagne et parce que je la cite beaucoup dans mes livres et que je l’ai souvent citée dans des interviews ou rencontres publiques que Suhrkamp a décidé de lui donner la visibilité qu’elle mérite. J’ai fait un dialogue public avec elle lors de la Foire du livre de Francfort au cours duquel j’ai dit ma dette à son égard. Et j’ai fait un blurb pour la réédition de La Place. Donc oui mes livres ont joué un rôle dans le succès qu’elle rencontre aujourd’hui dans le monde germanophone et je suis heureux d’avoir contribué à cette formidable reconnaissance de son œuvre. En même temps il ne faut pas trop m’attribuer son succès allemand car ce succès est surtout lié à la très grande qualité de ses livres. Elle est une auteure qui a beaucoup compté pour moi et je lui ai rendu hommage à de nombreuses reprises pour exprimer mon admiration et dire ma dette à son égard. Même si les hasards des phénomènes éditoriaux ont fait que je l’ai d’une certaine manière précédée en Allemagne, la réalité historique reste qu’elle m’a précédé, qu’elle nous a tous précédés. 4 Bourdieu, Pierre, „Les conditions sociales de la circulation internationale des idées“, in: Romanistische Zeitschrift für Literaturgeschichte / Cahiers d’Histoire des littératures romanes, 1-2, 14, 1990, 1-10. —, Actes de la recherche en sciences sociales, 145, décembre 2002, 3-8. —, Forschen und Handeln. Recherche et action. Conférences prononcées au Frankreich- Zentrum de l’Université de Fribourg en Br. (1989-2000), ed. Joseph Jurt, Fribourg-en- Brisgau, Rombach, 2004, 21-34. Eribon, Didier, „Eine Internationale der Progressiven aufbauen“, propos recueillis par Pascal Jurt, in: stadtrevue [Cologne], mars 2017, 21-22. Jurt, Joseph, „‚Ein Klassenunterschied, aber besonderer Art‘. Zu Annie Ernaux’ Erzählung ‚Das bessere Leben‘“, in: Vaterland [Lucerne], 21 avril 1987. —, „Transnationale Literatur-Rezeption. Am Beispiel der Aufnahme Jean-Luc Benoziglios im deutschsprachigen Raum“, in: Arcadia, 2, 44, 2009, 376-399. —, „La réception littéraire transnationale. Transnational literary reception“, in: REPOCS - Revista Pós Ciências Sociais [UFMA, S-o Luís], 17, 34, juillet/ décembre 2020, 235-269, version électronique: DOI: 10.18764/ 2236-9473.v17n34p253-270. Schultheis, Franz, „Das Ethos des Forschers“. Das Vermächtnis des Soziologen Pierre Bourdieu, propos recueillis par Jens Kastner, in: jungle word, 31, 30 juillet 2020, 10-13. 26 DOI 10.2357/ ldm-2020-0043 Dossier 1 Reprise in: Actes de la recherche en sciences sociales, 145, décembre 2002, 3-8 et dans Pierre Bourdieu, Forschen und Handeln. Recherche et action. Conférences prononcées au Frankreich-Zentrum de l’Université de Fribourg en Br. (1989-2000), ed. Joseph Jurt, Fribourg-en-Brisgau, Rombach, 2004, 21-34. 2 Version française de l’entretien Didier Eribon, „Eine Internationale der Progressiven aufbauen“, propos recueillis par Pascal Jurt, in: stadtrevue [Cologne], mars 2017, 21-22. 3 Courriel de Didier Eribon à l’auteur, 28 novembre 2020. 4 Ibid. DOI 10.2357/ ldm-2020-0044 27 Dossier Christoph Oliver Mayer „Dreifach hält besser“ Zur indirekten Rezeption Didier Eribons über die Werke von Édouard Louis und Annie Ernaux Didier Eribons autobiographischer Text Retour à Reims, der 2009 erstmals auf Französisch erschienen ist, wurde erst im Jahr 2016 in deutscher Übersetzung veröffentlicht (Eribon 2009, 2016) und entfaltete zu diesem Zeitpunkt eine gewisse Öffentlichkeitswirksamkeit, weil er den damals virulenten Erfolg rechtspopulistischer Parteien in Frankreich und Deutschland für ein linkes Publikum zufrieden stellend erklärte. Noch mehr Jahre, nämlich ganze 20, trennen die Erstausgabe der Réflexions sur la question gay und ihre deutsche Erstübersetzung (Eribon 1999, 2019). Bedingt durch die Verankerung in der französischen Kulturgeschichte und durch den langen Zeitraum, der auch schon seit der Neuauflage im Jahr 2012 verstrichen war, verwundert das Unverständnis nicht, das deutsche Rezensent(inn)en über die Betrachtungen zur Schwulenfrage äußerten. Dierk Saathoff schreibt summarisch, in einer allerdings im Großen und Ganzen doch sehr wohlwollenden Online-Rezension, in diesem Werk „zeigt sich Didier Eribon zwischen der Queer Theory, der Schwulenbewegung, der Soziologie und Michel Foucault so sehr hin- und hergerissen, dass ihm kaum ein folgerichtiger Gedanke gelingt“ (Saathoff 2020). Wer wie Didier Eribon als profunder Kenner der Werke Michel Foucaults und Pierre Bourdieus gilt, weiß sicherlich sehr wohl um die besondere Schwierigkeit der Rezeption soziologischer Werke, wie sie sich für die deutschsprachige Rezeption angesichts der noch hinzukommenden zeitlichen wie räumlichen (und sogar noch sprachlichen) Distanz auftut. Er wird sich aber auch bewusst sein, dass er selbst als Kultursoziologe im fortgeschrittenen Alter, zumal homosexuell, nur bis zu einem gewissen Grad Aufmerksamkeit für seine Themen erzielen kann, und zwar dann, wenn er die eigene Person in den Mittelpunkt rückt und sich als beklagenswertes Opfer im Zeichen der Scham inszeniert oder auf aktuelle politische Diskurse konkrete gern gehörte oder provokante Antworten parat hat. Noch erfolgreicher aber wäre er doch sicher, wäre er jung, weiblich, gutaussehend und charismatisch, im Optimalfall mit eigenem youtube-Kanal. Eribon hat dieses Dilemma jedoch anders gelöst, als er in La Société comme verdict eine Schule der literarischen Hontologie ausgemacht (Eribon 2013, 2017) und gefördert hat, die den Grundideen seines eigenen Werks eine breitere Rezeption gestattet. 1 Diese ‚Schule‘ besteht hauptsächlich aus den beiden im Weiteren näher betrachteten Erfolgsautoren Annie Ernaux und Édouard Louis. 28 DOI 10.2357/ ldm-2020-0044 Dossier 1. Der Eribon-Schüler Édouard Louis 1953 in Reims in eine typische Arbeiterfamilie hineingeboren, die Mutter eine Putzfrau, der Vater ein Fabrikarbeiter, beide Elternteile Wähler des Parti communiste, erfährt er selbst Beleidigungen aufgrund seiner Homosexualität, gelangt aber als einziger Akademiker in seiner Familie zum Studium nach Paris etc. Liest man unvoreingenommen den Debütroman von Édouard Louis, En finir avec Eddy Bellegueule / Das Ende von Eddy (Louis 2014, 2015), so könnte man den Eindruck bekommen, dass dieser Roman genau der eben skizzierten Biographie entspricht, welche jedoch Didier Eribons Leben gemäß dem Plot von Retour à Reims beschreibt. Diese Parallelität verwundert zwar ob des gehörigen Altersunterschieds zwischen dem 1992 in der Picardie geborenen Édouard Louis und dem fast 40 Jahre älteren Eribon. Es verblüfft allerdings weniger, wenn man die Widmung von En finir avec Eddy Bellegueule zu Rate zieht, wo Edouard Louis wiederum Retour à Reims als Initialzündung seines eigenen Werkes bezeichnet und damit seinem Freund Didier (Eribon) Respekt bekundet. Und es unterstreicht eine zentrale Botschaft Eribons: Proletarische Schwule aus der Provinz müssen weiterhin, auch noch im 21. Jahrhundert, ihr Heil in der Stadt suchen, sich von ihrer Familie distanzieren; sie erfahren jedoch durch ihr Schwulsein eine besondere alternative Möglichkeit der Intellektualisierung und Kulturalisierung. Sie erleiden oft Beleidigungen und körperliche Angriffe, werden also zu Opfern, sind früh sexualisiert und laufen Gefahr, sich in die passive Opferrolle drängen zu lassen oder aber unfreiwillig eine effeminierte Rolle einzunehmen - allesamt Argumente, die Eribons Réflexions sur la question gay bereits 1999 theoretisch entfaltet haben und die 15 Jahre später in En finir avec Eddy Bellegueule genauso wieder aufscheinen. Nun sind es aber nicht nur die Denkmuster, die das schwule Leben skizzieren, sondern es geht in Retour à Reims wie in En finir avec Eddy Bellegueule beide Male insbesondere um die proletarische Herkunft. Die besondere Prädisposition Homosexueller verschärft nur die Schieflage, die (nicht nur) in der französischen Gesellschaft zwischen den Klassen existiert. Wenn Didier Eribon in den Réflexions sur la question gay (Eribon 2019: 80) betont, dass der Aufstieg für Schwule in sozialen und künstlerischen Berufen nicht verwunderlich sei, zumal sie in diesen gesellschaftlichen Bereichen kaum Widerstände überwinden müssten und sie geradezu von der Gesellschaft dort hinein gedrängt würden, so heißt das andererseits: Es ist viel wahrscheinlicher, dass ein solcher Aufstieg Homosexuellen gelingt als (heterosexuellen) ‚Proletariern‘. Und der Logik des Bourdieu’schen Feldforschers folgend, der die Strukturen der Gesellschaft sehr gut kennen und durchschauen muss, wird in den Romanen das autobiographische Beispiel von schwulen Kindern bzw. Jugendlichen aus proletarischen Familien deshalb herangezogen, weil es ihnen diese Gesamtkonstellation ermöglicht, sowohl aus der Warte des betroffenen proletarischen Familienmitglieds zu schreiben als auch durch die besondere Chance der Homosexualität diese leichter zu überwinden und sie dadurch zu ergründen, theoretisch zu fassen und in einen literarischen Text zu transformieren. DOI 10.2357/ ldm-2020-0044 29 Dossier Betrachtet man den zweiten Roman von Édouard Louis, Histoire de la violence (dt. Im Herzen der Gewalt; Louis 2016 bzw. 2017), so fällt hier wiederum die Kombination aus realweltlicher persönlicher Bindung und intellektueller Verbundenheit auf. Didier (Eribon) erscheint textintern zusammen mit seinem jüngeren Lebensgefährten Geoffroy (de Lagasnerie) als das Freundespaar, bei dem der Protagonist Édouard Zuflucht nach seiner Vergewaltigung sucht, wobei die realweltliche Übertragung der Figur mit dem Vornamen Didier auf den Freund und Schriftstellerkollegen durch einen Dank im Paratext vom Autor explizit hergestellt wird. Zudem erkennt man im Werk eine Gesellschaftsanalyse, deren Bezug zu Bourdieu dort am deutlichsten hervortritt, wo auf die Kabylei als Ursprung des Vergewaltigers hingewiesen wird, jene Region, in der Bourdieu ja seine Soziologie begonnen hatte (Bourdieu 1958). Diese Verwandlung der hinter der Geschichte stehenden lebensweltlichen Realität, in welcher der von Édouard Louis angezeigte Täter tatsächlich Marokkaner war (Robert- Diard 2016), spricht Bände. Wo der Protagonist als Alter-Ego des Autors seine soziologischen Analysen in die Gedanken über das Handeln des Vergewaltigers integriert, ja sogar Rechtfertigungen für dessen Tun in seiner sozialen Schieflage und schwierigen Vergangenheit findet, tangiert er im Grunde den blinden Fleck der soziologischen Feldforschung, der darin besteht, dass diese zwar den Habitus der anderen lesen kann, aber vielleicht aus politischer Überzeugung daraus keine selbstschützenden Konsequenzen ziehen will. Der Text bzw. das Gesamtwerkt von Édouard Louis atmet allerdings nicht nur den Geist Bourdieus als gemeinsamen Referenzpunkt der literarischen Hontologie, sondern wirkt darüber hinaus durchaus als eine Fortsetzung bzw. Antwort darauf, was Didier Eribons Betrachtungen zur Schwulenfrage offenlassen oder nicht thematisieren wollten, und zwar in Gestalt von Aussagen zur schwulen Community heute: Sexdates, One-Night-Stands, Aids-Prävention etc. Diesbezüglich, also für die Kontinuität des Eribon’schen Werks, der sich vor allem auf literarische Referenzen wie Marcel Proust, André Gide und Jean Genet, aber auch auf Oscar Wilde, Michel Foucault und Hannah Arendt stützt, ist bei Edouard Louis wiederum bezeichnend, dass sich der deutsche Regisseur Thomas Ostermeier, nachdem er bereits 2017 zunächst in Manchester, dann in Berlin (Schaubühne) und 2018 auch in Hamburg Retour à Reims (Returning to Reims) auf die Bühne gebracht hatte, dann auch folgerichtig der Histoire de la violence (Au cœur de la violence) angenommen hat (Louis/ Ostermeier 2019). Die beiden Stück-Inszenierungen wirken wie zwei Akte oder zumindest zwei Bilder ein und desgleichen epischen Theaterstücks - ihre Aussage ist unisono eindeutig: Das arme schwule Opfer muss gegen die Gesellschaft ankämpfen und gerät aus diesem Grund in letztlich relativ harmlose, da gut ausgehende Schwierigkeiten - eine verzögerte universitäre Karriere und das melancholische Leid eines verhinderten Familienglücks (im Falle Eribons) bzw. eine Gewalterfahrung und die Vereinsamung fern der Familie (im Falle von Édouard Louis, der das Weihnachtsfest mit einem Fremden im Bett statt mit der Familie unterm Tannenbaum verbringt), aus der der Protagonist allerdings dann doch recht unbeschadet 30 DOI 10.2357/ ldm-2020-0044 Dossier hervorgeht, auch weil er als Intellektueller in der Lage ist, seine Erfahrung schriftstellerisch zu therapieren und weil er, gesellschaftskritisch eingestellt, das ihm Widerfahrene nicht einfach nur persönlich nimmt. Er sucht die Ursachen und Erklärungen für das gewalttätige Verhalten des Täters ebenso wie für die intolerante Gesellschaft; er überwindet zugleich eine mögliche Scham und das aus ihr resultierende Verschweigen und klagt stattdessen die grausamen Strukturen an. Der dritte Roman von Édouard Louis, die Annäherung an den Vater (Qui a tué mon père; Louis 2018), mit einer noch deutlicheren Verve hinsichtlich der politischen Situation in Frankreich, knüpft zusätzlich jugendkulturell an den kanadischen Regisseur und Schauspieler Xavier Dolan, dessen Film J’ai tué ma mère (2009) im Titel anklingt und dem das Werk gewidmet ist, an. Das Werk mit dem (vielleicht etwas unglücklichen) deutschen Titel Wer hat meinen Vater umgebracht (Louis 2019) bereichert den in den beiden autobiographischen Vorgängerromanen aufgenommenen Generationendialog mit Eribon im Zeichen schwuler Subkultur um gesellschaftspolitische bzw. soziologische Theorie, ganz im Sinne der politischen wie wissenschaftlichen Positionen von Eribon, und setzt sich dergestalt nur scheinbar von seinem Mentor ab, wenn er statt der in Retour à Reims endgültig vollzogenen Abkehr vom Vater, dessen Beerdigung nicht einmal besucht wird, die Hinwendung zu dem dereinst wenig Verständnis, mittlerweile jedoch Stolz über die schriftstellerischen Erfolge des Sohns zeigenden Vater zelebriert. In Wirklichkeit erklärt sich dieses relativ kurz gehaltene Werk gerade als eine Konsequenz aus dem generationalen Wandel in der französischen Gesellschaft. Edouard Louis verkörpert eine Generation, die nicht mehr gegen die Eltern als die eigentlichen Gegner rebelliert und in diesen die Ursache für die Diskriminierung sieht. Stattdessen wird der homophobe Diskurs seiner Umwelt und Familie eindeutig mit dem sozialen Stigma identifiziert, das politisch zu bekämpfen ist. Folgerichtig sind seine Ausführungen, wie genauso diejenigen Eribons, zuvörderst gegen die neoliberale französische Politik gerichtet, also gegen diejenigen - und darauf verweist das „Qui“ im Titel -, welche den (sozialen) Tod seines Vaters verschuldet haben, und als dezidiert gesellschaftspolitische Stellungnahme zu verstehen. Das Werk von Edouard Louis reflektiert, respondiert und reaktiviert also auch hier das Œuvre von Eribon. Ist das Zufall? Oder folgt das offen jener autobiographischen Motivation, die gerade Didier Eribon bei Bourdieu als blinden Fleck benennt (Eribon 2016: 154)? 2 Einerseits natürlich ja, treten Louis und Eribon in der Öffentlichkeit doch oft ‚im Doppelpack‘ auf und nehmen konkret aufeinander Bezug, sowohl in den genuin literarischen Werken als auch in öffentlichen Lesungen und wissenschaftlichen Veranstaltungen zu Fragen der Soziologie und Politik. Diese Auftritte wollen den - ob der Altersdifferenz von vornherein etwas seltsamen - Eindruck erwecken, es handele sich um eine Beziehung auf Augenhöhe. In Wirklichkeit erscheint allerdings der Ältere, also Eribon, gleichsam in allen Positionen ursächlich und als Antriebsfaktor. Eigentlich, so kann man es als Teil der ‚Heldenlegende‘ mittlerweile auf Wikipedia nachlesen, „entdeckt“ Eribon den jungen Geschichtsstudenten Édouard an der Université de Picardie (Édouard Louis 2020). Dieser gelangt daraufhin rasch an die Rue DOI 10.2357/ ldm-2020-0044 31 Dossier d’Ulm, dann an die EHESS und ist seit 2014 der Doktorand von Eribon. Er teilt sein politisches Engagement und das des Lebenspartners von Eribon, Geoffroy de Lagasnerie; die drei sind befreundet und gelten in der Pariser Intellektuellenszene als eine Art Dream-Team (Binswanger 2019). Diese positive Lesart ersetzt auch andere, nicht so schmeichelhafte oder gar bösartige Spekulationen über den Aufstieg von Édouard Louis, Erzählungen, wie sie andere Autoren zumindest unter der Hand kolportieren oder wie sie zwischen den Zeilen gelesen werden können. 3 An solchen Gerüchten mag Neid und Missgunst, mit Bourdieu gesprochen: ein Versuch, Positionen im Feld ‚mit dem Ellbogen‘ zu entscheiden, mitspielen (Bourdieu 1992); eine solche trajectoire und die blitzartige Karriere aus den tiefsten proletarischen Tiefen verwundert aber so oder so. Wie viele Studierende gibt es denn, die sozusagen ‚von null auf hundert‘ Sammelbände mit Autoren und Autorinnen internationaler Prominenz herausgeben können? Wenn gerade hinter dem hier angesprochenen, 2013 bei PUF erschienenen und 2016 nochmals aufgelegten Sammelband wiederum der Name Bourdieu aufblitzt - der Titel lautet Pierre Bourdieu. L’insoumission en héritage (Louis 2013), so vereint dieses Interesse an Bourdieu Eribon, Geoffroy de Lagasnerie und auch Annie Ernaux (neben Arlette Farge, Pierre Bergounioux, Frédéric Lordon und Frédéric Lebaron) und kreiert so etwas wie eine literarische Schule, die im Anklang an die treffenden Ausführungen in Retour à Reims als Literatur der Hontologie bezeichnet werden kann. Da sich Bourdieu gerade auch intensiv mit den Mechanismen des literarischen Feldes auseinandergesetzt hat (Bourdieu 1992) verwundert es nicht, wie geschickt Eribon und Co. sich eine neue Position im Feld erobern und damit kommerziell wie auch bei der Literaturkritik erfolgreich sind, also kulturelles Kapital anhäufen. Sie haben es sehr gut verstanden, wie sich eine solche literarische Strömung gemeinsam erfolgreicher etablieren lässt, wie man die eigenen Ideen mit Verve dergestalt in die öffentliche Debatte einführen kann. Ohne an dieser Stelle genauer über die konkreten Mechanismen sprechen zu wollen, die in Interviews, in der gezielten Nutzung sozialer Medien, im Einbringen in öffentliche Debatten etc. bestehen, ist die gezielte Vernetzung als literarische Strömung das besondere Charakterisitikum. Die Texte der Bourdieu-Schüler(innen) zeichnen sich dabei aus durch ihre dezidiert expressive Dimension. 4 Oder: „Selon Didier Eribon, le temps est venu de subvertir un ordre social racialisant, profondément inégalitaire et ethnonationalitaire à travers la synchronisation des temporalités hétérogènes des divers mouvements sociaux et la convergence des résistances à l’ordre établi“ (Boccara 2013). 2. Eribons geistige Schwester Annie Ernaux In einem anderen Werk Eribons, Gesellschaft als Urteil. Klassen, Identitäten, Wege (2013 auf Französisch und im Oktober 2017 auf Deutsch erschienen; Eribon 2017) geht es einmal mehr um Bourdieu und Foucault, aber eben auch um Annie Ernaux (geb. 1940 in Lillebonne, aufgewachsen in der Normandie in Yvetot). In diesem Werk 32 DOI 10.2357/ ldm-2020-0044 Dossier bekommt die literarische Hontologie dann auch ihren Namen. Eribon definiert die Strömung durch die Schilderung einer „Selbstanalyse“ zur Überwindung der „sozialen Scham“ und es fällt auf, dass in seiner literaturwissenschaftlichen Abhandlung das Werk von Annie Ernaux nicht nur sehr gut wegkommt, sondern als vorbildlich für diese Art der von ihm und Louis gepflegten literarischen Gesellschaftsanalyse gilt, was die Literaturwissenschaft in Gestalt von Isabelle Charpentier längst genauso für Ernaux beschrieben hat. 5 Annie Ernaux’ Lebenslauf weist durchaus Parallelen zu dem von Eribon und Louis auf. Sie ist sozusagen der Ausweis dafür, dass die literarische Hontologie sich nicht vordergründig oder ausschließlich auf die Schwulenfrage kapriziert. Vielmehr geht es darum, offen und ehrlich die Zugehörigkeit zu einer marginalisierten Gruppe auszusprechen und das schambesetzte Schweigen zu durchbrechen, verbunden mit gesellschaftlichen Emanzipationsforderungen und dem Versuch, den Leserinnen und Lesern tiefgründige Einsichten in das Funktionieren sozialer Ausgrenzung zu vermitteln. Annie Ernaux wird in eine Arbeiterfamilie hineingeboren, wenn auch ihre Eltern später einen kleinen Laden besitzen. Sie beschreibt in ihren zahlreichen autobiographischen Romanen das prototypische Aufwachsen eines Mädchens ihrer Generation und ihrer Schicht und die sukzessive Distanzierung von ihrer Herkunftsfamilie („J’ai perdu le dernier lien avec le monde dont je suis issue“, Ernaux 1988: 82). Sie lässt uns teilhaben an der Populärkultur der 1960er und 70er Jahre, erzählt in Les Armoires vides (1974), La Place (1992) oder Les Années (2008) über einen Zeitraum von mittlerweile 40 Jahren von ihrer Kindheit, ihrem Studium in Rouen und Bordeaux, ihrer Ehe (La Femme gelée, 1981) ihrem Beruf als Lehrerin, vor allem aber von ihrer Beziehung zu ihren Eltern und von deren Geschichte (vor allem in dem Roman mit dem bezeichnenden Titel La Honte, 2000). Die Anthologie Écrire la vie (2014) hat dann durchaus stark metapoetische Züge und entfaltet ihre Art zu schreiben. In Mémoire de fille (2016) kommt noch einmal verstärkt die politische Schlagseite zum Tragen, unterstützt sie politisch doch den Linken Mélenchon, sowohl 2012 als auch 2017 (Blin 2017). Ernaux legt im Grunde ihr ganzes Leben offen: der soziale Aufstieg (La Place), ihre Sexualität und Liebeserfahrungen (Passion simple, 1991; Se perdre, 2001; L’Occupation, 2002), ihre Umwelt (Journal du dehors, 1993; La Vie extérieure, 2000) wie auch intimste Erlebnisse wie eine Abtreibung (L’Événement, 2000) oder die Alzheimer-Erkrankung und der Tod der Mutter (Une femme, 1988) bis hin zur eigenen Krebserkrankung (L’Usage de la photo, 2005) werden ohne Voyeurismus und ohne Selbstmitleid zum Thema eines eher chronistischen Schreibens, das sich als zeitgeschichtliches Dokument versteht. Damit einher geht ein transpersonelles Schreiben, das den Mechanismus der Darstellung genauso enthüllt wie es das eigene Subjekt dekonstruiert. Die eigene trajectoire wird in dieser Art der Autofiktion gleichsam schonungslos entfaltet. 6 Kein Detail wird ausgespart und gerade das, was aus einer bürgerlichen Perspektive peinlich oder herabsetzend sein könnte und was sie, der der Aufstieg zur Schriftstellerin gelungen ist, für sich auch als solches empfunden hat, wird offen und ehrlich ausgesprochen. 7 DOI 10.2357/ ldm-2020-0044 33 Dossier Die Zielsetzung von Annie Ernaux besteht darin, ihre Autobiographie als exemplarisch-stellvertretenden und nicht nur als individuell-partikulären Fall darzustellen. Ihr transpersonelles Schreiben skizziert sie selbst als die adäquate Form, um ihr reales, individuelles Leben in eine allgemeingültige Literatur zu verwandeln: „J’avais besoin que ma réalité personnelle devienne de la littérature: c’est seulement en devenant de la littérature qu’elle deviendrait ‚vraie‘ et autre chose qu’une expérience individuelle“ (Ernaux 1993: 220). Das Ich wird somit durch den Prozess einer Selbstfiktionalisierung zur Stimme einer/ eines anderen oder gar von etwas anderem. Dahinter steckt ein klares Bekenntnis zum Engagement bzw. die Hoffnung auf eine kollektive Reaktion durch die Erkenntnis gesellschaftlicher Zu- und Umstände (Wroblewski 2020) gestern und heute. Dass dies auch Grenzen hat, zeigt sich dann in Les années, in der sie den 11. September 2001 als Beginn einer neuen Epoche und zugleich einer neuen Generation bezeichnet, für die sie weniger Identifikationspotenzial sieht. Es verwundert nun keineswegs, wie Ernaux mit ihrer „Gedächtnispolitik“ (Eribon 2017: 99) zu Eribons ‚Schwester im Geiste‘ wird, wie sie gleichsam die weibliche, heterosexuelle Seite der literarischen Hontologie mitübernimmt. Einerseits näher bei Eribon, was die Analyse der eigenen Person, die soziale Herkunft und die politische Positionierung anbelangt (cf. Hugueny-Léger 2017), ist sie andererseits durch den stringenten Einbezug der Populärkultur wiederum Édouard Louis nicht unähnlich. Eindeutig geht aus ihrer Biographie z. B. hervor, was selbst Louis verschweigt bzw. explizit offenlässt, nämlich dass die Partizipation an der Alltagskultur, am Fernsehen und an den Printmedien, die Voraussetzungen zur höheren Bildung schafft, dass ihr die Medien und die Populärkultur den Aufstieg in die intellektuelle Elite ermöglichen oder zumindest nicht verunmöglichen, vermitteln sie doch Allgemeinbildung, Sprach- und Weltwissen. Auffällig dabei ist, dass Ernaux genauso an der Hochkultur, die ihr auch, aber eben nicht nur durch die Schule vermittelt wird, wie an der Populärkultur partizipiert. Vielleicht ist es geradezu das Besondere an der Situation im Frankreich der 1960er und 70er Jahre, dass eine Trennung in kulturelle Welten, in eine dem Proletariat zugeschriebene Populärkultur und eine von den Eliten verwaltete Hochkultur so nicht existierte. Arthur Rimbauds Gedichte (Ernaux 2008: 71) oder Pierre Corneilles Dramen (Ernaux 2008: 86) stehen in der „société de consommation“ (Ernaux 2008: 121) gleichberechtigt neben Werbesprüchen, Jugendzeitungen und Kiri dem Clown. Ein Teil der eigenen Identität ist immer mit der niederen Herkunft verbunden: Der Vorteil besteht bzw. bestand aber darin, dass dergestalt und durch eine aufstiegs- und bildungsorientierte Gesellschaft zeitweise eine gewisse Wahl möglich war, welcher Kultur man zugehören will, so wie auch Eribon zeigt, dass der Schwule aufgrund seiner Andersartigkeit und seiner Zuneigung zum intellektuellen Milieu aus dem Gefangensein in der einen Welt ausbrechen kann, oder wie Bourdieu meint, dass der Feldforscher durch Einsichten in die Gesetze der Gesellschaft diese besser damit umzugehen und damit zu beeinflussen weiß. 34 DOI 10.2357/ ldm-2020-0044 Dossier Beispielhaft wird dies, wenn Ernaux in Les années berichtet, welche Musik sie als Jugendliche bevorzugte: „Les mots de Brel et de Brassens, comme cela de Piaf autrefois, désorientaient davantage comme s’ils avaient dû nous accompagner toute notre vie, même si on les écoutait plus tellement, l’un trop moral, l’autre aimablement anarchiste, qu’on préférait Renaud et Souchon“ (Ernaux 2008: 140). Während sie also eher Abstand nimmt vom Kanon der Chanson-Musik, spricht sie sich für diejenigen Sänger aus, die gegen das Bildungsbürgertum rebellierten und politische Kritik übten. 8 Den Kanon kennt sie aber trotzdem noch zusätzlich, so wie auch im Falle Eribons Proust, Sartre und Gide selbstverständliche Referenzautoren bleiben können. Um gegen den sozialen Stillstand argumentieren zu können, bedarf es eines Einblicks in alle Lebenswelten, der von unten unter gewissen Umständen, seien sie nun zeitbedingt oder habitus-spezifisch, möglich ist. Wenn er sich aber nicht mehr gleichsam selbstverständlich einstellt, muss, so Ernaux, die Literatur einspringen. 3. Die indirekte Rezeption Ein kurzer Rezeptionsbefund kann tatsächlich zeigen, wie gerade in Deutschland die Verbindung von Didier Eribon, Édouard Louis und Annie Ernaux funktioniert und wie, positiv wie negativ, ein solches kanonisches Einordnen in literarische Schulen abläuft. Ich beziehe mich auf einen schlichtweg als inkompetent zu bezeichnenden Verriss, den Thea Dorn in der ZDF-Sendung Literarisches Quartett vom 13.10.2017, einer Sondersendung anlässlich der Frankfurter Buchmesse, zum Besten gab. 9 Dabei sind es zwei Argumente, die die Gastgeberin der Sendung und Literatin Thea Dorn gegen die (wiederum sehr spät erfolgte und phasenweise qualitativ wirklich schwache und dadurch gegenüber dem Original weit abfallende) deutsche Übersetzung von Ernaux’ Les années anführt: Zum einen zweifelt sie, in völliger Unkenntnis der französischen Bildungslandschaft, an, dass eine Französin aus dem Proletariat zur Abiturientin werden konnte („Wie kommt es dazu, dass sie Abitur machen kann? “), was sie mit den anderen (ebenso ahnungslosen) Mitdiskutanten zu dem Argument entwickelt, die soziologische Selbstergründung sei eher unglaubwürdig. Sie selbst hatte zum anderen den Roman zuvor mit Ulla Hahns eher larmoyanten Romanautobiographien (TV-Sendung 07: 37) verglichen und damit Annie Ernaux explizit nicht in den später genannten Trend der für Thea Dorn negativ konnotierten (sie spricht von „politisch-französisch-links“) französischen soziologischen Selbstergründung eingereiht. 10 Auffällig ist aber, dass die Ablehnung des Werkes mit der erkannten Nähe zur literarischen Hontologie zu tun hat, die einer erzkonservativen Kritikerin wie Thea Dorn naturgemäß nicht gefallen kann (cf. Reiß 2018) und die sie augenscheinlich aber so verlegen macht, dass sie geradezu ein biestiges und recht unprofessionelles Bild abgibt, was wiederum allen drei hier betrachteten Autor(inn)en sicherlich gefallen hätte. Die These, die ich aus den beiden von Dorn hier ablehnend gebrauchten Argumenten ableite, ist nun die, dass ein an Foucault und Bourdieu geschulter Soziologe wie Didier Eribon genau die Notwendigkeit einer konzertierten Abwehr konservativer DOI 10.2357/ ldm-2020-0044 35 Dossier Kritiker erkannt hat, und gewisse Stellschrauben an der Rezeption seiner Hauptthesen ansetzen möchte, die die Werke der sogenannten literarischen Hontologie, insbesondere die von Annie Ernaux, aber erst recht das von Édouard Louis als ein großes Ganzes ausweisen, hinter dem sich Didier Eribon kongenial als Denker und Lenker erkennen lässt. Ohne behaupten zu wollen, dass, v. a. im Falle von Annie Ernaux, eine solche (Fern-)Steuerung tatsächlich vorliegt, kann jedenfalls die mediale Rezeption des Trios als eine bewusste Positionierung im literarischen Feld bzw. sogar als eine gezielte Positionierung des literarischen Feldes verstanden werden. Gerade in Deutschland funktioniert dies, vielleicht noch einfacher als in Frankreich, aufgrund des nur relativen Wissens um die französische Gesellschaft bzw. ihre zeitgenössische Debattenwie Alltags- und Populärkultur, relativ gut auch durch Provokation, Wiederholung und Frontbildung. Binswanger, Daniel, „Die Herrschenden haben Angst - und das ist wundervoll“, www.republik. ch/ 2019/ 01/ 12/ die-herrschenden-haben-angst-und-das-ist-wundervoll (publiziert 12.01.2019, letzter Aufruf 21.06.2021). Blin, Simon, „Le ‚lettré‘ Mélenchon et ses ‚têtes‘ militantes“, www.liberation.fr/ debats/ 2017/ 04/ 05/ le-lettre-melenchon-et-ses-tetes-militantes_1560748, (publiziert 05.04.2017, letzter Aufruf 21.06.2021). Boccara, Guillaume, „Pierre Bourdieu. 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DOI 10.2357/ ldm-2020-0044 37 Dossier 3 Cf. die Beschreibung, wie Eribon und Louis 2011 ihr Lehrer-Schüler-Verhältnis im Fitness- Studio vertieften: „Every day, they went to the gym together“, cf. „Edouard Louis: life with his brothers in arms and in spirit“, in: Le Monde in English 17.8.2018, https: / / medium.com/ m-le-magazine-du-monde/ edouard-louis-life-with-his-brothers-in-arms-and-in-spirit-99951 352c1c2 (letzter Aufruf 21.06.2021). 4 In Anlehnung an Koschorke 2012, der Erzählungen als Erzählspiele auffasst und dabei repräsentionale und expressive Dimensionen von Texten unterscheidet: „Als Repräsentation macht sich die Erzählung scheinbar durchsichtig zugunsten der Darstellung einer (imaginierten) Welt; als Expression gibt sie Auskunft über Eigenschaften des Erzählers“ (Koschorke 2012: 87). 5 Gemeint ist hier Charpentier 2009 und Charpentier 2014. Der Begriff taucht später dann auch bei Komorowska 2017 auf. 6 Cf. Élise Hugueny-Léger, Annie Ernaux, une poétique de la transgression, Bern, Peter Lang, 2009; Danielle Bajomée / Juliette Dor (ed.), Annie Ernaux. Se perdre dans l’écriture de soi, Paris, Klincksieck 2011; Thomas Hunkeler / Marc-Henry Soulet (ed.), Annie Ernaux. Se mettre en gage pour dire le monde, Genève, Métis Presses, 2012. 7 Beispiel aus Les Années: „elles étaient interminables les années de masturbation“ (Ernaux 2008: 52). 8 Im Falle von Renaud zeigt sich das etwa bereits mit seinem ersten Erfolg 1968, „Crève salope! “. Bei Alain Souchon ist hier eher der angloamerikanische Musikeinfluss gemeint. 9 Abrufbar war die Sendung unter www.zdf.de/ kultur/ das-literarische-quartett/ das-literarischequartett-von-der-frankfurter-buchmesse-vom-13-oktober-2017-100.html (letzter Abruf 20.03. 2018). 10 Was im Übrigen noch negativer erscheint, wenn man die Eigengeschichte des Literarischen Quartetts mit einbezieht, wo Marcel Reich-Ranicki 2001 den angesprochenen Roman Ulla Hahns (Das verborgene Wort) öffentlichkeitswirksam verrissen hatte, cf. Borcholte 2001. 38 DOI 10.2357/ ldm-2020-0045 Dossier Jan Rhein Didier Eribon im Kontext des Buchmesseschwerpunkts Francfort en français auf der Frankfurter Buchmesse 2017 Im Rahmen eines Gastlandauftritts auf der Frankfurter Buchmesse überschneiden sich verschiedene Felder der Repräsentation 1 und der Rezeption: Kultur, Politik, Kulturpolitik, Marketing, Außen- und Fremdwahrnehmung eines Landes fallen im Länderpavillon der Messe in eins, goutiert und kommentiert von einem informierten, internationalen Fachpublikum ebenso wie von der allgemeinen Öffentlichkeit. 2017 war Frankreich - und die französische Sprache - als Ehrengast auf der Frankfurter Buchmesse präsent. Der Platz Didier Eribons in diesem Umfeld ist spannungsreich: Einerseits kann er seit dem Erfolg von Retour à Reims als wichtiger, wenn auch „nicht-intentionaler“, Mittler (zu diesem Konzept cf. Colin/ Umlauf 2013) im deutsch-französischen Feld beschrieben werden, zugleich aber ist er ein vehementer Kritiker Emmanuel Macrons. Mit Macron, dem Schirmherrn des Gastlandauftritts, wurde die Hoffnung auf einen Neubeginn in den deutsch-französischen Beziehungen verbunden, nachdem es um diese in den vergangenen Jahren nicht zum Besten gestanden hatte (cf. etwa Flügge 2014). Zwischen der Funktion, die Eribon als Repräsentant des Literaturlands Frankreichs einnimmt, und seinem der offiziellen Repräsentation gegenlaufenden Standpunkt ergibt sich also ein Spannungsverhältnis, das im Folgenden näher beleuchtet werden soll. 2 1. Frankreichs ‚Retour à Francfort‘ Nach 1989 war Frankreich 2017 zum zweiten Mal Ehrengastland auf der Frankfurter Buchmesse - nach einer schon zu Zeiten Sarkozys ausgesprochenen Einladung, der eine lange Phase des Zögerns von französischer Seite gefolgt war. Stand der Wert der Buchmesse für die Verlagsbranche außer Frage, so hatte die französische Politik gezögert, das Budget dafür bereit zu stellen. Erst Manuel Valls verkündete während eines Berlin-Besuchs im Jahr 2014, dass Frankreich die Einladung für 2017 annehmen werde. 3 Wie schon 1989, im ersten Frankreich-Jahr der Buchmesse, als man den 200. Jahrestag der französischen Revolution feierte und in Deutschland die Mauer fiel (cf. Rütten 1999: 144-145, Hertwig 2018a), waren auch 2017 die Messe im Ganzen und der Frankreichauftritt im Besonderen von politischer Aktualität und Wertedebatten geprägt. Aus der Vorberichterstattung zur Messe lässt sich herauslesen, wie präsent die terroristischen Anschläge in Paris noch waren (cf. Kegel 2017a), wie nah ein möglicher Wahlsieg Marine Le Pens manchen Kommentatoren galt. „Ob Marine Le Pen […] die Eröffnungsrede halten wird? “, fragte Sandra Kegel (ibid.) in der FAZ, „Hoffen wir, dass [die Messe] nicht von Le Pen eröffnet wird“, hieß es in der DOI 10.2357/ ldm-2020-0045 39 Dossier Süddeutschen Zeitung (Breidecker 2016), während auch in Deutschland der Bundestagswahlkampf an Fahrt gewann und sich gleichzeitig ein drohender Erfolg der AfD abzeichnete. Und nicht zuletzt warf auch der ‚Brexit‘ seine Schatten voraus. „Die Krise der Demokratie, die Krise Europas, die Krise der Kultur, die Krise der Heimat, die Flüchtlingskrise“ (Bethke 2017: 11) also prägten das Jahr und die Messe. Dieser politisch aufgeladene Kontext, der auch eine Erklärung dafür bieten mag, dass Didier Eribon seit der Übersetzung von Retour à Reims in der deutschen Presse und Öffentlichkeit auf besonderes Interesse stieß, erklärt auch die im Umfeld der Messe und des Gastlandauftritts 2017 zu verzeichnenden Diskurse. Schon früh betonte die französische Seite, der Messe-Auftritt solle im Zeichen von Europäischer Kohäsion, Meinungsfreiheit, „sprachlicher Gastfreundschaft“ stehen (cf. Göpfert 2017: D7). Er war für Frankreich von hoher Priorität (cf. Breidecker 2017): Die Aufmerksamkeit, die ihm von offizieller Seite zuteil wurde, lässt sich auch daran ablesen, dass er ab Januar 2017 nicht nur als ein kulturpolitisches Ereignis, sondern im Zentrum der deutsch-französischen Agenda situiert wurde: So waren etwa Buchmesseleiter Juergen Boos und Gastlandkoordinator Paul de Sinety als Teil der Delegation anlässlich der Verleihung der Ehrendoktorwürde an Joachim Gauck an der Sorbonne (24.1.2017) zugegen (Börsenblatt 24. Januar 2017: 77). Schon ab Februar und bis Oktober 2017 wurden in ganz Deutschland Literaturveranstaltungen unter dem Label „Frankfurt auf Französisch“ organisiert und auf der dafür eingerichteten Internetseite publiziert (www.francfort2017.com). Das Programm wurde durch das Institut français in Paris zentral koordiniert, unter Leitung des commissaire général Paul de Sinety (cf. Hertwig 2018a: 10; 2018b: 130) und unter Einbeziehung des Netzwerks der französischen Kulturvertretungen in Deutschland durchgeführt. So wurden insgesamt, auf der Buchmesse und deutschlandweit, rund 1500 Veranstaltungen organisiert (cf. Hertwig 2018b: 131). Frankreich nutzte „La grande Bühne“, so der Name der zentralen Aufführungsfläche des Pavillons, um Werte zu vermitteln, die de Sinety folgendermaßen zusammenfasste: Es sei darum gegangen, „de repenser notre relation“, „de travailler [sur] la perception réciproque que peuvent avoir la France de l’Allemagne et l’Allemagne de la France“ (ibid.), ein Verlagswesen zu zeigen, das „extrêmement dynamique“ sei, und schließlich v. a. eine Öffnung zum gesamten französischen Sprachraum in Szene zu setzen: Nous souhaitons interroger cette langue française à partir des questions d’hospitalité et d’accueil, et promouvoir l’extraordinaire richesse éditoriale qui existe aujourd’hui dans le domaine de l’édition […] pour faire découvrir […] l’exceptionnelle diversité éditoriale francophone d’aujourd’hui. (ibid.: 131) Kurz: Man wollte kein „festival de Saint-Germain-des-Prés“ organisieren, mithin nicht nur die alteingesessenen Pariser Verlage in den Mittelpunkt stellen, sondern eine Dezentralisierung betreiben - sowohl was die geographische Herkunft, als auch was die Vielfalt der präsentierten Gattungen, Genres und literarischen Medien betraf. Dynamik, Innovation, Diversität, Entdeckerfreude sollten auch über den Gastlandpavillon vermittelt werden, eine „Bücherstadt“ (Breidecker 2017: 12) aus luftigen 40 DOI 10.2357/ ldm-2020-0045 Dossier Holz-Regalen, die eine gewisse Provisorik signalisierten (cf. Anastasio 2018) und somit Ideen im Werden evozierten. Als symbolischer Irritationsmoment stellte sich eine leicht zu übersehende Schwelle im Eingangsbereich heraus - also dort, wo man quasi Frankfurt verließ und Frankreich betrat -, die immer wieder BesucherInnen zu Fall brachte. Auch wenn die TAZ darin eine „unfreiwillige Performance“ (Graton 2017: 10) erkannte, muss man diesen kleinen Fehler im System nicht überbewerten. Er steht jedoch dafür, dass die Repräsentation durchaus Brüche aufwies, für die unter anderem Eribon eine Rolle spielte, wie zu zeigen sein wird. 2. Houellebecq, Macron und Eribon Eribon wurde früh als offizieller Gast der Buchmesse geführt. Nach und nach wurde die Liste der 130 AutorInnen veröffentlicht, die im Rahmen des Ehrengastprogramms offiziell eingeladen waren. Auf dem Salon du Livre in Paris wurde am 23. März 2017 die zweite Tranche dieser Liste veröffentlicht, auf der auch Eribons Teilnahme verkündet wurde (cf. Börsenblatt, „Die Autorenliste“, 23. März 2017). Schon diese Liste wurde in den deutschen Medien kommentiert, die erwartungsgemäß v. a. die bereits prominenten Namen erwähnten: Und mit wem darf sonst gerechnet werden? Michel Houellebecq, diese gewaltige Lokomotive, die nach langen Jahren des Dahindümpelns der französischen Gegenwartsliteratur wieder Dampf macht, ist natürlich angefragt, hat sich aber noch nicht erklärt. Didier Eribon wiederum, der mit seinem Ego-Dokument „Rückkehr nach Reims“ der französische Überraschungsstar des letzten Jahres war, ist gesetzt. (Krause 2017) Dass Houellebecq und Eribon in einem Zug genannt werden, ist durchaus bezeichnend - beide Autoren stehen wie Labels für das wiedererstarkte Interesse Deutschlands an der französischen Literatur. Sie vertreten dabei auch in der französischen Öffentlichkeit antagonistische Positionen, insbesondere auch bezüglich ihrer Haltung zu Macron. 4 In o. g. Zitat wird der Antagonismus zwar nicht thematisiert; gleichwohl werden beide Autoren („wiederum“) in Opposition zueinander gestellt - ein Verfahren, das sich noch an anderer Stelle findet; so heißt es etwa im Tagesspiegel, Eribon wirke „auch durch seine Erscheinung“ „wie ein Gegenmodell zu Houellebecq“; Annie Ernaux, Edouard Louis und er bildeten ein „neues glamouröses Kraftzentrum der französischen Literatur. […] Und was war nochmal mit Houellebecq? “ (Bartels 2017). Im Buchmessejahr fiel das deutsche Interesse für französische Literatur zusammen mit dem Interesse am neugewählten Präsidenten Macron. Auch das Verhältnis Macrons und seines Kabinetts zur Literatur war immer wieder Thema: Dass Macron die Verlegerin von Actes Sud, dem Verlag Daniel Kehlmanns, mithin der „französische[n] Heimat deutscher Literatur“ (Altwegg 2017a), zur Ministerin ernannte, wurde gemeinhin positiv kommentiert (cf. Hanimann 2017a, Fuhrig 2017). Auch die Memoiren Bruno Le Maires und die Krimis Edouard Philippes nahm man wahr (cf. Minkmar DOI 10.2357/ ldm-2020-0045 41 Dossier 2017b, Sandberg/ Heyer/ Brinkbäumer 2017: 20). Ein langes Interview in der während der Buchmesse erscheinenden Ausgabe des Spiegel (Sandberg/ Heyer/ Brinkbäumer 2017) zeigt die allgemeine Faszination für die Figur Macron. Neben einigem Privaten werden auch die Lesegewohnheiten des Präsidenten thematisiert - aus Frankreich schätze er u. a. Houellebecq und Slimani, aus Deutschland Goethe, Grass und Süskind (ibid.: 18-19). In derselben Spiegel-Ausgabe werden in einem weiteren Artikel abermals Houellebecq, Macron und Eribon zusammengeführt: In Europa ließe sich eine Dynamik erzeugen [so Macron], die die Nationalstaaten herausfordert auf der Höhe ihrer Möglichkeiten zu bleiben und nicht zum „Bordell für asiatische Touristen“ zu verkommen, wie es der französische Schriftsteller Michel Houellebecq prophezeite. Macron beschwört ein Europa der Universitäten, der Bibliotheken und Cafés. (Minkmar 2017a: 23) Nicht nur wird hier Houellebecq als Gewährsmann für eine zu verhindernde Horrorvision angeführt, auch wird Macron als Mann des Geisteslebens gezeigt. Im selben Artikel wird abermals eine Opposition zwischen Macron und Houellebecq einerseits und Eribon andererseits aufgemacht: „Stellvertretend für die klassische Linke sieht der Soziologe Didier Eribon […] in der Wirtschaftspolitik Macrons eine ernste Gefahr“ (Minkmar 2017a: 23). Hier zeigt sich, wie Eribon als oberster Antipode des Präsidenten, aber auch als Gegenpart zu dem in Deutschland wohl prominentesten französischen Literaten in dessen mediales Fahrwasser gerät - was gleichzeitig seine Sichtbarkeit steigert. Dieser Mechanismus wird am Beispiel des Eröffnungsabends der Messe besonders sichtbar. 3. Eröffnungsabend (10.10.2017) und begleitende Debatten Gemäß dem oben dargestellten kulturpolitischen Kontext wurden auch am Eröffnungsabend die Werte von Demokratie und Meinungsfreiheit betont (cf. Schulte 2017): In den verschiedenen Reden wurde u. a. an den seinerzeit im Gefängnis sitzenden Journalisten Dennis Yücel und an den Saudi-Arabischen Blogger Raif Badawi erinnert, die kurz zuvor aus türkischer Haft freigekommene Autorin Aslı Erdoğan war persönlich anwesend. Heinrich Riethmüller, der Vorsteher des Börsenvereins des deutschen Buchhandels, verwies auf den Wert des Buchs für die offene Gesellschaft: „Die Gesellschaft braucht uns - und zwar genau jetzt! “ (Riethmüller 2017). Mit Macron und Angela Merkel wurde die Messe besonders prominent eröffnet - es war erst das zweite Mal, dass die deutsche Bundeskanzlerin aus diesem Anlass nach Frankfurt gereist war (cf. Bosshard 2018: 27). Buchmessen sind Gelegenheiten für Politiker, nicht wie gewöhnlich als Akteure aufzutreten, die medienpolitische Rahmenbedingungen gestalten, sondern sich der Kulturszene zur „Repräsentation und Imagepflege“ (Niemeier 2001: 102) zu zeigen. Man darf vermuten, dass besonders dem französischen Präsidenten sein Auftritt zur eigenen Zufriedenheit gelungen ist - die oben festgestellte Sympathie des deutschen Feuilletons für Macron setzte sich 42 DOI 10.2357/ ldm-2020-0045 Dossier in der Presseberichterstattung fort. So zeigt sich Jürgen Kaube in der FAZ zwar bewusst, dass „Staatspräsidenten […] nicht als Leser gewählt“ würden, aber dennoch lobt er, Macron habe nicht „das Offensichtliche“ zur deutsch-französischen Freundschaft gesagt, sondern stattdessen die Literatur in den Vordergrund gestellt: „Was er über Baudelaire wisse, so Macron, wisse er dank Walter Benjamin. Ist die Frage zulässig, welcher deutsche Politiker imstande wäre, auch nur zu sagen, was Macron damit meinte? “ (Kaube 2017: 11). Dem Repräsentationscharakter der Veranstaltung entgegenlaufend, dem Selbstverständnis der Messe aber entsprechend, erhielten beide Politiker im Rahmen ihrer Auftritte auch Kritik: Merkel gleich auf offener Bühne, indem Riethmüller Kritik am deutschen Urheberrechts-Wissensgesellschaftsgesetz formulierte, und außerdem an die Kanzlerin appellierte, sich mehr für Menschenrechte einzusetzen (Riethmüller 2017). Macron hingegen erhielt Gegenwind von Eribon: am gleichen Abend auf einer anderen Veranstaltung, sowie in einer entschiedenen Gegenrede, die ebenfalls an diesem Tag in der Süddeutschen Zeitung erschien (Eribon 2017). 4. „Not my President“ Macron proklamiert im Sinne des gesamten Frankreich-Auftritts eine grenzüberschreitende, die europäische Kohäsion stärkende Literatur, die durch Literaturtransfers zusammengehalten wird - sei es Benjamins Baudelaire-Lektüre, André Gides Nietzsche-Rezeption oder Peter Handkes Übertragungen von René Char (Présidence de la République 2017). Ob sich Eribon vom Macronschen Literaturbegriff mitgemeint fühlt, bleibt in seiner Gegenrede offen, die am Tag der Messeeröffnung erscheint und die er auch in französischer Fassung auf seiner Internetseite und auf Facebook veröffentlicht. 5 In ihr erklärt er, warum er die Einladung zur Eröffnungsveranstaltung nicht angenommen habe. Sein Text ist frei von Zwischentönen: Er lehnt Macron rundheraus ab, „jede seiner Reformen“ bedrohe „alles“, „was zum Fundament einer europäischen Kultur gehört“. Die Grundlage für Eribons Wutrede ist seine schon oft geäußerte Kritik einer „ökonomisch neoliberalen Ideologie“ - „eine auf den Kopf gestellte Umverteilung“, von der nur „die Reichsten im großen Stil profitieren“ würden: „Welch ekelhafter Hohn! “ Er kommt weiter auf die Polizeigewalt gegen Migranten zu sprechen, die im Gegensatz zu Macrons „schönen Parolen“ stünden, „als er vor den Vereinten Nationen für einen würdevollen Umgang mit Migranten appellierte“: „Genau besehen ist das, was er tut, das exakte Gegenteil von dem, was er sagt.“ Bezüglich des französischen Bildungssystems fällt Eribons Urteil ebenso vernichtend aus, die grandes écoles würden zu Ungunsten der öffentlichen Hochschulen bevorzugt, was Klassenunterschiede verstärke: „via Kulturkapital kehrt Kapital zum Kapital zurück.“ Auf die Kulturpolitik Macrons kommt er interessanterweise eher allgemein zu sprechen: „Die Kultur ist kein autonomer Bereich. Man kann nicht gleichzeitig ihm angehören und DOI 10.2357/ ldm-2020-0045 43 Dossier gleichgültig bleiben gegenüber ökonomischen, politischen und sozialen Rückschritten.“ Eribon sieht für Frankreichs Zukunft, was er als Griechenlands Gegenwart erkennt: Ein großer Teil der griechischen Bevölkerung wurde in Armut gestürzt, die Jüngeren ins Exil gezwungen und die Älteren in Verzweiflung und manchmal bis in den Selbstmord getrieben. In Griechenland und in vielen anderen europäischen Ländern sind die Verlagshäuser in ihrer Existenz bedroht. Die Buchhandlungen schließen, da sich die Leser keine Bücher mehr leisten können. Macrons Politik sei „eine große Bedrohung für Kultur, Freiheit und die Zivilisation“. Er wünscht sich ein Europa, das mehr ist. Ein soziales Europa […], das solidarisch ist, mit einer sozialen Rechtsprechung […]; ein kulturelles Europa, das intellektuell, literarisch und künstlerisch ist. Ein offenes Europa. Also nicht das Europa, das Macron für uns im Sinn hat: eines der Prekarisierung und der Schwächung der Arbeitswelt; eines, das die Kultur in Gefahr bringt; eines der Polizeigewalt gegen Migranten. Kurzum, sozial wie wirtschaftlich: ein Europa der Gewalt. Die Erklärung schließt mit einer Attacke auf die Person Macrons, er nennt ihn einen „größenwahnsinnige[n] und narzisstische[n] Präsident[en], als ein Präsident, der andere Menschen beleidigt und verachtet, liebt es Macron, in schönen Gesprächsrunden zu großen, mystisch-lyrischen Höhenflügen anzusetzen“. Eribon schließt mit den Worten: „Nein. - Not my president“. Es lohnt sich, Eribons Kritik so ausführlich zu zitieren, da sie zu dieser Zeit und in dieser Deutlichkeit und Sichtbarkeit in der deutschen Presse nahezu singulär dasteht. 6 Eribon kritisiert die Figur Macron in ihrer Gesamtheit - nicht den Politiker oder einzelne seiner Entscheidungen. Indem er den „Geistesmenschen“ Macron insgesamt demystifizieren will, zeichnet er einen Gegenentwurf zu dem Bild, das etwa im Spiegel-Interview generiert wird. Es mag zunächst überraschen, dass Eribon, was den Kulturbereich betrifft, eine Schleife über Griechenland dreht, und insgesamt wenig konkret wird. Deutlich prononcierter ist die Kritik an Macrons Wirtschafts-, Flüchtlings-, Sozial- und Europapolitik formuliert. Wie gezeigt wurde, steht dies jedoch in Verbindung mit gesetzten Diskursen der Messe und bezieht sich auf die politische Agenda Macrons, mit der dieser nach Frankfurt gereist war. Dass der französische Präsident und Eribon - auf gegensätzliche Weise - die europäische Kohäsion beschworen, ist auch einer politischen Aktualität geschuldet. Macron wartete zu dieser Zeit vergeblich auf eine Antwort der deutschen Bundesregierung auf seine Vorschläge, die er zwei Wochen zuvor in seiner Sorbonne-Rede unterbreitet und auch am Messeeröffnungstag vor Frankfurter Studierenden erneut diskutierte (Wiegel 2017: 183). Nicht zuletzt, weil er dabei von Daniel Cohn-Bendit sekundiert wurde, wurde diese auch in Deutschland stark wahrgenommen. Die deutsche Bundesregierung hatte sich bis dahin zu diesen Vorschlägen noch nicht geäußert, weshalb Macrons Vorschläge wie ein Elefant im Raum standen. Dies wurde teilweise auch auf der Messe thematisiert, etwa von dem Politikwissenschaftler Claus Leggewie, 44 DOI 10.2357/ ldm-2020-0045 Dossier der mit Robert Menasse über dessen Europa-Roman Die Hauptstadt diskutierte: „Es ist zum vierten Mal der Versuch von Macron, die deutsche Politik aufzuwecken und zu sagen: Könnt ihr bitte mal antworten auf das, was ich die ganze Zeit vorschlage? “ (Herberg 2017: L5). Dass Menasse mit Die Hauptstadt - ebenfalls am Eröffnungstag - mit dem deutschen Buchpreis ausgezeichnet wurde, machte das Europathema auch im Feuilleton noch präsenter. 7 Der Europadiskurs - ob von der Literatur, der Buchmesse oder der Politik gesetzt -, und die kritische Stimme Eribons fallen im Messealltag und in der begleitenden Berichterstattung demnach mehrfach ineinander. 5. Eribons Sichtbarkeit auf der Messe und in der Presse Trotz - und gerade wegen - seiner Absage war Eribon auf der Messe präsent: 8 Noch am Eröffnungsabend trat er - wiederum neben Robert Menasse - auf der Bühne der im Schauspiel Frankfurt stattfindenden Open Books-Eröffnung auf (cf. Hladek 2017: 26). 9 Das Begleitprogramm listet weitere Auftritte auf, so etwa am 11.10. ein Gespräch auf dem ‚Blauen Sofa‘ (cf. Aguigah 2017), am 12.10. ein Auftritt an der im Gastpavillon ausgestellten Gutenbergdruckpresse - also eine durchaus ‚offizielle‘, wenn auch nicht politisch konnotierte Veranstaltung -, sowie am selben Tag ein Gespräch mit Annie Ernaux in der Evangelischen Akademie Frankfurt. In der Presse konnte Eribon nicht nur von diesen thematischen Zusammenhängen für seine Sichtbarkeit profitieren, sondern insbesondere von einer medialen Zuspitzung auf wenige Autorinnen und Autoren. Mehr als 5000 Presseartikel widmeten sich der Frankfurter Buchmesse - Paul de Sinety erklärt sich diesen Presseerfolg wiederum auch mit den französischen Präsidentschaftswahlen, die dem deutschen Frankreichinteresse einen zusätzlichen Schub verliehen hätten (Hertwig 2018b: 132); so erklärt sich auch Sandra Kegel im Frankreichspecial der FAZ die „wiedererwachte Neugier“ (Kegel 2017b: L1; cf. Hethey/ Struve 2018: 76) am Nachbarland. Die Sammeldarstellungen in den Literaturbeilagen der Zeitungen wollen die Vielfalt der französischen littérature-monde - aber dann doch wieder: v. a. der Literatur aus Frankreich - zeigen. Allgemein wird dieser eine große Lebendigkeit und Vielfalt bescheinigt - vorbei seien die Zeiten, in denen man in Deutschland eine „gewisse Dürftigkeit der französischen Gegenwartsliteratur beklagte“ (Altwegg 2017b: 11). Wie Hethey/ Struve festhalten (2018: 75), behandelt die Presse sowohl die Messe als Ganzes wie einzelne Autoren. Beide Themenfelder fallen naturgemäß ineinander, jedoch nicht völlig: Besonders die Ambition der Buchmesse, Vielfalt und Diversität zu bewerben, wird zwar abgebildet, indem AutorInnen unterschiedlicher Strömungen, Länder und Genres vorgestellt werden - allerdings sind es immer dieselben. Es fällt auf, dass von den 130 offiziell eingeladen Autorinnen und Autoren (nicht zu reden von den unzähligen anderen, die im Buchmessejahr übersetzt worden waren) nur ein geringer Anteil in der überregionalen Presse Erwähnung fanden. Einige Beispiele mögen dies verdeutlichen: Die Kulturbeilage des Spiegel (40/ 2017) widmete sich Virginie Despentes, Didier Eribon und Leïla Slimani. In der Taz DOI 10.2357/ ldm-2020-0045 45 Dossier (10.12.2017) wurden Gaël Faye, Eribon, Annie Ernaux und Houellebecq besprochen; In der ZEIT-Literaturbeilage (05.10.2017) ging es im einführenden Artikel um Houellebecq, Emmanuel Carrère, Despentes, Ernaux, Eribon, Édouard Louis (Radisch 2017: 16-21), außerdem Tristan Garcia, Catherine Millet und Hélène Cixous. Das Buchmesse-Special der FAS (08.10.2017) beginnt mit einem Interview mit Daniel Cohn-Bendit, gefolgt von Besprechungen und Interviews mit Houellebecq, Faye - unter dem Eribon entliehenen Titel „Rückkehr nach Burundi“ (Encke 2017: 43) -, Louis, schließlich Jean-Philippe Toussaint, Millet, Yasmina Reza, Slimani und schließlich Eribon, dessen Buch La Société comme verdict (Gesellschaft als Urteil) wiederum unter der Eribon-Anspielung „Rückkehr zur Rückkehr“ (Riechelmann 2017: 56) besprochen wird. 10 In der Süddeutschen Zeitung schließlich finden sich in einem Sonderteil zur Buchmesse (10.10.2017): Faye, Roman Gary, Ernaux, „Asterix“, und Eribons o. g. Erklärung. Man kann den Literaturbeilagen demnach durchaus bescheinigen, die von den Gastlandorganisatoren angestrebte diversité abzubilden, dies jedoch mit einem sehr begrenzten Inventar bekannter Namen, die als Vertreter einer oder mehrerer Strömungen der frankophonen Gegenwartsliteratur angeführt werden: Eribon dient dabei mal als Beispiel für ein Schreiben zwischen Autobiographie und Theorie - als Repräsentant „einer neuen Aufrichtigkeit“ (Radisch 2017: 16-21; cf. Hethey/ Struve 2018: 80-81). In der Süddeutschen Zeitung heißt es, die Bücher von Eribon und Louis seien „Beispiele einer persönlich gefärbten literarischen Gesellschaftskritik“ (Hanimann 2017b). In dieser Lesart gilt Eribon eher als Autor einer „große[n] literarische[n] Überraschung“ (Rapp 2017: 3). Auf der anderen Seite steht Eribon stellvertretend für ein „klassisches linkes Großprojekt: Kritik und Veränderung der gesellschaftlichen Machtverhältnisse“ (2017: 36), wie es in der Zeit heißt, wo auch die Verbindungen zwischen Eribon, Geoffroy de Lagasnerie (die sich ihre Bücher gegenseitig widmen) und Édouard Louis thematisiert wird (Cammann 2017: 37). 11 Gerade die drei letztgenannten bildeten - gegen den mit Macron milden Houellebecq - auf der Messe „fast schon ein eigenes Einsatzkommando“ gegen den Präsidenten, wie Julia Encke festhält (2017: 42). Die meisten Erwähnungen Eribons sind einführenden, kursorischen Charakters; es geht mehr um eine allgemeine Haltung als um eine Detailanalyse. Die Relevanz Eribons wird mit seinem bereits bewiesenen Erfolg begründet. Abseits der Überblicksdarstellungen aus Anlass der Buchmesse wird auch Eribons gerade in deutscher Übersetzung erschienenes Buch La Société comme verdict vorgestellt, und dies in der Regel im regulären Feuilleton und deutlich ausführlicher, was zu einer noch gesteigerten Sichtbarkeit des Autors in dieser Woche beiträgt: Als Repräsentant gleich mehrerer literarischer Tendenzen und als Autor einer Neuerscheinung. Die Rezensionen des Buchs sind durchaus durchwachsen - kritisiert wird u. a. sein Umfang, eine geringe empirische Grundlage (cf. Nachtwey 2017) sowie der grundsätzliche Widerspruch des Erfolgs Eribons in einem System, das er als undurchlässig kritisiert: 46 DOI 10.2357/ ldm-2020-0045 Dossier Und die Kultur? Wird von Eribon als „Faschismus der Eliten“ abgefertigt. Mit dem Einwand seiner Kritiker, seine eigene berufliche Karriere ließe sich Eribons Analysen widersprechend doch gerade als Beleg sozialer Mobilität selbst in Frankreich deuten, setzt sich Eribon auch hier nicht auseinander. […]. Dabei kann auch Eribon seinen Stolz nicht verbergen über sein Dazugehören zur kulturellen Elite - „ich begriff, ich verstand, ich schrieb, ich kannte, war befreundet mit“ - so geht es Seite um Seite. (Wagner 2017: 10) Der Rezensent unterschlägt, dass Eribon sich dieses Widerspruchs sehr wohl bewusst zeigt und ihn in La Société comme verdict mehrfach thematisiert (cf. Eribon 2014: 62). Gleichwohl lässt er sich auch auf Eribons Präsenz auf der Buchmesse beziehen: Die prominente Teilnahme am Gastlandauftritt als einer Institution der Repräsentation (auch von Staatsmacht, von kulturellem Kapital) führt in gewisser Weise in den Kern des grundsätzlichen Dilemmas, das er in La Société comme verdict benennt: Entrer dans une „profession“, dans un milieu, c’est inévitablement adapter son corps et son esprit aux réquisits explicites ou tacites d’un univers qui a existé avant qu’on ne cherche à s’y faire une place et qui ne nous l’accorde qu’à cette condition […]. (Eribon 2014: 113) An dieses Zitat anknüpfend, kann man festhalten, dass Eribon die Bedingungen des ihm durch die Buchmesse „angebotenen Raums“ zu nutzen gewusst hat. Es spricht für den Frankreichauftritt sowie die Buchmesse in ihrer Gesamtheit, dass auf ihr auch gegenläufige Diskurse einen Platz finden und Sichtbarkeit erlangen. 12 6. Fazit Eine Buchmesse ist ein Repräsentationsort (cf. Niemeier 2001: 102): für die Politik, die Kulturwirtschaft, die Autoren - Akteure mit naturgemäß nicht deckungsgleichen Interessen. Sie ist demnach auch „Anlass und Ort politischer Reflexion und Diskussion“ (Hethey/ Struve 2018: 80). Anhand von Didier Eribons Platz auf der Messe und insbesondere in seiner Konfrontation mit Macron lässt sich ein solcher - auf besonders großer Bühne ausgetragener - Repräsentationskonflikt illustrieren. Die mit der Messe und ihren Mechanismen verbundene Sichtbarkeit hat er auf seine Weise zu nutzen gewusst: Gerade wegen seiner Abwesenheit am Eröffnungsabend war Eribon einer der präsentesten Autoren. Als „nicht-intentionaler Mittler“ im deutsch-französischen Feld, der eine Gegenposition zur offiziellen Repräsentanz des Gastlandes (in Gestalt des Präsidenten) vertritt, findet er seinen Platz im Programm. Vom Zusammenfallen einer auf der Messe geführten Werte- und Europadebatte sowie von medialen Zuspitzungen konnte Eribon nur profitieren, da er stellvertretend als einer der obersten Vertreter einer ganzen politischen, aber auch literarischen Tendenz geführt wurde. Als Schwelle, über die man stolpert. DOI 10.2357/ ldm-2020-0045 47 Dossier Aguigah, René, „Paradoxien der Scham. Didier Eribon: ‚Gesellschaft als Urteil‘“, www. deutschlandfunkkultur.de/ didier-eribon-gesellschaft-als-urteil-paradoxien-der-scham.1270. de.html? dram: article_id=398613 (publiziert im Oktober 2017, letzter Aufruf am 19.12.2020). Altwegg, Jürgen, „Eine Verlegerin für den Élysée-Palast“, www.faz.net/ aktuell/ feuilleton/ debatten/ francoise-nyssen-wird-kulturministerin-15022404.html (publiziert im Mai 2017, letzter Aufruf am 19.12.2020) (2017a). —, „Diese Schriftsteller machen gewaltig Eindruck“, in: FAZ, 239, 14.10.2017 (b), 11. Anastasio, Matteo, „Neue Sprachen der Literatur ‚auf Französisch‘. 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Benyahia-Kouider/ Leménager (2014) sowie Bosshard (2018: 26). 4 So hatte Houellebecq im Frühjahr in der „Émission politique“ gesagt, dass er - wäre er kein Nicht-Wähler - Macron wählen würde, denn er sei zu reich für Marine Le Pen oder Jean- Luc Mélenchon (cf. Encke 2017). 5 https: / / didiereribon.blogspot.com/ 2017/ 10/ pourquoi-je-nassisterai-pas.html? q=pr%C3% A9sident&fbclid=IwAR1IQdqa8sb39Zx0gHsL7AJAvwd_H_pgd-egfPke0i0pJnoTNT700CqtZFI (publiziert am 11.10.2017, letzter Zugriff am 14.05.2021). 6 So wird etwa Virginie Despentes, die sich später vehement gegen Maron wendet (Heyer 2018), in zeitlicher Nähe zur Buchmesse noch zitiert, sie sehe in Macron die Verkörperung einer „neuen Männlichkeit“ (cf. Martini 2017). Lediglich Barthels (2017) spricht von „den Intellektuellen“ gegen Macron, bezieht sich inhaltlich dann aber doch wieder nur auf Eribon. 7 Auch Mathias Énard ist zu nennen, der auf der Leipziger Buchmesse den Buchpreis zur Europäischen Verständigung erhielt (Kegel 2017). Cf. weiter zu den Europadiskursen auf der Messe Hethey/ Struve (2018: 78). 50 DOI 10.2357/ ldm-2020-0045 Dossier 8 Die Liste seiner offiziellen Termine hat er auf seiner Facebook-Seite veröffentlicht: www.facebook.com/ permalink.php? story_fbid=1068516416585463&id=221260801311033 (letzter Zugriff: 14.05.2021). 9 Auch in der Berichterstattung über diesen Abend wird Eribon als Antipode Macrons herausgestellt: So habe „Kulturdezernentin Ina Hartwig wie beschwipst von ihrer Begegnung vor drei Stunden mit Macron“ geschwärmt, notiert ein Redakteur, der Eribon dazu in Opposition stellt, allerdings auch bemerkt, dessen Auftritt sei „nicht frei von teils sozialromantischen Schicksalsnoten“ gewesen (Hladek 2017: 26). 10 Mit ebendiesem Titel - Rückkehr zur Rückkehr - ist im Übrigen auch die Eribon- Kurzbesprechung in der Spiegel-Kulturbeilage überschrieben (Rapp 2017: 3). 11 Auch Hethey/ Struve (2018: 81) situieren Eribon in ihrer Auswertung des Pressespiegels in einer Reihe mit personenbezogenen Artikeln zu Tristan Garcia, Geoffroy de Lagasnerie und Édouard Louis. 12 In diesem Zusammenhang ist auch auf weitere Diskussionen zu verweisen. So wurde auch die kritische Frage, ob es sich bei der Einladung einer Reihe subsaharischer Verlage zu einem Gemeinschaftsstand nicht um einen gönnerhaften Kulturimperialismus Frankreichs handele, auf der Messe selbst mitthematisiert (cf. Rhein 2018). DOI 10.2357/ ldm-2020-0046 51 Dossier Gregor Schuhen Erfolgsmodell Autosoziobiografie? Didier Eribons literarische Erben in Deutschland (Daniela Dröscher und Christian Baron) 1. Gleichzeitigkeit des Ungleichzeitigen: Eribon und Ernaux in Deutschland Die Neuübersetzung der Schriften von Annie Ernaux durch den Suhrkamp-Verlag (seit 2017) wäre ohne den Erfolg von Didier Eribons Rückkehr nach Reims (2016) wohl kaum denkbar gewesen. Dieser Befund entbehrt nicht einer gewissen Ironie, gehört doch Ernaux neben Pierre Bourdieu zu den erklärten Vorbildern Eribons (cf. dazu Eribon 2013: 99-165). Annie Ernaux galt hierzulande lange Zeit eher als Insidertipp oder wurde allenfalls sporadisch in literaturwissenschaftlichen Seminaren behandelt. Erst durch die Neuausgabe in der Übersetzung von Sonja Finck avanciert sie neben Eribon und Édouard Louis zum kulturellen Sprachrohr, wann immer die soziale Frage im frankreichspezifischen Kontext verhandelt wird (cf. z. B. ihren Kommentar zur Gilets-Jaunes-Bewegung in der Zeit vom 6. Dezember 2018). Die Chronologie der Veröffentlichungen - Eribon 2016, Ernaux 2017 - mag meine Eingangsthese stützen, sagt aber noch nichts aus über die Gründe für den immensen Erfolg der Ernaux-Neuedition, denn es handelt sich hierbei keineswegs nur um einen Feuilleton-Hype, sondern auch um eine kommerzielle Erfolgsgeschichte. Auch hier muss zunächst ein Blick auf die Rezeption von Rückkehr nach Reims geworfen werden. Das Presse-Dossier des Suhrkamp-Verlages umfasst nicht weniger als 38 Seiten. Die erste Rezension von Gustav Seibt, die am 21. Mai 2016 in der SZ erscheint, stellt die erste hymnische Stimme im Chor der Lobgesänge dar, die bis Ende desselben Jahres nicht verstummen. Trotz der sieben Jahre, die zwischen dem Erscheinen des französischen Originals und der deutschen Übersetzung von Tobias Haberkorn liegen, gilt Rückkehr nach Reims als „überragend aufschlussreich“ (Seibt 2016: 20), als „Buch der Stunde“ (Müller-Lobeck 2016: 15) von „existenzieller Wucht“ (Krause 2016: 2), dessen Autor gleich mehrfach das Prädikat des „Meisterdenkers“ (Rapp 2016: 139, Seibt 2016: 20) zugesprochen wird. Flankiert wird die positive Rezeption durch Interviews mit Eribon, bis schließlich 2017 Thomas Ostermeiers Theater-Adaption auf dem Manchester International Festival Weltpremiere feiert. Eribon war hierzulande bis dato eher als Foucault-Biograf und als intellektueller Schwulenaktivist bekannt. Nach dem Erfolg von Rückkehr nach Reims rückt er gleichsam über Nacht zu der kritischen Stimme aus Frankreich auf, die sich zu Wort meldet, sobald aktuelle Probleme auf der Agenda stehen, seien es der zunehmende Rechtsruck, gesellschaftliche Spaltungen oder das Schicksal der ehemaligen Arbeiterklasse nach der Deindustrialisierung. Immer häufiger jedoch tut er dies nicht allein. In seinem Fahrwasser schwimmen zumeist die beiden deutlich jüngeren Schüler Édouard Louis, seines Zeichens Erfolgsautor autobiografischer Texte, und Geoffroy 52 DOI 10.2357/ ldm-2020-0046 Dossier de Lagasnerie, Sozialphilosoph. Louis hatte bereits 2015, also ein Jahr vor der Übersetzung von Retour à Reims, im deutschsprachigen Raum einen Achtungserfolg mit seinem Debütroman Das Ende von Eddy; Lagasnerie veröffentlicht 2016 seine Studie zur Kunst der Revolte ebenfalls im Suhrkamp-Verlag. Das Trio inszeniert sich häufig als linker Intellektuellenzirkel, widmet sich gegenseitig seine Texte und tritt gemeinsam auf, so etwa in Harvard (2018) oder beim Literaturfestival in Berlin (2019), und verkörpert damit gewissermaßen das von Bourdieu angestrebte Ideal des „intellectuel collectif“ (cf. Schultheis 2019, Schuhen 2021). Als Frankreich 2017 Gastland auf der Frankfurter Buchmesse ist, nimmt das Interesse an den drei Autoren sowie an Ernaux noch erheblich zu. In vielen Berichterstattungen werden Eribon und Ernaux in einem Atemzug genannt, so etwa von Gerrit Bartels im Tagesspiegel: Überdies sind da solche, die oft aus dem Norden Frankreichs und aus Arbeiterfamilien stammen und im Moment viel von sich reden machen: Annie Ernaux, Édouard Louis oder Didier Eribon. Sie verstehen sich als „Ethnografen ihrer selbst“, versuchen sich in ihren Büchern an einer Selbstanalyse, die sie gleichzeitig als Gesellschaftsanalyse verstehen. Ihre Lebenserzählungen betten sie zudem in die „große“ Geschichte ein. (Bartels 2017) Ernaux’ Die Jahre erscheint zur Eröffnung der Buchmesse und profitiert von der medialen Aufmerksamkeit ihres Nachfolgers Eribon und dessen cercle. Auch der Name Bourdieu taucht als Inspirationsquelle in einigen Berichterstattungen auf (cf. Minkmar 2017), so dass hier die Ahnenfolge klar abgesteckt wird: Das Quintett Bourdieu-Ernaux-Eribon-Louis-Lagasnerie erinnert an eine intellektuelle Familienaufstellung, einen Stammbaum engagierten Schreibens gegen soziale Ungleichheiten. Es kommt auch sporadisch zu gemeinsamen Stellungnahmen, so etwa zu den Gilets Jaunes oder Beiträgen in einem Band, der das Erbe Bourdieus würdigt (cf. Louis 2013). In Frankreich gilt Ernaux längst als politisch linke und literarische Institution, als starke Stimme im Kampf gegen Neoliberalismus und neofeudale Strukturen im Bildungssystem. Eribon, Louis und Lagasnerie sind medial zwar auch präsent, aber es scheint, als sei ihr Stellenwert in Deutschland deutlich höher. Möglicherweise liegt das an den Themen ihrer Werke, die in Frankreich auf eine lange Tradition zurückblicken, die mindestens bis zu den Romanen von Zola zurückreicht. Der Begründer des literarischen Naturalismus hat die soziale Frage schon Ende des 19. Jahrhunderts als Thema in den literarischen Kanon eingeführt und mit seinem gesellschaftspolitischen Engagement die Figur des Intellektuellen maßgeblich geprägt (cf. Jurt 2012). Betrachtet man nun die deutsche Editions- und Rezeptionsgeschichte, fällt auf, dass nicht nur Eribon vor Ernaux erschienen ist, sondern Louis’ Debütroman, also das Werk des Jüngsten, am Anfang dieser Genealogie steht. Kennzeichnend für dieses intergenerationelle ‚Familienunternehmen‘ sind neben der Prägung durch die Soziologie Bourdieus die soziale Herkunft der drei Autoren, mithin ihr Status als transclasses (cf. Jaquet 2014) sowie - in formaler Hinsicht - die Wahl des hybriden Genres der Autosoziobiografie. Dieses Zusammenspiel von autobiografisch vermit- DOI 10.2357/ ldm-2020-0046 53 Dossier telter Narrativität und gesellschaftsdiagnostischer Faktualität gehört auch für Spoerhase zu den Grundmerkmalen einer jeden Autosoziobiografie: „ein Genre, das das Persönliche mit dem Politischen, die soziologische Theorie mit der literarischen Form, die Selbstmit der Gesellschaftsanalyse verbindet“ (Spoerhase 2018: 232). Ernaux’ Texte gehören ebenso in diese Kategorie wie auch Bourdieus postum erschienene Esquisse pour une auto-analyse (2002/ 05), in der die analytischen Passagen jedoch deutlich mehr Raum einnehmen als in den récits von Ernaux. Man könnte sagen, dass Eribon eher dem Vorbild Bourdieu nacheifert, während sich Louis stärker an Ernaux orientiert. Diese von Klassenflüchtlingen verfasste literarische Form kennt in Deutschland bis Eribon und Ernaux kaum Vorbilder. Sie scheinen mithin einen Nerv getroffen zu haben, da die fokussierten Problemlagen auch hierzulande immer mehr an Relevanz gewinnen, insbesondere der zunehmende Rechtsruck, das Abgleiten der unteren Schichten in die Prekarität sowie die Unwahrscheinlichkeit eines Bildungsaufstiegs. Dass sich seit 2016 auch einiges in der deutschsprachigen Literatur geändert hat, davon soll im Folgenden die Rede sein. Sowohl der kommerzielle Erfolg als auch die Aufmerksamkeit seitens der Feuilletons haben dazu geführt, dass es inzwischen einige deutsche Ableger dieser Gattung gibt, so etwa Daniela Dröschers autobiografischen Essay Zeige deine Klasse (2018), in dem Eribon als ‚Türöffner‘ charakterisiert wird, dann Christian Barons Lebensbericht Ein Mann seiner Klasse (2020). Auch im Bereich der Autofiktion ist eine vermehrte literarische Auseinandersetzung mit der Klassenfrage nicht zu übersehen. Zu nennen sind etwa Anke Stellings Roman Schäfchen im Trockenen (2018), der die Geschichte einer transfuge de classe im Berliner Bobo-Milieu schildert, und Deniz Ohdes Debütroman Streulicht (2020). Stellings Roman bescheinigt die SZ einen „Willen zur soziologischen Genauigkeit“ (Bisky 2018), der an Eribon denken lasse. Bevor ich mich mit Daniela Dröscher und Christian Baron zwei sehr unterschiedlichen Texten widme, kann bereits vorab konstatiert werden, dass Eribons Rückkehr nach Reims nicht nur innerhalb der Editionsgeschichte französischer Autosoziobiografien hierzulande eine Katalysatorfunktion zuzusprechen ist, sondern dass Eribon auch in der noch jungen Geschichte deutschsprachiger Ableger dieses Genres eine Initiatorrolle zukommt. 2. Daniela Dröschers Zeige deine Klasse (2018) Mit insgesamt elf namentlichen Erwähnungen ist Eribon neben Bourdieu, der immerhin auf zehn Einträge im nicht vorhandenen Personenregister kommt, mit knappem Vorsprung der am häufigsten aufgerufene Kronzeuge in Daniela Dröschers essayistischem Lebensbericht, der im Untertitel die Geschichte meiner sozialen Herkunft annonciert. Ernaux kommt auf vier Nennungen, darunter eines der drei Mottos des Buchs. Allein diese Auflistung gibt im Zusammenspiel mit dem Titel des Essays ersten Aufschluss über die intellektuelle Marschrichtung von Dröschers Erinnerungen an ihre Kindheit und Jugend in der rheinland-pfälzischen Provinz. Auch wenn die 54 DOI 10.2357/ ldm-2020-0046 Dossier Chronologie größtenteils gewahrt bleibt, schreibt Dröscher eher fragmentarisch-assoziativ, benutzt typographische Hervorhebungen, arbeitet bevorzugt mit Listen und Tabellen und liebt Fußnoten, in denen sie „‚anökonomische‘ weiterführende Gedanken [versammelt], die im Haupttext keinen Platz finden“ (Dröscher 2018: 29). Die Lust am Fragmentarischen und Taxonomischen erinnert teilweise an Ernaux, aber insbesondere das abschließende „ABC der Scham“ gemahnt an Roland Barthes’ alphabetisch angeordnete autobiografische Skizzen in Roland Barthes par Roland Barthes (1975). Der Begriff der Scham dürfte einer der am meisten verwendeten des Textes sein, eng gefolgt von Bourdieus Habitus-Begriff. Man könnte Dröschers Memoiren, wenn man sie in der diskursiven Echokammer des Trios Eribon-Ernaux- Bourdieu liest, etwas zutiefst Epigonenhaftes attestieren, ja, in ihnen den Versuch sehen, auf der Erfolgswelle französischer Autosoziobiografien mitzuschwimmen. Dass dem nicht - oder nur bedingt - so ist, erschließt sich im direkten Vergleich der Lebensgeschichten. Eribon, Ernaux und auch Bourdieu schreiben über ihre soziale Herkunft aus der Arbeiterklasse der Nachkriegszeit, den sog. classes populaires. Der klassenspezifische Abstand zwischen dem einfachen Herkunftsmilieu ihrer Eltern und dem akademisch-intellektuellen Umfeld ihres Erwachsenenalters ist deutlich größer als bei Dröscher. Sie stammt aus einem wohlhabenden Elternhaus: der Vater Maschinentechniker, die Mutter Fremdsprachenkorrespondentin, beide Eltern Profiteure der Wirtschaftswunderzeit, wenngleich ohne akademischen Abschluss. Die Mutter ist leidenschaftliche Leserin, aber stark übergewichtig, der Vater begeisterter Hörer klassischer Musik, jedoch außer Stande Noten zu lesen. Diesen beiden Einschränkungen, die Dröscher sorgfältig schon im Prolog ihrer Aufzeichnungen auflistet, entspringt das Gefühl der sozialen Scham, das sie erst durch die Lektüre Eribons adäquat zu fassen versteht: Ich las das Buch [Rückkehr nach Reims, G. S.] atemlos, mit heißen Ohren, und entdeckte darin im Nachhall eine Hintertür für mich. Obgleich ich mit liebevollen, wohlhabenden, gebildeten Eltern aufgewachsen bin, habe auch ich gelernt, mich für meine Eltern zu schämen. Die Scham gehörte lange Zeit sogar so untrennbar zu mir wie das Atemholen (Dröscher 2018: 21, Herv. G. S.). Wie bereits angedeutet, arbeitet Dröscher oft mit solchen konzedierenden Konstruktionen, um das eigene Milieu zu analysieren: „Als Wochenzeitung aber gab es bei uns kein Blatt mit Feuilletonteil […]. Mein Vater liebt klassische Musik […], aber Noten lesen kann er nicht“ (Dröscher 2018: 17, Herv. G. S.). Der sich anschließende Hinweis auf Bourdieus Die feinen Unterschiede - im Original: La distinction - liefert gleich die Beschreibung der eigenen Vorgehensweise, nämlich das Aufzeigen von Distinktionsmerkmalen. Distinktion meint im Deutschen zunächst einmal das Sichunterscheiden von anderen, impliziert mithin den modus operandi des Vergleichens. Im Französischen umfasst der Begriff distinction zwei Bedeutungsebenen, nämlich das „Erkennen eines Unterschieds und das positive Abheben von Anderem“ (Rehbein 2014: 76), was eine Wertung einschließt, auf die Bourdieu aufmerksam macht, DOI 10.2357/ ldm-2020-0046 55 Dossier indem er Geschmack und Lebensstil der Bourgeoisie untersucht und diese als normativ und gesamtgesellschaftlich erstrebenswert klassifiziert. In den beiden Zitaten aus Zeige deine Klasse findet eine doppelte Form der Distinktion statt: Im ersten leitet die Konjunktion „obgleich“ die positive Distinktion im direkten Vergleich zu Eribons Kindheit ein, während im zweiten Zitat mithilfe des doppelten „aber“ das eigene Milieu als defizitär wahrgenommen wird, ohne jedoch explizit auf den Lebensstil der Bourgeoisie als Standard hinzuweisen, der eher stillschweigend als ‚natürlich‘ vorausgesetzt wird: „Die Herrschenden haben die Macht, ihren eigenen Lebensstil als vollkommen geltend durchzusetzen, also als notwendig und natürlich“ (Rehbein 2014: 77). Im Grunde steckt Dröscher mit diesen beiden Vergleichen die klassenspezifische Amplitude ab, auf der sie sich im Folgenden zu verorten versucht: ganz unten (Eribons Herkunftsmilieu) und ganz oben (Milieu der Bourgeoisie). Es geht Dröscher also um den Parcours des Bildungsaufsteigers, der im eigenen Fall deutlich kürzer ausfällt als bei Eribon, nämlich vom gut betuchten und wohlbehüteten Provinz-Elternhaus zum bildungsbürgerlichen Bobo-Lifestyle der deutschen Hauptstadt. Unter Ausblendung eines rein wissenschaftlichen Erkenntnisinteresses fragt man sich nach der Lektüre von Zeige deine Kasse an manchen Stellen zwangsläufig: Wo ist das Problem? Wenn man die Lebensgeschichten von Ernaux, Bourdieu, Eribon oder auch Louis gelesen hat, die hier ganz offensichtlich Pate gestanden haben, und die uns teils soziologische, teils narrative Einblicke in ein Herkunftsmilieu bieten, das es bis dato nur selten auf den Höhenkamm der Literatur geschafft hat, wirken die Quellen der sozialen Scham bei Dröscher mitunter seltsam bemüht. Diese werden subsumiert unter der Trias von „drei Ds - dicke Mutter, Dorf, Dialekt“ (Dröscher 2018: 23). Es geht also um das Gefühl der Scham angesichts des opulenten mütterlichen Körpers, angesichts der provinziellen Herkunft sowie angesichts des eigenen Dialekts, der hier eher als zu überwindender Soziolekt daherkommt. Die soziale Scham bei Dröscher verliert, wenn man sie mit den Schilderungen von Ernaux oder Eribon vergleicht, an existenzieller Wucht, da sie - trotz des Buchtitels - weniger als Klassenschicksal kategorisiert, sondern sehr viel stärker individualisiert, ja subjektiviert wird. „Anders als Eribon“, so Dröscher, „bin ich keine Soziologin. Alles, was ich habe, ist meine Subjektivität“ (Dröscher 2018: 28). Nähme man die Autorin hier beim Wort, müsste man sich allerdings über die Vielzahl an Fußnoten und Zitaten wundern, die nahezu allesamt soziologischer oder kulturwissenschaftlicher Provenienz sind. Agnieszka Komorowska schreibt zu Beginn ihrer Studie zur Gattung der „hontofiction“, dass es sich bei der Scham um „einen Modus des Weltbezugs“ handele und dass dem Gefühl der Scham stets die „Verbindung von Subjektivität und sozio-historischer Realität“ (Komorowska 2017: 9) inhärent sei. Die Scham, so Komorowska, wird in autofiktionalen Texten, die um die Brüchigkeit des eigenen Subjektstatus zirkulieren, „als Erkenntnismoment modelliert, in dem diese Brüchigkeit schreibend eingeholt wird“ (Komorowska 2017: 11). So erläutert auch Dröscher, dass sie sich ihrer eigenen Scham erst nach dem „Betreten der Universität“ (Dröscher/ Meyer 2018) bewusst geworden sei und sich ihrer im Modus des Schreibens entledigen konnte. 56 DOI 10.2357/ ldm-2020-0046 Dossier Bis sie an diesen Punkt des Schreibens gekommen sei, habe sie erst bei Eribon die entsprechende Sprache für diesen Zugang finden müssen. Auch Ernaux fehlt zunächst der Zugang zum Ursprung ihrer eigenen Scham, wovon sie in ihrem gleichnamigen Werk La honte (1997) berichtet. Sie erinnert sich an eine Ur-Szene, als ihr Vater eines Sonntags in einem Akt zügelloser Wut versucht, ihre Mutter zu töten. Mithilfe von Medien - Fotografien, Zeitungsartikeln, Chansons - versucht sie im Folgenden zu rekonstruieren, warum dieses traumatische Erlebnis zur Keimzelle ihrer Scham werden konnte und wann sie sich ihrer bewusst wurde - auch Ernaux nennt den Eintritt in die Privatschule ihre „entrée dans la honte“ (Ernaux 1997: 116). Sowohl bei Dröscher als auch bei Ernaux führt das Kennenlernen eines neuen, privilegierten Milieus zum Vergleich mit dem eigenen Herkunftsmilieu, was wiederum den Prozess der Scham in Gang setzt: „qu’à la honte il faut plus de honte encore“ (Ernaux 1997: 120). Beide Autorinnen versuchen demnach, sich schreibend von diesem zugleich subjektiv empfundenen wie sozial induzierten Schamgefühl zu befreien. Man kann also mit Komorowska festhalten, dass der Scham nicht nur eine biografische Relevanz, sondern auch ein poetologischer Stimulus innewohnt (cf. Komorowska 2017: 222). Eribon widmet sich erst im Nachfolgeband von Retour à Reims, in La société comme verdict (2013), ausführlich dem Gefühl der Scham. Dort schreibt er: „On peut avoir écrit un livre sur la honte et n’avoir pas réussi à la dépasser“ (Eribon 2013: 36). Grund dafür sei der gespaltene Habitus des sich Schämenden, mithin seine innere Zerrissenheit als primordiale Matrix jenes „sentiment complexe“ (ibid.). Dies mag erklären, warum das eigene Bewusstsein der Scham erst einsetzt, wenn sich der gespaltene Habitus im Augenblick des Milieuwechsels herausbildet. Mit Bezug auf Bourdieu stellt Dröscher folgerichtig die Universität als „den Ort meiner sozialen Geburt “ (Dröscher 2018: 24, kursiv i. O.) dar, da an diesem Ort nicht nur das nötige kulturelle Kapital für den Bildungsaufstieg zur Verfügung gestellt wird, sondern ein Dispositiv der Erkenntnis, was das eigene Anderssein angeht. Angehörigen solcher minoritärer Gruppen attestiert Eribon die Scham als „une des dimensions fondamentales de leur rapport au monde“ (Eribon 2013: 47). Dabei spielt es kaum eine Rolle, wie groß die Entfernung zwischen dem Herkunftsmilieu und der neuen, noch fremden Welt des Zielmilieus ist. Ein Blick in die eher zwiespältige Rezeption von Dröschers Memoir zeigt, dass sie sich in allen Kritiken dem Vergleich mit Eribon stellen muss. Die Rezension in der SZ beschäftigt sich im ersten Drittel ausschließlich mit Eribon, der als „Hausgott der autobiografischen Erzählung“ von Daniela Dröscher identifiziert wird (Mayer 2018), bevor auch nur einen Satz über den eigentlichen Gegenstand der Rezension verloren wird. Bettina Schabert von literaturkritik.de und Hannah Bethke von der FAZ kommen beide zum Ergebnis, dass sie Dröschers Erzählung im Vergleich mit Eribon und Bourdieu für zu reduktionistisch halten, da der eigene Lebensweg zu eindimensional vom Standpunkt der sozialen Klasse aus betrachtet wird, wobei andere Faktoren ausgeblendet würden, wie etwa Charakter oder Persönlichkeit (cf. Schabert DOI 10.2357/ ldm-2020-0046 57 Dossier 2018, Bethke 2018). Gemein ist den Rezensionen auch die Frage nach dem eigentlichen Problem der Autorin. Diese Frage wirft natürlich ein grundsätzliches Problem im Umgang mit der Gattung Autosoziobiografie auf: Dürfen nur die extremen Bildungsaufsteiger über ihre soziale Herkunft schreiben? Wie groß muss der Abstand zwischen Herkunft und Ankunft sein, um soziale Scham plausibel erscheinen zu lassen? Oder überspitzt formuliert: Wer hat das Recht auf Scham? Der meritokratisch geprägte Imperativ des „Stell dich nicht so an! “ scheint an mehreren Stellen der Rezensionen auf und sagt letzten Endes mehr über die Rezensentinnen aus als über die Qualität des Essays. Interessant erscheint mir, dass der ‚Hausgott‘ Eribon nicht nur die Genese von Zeige deine Klasse geprägt hat, sondern auch seine Rezeption. 3. Christian Barons Ein Mann seiner Klasse (2020) Auf den ersten Blick scheint es eine Reihe von Parallelen zu geben zwischen dem autobiografischen Essay von Daniela Dröscher und dem Lebensbericht Ein Mann seiner Klasse des Journalisten und Autors Christian Baron: Beide stammen aus Rheinland-Pfalz und schreiben über ihre soziale Herkunft; auf dem Buchdeckel beider Werke taucht - wie übrigens auch schon bei Eribon - ein eigenes Kindheitsfoto auf; beide führen den Klassenbegriff schon im Titel ihrer Aufzeichnungen und setzen damit den Fokus auf soziologische Aspekte. Hier enden allerdings schon die offenkundigen Gemeinsamkeiten. Baron schreibt über seine Herkunft aus prekären Verhältnissen in einem sozial benachteiligten Viertel Kaiserslauterns. Der Vater, auf den auch der Buchtitel abzielt, arbeitet als Möbelpacker, ist dem Alkohol verfallen und neigt zu massiven Gewaltausbrüchen gegen sämtliche Familienmitglieder. Die Mutter stirbt früh an Krebs, als der junge Christian zehn Jahre alt ist. Er und seine drei Geschwister wachsen bei der Schwester der Mutter auf, der Vater spielt fortan kaum noch eine Rolle. Mithilfe einer weiteren Tante gelingt Christian der mühsame Aufstieg, zunächst als Sportreporter bei einer Regionalzeitung, dann als Student der Politikwissenschaft, Soziologie und Germanistik in Trier und schließlich als Politikredakteur der Wochenzeitschrift Der Freitag sowie als freier Mitarbeiter für andere Zeitungen. So gehört Baron 2016 auch zu den Laudatoren von Rückkehr nach Reims, das er für die sozialistische Tageszeitung Neues Deutschland rezensiert (Baron 2016a). Im selben Jahr bringt er unter dem Titel Proleten, Pöbel, Parasiten. Warum die Linken die Arbeiter verachten ein Sachbuch in einem Berliner Kleinstverlag heraus (Baron 2016b), das ebenfalls aus eigenen Erfahrungen den Bedeutungsverlust linker Parteien innerhalb der unteren Schichten diskutiert. Diesem Buch kam jedoch kaum Aufmerksamkeit zu, lediglich ein Verriss in der SZ beklagte die simplifizierenden Thesen - insbesondere im Vergleich zu Eribon, dem wiederum der genervte Rezensent „salonlinkes Schlaubergertum“ (Pollmer 2017) attestiert. Mit Ein Mann seiner Klasse ändert sich Anfang 2020 schlagartig die mediale Aufmerksamkeitsökonomie, was möglicherweise an dem renommierteren Verlag Claassen und an der Form des Textes liegt. Barons zweites Werk ist als klassische Autobiografie konzipiert, die sowohl auf sozialanalytische Passagen als auch auf 58 DOI 10.2357/ ldm-2020-0046 Dossier postmoderne Stilmerkmale und direkte Bezugnahmen auf seine französischen Vorbilder verzichtet. Dass es einen großen Einfluss vor allem durch die Werke von Louis und Ernaux gegeben hat, davon berichtet Baron in zahlreichen Interviews. In einem der ersten Interviews, das Baron dem Spiegel gegeben hat, wird er auf den Einfluss von Eribon und Louis angesprochen und antwortet recht eindeutig: „Louis ist ein Vorbild“ (Baron/ Frank 2020). Vergleicht man nun Barons Text mit den Werken von Louis, so kommt man zum Schluss, dass Ein Mann seiner Klasse gleichsam das Amalgam aus Louis’ En finir avec Eddy Bellegueule (2014) und seinem letzten Text Qui a tué mon père (2018) darstellt. In seinem Erstling hatte Louis bereits mit dem ersten Satz „De mon enfance je n’ai aucun souvenir heureux“ (Louis 2014: 13) den Ton angegeben, den seine schonungslosen Memoiren bis zum Ende beibehalten werden: Gewalt, Angst und Scham bestimmen die Erinnerungen an das eigene Herkunftsmilieu: die Männer allesamt Säufer und Schläger, die Frauen junge Mütter, Hausfrauen oder Kassiererinnen. Der Vater wird als homophober Fabrikarbeiter beschrieben und stellt eine der Hauptzielscheiben der Wut des Erzählers dar. Louis hat mit der düsteren Schilderung seines Heimatdorfes nicht nur Lob, sondern auch Kritik auf sich gezogen - vor allem von den Bewohner/ inne/ n des kleinen Ortes Hallencourt (cf. Keßler 2018: 217-223). Qui a tué mon père liefert den Versuch einer ‚Wiedergutmachung‘ - insbesondere an der Darstellung seines Vaters. Louis macht deutlich, dass sein Vater nicht von Natur aus gewalttätig und ungebildet sei, sondern dass sein schlichter Geist und geschundener Körper als Resultat der französischen Sozial- und Bildungspolitik der letzten zwanzig Jahre zu deuten seien: „L’histoire de ta souffrance porte des noms. L’histoire de ta vie est l’histoire de ces personnes qui se sont succédé pour t’abattre. L’histoire de ton corps accuse l’histoire politique“ (Louis 2018: 84). Baron führt nun in seinem Memoir die widerstrebenden Gefühle des klassenflüchtigen Sohnes zusammen, die Louis penibel getrennt auf zwei Werke verteilt: Wut und Verständnis, Ekel und Vergebung, Scham und Stolz, wie folgendes Zitat zum Ausdruck bringt: „Unser Vater war ein Mann seiner Klasse. Ein Mann, der kaum eine Wahl hatte, weil er wegen seines gewalttätigen Vaters und einer ihn nicht auffangenden Gesellschaft zu dem werden musste, der er nun einmal war. Das entschuldigt nichts, aber erklärt alles“ (Baron 2020: 19). Die offenkundige Nähe zu den Werken von Louis - sowohl formal-stilistisch als auch inhaltlich - ändert allerdings kaum etwas daran, dass die Literaturkritik immer wieder und vor allem den Namen Eribon ins Spiel bringt, wenn sie eigentlich über Baron schreibt. Besonders erhellend ist in diesem Zusammenhang eine Podiumsdiskussion, die im November 2020 in Rostock stattgefunden hat. Es handelt sich um eine Veranstaltung unter dem Motto „Uncanny Valleys. Der schmale Grat zwischen Fakt und Fiktion“. Neben Baron sind die Schriftstellerin Isabelle Lehn sowie der Literaturwissenschaftler Johannes Franzen zu Gast, um über den „Boom autobiografischen, autofiktionalen und dokumentarischen Erzählens mitsamt all seinen Fallstricken“ zu diskutieren, wie es im Ankündigungstext geschrieben stand. Der Name Eribon taucht gleich prominent zu Beginn der Anmoderation von Christine Watty auf und kehrt DOI 10.2357/ ldm-2020-0046 59 Dossier mehrfach wieder, insbesondere in den Fragen an und Aussagen von Christian Baron. Zunächst reagiert Baron auf die Stilkritik an seinem Werk, die Ijoma Mangold in der Zeit vorgebracht hatte. Mangold gesteht Baron zwar zu, dass er in seiner Autobiografie einen „reizvolle[n] Stoff“ entfalte, aber dass es bei der „literarischen Durchdringung des Stoffs […] noch Luft nach oben“ (Mangold 2020) gebe. Zu diesem Urteil kommt der Zeit-Literaturchef nicht, ohne zuvor noch an Didier Eribon erinnert und die Schublade der „Unterklassen-Literatur“ (ibid.) aufgemacht zu haben. Tatsächlich erinnert Barons Schreibweise in ihrer Schlichtheit eher an Ernaux oder Louis. Ernaux charakterisiert ihren eigenen Stil in ihrer ‚Auto-Poetologie‘ L’écriture comme un couteau als „écriture plate“, die möglichst keine „complicité avec le lecteur cultivé“ (Ernaux 2003: 34) aufkommen lassen wolle. Baron argumentiert in seiner Replik auf Mangold ganz ähnlich: „Trotzdem war es mein Ehrgeiz […], im Gegensatz etwa zu Didier Eribon, eine Schreibweise zu finden, die auch denen zugänglich ist, deren Leben ich hier mitverarbeite, weil ich es sonst als zusätzlichen […] Klassenverrat empfunden hätte, wenn ich es zumindest nicht versuche“ (Baron/ Watty 2020). Im selben Interview erzählt Baron die Anekdote, dass er seinem Bruder eine erste Fassung des Textes zu lesen gegeben habe, in der noch direkte Zitate von Kafka, Louis und Ernaux eingeflochten waren. Der Bruder habe ihn daraufhin nach dem Grund solcher Zitate gefragt und ihm unterstellt, dadurch besonders schlau erscheinen zu wollen. Baron fühlte sich ertappt und hat die Fremdzitate entfernt - man könnte mithin in Barons Lebensbericht den Anti-Dröscher sehen, aber eben auch den Anti-Eribon, was Baron auch so zum Ausdruck bringt: „Ich bin nicht der deutsche Eribon! “ (Baron/ Watty 2020). Gleichwohl muss er bekennen - „Fluch und Segen zugleich“ (ibid.) -, dass er ohne Eribon wohl niemals seinen Text bei Claassen hätte veröffentlichen können: „Ohne diesen großen Erfolg, den Eribon in Deutschland, den Suhrkamp mit diesem Buch hatte, hätte ich wahrscheinlich mein Buch nicht bei einem renommierten Verlag machen können“ (ibid.). Insofern lässt sich trotz aller Abgrenzungsversuche konstatieren, dass auch im Fall Baron Eribon als ‚Türöffner‘ fungiert hat, allerdings weniger im Hinblick auf die Genese des eigenen Textes als hinsichtlich seiner geglückten Publikation und Rezeption: Abgesehen von dem stilistischen Verriss in der Zeit ist das Feuilleton-Echo zu Ein Mann seiner Klasse eher wohlwollend, Julia Encke spricht gar von einem der „besten literarischen Debüts [der] Saison“ (Encke 2020). 4. Eribon, immer wieder Eribon Die Rezeption der beiden Werke von Daniela Dröscher und Christian Baron zeigt deutlich auf, dass sich der Name Didier Eribon hierzulande längst von seinem Träger gelöst hat und zu einer eigenen Marke geworden ist. Dies gilt insbesondere für die Feuilletons, aber auch teilweise für die Sozialwissenschaften. Um das Branding dieses Labels zu definieren, bedarf es einiger Schlagwörter, die im Zusammenhang mit den Eribon-Verweisen immer wieder auftauchen: Unterschicht, Bildungsaufstieg, 60 DOI 10.2357/ ldm-2020-0046 Dossier Klassenflucht, Klassenkampf, Sozialdeterminismus und - vor allem - die erste Person Singular. Dass Eribon seinerseits einen Großteil seines analytischen Werkzeugkastens den Theorien und Modellen Bourdieus zu verdanken hat, geht dabei nahezu unter. Das mag daran liegen, dass sich die Lektüre von Rückkehr nach Reims durch die ständigen Bezüge zum eigenen (Er-)Leben weniger mühsam gestaltet als das Studium der teils sperrigen Syntax von Bourdieu. Auch eröffnen die autobiografischen Passagen des Werkes ganz offenkundig eine größere Anschlussfähigkeit für literarische Nachfolger/ innen. Bourdieu selbst hat die erste Person Singular immer vermieden, wenn man von seinem letzten Werk absieht, der bereits genannten Esquisse pour une auto-analyse, in der er mit der Ich-Feindlichkeit des wissenschaftlichen Diskurses bricht. Eribon bezieht sich mehrfach auf Bourdieus Soziologischen Selbstversuch und wirft seinem Lehrer sogar vor, zu zögerlich mit dem Einbezug der eigenen Lebenserfahrungen umgegangen zu sein (cf. Eribon 2013: 74). Die Mischung aus Sozialanalyse und notorischer Ich-Bezogenheit hat aber nicht nur das literarische Feld im engeren Sinne beflügelt, sondern trägt auch erste Früchte im wissenschaftlichen Bereich. 2020 erscheint ein bemerkenswerter sozialwissenschaftlicher Sammelband mit dem Titel Vom Arbeiterkind zur Professur. Sozialer Aufstieg in der Wissenschaft (Reuter et al. 2020). Schon das Motto zum einführenden Kapitel stammt aus Rückkehr nach Reims und auch die ersten Seiten machen keinen Hehl aus ihrer Inspiration durch das Werk des Franzosen (cf. Möller et al. 2020: 9sq.). Das Kernstück des Bandes ist überschrieben mit „Autobiographische Notizen“ (131-376) und versammelt insgesamt 19 Selbstzeugnisse von Professor/ inn/ en aus verschiedenen wissenschaftlichen Disziplinen, in denen jeweils der eigene Bildungsaufstieg erzählt wird. Jeder dieser „Notizen“ ist ein Kinderfoto des bzw. der Verfasser/ in vorangestellt. Ebenfalls im Jahr 2020 veröffentlicht die Journalistin Anna Mayr im Hanser-Verlag den Essay Die Elenden. Warum unsere Gesellschaft Arbeitslose verachtet und sie dennoch braucht. Darin schreibt sie über ihren eigenen Lebensweg aus einem Haushalt arbeitsloser Eltern. Die erste Eribon- Erwähnung lässt nicht lange auf sich warten: „Deutsche Leser scheinen in den letzten Jahren ganz versessen auf Milieubetrachtungsbücher zu sein. Es begann mit dem Soziologen Didier Eribon, dessen Essay Rückkehr nach Reims in Frankreich bereits 2009 erschien, in Deutschland erst 2016“ (Mayr 2020: 21). Dieser ‚Versessenheit der deutschen Leser‘ kommt Mayr auf den folgenden Seiten entgegen und versucht den Nachweis zu erbringen, dass unsere Gesellschaft die Arbeitslosen einerseits braucht, um sich positiv von ihnen abzugrenzen, und andererseits, um den Billigjob-Sektor immer mehr zu erweitern. Die eigene Lebensgeschichte dient dabei als heuristisches Anschauungsmaterial. Davon ausgehend sei abschließend noch einmal nach den möglichen Gründen gefragt, warum die Deutschen derzeit so versessen sind auf die von Eribon inspirierten ‚Milieubetrachtungsbücher‘. Welchen Nerv hat Eribon getroffen, dass er sowohl auf Seiten der Literaturkritik als auch unter Kunstschaffenden und in den (Sozial-)Wissenschaften innerhalb von nur vier Jahren zur eigenen Marke werden konnte? Rein inhaltlich betrachtet stellt Rückkehr nach Reims eine Zeitdiagnose dar, DOI 10.2357/ ldm-2020-0046 61 Dossier die 2016 schon sieben Jahre alt ist. Vergleicht man jedoch den französischen und den deutschen Kontext, wird deutlich, dass die Transformationsprozesse wie Rechtsruck, Prekarisierung und soziale Spaltungen erst mit einiger Verzögerung in Deutschland virulent werden. Die PEGIDA -Bewegung etwa konstituiert sich im Oktober 2014; die Erfolgsgeschichte der AfD nimmt erst im Jahr danach, konkret im Sommer der sog. ‚Flüchtlingskrise‘, richtig an Fahrt auf. So musste Rückkehr nach Reims im Sommer 2016 als ‚Buch der Stunde‘ aufgefasst werden, als Erklärungsangebot für eine zutiefst verunsicherte Nation. Allerdings muss einschränkend hinzugefügt werden, dass Eribons etwas einseitige These von den Abgehängten als Kernklientel der Rechtspopulisten hierzulande nur bedingt greift, wie u. a. Philip Manow herausgearbeitet hat. Manow stellt fest, dass vor allem „eine Gruppe der eher kulturell Entfremdeten als Wählerschaft der Populisten“ (Manow 2018: 75) identifiziert werden kann - die „wirklich ‚Abgehängten‘, die Marginalisierten, das neue Prekariat und die sonst wie Benachteiligten“ (ibid.: 72) gehen oft gar nicht mehr wählen. Gleichwohl bleibt Eribon präsent im Diskurs, was nicht allein an seinen soziologischen Analysen und Diagnosen liegen dürfte, sondern vor allem an den Einblicken in ein Milieu, das er in den autobiografischen Passagen des Textes offenlegt. Diese Form des narrativ vermittelten Sozialrealismus ist, wie eingangs dargestellt, im deutschen Kontext deutlich weniger verbreitet. Die französische Tradition der Proletarierliteratur setzt sich vom 19. Jahrhundert fort bis zu den Texten von Ernaux, was vielleicht erklärt, warum Eribon in Frankreich nicht dieselbe Innovationskraft zugesprochen wird wie hierzulande, und führt zu dem bereits aufgestellten Befund, dass Eribon auf dem deutschen Literaturmarkt nicht nur zum ‚Türöffner‘ für junge deutsche Autor/ inn/ en wurde, sondern auch für sein eigenes Vorbild Annie Ernaux. Baron, Christian, „Vom aufhaltsamen Aufstieg der Rechten“, in: Neues Deutschland, 09.08. 2016 (2016a), 16. —, Proleten, Pöbel, Parasiten. Warum die Linken die Arbeiter verachten, Berlin, Das Neue Berlin, 2016b. —, Ein Mann seiner Klasse, Berlin, Claasen, 2020. Baron, Christian / Frank, Arno „Die ‚einfachen Leute‘ sind eben sehr kompliziert“, Interview vom 04.02.2020, www.spiegel.de/ kultur/ literatur/ christian-baron-es-muessten-mehr-menschenueber-die-einfachen-leute-schreiben-a-50108a2d-f8ca-4877-abee-de15e5b25f39 (letzter Aufruf am 10.07.2021). Baron, Christian / Watty, Christiane, „Uncanny Valleys. Der schmale Grat zwischen Fakt und Fiktion“, Online-Podiumsdiskussion Rostock vom 25.11.2020, www.youtube.com/ watch? v=vS0_nTrUJ8E&t=3367s (letzter Aufruf am 10.07.2021). Bartels, Gerrit, „Gemeinsam für die europäische Kultur. Frankreich bei der Buchmesse“, in: Der Tagesspiegel, 11.10.2017, www.tagesspiegel.de/ kultur/ frankreich-bei-der-buchmessegemeinsam-fuer-die-europaeische-kultur/ 20440448.html (letzter Aufruf am 10.07.2021). Bethke, Hannah, „Alles eine Frage der Klassenlage? “, in: Frankfurter Allgemeine Zeitung, 26.10.2018, www.faz.net/ aktuell/ karriere-hochschule/ das-neue-sachbuch-zeige-deine-klassevon-daniela-droescher-15852864-p2.html (letzter Aufruf am 10.07.2021). 62 DOI 10.2357/ ldm-2020-0046 Dossier Bisky, Jens, „Nehmt das, naive Freunde der Mittelklasse! “, in: Süddeutsche Zeitung, 28.11. 2018, www.sueddeutsche.de/ kultur/ anke-stelling-schaefchen-im-trockenen-rezension-1.4232312 (letzter Aufruf am 10.07.2021). Dröscher, Daniela, Zeige deine Klasse. 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Schultheis, Franz, Unternehmen Bourdieu. Ein Erfahrungsbericht, Bielefeld, transcript, 2019. Seibt, Gustav, „Der Verrat der Kaviarlinken“, in: Süddeutsche Zeitung, 21./ 22.05.2016, 20. Spoerhase, Carlos, „Nachwort. Aufstiegsangst: Zur Autosoziobiographie des Klassenübergängers“, in: Chantal Jaquet, Zwischen den Klassen. Über die Nicht-Reproduktion sozialer Macht, Konstanz, Konstanz University Press, 2018, 231-253. 64 DOI 10.2357/ ldm-2020-0047 Dossier Christoph Schaub Autosoziobiografisches und autofiktionales Schreiben über Klasse in Didier Eribons Retour à Reims, Daniela Dröschers Zeige deine Klasse und Karin Strucks Klassenliebe Autosoziobiografisches und autofiktionales Schreiben über Klasse In ihrem autosoziobiografischen Text Zeige deine Klasse. Die Geschichte meiner sozialen Herkunft (2018), der in ausdrücklicher Bezugnahme auf die 2016 erschienene deutsche Übersetzung von Retour à Reims (2009) entstanden ist, schreibt Daniela Dröscher: „Der französische Soziologe Didier Eribon hat hierzulande eine Tür aufgemacht. Man redet wieder über soziale Unterschiede“ (Dröscher 2018: 21). Die Annahme der Autorin wird auch im deutschsprachigen Feuilleton geteilt. Anlässlich ihrer Rezension von Zeige deine Klasse argumentiert beispielsweise Verena Mayer, dass Eribon ein „Revival der ‚Klasse‘“ „ausgelöst“ habe, durch das Debatten über die Arbeiterklasse und Klassismus nun (wieder) öffentlich geführt würden (Mayer 2018). Anna Mayr, die der Welle autofiktionaler „Milieubetrachtungsbücher“ kritisch gegenübersteht und sich dennoch Elementen dieses Genres bedient, setzt seinen Beginn ebenfalls mit der Rezeption Eribons seit 2016 an (Mayr 2020: 21; cf. ähnlich Scholz 2019: 127-129). In der Tat ist in Deutschland und international verstärkt eine literarische Produktion formal, inhaltlich und politisch heterogener Texte über vor allem die proletarische Klasse und soziale Herkunft zu beobachten, die sich im Spannungsfeld von Autosoziobiografie und Autofiktion bewegen. Diese teilen bestimmte Merkmale und nehmen entweder direkt auf Retour à Reims Bezug oder sind zumindest zeitlich nach diesem Text entstanden: beispielsweise Édouard Louis’ En finir avec Eddy Bellegueule (2014) in Frankreich, J. D. Vances Hillbilly Elegy (2016) in den USA und Gabriel Krauzes Who they was (2020) in England; in Deutschland neben Zeige deine Klasse etwa Christian Barons Ein Mann seiner Klasse (2020) und Deniz Ohdes Streulicht (2020). Eine neue Debatte über Klasse und die Bedeutung dieser Kategorie für Fragen nach sozialer Herkunft, mithin ein neues autofiktionales Schreiben über Klasse sei in Deutschland, so die weithin geteilte Grundannahme dieses Diskurses, nicht ohne den Einfluss von Eribons Text zu verstehen. Vor diesem Hintergrund möchte mein Aufsatz erstens zur Diskussion des Einflusses Eribons auf autofiktionales und autosoziobiografisches Schreiben über Klasse in deutscher Sprache beitragen, indem er Retour à Reims und Zeige deine Klasse vergleicht. Im Mittelpunkt dieses Vergleichs stehen zum einen Fragen der Lektüre - also Leseerfahrungen und intertextuelle Bezüge als Produktionsbedingungen und verfahren eines solchen Schreibens über Klasse; zum anderen die Auseinandersetzung mit Scham als einem zentralen Thema beider Texte, das eng mit Fragen einer DOI 10.2357/ ldm-2020-0047 65 Dossier intersektional verschränkten sozialen Position und von Klassenwechseln verbunden ist. Dabei wird insbesondere gezeigt, dass Dröscher Eribons poetisch-methodisches Vorgehen für einen Klassenkontext adaptiert, der sich von dem für Eribon zentralen Arbeiter*innenmilieu unterscheidet. Dröscher geht es nämlich darum, die „Fiktion der Mittelklassen-Normalität“ des rheinland-pfälzischen, ländlichen Raums und damit ihre eigene Biografie einer Klassenanalyse zu unterziehen (Dröscher 2018: 29). Zweitens möchte ich vorschlagen, dass die Rolle eines ‚Türöffners‘ oder Diskursbegründers, die Eribon in der deutschen Debatte zugesprochen wird, symptomatisch dafür ist, dass ältere Traditionen autofiktionalen Schreibens über Klasse durch den literarischen wie literaturwissenschaftlichen Diskurs geschichtlich verschüttet wurden. Sie scheinen bisher kaum als potenzielle Bezugspunkte einer neuen literarischen Auseinandersetzung mit Klasse sichtbar zu sein und mobilisiert zu werden. Dieses Argument wird entwickelt, indem die Autosoziobiografien Eribons und Dröschers auf den autofiktionalen Roman Klassenliebe (1973) von Karin Struck bezogen werden. Die Rede von autofiktionalem und autosoziobiografischem Schreiben über Klasse bedarf eingangs einer Begriffserklärung. ‚Klasse‘ bezieht sich auf eine sozio-ökonomische Position und fungiert als Kategorie gesellschaftlicher Klassifikation, Stratifikation, Erfahrung, Politik und Identitätsbildung, die den Zugang zu materiellen oder symbolischen Ressourcen reguliert, mit Diskriminierung verbunden sein kann oder Solidarisierungen ermöglicht. ‚Klasse‘ ist dabei zusammen mit anderen Kategorien, die soziale Positionen betreffen, zu analysieren: bei Eribon sind insbesondere Sexualität und Geschlecht signifikant, bei Dröscher Geschlecht und Nationalität. Wesentlich ist zudem - gerade für die literaturwissenschaftliche Auseinandersetzung mit Klasse -, „dass die Klassenfrage unausweichlich zu einer Frage der Poesis, der Herstellung, der Formgebung: der Bildung in einem (entgrenzt) ästhetischen Sinne führt“ (Blome/ Eiden-Offe/ Weinberg 2010: 163), zu der sowohl Institutionen als auch literarische Genres beitragen (cf. Eiden-Offe 2017: 23-24). Autofiktionales und autosoziobiografisches Schreiben über Klasse bezeichnet dann einige von vielen literarischen Praktiken dieser poetischen Formung und Verhandlung von Klasse. Die Begriffe der ‚Autofiktionalität‘ und der ‚Autosoziobiografie‘ bestimmen die in Frage stehenden literarischen Praktiken genauer. 1 Autofiktion wird hier nicht als ein Genre verstanden, sondern als eine Schreibweise, die durch „verschiedene Formen der mehr oder weniger paradoxen Verknüpfung des referentiellen Paktes mit dem Fiktions-Pakt“ charakterisiert ist (Zipfel 2009: 311). Autofiktion umfasst also verschiedene Genres, wie etwa Strucks Roman, in dem sich „Autofiktion als eine besondere Art des fiktionalen Erzählens“ äußert (ibid.: 302). Die Autosoziobiografie verbindet hingegen die Autobiografie mit einer soziologischen (oder zumindest soziologisch beeinflussten) Analyse der eigenen Herkunft. 2 Damit teilt dieses Genre den Bezug auf das Autobiografische mit autofiktionalem Schreiben. Wie bei autofiktionalen Texten wird auch in autosoziobiografischen Texten die biografische Wirklichkeit literarisch mitgeformt, was von Eribon und Dröscher auch reflektiert wird (cf. Eribon 66 DOI 10.2357/ ldm-2020-0047 Dossier 2018: 13, 242-244; Dröscher 2018: 28-29, 39). Dröscher schreibt gar: „Wie jede Selbsterzählung ist auch diese eine erdichtete“ (ibid.: 28). Dennoch inszenieren sich die Texte Eribons und Dröschers im Gegensatz zum autofiktionalen Roman Strucks so, dass sie lediglich im Sinne des referenziellen Paktes rezipiert werden sollen. Neben dem autobiografischen Element teilen autofiktionales und autosoziobiografisches Schreiben eine weitere strukturelle Gemeinsamkeit. Folgt man Monika Wagner-Egelhaaf, „exponiert [der autofiktionale Text] den Autor“, und es besteht ein „Konnex von Autofiktion und Autorschaft“ (2013: 14). Eine ähnliche Exponierung der Autor*innen lässt sich auch für das Genre der Autosoziobiografie feststellen. In den Texten Eribons, Dröschers und Strucks geht dabei die erzählte und analysierte (Selbst)Bildung zur Autorschaft mit einem Klassenwechsel einher. Autorschaft ist hier durch die Formierung einer neuen Klassenposition geprägt. Der Autorposition von Eribon, Dröscher und Struck ist dabei eine „Übersetzungsleistung“ eingeschrieben, kraft derer über das eigene Herkunftsmilieu für eine von diesem unterschiedene Öffentlichkeit berichtet wird (Spoerhase 2017: 36). Eine solche Autorposition scheint charakteristischer Bestandteil sowohl des autofiktionalen als auch des autosoziobiografischen Schreibens über Klasse zu sein, wenn diesen eine Aufstiegsbiografie als Produktionsbedingung zugrunde liegt. Lektüren Obgleich Eribon und Dröscher eine Autorposition teilen, die durch einen Klassenwechsel und eine Bildung zu großstädtischen Intellektuellen - hier der Journalist, Universitätsprofessor und öffentliche Intellektuelle, dort die freie Schriftstellerin - charakterisiert ist, schreiben sie über unterschiedliche Klassen: Während der 1953 in Reims geborene und aufgewachsene Eribon über „ce milieu ouvrier […] et cette misère ouvrière“ berichtet (Eribon 2018: 19), steht die ländliche Mittelklasse im Mittelpunkt des Klassenwechsels der 1977 geborenen und in einem rheinland-pfälzischen Dorf aufgewachsenen Dröscher. Sowohl bezüglich des Blicks auf die eigene Biografie als auch hinsichtlich der für diesen konstitutiven sozialen Position unterscheiden sich Eribon und Dröscher, wie Letztere hervorhebt: „Anders als Eribon bin ich keine Soziologin. Alles, was ich habe, ist meine Subjektivität. Ich bin nicht nur als ‚Aufsteigerkind‘ sozialisiert, sondern auch als Frau und Tochter meiner ‚fremden‘ [weil von polnischen Eltern abstammenden; C. S.] Mutter“ (Dröscher 2018: 28). 3 Im Gegensatz zu Eribon - „[p]remier de ma famille à m’engager sur la voie d’une trajectoire ascendante“ (Eribon 2018: 86) - erzählt das „Aufsteigerkind“ Dröscher zwei Klassenwechselgeschichten zugleich: einerseits den Aufstieg ihrer Eltern, die „einer Welt der Bergmänner und Bauern [entstammten]“ und kein Abitur haben (Dröscher 2018: 18), in eine wohlhabende Mittelklassenexistenz; anderseits ihren eigenen Bildungsaufstieg, der über das Abitur zu Studium und Promotion und schließlich zu einer Karriere als Schriftstellerin führt. Das proletarische Milieu, das im Zentrum von Retours à Reims steht, ist in Dröschers Biografie um eine Genera- DOI 10.2357/ ldm-2020-0047 67 Dossier tion distanziert. 4 Als „erste Akademikerin […] meiner Kernfamilie“ bleibt ihr Bildungsaufstieg ambivalent, insofern er „progressiv, was Bildung, und regressiv, was materielle Sicherheit angeht“, ist (ibid.: 14, 24). Trotz dieser unterschiedlichen sozialen Positionen ähneln sich die Metaphorik und Begriffe, durch welche die Klassenwechsel in diesen Autosoziobiografien artikuliert werden. So spricht Eribon davon, „von einem Lager ins andere [zu] wechseln“ (Eribon 2016: 45; cf. Eribon 2018: 51), und Dröscher davon, „die Seiten [zu] wechseln“ (Dröscher 2018: 174); 5 geradezu leitmotivisch wird der Begriff der Verwirrung in Zeige deine Klasse wiederholt, während in Retour à Reims von Verunsicherung die Rede ist (Eribon 2016: 65; Eribon 2018: 72); zudem finden sich in den Texten viele Bilder der Verletzung und des Auseinanderklaffens: So schreibt Eribon beispielsweise von einem „Riss“ (Eribon 2016: 76; 2018: 82), Dröscher zum Beispiel von einer „Lücke“ und einer „Wunde“ (Dröscher 2018: 21, 28). 6 Es lässt sich hier lediglich spekulieren, ob solche Ähnlichkeiten zumindest teilweise einer Überschreibung der Klassenwechselerfahrung Dröschers durch ihre Lektüre von Eribon geschuldet sind, ob sie sich parallel entwickeln oder beide Autor*innen auf ein geteiltes Reservoir an Sprachbildern zurückgreifen. Jedenfalls ist mit Blick auf beide Texte die Verwendung einer ähnlichen metaphorischen Sprache zur Beschreibung einer anders situierten Klassenwechselgeschichte auffällig. Während sich die literarische Form der Autosoziobiografien Retour à Reims und Zeige deine Klasse stark unterscheidet, 7 teilen sie ein wissenschaftliches Objektivierungsverfahren, das sich insbesondere in Verweisen auf Fachliteratur in Fußnoten sowie der Verwendung sozial- und kulturtheoretischer Begriffe äußert. Daneben sind ihnen weitere Produktionsbedingungen und -verfahren gemeinsam: Zu diesen zählen nicht nur der Bildungsaufstieg selbst, sondern auch Fotos, Erzählungen und gezielte Telefonate mit Familienmitgliedern als Mittel zum Verstehen der sozialen Gemachtheit der eigenen Biografie. Außerdem sind Lektürebiografien und bestimmte Leseweisen wesentlich. Dies ist erstens deshalb entscheidend, weil sowohl Eribon als auch Dröscher das Lesen als eine Praktik der Distanzierung vom Herkunftsmilieu deuten (cf. Eribon 2018: 60; Dröscher 2018: 57, 121). Eine Ermöglichungsbedingung der Autorschaft von Subjekten, deren Klassenposition durch einen Klassenwechsel charakterisiert wird, ist dann die Herausbildung einer Lektürebiografie, die sie von ihrem Herkunftsmilieu unterscheidet. Zweitens sind Lektüren wichtig, insofern das Schreiben über die eigene Herkunft durch die Rezeption verwandter Texte mitermöglicht wird, wie Eribon deutlich macht: „Je me mis à lire avec frénésie tout ce qui pouvait se rapporter à ces thèmes. Je savais qu’un tel projet - écrire sur le ‚retour‘ - ne peut se mener à bien qu’à travers la médiation, je devrais dire le filtre, des références culturelles […]“ (Eribon 2018: 246). Dem autosoziobiografischen Schreiben über Klasse geht also in diesen Fällen das Lesen gerade auch von Literatur über Klasse voraus. Trotz Eribons Rede von der ‚Neutralisierung‘ einer „charge émotionelle“ durch die zwischen Lebenserfahrung und deren deutender Darstellung vermittelnde Lektüre herrschen bei Eribon und Dröscher identifikatorische Leseweisen vor (ibid.). Die 68 DOI 10.2357/ ldm-2020-0047 Dossier Gegenstände dieser Lektüren stellen zugleich poetisch-methodische Modelle für die Auseinandersetzung mit der eigenen Herkunft bereit. In Retour à Reims gilt dies für Werke von Annie Ernaux, James Baldwin, John Edgar Wideman und Raymond Williams. 8 Zwei Passagen müssen hier genügen, um mein Argument zu plausibilisieren: Le texte qu’il [Baldwin; C. S.] écrit pour lui [seinem Stiefvater; C. S.] rendre hommage peut donc s’interpréter comme le moyen d’accomplir ou, en tout cas, d’entamer ce ‚retour‘ mental en essayant de comprendre qui était ce personnage qu’il avait tant détesté et qu’il avait tant voulu fuir. Et, peut-être, en s’engagent dans ce processus d‘intellection historique et politique, devenir un jour capable de se réapproprier émotionnellement son propre passé […]. Comme Baldwin à propos du sien, j’en vins à penser que tout ce qu’avait été mon père […] avait été façonné par la violence du monde social. Comme Baldwin, dans un contexte fort différent, je suis certain que mon père portait en lui le poids d’une histoire écrasante […]. Exactement comme la mère de Baldwin, la mienne m’a dit : […]. (ibid.: 34-35) In dieser Passage fällt die Häufung der Konjunktion „comme“ auf, die trotz vieler Differenzen eine grundsätzliche Ähnlichkeit der Erfahrungen Baldwins und Eribons postuliert: Eribon liest Baldwin identifikatorisch als einen Schlüssel zum Verstehen der eigenen biografischen Erfahrung. Zugleich sieht er in Baldwins literarischer Auseinandersetzung mit seinem Stiefvater ein Modell für die literarische, analytische und emotionale Auseinandersetzung mit der eigenen sozialen Herkunft im Modus der - auch narrativen - Rückkehr. Auf ähnliche Weise liest Eribon auch Ernaux, wobei die identifikatorisch verwendete Konjunktion „comme“ erneut vorkommt: Je citai un passage qui m’avait beaucoup touché dans une interview d’Annie Ernaux […]. Comme elle, je ressentis la nécessité, dans le contexte d’un mouvement politique et de l’effervescence théorique qui l’accompagnait, de ‚plonger‘ dans ma mémoire et d’écrire pour ‚venger ma race‘. (Eribon 2018: 241-242) Die Gemeinsamkeit, die Eribon durch seine Lektüre herstellt, besteht nicht nur in einem geteilten Projekt, einer Erforschung der sozialen Vergangenheit, sondern auch in einer emotionalen Identifikation mit anderen Schreibenden mit einer ähnlichen sozialen Position. Eribons intertextueller Referenzrahmen charakterisiert zudem jene dem autosoziobiografischen und autofiktionalen Schreiben über Klasse zugrunde liegenden Erfahrungen als transnational geteilte, d. h., die erzählten Klassenerfahrungen sind keine national beschränkten und haben einen (potenziell) weltliterarischen Resonanzraum. Dies findet in Dröschers Bezug auf Eribon eine Bestätigung und Fortsetzung. Eribon wird für Dröscher zu einer durch Lesen angeeigneten Identifikationsinstanz; damit nimmt Eribons Text in Zeige deine Klasse eine ähnliche Funktion ein wie Texte Ernaux’ oder Baldwins in Retour à Reims. In Zeige deine Klasse finden sich zwölf über den gesamten Text verteilte direkte Referenzen auf Eribon, darunter längere Zitate. Während Eribon „avec frénésie“ liest und von bestimmten Passagen berührt wird, wird Dröscher körperlich von ihrer Eribon-Lektüre affiziert. Ähnlich wie DOI 10.2357/ ldm-2020-0047 69 Dossier Eribon lernt sie zudem durch diese identifikatorische, emotional bewegte Leseweise die Konsequenzen ihrer eigenen sozialen Herkunft verstehen. Statt der Konjunktion „comme“ betont nun das Adverb „auch“ die Stiftung einer Ähnlichkeitsbeziehung: „Ich las das Buch atemlos, mit heißen Ohren, und entdeckte darin eine Hintertür für mich. Obgleich ich mit liebevollen, wohlhabenden, gebildeten Eltern aufgewachsen bin, habe auch ich gelernt, mich für meine Eltern zu schämen“ (Dröscher 2018: 21). Und: „Erst aber als ich Eribon las, verstand ich, dass ich auch im Hinblick auf mein Herkunftsmilieu eine Scham zweiter Ordnung gelebt hatte“ (ibid.: 23). Insbesondere durch die collagehafte Einfügung von Eribon-Zitaten, die die erzählten eigenen Erfahrungen spiegeln und dadurch erhellen, bildet Zeige deine Klasse die Lektürepraxis der Autorin als Erkenntnisprozess in ihrer Schreibpraxis ab: Dies wird beispielsweise an ihrer Auseinandersetzung mit dem durch den Wechsel ins akademische Milieu erzeugten „Gefühl des Zu- SPÄT “ deutlich (ibid.: 192). Bei Dröscher führt die Lektüre Eribons so von „Blindheit“ zu Selbsterkenntnis als Einsicht in die soziale Gemachtheit der eigenen Emotionen, Verhaltens- und Denkweisen (ibid.: 15). 9 Allerdings fungieren bei Eribon und Dröscher Lesen und Schreiben nicht nur als Dimensionen intellektueller und emotionaler Bildung. Bücher - wie Eribon formuliert - konstituieren vielmehr „un point d’appui décisif dans le travail qu’il me fallait entreprendre pour me réinventer moi-même et reformuler ce que j’étais“ (Eribon 2018: 227), eine Selbstbildung, die durch einen Klassenwechsel geprägt und insbesondere durch Lektüre und Autorschaft praktiziert wird. Diese Selbstbildung und ‚Neuerfindung‘ Eribons und Dröschers, die wesentlich die Bildung in eine neue Klassenposition hinein ist, ist in ihren Bedingungen und Verfahren also zu einem nicht geringen Teil in einem weiten Sinne literarisch und artikuliert sich in der Autosoziobiografie als einer Form des Schreibens über Klasse. 10 Scham In ihrer Lektüre identifiziert Dröscher Scham als „[e]ine zentrale Kategorie“ von Retour à Reims (Dröscher 2018: 21). In der Tat hat Eribon am Beginn seiner Autosoziobiografie die Analyse von Scham - genauer: des Verhältnisses von sexueller und sozialer Scham - als einen Schlüssel zum Verständnis seiner eigenen Subjektivierung hervorgehoben. Die Frage nach diesem Verhältnis konstituiert eine Ausgangsfrage seines Schreibens über soziale Herkunft: Je devrais même énoncer la question en ces termes: „Pourquoi, moi qui ai tant éprouvé la honte sociale, la honte du milieu d’où je venais quand, une fois installé à Paris, j’ai connu des gens qui venaient de milieux sociaux si différents du mien, à qui souvent je mentais plus ou moins sur mes origines de classe, ou devant lesquels je me sentais profondément gêné d’avouer ces origines, pourquoi donc n’ai-je jamais eu l’idée d’aborder ce problème dans un livre ou un article? “ Formulons-le ainsi: il me fut plus facile d’écrire sur la honte sexuelle que sur la honte sociale. (Eribon 2018: 21) 70 DOI 10.2357/ ldm-2020-0047 Dossier In Retour à Reims kommt es also zu einer Differenzierung zwischen verschiedenen, miteinander in Verbindung stehenden Arten der Scham im Subjektivierungsprozess. Folgt man nun Bettina Kleiner, scheint die soziale Scham in Rückkehr nach Reims deshalb beharrlicher […], weil sie a) biografisch früher auftaucht als die sexuelle und weil b) soziale Herkunft in Bildungsinstitutionen sowohl in Leistungszuschreibungen als auch in akademische Anerkennungspraktiken eingelassen ist und Referenzen von Beschämungspraktiken aufgrund dieser Interdependenzen schwer ausgemacht werden können. (Kleiner 2020: 57) Dabei führe „[d]as Leiden an sozialer und sexueller Scham […] zur Abwendung von der Familie“, während „Sozialscham“ zugleich „eine Hinwendung zu Bildung und sexuelle Scham die Suche nach einem schwulen sozialen Leben“ ermögliche (ibid.: 62). Für Dröscher liegt in der Thematisierung von Scham eine entscheidende Grundlage ihrer Identifikation mit dem Projekt des französischen Soziologen, denn „[d]ie Scham gehörte lange Zeit sogar so untrennbar zu mir wie das Atemholen“ (ibid.). Die Autorin hebt an ihrer Erfahrung von Scham als einer quasi-naturalisierten Körperlichkeit das hervor, was die Forschung für Eribon gezeigt hat, nämlich dass „Eribons Von-der-Scham-Schreiben […] Scham als körperliches (Er-)Leben, als gezeichnete Subjektposition und soziales Sein“ in den Vordergrund gerückt habe (Kalmbach/ Kleinau/ Völker 2020: 2). Und ähnlich wie für Eribon, für den „Klassenscham […] weniger zugänglich“ gewesen sei als sexuelle Scham (Kleiner 2020: 62), war für Dröscher die soziale, klassenspezifische Gemachtheit der eigenen Scham nur schwierig zu erkennen (cf. Dröscher 2018: 14-15, 23). Die Kategorie der Scham ist dabei für die Autorin so grundlegend, dass sie Zeige deine Klasse geradezu paratextuell einklammert, sind doch der Prolog „Ein Gelächter und eine schmerzliche Scham“ und der letzte Teil „Alphabet der Scham“ betitelt (ibid.: 13, 215). Dröschers Scham ist jedoch nicht Eribons Scham, die Scham einer heterosexuellen Frau aus der Mittelklasse nicht die eines homosexuellen Mannes aus der Arbeiterklasse. Dröscher betont selbst diese soziale Situiertheit der Scham: „Ein Kind großbürgerlicher Eltern oder sozial selbstbewusster Arbeitereltern schämt sich anders für seine dicke Mutter als das Kind einer ‚Fremden‘ und eines verunsicherten Aufsteigers“ (ibid.: 113). Hinsichtlich der Rezeption des Schamdiskures von Retour à Reims in Zeige deine Klasse lässt sich also eine ausdifferenzierende Aneignung dieses Diskurses im Verhältnis insbesondere zur Klasse beobachten. Im Vergleich zu Eribon sind dabei zwei Aspekte hervorzuheben. Zum einen ergibt sich bei Dröscher aufgrund ihres Bildungsaufstiegs aus einer Mittelklassenposition heraus eine Art „Paradox“ der Scham (Dröscher 2018: 24). Hierbei schämt sich das Subjekt in zwei verschiedene soziale Richtungen: Als Kind und Jugendliche habe ich einer privilegierten Minderheit angehört und die Scham nach unten gelernt. Mit dem Eintritt in die Universität […] verlor ich dem Gefühl nach diesen privilegierten Status und lernte Stück für Stück die gegenläufige Scham nach oben. Anders DOI 10.2357/ ldm-2020-0047 71 Dossier gesagt habe ich der nach oben empfundenen Scham erlaubt, meine Privilegien zu überdecken […]. (ibid.) Diese Spezifik der Scham der Mittelklassen-Milieuwechslerin kann laut Dröscher aufgrund eines „[V]ernebel[ns]“ von Klassenprivilegien eine die gesellschaftliche Stratifikation stabilisierende Funktion haben (ibid.: 26). Scham kann allerdings auch zum Anlass werden, „mir meiner blinden Flecke und ungenutzten Handlungsmöglichkeiten bewusst zu werden“ (ibid.: 25), wenn sie zum Gegenstand kritischer Reflexion wird. 11 Während in Retour à Reims insbesondere das Verhältnis von sozialer und sexueller Scham im Mittelpunkt der Untersuchung steht, artikuliert sich in Zeige deine Klasse zum anderen die Scham eines mit einer Reihe von Ortswechseln verbundenen Bildungsaufstiegs im Verhältnis von (Mittel)Klasse und vergeschlechtlichtem Körper, Stadt-Land-Gegensatz, Sprache und Nation. Dröscher beschreibt in erster Linie eine „dreifaltige“ Herkunftsscham (ibid.: 153), die ihren Klassenwechsel charakterisiert: Zusätzlich zur Körperscham über meine Mutter prägt sich zu Beginn der Pubertät eine zweite Scham aus, die Scham über den Ort, an dem ich lebte. Unser kleines rheinland-pfälzisches Dorf, am Rand der Welt gelegen, schien mir mit einem Mal bevölkert von provinziellen Menschen, die in einem provinziellen Dialekt redeten. […] Zum dritten Pfeiler meiner Scham wurde der Dialekt der ländlichen Nahe-Region. Mein Vater sprach ihn so wie fast alle im Dorf. […] Ich lebte lang in der gefühlten Gefangenschaft dieser drei Ds - dicke Mutter, Dorf, Dialekt. (ibid.: 22-23) Zusätzlich kommt es biografisch später zu einer Transformation der Herkunftsscham im Verhältnis zur Kategorie der Nation. Diese wird darüber hinaus mit einer Erfahrung von race analogisiert: An der Universität trat eine vierte Scham, ein viertes D hinzu; die Scham, deutsch zu sein. Auch das ist eine Herkunftsscham - allerdings keine gemachte. Es ist ein primäre, ähnlich aufrichtig empfundene wie die Scham, die ich in London, genauer gesagt einem schwarzen Viertel lernte: die Scham, weiß zu sein. (ibid.: 23) In Zeige deine Klasse markiert die spezifische Ausformung des Schamdiskurses also die soziale Position (und teils die politische Positionierung) der Autorin. Zugleich wird deutlich, dass sich für Dröscher Scham gerade durch die Lektüre von Retour à Reims als Folie eines Verständnisses der eigenen sozialen Herkunft anbietet, ein Verständnis also, das somit auch durch die Praktik der identifikatorischen literarischen Rezeption mit gemacht ist. Dass es bei Dröscher eine grundsätzliche Anknüpfung an den Schamdiskurs Eribons gibt, legt aber auch nahe, dass Scham eine transnational über verschiedene Klassenpositionen hinweg geteilte Erfahrung von Klassenwechsler*innen ist. Dabei wird im Vergleich von Retour à Reims und Zeige deine Klasse sichtbar, dass der Zusammenhang von Scham und Klassenwechsel 72 DOI 10.2357/ ldm-2020-0047 Dossier sich in verschiedenen Klassen und ihren Verschränkungen mit anderen Herrschaftsverhältnissen unterschiedlich artikuliert. Die Rezeption Eribons in der deutschsprachigen Öffentlichkeit ermöglicht damit auch eine differenzierte Untersuchung des Zusammenhangs von Scham, sozialer Position und Aufstiegsnarrativen in einem transnationalen literarischen Kontext, der eine der Produktionsbedingungen der hier diskutierten Autosoziobiografien ist. 12 Verschüttete Traditionen In Zeige deine Klasse merkt Dröscher an, dass ein mangelndes Klassenbewusstsein verantwortlich für ihre ‚Verwirrung‘ über die eigene soziale Position gewesen sei. Die Abwesenheit eines solchen Selbstverständnisses hänge wesentlich mit dem Verschwinden der Kategorie der Klasse aus dem „offiziellen Diskurs“ und der Vorherrschaft der Kategorie der Schicht zusammen, die von der Autorin als weniger kollektivierend verstanden wird: Ich war nicht die Einzige, die derart verwirrt über der Realität schwebte. In der Zeit zwischen 1981 und 2000 gab es in Deutschland im offiziellen Diskurs kaum Klassenunterschiede. Aus der Klasse sollte die Schicht geworden sein. (Dröscher 2018: 19). Dröschers Selbstaussage trifft sich - wie eingangs skizziert - mit der im bürgerlichen und linksliberalen Feuilleton weitestgehend geteilten Einschätzung, dass erst seit Eribon wieder über (die proletarische) Klasse gesprochen und literarisch geschrieben sowie das Verhältnis von literarischer Produktion und Klasse thematisiert werde. Der von Dröscher aufgerufene Zeitraum korrespondiert allerdings zugleich ungefähr mit dem Zeitraum, in dem Forschungen zur proletarischen Klasse und ihrer Literatur aus dem literaturwissenschaftlichen Diskurs der Bundesrepublik Deutschland verschwanden. Waren im Zuge der Studierendenbewegung Interesse am Verhältnis von literarischer Praxis und Klasse durch linke Germanist*innen artikuliert sowie verschüttete Traditionen der Arbeiter*innenliteratur ausgegraben worden, kam diese Wissensproduktion in den frühen 1980er Jahren zumindest in ihrer Breite zu einem raschen Ende. 13 Erst ab etwa Mitte der 2010er Jahre lässt sich wieder ein verstärktes Interesse an diesen Fragen feststellen. 14 Durch die erneute Verschüttung gerieten auch ältere autofiktionale oder zumindest um biografische Erfahrungen kreisende Traditionen des Schreibens über Proletarier*innen eher aus dem Blick, die gerade wiederentdeckt worden oder entstanden waren: So zum Beispiel die Arbeiterkorrespondentenbewegung der Weimarer Republik, das im Malik-Verlag erschiene Ein Prolet erzählt. Lebensschilderung eines deutschen Arbeiters (1930) von Ludwig Turek oder Gerhard Zwerenz’ Kopf und Bauch. Die Geschichte eines Arbeiters, der unter die Intellektuellen gefallen ist (1971). Dadurch, so ließe sich vermuten, wurde es erst möglich und notwendig, dass Retour à Reims als der Text in Teilen der linksliberalen und linken Öffentlichkeit Deutschlands zirkulieren konnte, der einen neuen breiten (autobiografisch markierten) Diskurs über Klasse begründete. Natürlich spielten auch andere Gründe eine Rolle für die starke Rezeption Eribons. DOI 10.2357/ ldm-2020-0047 73 Dossier Insbesondere seine Auseinandersetzung mit dem Erstarken der Rechten ist hier zu nennen. Es ließe sich vor diesem Hintergrund kontrafaktisch fragen, welche alternativen Anschlüsse und Fortschreibungen von verschütteten Traditionen unter anderen Bedingungen möglich gewesen wären. Ein naheliegendes Beispiel, um eine solche Fragestellung zu plausibilisieren, liefert Karin Strucks 1973 erschienener autofiktionaler Roman Klassenliebe, ein Text, der in erster Linie im Kontext der Neuen Subjektivität und der feministischen Literatur, weniger als Beispiel einer Literatur über Klasse oder der Arbeiter*innenliteratur rezipiert worden ist. 15 Im Mittelpunkt des einem „tagebuchartige[n] Protokoll[]“ (Neuhaus-Koch 2011: 268) ähnelnden Textes steht ein - im Gegensatz zu den retrospektiven Aufstiegsnarrativen Eribons und Dröschers - krisenhafter Klassenwechsel, der sich als Bildungsaufstieg vollziehen soll(te): Die von Bauern und Landarbeitern abstammende Ich-Erzählerin droht an ihrer Dissertation zu scheitern. 16 Laut Eva Blome veranschaulicht der Roman, „dass deutschsprachige autobiografische Texte, die von der Erfahrung des Klassenwechsels berichten, bereits in den 1970er Jahren eine erste Konjunktur erlebten“ (Blome 2020). Ähnlich wie bei Eribon und Dröscher vollzieht sich die Auseinandersetzung mit der eigenen Klassenposition auch bei Struck über Lektüren (cf. Blome 2020). Der Klassenwechsel geht außerdem auch für Strucks autodiegetische Erzählerin mit Erfahrungen der sozialen Scham einher. So bekennt sie zum Beispiel mit Bezug auf alle Stationen ihres Bildungsaufstiegs: „Wer hält durch: immer geduckt in der Bank sitzen, vor lauter Angst, nichts zu können, auch zuletzt nichts zu können. Abitur ergaunern. Schein ergaunern. Das Gefühl: alles ist ergaunert“ (Struck 2013: 106). Die genannten Gründe plausibilisieren, weshalb Klassenliebe unter anderen literarischen Produktionsbedingungen - nämlich denen nicht abgebrochener Traditionen autofiktionalen Schreibens über Klasse - durchaus statt Retour à Reims als einer von vielen möglichen Anknüpfungspunkten für ein eigenes Schreiben über soziale Herkunft hätte fungieren können. Zudem hätte Klassenliebe eine solche Funktion vielleicht auch deshalb erfüllen können, weil dieser an der als subjektiv kodierten Form des Tagebuchs orientierte Text sich durchaus mit einer zentralen Aussage Dröschers trifft: „Anders als Eribon bin ich keine Soziologin. Alles, was ich habe, ist meine Subjektivität“ (Dröscher 2018: 28). Formal unterscheidet sich Klassenliebe allerdings grundlegend von den Autosoziobiografien Eribons und Dröschers, die sich „ihrem Gegenstand nur im Rückblick annähern“ und durch „eine distanzierte Haltung“ und „zeitliche[] Distanz zur vergangenen Subjektivität“ geprägt sind (Ernst 2020). Obgleich Analepsen Klassenliebe charakterisieren, operiert der Text im Modus eines Jetzt, das durch die Unmittelbarkeit der Krisenerfahrung des Klassenwechsels geprägt ist und diese emotional und intellektuell zu verhandeln versucht. Das vorherrschende Tempus des Romans ist dementsprechend das Präsens, auch weil der Klassenwechsel emotional nur teilweise in der Vergangenheit liegt. Im Gegensatz zu Dröscher und Eribon ist die Sprache aufgewühlt, der Text weniger narrativ geordnet. Der Roman ist nicht im Gestus des souveränen, wissenden, objektivierenden Rückblicks einer mehr oder weniger 74 DOI 10.2357/ ldm-2020-0047 Dossier erfolgreichen Aufsteigerin geschrieben, wie dies für Retour à Reims und Zeige deine Klasse der Fall ist. Zwar fühlt sich die Ich-Erzählerin von ihrer Klasse „entfernt“ und bekennt: „ich beobachte meine eigene Klasse“ (Struck 2013: 70). Jedoch sieht sie „Arbeiter neben Frauen und Kindern [als] die entscheidende Gruppe der Unterprivilegierten, der ihre ganze Solidarität gilt“ (Neuhaus-Koch 2011: 269), was bereits der vieldeutige Titel evoziert. Damit entzieht sich Klassenliebe, so ließe sich argumentieren, Vorwürfen, die wiederholt an aktuelles autosoziobiografisches Schreiben über deklassierte Gruppen herangetragen wurden, nämlich dass dieses eine andere Klasse adressiere als die, die der Gegenstand des Textes ist; dass die Schreibenden sich tendenziell mit ihren Herkunftsklassen entsolidarisierten, um wahrgenommen zu werden; ja dass es „[t]eilweise […] an Sozialpornographie [grenze], was die Kinder der Armen über ihre Eltern schreiben“ (Mayr 2020: 24). 17 Mit Blick auf den skizzierten Zusammenhang möchte ich dafür plädieren, die ‚Türöffnung‘, die sich durch die Rezeption Eribons in Deutschland ergeben hat, als mindestens zweifache Neuperspektivierung zu nutzen, die über eine ausschließliche Konzentration auf die Rezeption Eribons hinausgeht. Erstens bietet sich die Chance für die Untersuchung verschiedener autofiktionaler Genres und Verfahren des Schreibens über Klasse, in deren Spannungsfeld auch die Autosoziobiografie steht. Dabei ist es insbesondere wichtig, zu diskutieren, welches Sprechen und Schreiben über Klasse diese verschiedenen Genres in unterschiedlichen Kontexten ermöglichen oder verhindern und welche Öffentlichkeiten sie adressieren. Zweitens ergibt sich aus dieser Konstellation die Aufgabe, verschüttete Traditionen autofiktionalen Schreibens über Klasse und soziale Herkunft unter heutigen Bedingungen zu rekonstruieren und die Gründe für diese Verschüttung kritisch zu analysieren. Denn es liegt nahe, das für längere Zeit weitestgehende Fehlen eines literarischen, literaturwissenschaftlichen und öffentlichen Diskurses über Klasse, das durch die Rezeption Eribons erst wieder für Autor*innen wie Dröscher und eine breitere Öffentlichkeit sichtbar oder zumindest adressierbar gemacht wurde, ganz im Sinne Eribons als etwas gesellschaftlich, kulturell und nicht zuletzt politisch Gemachtes zu verstehen. Baron, Christian, „Eine Scham, die bleibt“, in: Der Freitag, 35, 27.08.2020, 19. Blome, Eva, „Institutionalisierung und Innovation. Gender Studies in literatur- und sozialwissenschaftlicher Perspektive (mit Überlegungen zu Didier Eribons Rückkehr nach Reims)“, in: Manuela Günter / Annette Keck (ed.), Kulturwissenschaftliche Perspektiven der Gender Studies, Berlin, Kadmos, 2018, 37-62. —, „Rückkehr zur Herkunft. Autosoziobiografien erzählen von der Klassengesellschaft“, in: Deutsche Vierteljahrsschrift für Literaturwissenschaft und Geistesgeschichte, 2020, DOI: 10.1007/ s41245-020-00118-y (publiziert am 24.11.2020; Aufruf am 1.12.2020). Blome, Eva / Eiden-Offe, Patrick / Weinberg, Manfred, „Klassen-Bildung. Ein Problemaufriss“, in: Internationales Archiv für Sozialgeschichte der deutschen Literatur, 35 (2), 2010, 158-194. Dröscher, Daniela, Zeige deine Klasse. Die Geschichte meiner sozialen Herkunft, Hamburg, Hoffmann und Campe, 2018. DOI 10.2357/ ldm-2020-0047 75 Dossier Eiden-Offe, Patrick, Die Poesie der Klasse. Romantischer Antikapitalismus und die Erfindung des Proletariats, Berlin, Matthes & Seitz, 2017. Eribon, Didier, Rückkehr nach Reims, trad. Tobias Haberkorn, Berlin, Suhrkamp, 2016. —, Retour à Reims. Précédé d’un entretien avec Édouard Louis, Paris, Flammarion, 2018. Ernst, Christina, „Das Leben schreiben. Annie Ernaux’ Tagebücher“, www.zflprojekte.de/ zflblog/ 2020/ 06/ 22/ christina-ernst-das-leben-schreiben-annie-ernaux-tagebuecher (publiziert am 22.06.2020; Aufruf am 26.11.2020). Graw, Isabelle / Weingart, Brigitte, „Entre nous. Ein Briefwechsel über Autofiktion in der Gegenwartsliteratur zwischen Isabelle Graw und Brigitte Weingart“, in: Texte zur Kunst, 115, 2019, 39-63. Hake, Sabine, The Proletarian Dream. Socialism, Culture, and Emotion in Germany, 1863-1933, Berlin/ Boston, De Gruyter, 2017. Kalmbach, Karolin / Kleinau, Elke / Völker, Susanne, „Sexualität, Klasse und Scham schreiben - Des/ Identifikationen ermöglichen? “, in: id. (ed.), Eribon revisited - Perspektiven der Gender und Queer Studies, Wiesbaden, Springer VS, 2020, 1-9. Kleiner, Bettina, „Sexuelle und soziale Scham. 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Zu Begriff und Phänomen des Literarischen, Berlin / New York, De Gruyter, 2009, 285-314. 76 DOI 10.2357/ ldm-2020-0047 Dossier 1 Zu Theorie und Begriffsgeschichte der Autofiktion cf. Zipfel 2009, Wagner-Egelhaaf 2013. Ich möchte Manuel Clemens und Florian Kappeler für die kritische Lektüre meines Textes und ihre hilfreichen Kommentare danken. 2 Zur Autosoziobiografie, deren Begriff von Annie Ernaux geprägt wurde, cf. Ernst 2020, Blome 2020. 3 Auch für Eribon spielen seine Mutter und Geschlechterverhältnisse eine entscheidende Rolle, cf. Blome 2018: 55. Dröscher hebt dies nicht an Retour à Reims hervor. 4 Cf. in diesem Zusammenhang Blome 2020, die argumentiert, dass in Autosoziobiografien „Klassenverhältnisse als Generationenverhältnisse erzählt“ werden. 5 Ernaux ist eine weitere Quelle dieser Bildsprache, cf. Dröscher 2018: 5. 6 Es scheint mir methodisch sinnvoll zu sein, hier aus der deutschen Übersetzung von Retour à Reims zu zitieren, da Dröscher mit dieser gearbeitet hat. 7 Gegenüber der geschlossenen Prosaform von Retour à Reims fällt insbesondere der fast collageartige Charakter von Zeige deine Klasse auf, wozu die Autorin Formen wie Steckbrief, Liste oder Fragebogen verwendet. 8 Durch die identifikatorischen intertextuellen Bezüge konstruiert Eribon „Wahlverwandtschaften, die unterschiedliche Akteur*innen feministischer, antirassistischer, Schwarzer, queerer Artikulationen und Kämpfe adressieren“ (Kalmbach/ Kleinau/ Völker 2020: 2). Eribons teils desidentifkatorische Lektüre Bourdieus stellt ein Gegenbeispiel dar, cf. Eribon 2018: 164-170. 9 In Retour à Reims und Zeige deine Klasse ist die Auseinandersetzung mit Texten Anlass zur „Selbstbefragung“ (Blome 2018: 53). 10 Der Begriff der Bildung liegt hier auch deshalb nahe, weil Retour à Reims plausibel mit dem Bildungsroman in Verbindung gebracht worden ist, cf. Schulz 2020. Ähnlich könnte bezüglich Zeige deine Klasse argumentiert werden. 11 Ähnlich sieht Dröscher in der Erkenntnis der sozialen Gemachtheit ihrer Scham die Möglichkeit von Solidarisierungen mit Blick auf die Verschränkung von Klasse und Geschlecht erwachsen (Dröscher 2018: 158). 12 Gleiches gilt auch für die Rezeption Ernaux’, cf. Baron 2020. 13 Für zwei das literaturwissenschaftliche Wissen dieser Forschung synthetisierende Beispiele, die bezeichnenderweise beide aus den 1970er Jahren stammen, cf. Stieg/ Witte 1973, Trommler 1976. 14 Beispiele für dieses neuere germanistische Forschungsinteresse sind Eiden-Offe 2017 und Hake 2017. 15 Cf. allerdings Neuhaus-Koch 2011, die Struck im Kontext der Arbeiter*innenliteratur verortet. Cf. außerdem Blome 2020, die Klassenliebe als autosoziobiografischen Text begreift. 16 Auch Dröscher kämpfte mit ihrer Dissertation, cf. Dröscher 2018: 233-234. 17 Cf. Scholz 2019: 129. Wie Mayr und Brigitte Weingart (im Anschluss an Louis) kritisieren, sind das Aufgestiegensein bzw. die Verpflichtung, über die eigene Herkunftsklasse zu sprechen, die Grundlage eines in der bürgerlichen Öffentlichkeit legitimierten Sprechens über die proletarische Klasse (Mayr 2020: 29-31; Graw/ Weingart 2019: 59). Cf. zudem überblicksartig Blome 2020. DOI 10.2357/ ldm-2020-0048 77 Dossier Christina Ernst ‚Arbeiterkinderliteratur‘ nach Eribon Autosoziobiographie in der deutschsprachigen Gegenwartsliteratur Klassenaufstieg erzählen: Das ‚Eribon-Genre‘ Er ging zum Klavier, griff ein Buch und wedelte damit. Ich kannte das Buch. „Um was geht es? “, sagte ich. „Um was geht es? “, sagte Micha. […] Ich sagte: „Arbeiterjunge schafft es auf die Uni. Gehört nicht mehr dahin, wo er herkommt. Gehört nicht dahin, wo er jetzt ist.“ Micha sagte: „Junger Schwuler zieht in die Großstadt. Gehört nicht mehr dahin, wo er herkommt. Gehört nicht dahin, wo er jetzt ist.“ Ich sagte: „Da haben wir zwei verschiedene Bücher gelesen.“ […] Micha sagte: „Ich habe mich nicht getraut, im Laden nach dem Buch zu fragen. Ich wusste nicht, wie man den Namen ausspricht. Oder den Titel. Ich hätte das Buch fast nicht gelesen, weil ich kein Französisch kann. Witzig, oder? “ (Bjerg 2020: 100). Ohne dass Titel oder Autor genannt werden, scheint sofort ersichtlich zu sein, auf welches Buch hier in Bov Bjergs Roman Serpentinen (2020) angespielt wird: es geht um Didier Eribons autosoziobiographisches 1 Werk Retour à Reims (2009), das 2016 in deutschsprachiger Übersetzung als Rückkehr nach Reims im Suhrkamp-Verlag erschienen ist. Naheliegend ist diese Deutung zunächst aufgrund der parallelisierten Themensetzung „Arbeiterjunge schafft es auf die Uni“ / „junger Schwuler zieht in die Großstadt“, die auch Eribon als die zwei Sujet-Stränge seiner Erzählung nennt, wobei er sie einander nicht nur gegenüberstellt, sondern verschränkt betrachtet, wie eines das andere bedingt: „Wer ich heute bin, geht auf die Verflechtung zweier Projekte zurück. Ich war mit der doppelten Hoffnung nach Paris gekommen, ein freies schwules Leben zu führen und ein ‚Intellektueller‘ zu werden“ (Eribon 2016b: 223). Verstärkt wird die intertextuelle Anspielung durch die Emphase auf den „französischen“ Namen und Titel. Damit sie funktioniert und den Leser*innen klar ist, dass hier von Rückkehr nach Reims die Rede ist, braucht es aber mehr als diese textimmanenten Faktoren. Ihre Wirkung ist rückgebunden an den spezifischen historischen Moment, in dem Bjergs Buch erscheint; sie entfaltet sich in diesem im Zusammenspiel von Sujet und Textsorte. Bov Bjerg erzählt in Serpentinen von der ‚Rückkehr‘ eines sozialen Aufsteigers an die Schauplätze seines Aufwachsens in der Provinz, als Reise in die Herkunftsgegend gemeinsam mit dem Sohn, und als Reflexion über die sozialen Determinismen dieses Ortes, in die die eigene Familiengeschichte eingebettet wird. Entlang der Frage: „Um was geht es? “, die sich leitmotivisch durch den Roman zieht, wird der soziale Aufstieg des Protagonisten auch als versuchter Ausstieg aus klassenspezifischen Maskulinitätsvorstellungen und einer Genealogie von Suizid der männlichen Vorfahren erzählt. 2 78 DOI 10.2357/ ldm-2020-0048 Dossier Bjergs intertextueller Verweis auf Eribon steht stellvertretend für eine ganze Reihe an deutschsprachigen Autor*innen, die Rückkehr nach Reims, wenn auch in ganz unterschiedlicher Weise, in ihrem Schreiben aufgegriffen haben. Dieser Form des literarischen Transferts soll im Folgenden nachgegangen werden. Sie wird zunächst eingebettet in das deutschsprachige Diskursfeld der Eribon-Rezeption, in dem sie entsteht und ihre spezifische Ausprägung bekommt. Literarische Texte, in denen die Erzählung der eigenen Arbeiter*innenklassenherkunft 3 an soziologische Analysen rückgebunden wird, sind zwar kein rein (deutsch-)französisches Phänomen - man denke etwa an J. D. Vances Hillbilly Elegy (2016), das auch hierzulande größere Aufmerksamkeit bekommen hat - dennoch scheinen sich gerade die deutschsprachigen Literaturproduktionen hier in eine sichtliche, oft auch explizite Tradition des Autor*innenkreises Eribon-Ernaux-Louis zu stellen. Debatten zur Klassengesellschaft werden im deutschsprachigen Raum zurzeit vermehrt entlang der Kategorien von sozialer Herkunft, ‚Bildungsaufstieg‘ und (habituellen) Klassenunterschieden geführt; sie entstehen häufig im Kontext literarischer Texte bzw. bedienen sich literarischer Verfahren, die Anleihen an den französischen Autosoziobiographien nehmen. Auch fünf Jahre nach dem Erscheinen der deutschen Übersetzung muss Didier Eribon als Referenzname herhalten, wenn im deutschsprachigen Raum über Gegenwartsliteratur, die sich mit Arbeiter*innenklassen-Herkunft auseinandersetzt, berichtet wird: „Fast könnte man vom Eribon-Genre sprechen“ heißt es in einer Rezension von Andrea Heinz über Bov Bjegs Serpentinen (Heinz 2020). Das „Eribon-Genre“, oder genauer, die Textsorte, für die Eribon regelmäßig als Gewährsbeispiel heranzitiert wird, wird im deutschsprachigen Literaturdiskurs meist unter der Bezeichnung ‚Autofiktion‘ verhandelt. Interessant dabei ist der große Stellenwert, der der Autofiktion dabei im Feld der Gegenwartsliteratur beigemessen wird; symptomatisch dafür sei die Ausgabe „Literatur“ der Zeitschrift Texte zur Kunst (2019) genannt, in der sich ein Großteil der Beiträge mit Phänomenen der (im emphatischen Sinne so bezeichneten) Autofiktion auseinandersetzen. 4 „Autofiktion“ meint hier aber nicht eine „fiction d’événements et de faits strictements réels“ (Doubrovsky 1977), wie der Urheber des Begriffs Serge Doubrovsky auf dem Klappentext seinen „Roman“ Fils charakterisiert - also ein Spiel mit dem „pacte autobiographique“ (Lejeune 1975) und der Grenze zwischen faktualem und fiktionalem Erzählen. In der gegenwärtigen (deutschsprachigen) Konzeption unterhält das Subjekt der Autofiktion Schnittmengen zu den Autor*innen, ist also in deren sozialer Position verankert und bürgt dadurch für eine Glaubwürdigkeit des Geschriebenen, ohne sich auf dessen Faktizität berufen zu müssen (cf. Graw/ Weingart 2019: 41-45). Ob die Texte als ‚autobiographisch‘ im engeren Sinne, also als faktuale Wirklichkeitsdarstellung gesetzt sind oder ob sie vielmehr auf Fiktionalisierungsstrategien zurückgreifen, ist dabei zweitrangig. Mit dem Selbstverständnis der (französischsprachigen) Autosoziobiographie teilt die Autofiktion ihre Abwehrhaltung zur Autobiographie als etabliertem Genre (cf. Haas 2019). Hier soll nicht die Authentizität eines personalen Autor*innen-Ichs konstruiert, sondern soziale Wirklichkeit dargestellt werden; so fasst etwa Didier Eribon DOI 10.2357/ ldm-2020-0048 79 Dossier sein Vorhaben mit folgenden Worten zusammen: „Il ne s’agissait donc pas de ‚moi‘ dans ce livre [Retour à Reims], mais de la réalité sociale“ (Eribon 2013: 10). Die Eribon-Bezüge in den Texten der deutschsprachigen Gegenwartsliteratur werden aber nicht nur in der Rezeption, sondern auch von den Autor*innen selbst hergestellt. Dabei fällt eine Verschiebung auf: waren es zunächst vor allem Verweise auf Eribon selbst, mit denen die Autor*innen ihre Texte in Kontext setzten, so werden diese in den literarischen Erscheinungen von 2020 ausgeweitet auf Bezugnahmen auf Annie Ernaux. 5 Aus dem ‚Eribon-Genre‘ ist folglich auch im deutschsprachigen Raum das Genre ‚Autosoziobiographie‘ geworden, welches nun etwas weiter gefasst (literarische) Texte meint, die Arbeiter*innnenklassenherkunft als autobiographische Erzählung mit Blick auf die sozialen Gegebenheiten verhandeln und sich dieser Herkunft in einer retrospektiven, schreibenden ‚Rückkehr‘ - wobei die Rückkehr zumeist auch Plot der Erzählung ist - (wieder)annähert. So nimmt, neben dem eingangs erwähnten Roman Bov Bjergs, das Schreiben über Klassenscham, Klassenaufstieg und das Erzählen der Familiengeschichte als Auseinandersetzung mit den sozialen Faktoren, die diese bestimmen, in Daniela Dröschers Zeige deine Klasse. Die Geschichte meiner sozialen Herkunft (2018), Christian Barons Ein Mann seiner Klasse (2020) und Leander Scholz’ Aufsatz „Arbeiterkinderliteratur“ 6 (2019) deutliche Anleihen an den französischen Vorbildern. Auch bei Anna Mayrs Die Elenden (2020), einer an der eigenen Biographie aufgezogenen Sozialreportage über die Geschichte der Arbeitslosigkeit in Deutschland und das Aufwachsen mit Hartz IV , und bei Jan Brandts Familienchronik Ein Haus auf dem Land / Eine Wohnung in der Stadt (2019), die motivisch als ‚Rückkehr‘ in das Dorf des Heranwachsens und das Haus des Urgroßvaters konstruiert ist, ist Eribon eine der Gewährsreferenzen. Bezugnahmen auf Rückkehr nach Reims, sowohl thematisch als auch formal, finden sich schließlich in vier 2020 erschienenen sozialwissenschaftlichen Sammelbändern, die das Thema ‚Klassenherkunft/ Klassenaufstieg‘ zu einem Gutteil in persönlichen Essays verhandeln. 7 Eribon wird in vielen dieser Aufsätze nicht nur zitiert, sondern dient auch als eine Art Modell der ‚autobiographischen Bekenntnisse‘ über den „soziale[n] Aufstieg in der Wissenschaft“ (cf. Möller et al. 2020). All diese Texte haben gemeinsam, dass sie - in der Terminologie Genettes - hypertextuelle Beziehungen zu Rückkehr nach Reims als Vorgängertext aufweisen, wobei der Grad der Nachbildung oder Transformation unterschiedlich gestaltet, aber jedenfalls mehr als Kommentar oder Zitat ist (cf. Genette 1993: 14, 18sq.). Tatsächlich lässt sich sowohl auf inhaltlicher (Thema, Motive, Handlungsaufbau) als auch auf formaler Ebene ein dichtes Netz an Bezugnahmen auf das Vorbild festhalten, so dass Eribon eine genrebildende Funktion für die deutschsprachige Autosoziobiographie zugesprochen werden kann. Diese Verfahren werden im Folgenden exemplarisch anhand von zwei Aufsätzen aus dem Band Vom Arbeiterkind zur Professur (2020) und anhand des Romans Serpentinen (2020) untersucht, wobei punktuell auch auf andere Beispiele Bezug genommen wird. 80 DOI 10.2357/ ldm-2020-0048 Dossier Die Rezeption in Deutschland: Autosoziobiographie als Genre in the Making Sieben Jahre nach der französischen Erstausgabe erschien 2016 Rückkehr nach Reims in der deutschsprachigen Übersetzung von Tobias Haberkorn. Der daraufhin einsetzende Erfolg - mehr als 80 000 verkaufte Exemplare innerhalb des ersten Jahres, 8 euphorische Rezensionen in der Presse, 9 zahllose Interviews, Diskussionsrunden und Vorträge mit dem Autor - kann auch daran bemessen werden, dass Didier Eribon seitdem zu einer fixen Referenzgröße geworden ist, wenn in wissenschaftlichen oder feuilletonistischen Texten Fragen zur Arbeiter*innenklasse und zu Klassenverhältnissen erörtert werden. 10 Zu dieser für ein Theorie-Buch ungewöhnlich breiten Rezeption gibt es eine Vielzahl von Erklärungsversuchen, die den Erfolg auf das Zusammenspiel unterschiedlicher Faktoren zurückführen. Ein weit verbreiteter Ansatz besteht darin, der Rückkehr nach Reims vorrangig als politisch-soziologisches Sachbuch zu lesen, d.h. Eribons Ausführungen zu den Lebensumständen der sozialen Klasse seiner Herkunftsfamilie sowie die vor allem im (kurzen) dritten Kapitel erläuterten Beobachtungen und Analysen zum Wahlverhalten und politischen Selbstverständnis der Arbeiter*innenklasse hervorzuheben. Worauf der Wandel der sich ehemals selbstverständlich als links verstehenden Arbeiter*innenklasse hin zu den rechtsextremen Parteien zurückzuführen ist und welchen Anteil daran die Sozialdemokratie selbst bzw. ihre (und nicht nur ihre) zunehmende Tendenz zu einem neoliberalen Verständnis von Gesellschaft und der damit einhergehende Sozialabbau haben, dafür scheint Eribon einen schlüssigen Erklärungsansatz zu liefern, der sich scheinbar von Frankreich auch auf die Situation an anderen Orten des Globalen Nordens übertragen lässt. Die Neigung, den Text als Eribonsche Gesellschaftsdiagnose in anderer Form zu lesen, hängt mit den spezifischen Zeitumständen zusammen, in denen die Übersetzung erscheint: 2016 ist ein Jahr einschneidender politischer Wandlungsprozesse, in dem Großbritannien für den Brexit stimmt, Donald Trump zum Präsidenten der Vereinigten Staaten gewählt wird und sich in Deutschland rechte Bürger*innen-Protestbewegungen formieren. Mit den gesellschaftlichen Prozessen, die hinter diesen politischen Ereignissen stehen, haben sich zwar zeitgleich auch andere Autor*innen befasst, 11 die enorme Resonanz auf Didier Eribons Rückkehr nach Reims geht allerdings weit über die der anderen soziologischen Abhandlungen hinaus. Sie ist neben der Thematik und dem Erscheinungsdatum der Übersetzung auch auf die spezifische Textästhetik zurückzuführen: An das hybride Genre des Buches, das in den Worten des Autors „on ne pourrait assigner ni au geste littéraire ni à l’étude sociologique, mais qui, en combinant ces deux registres […], les mobiliserait ensemble et décuplerait leurs forces respectives“ (Eribon 2016a: 58sq.). Im Unterschied zu anderen soziologischen Studien zur Klassengesellschaft verbindet Eribon wissenschaftliches mit literarischem Schreiben und verknüpft seine theoretischen Reflexionen mit autobiographischen Erzählungen. Rückkehr nach Reims ist demnach so sehr Selbstwie Gesellschaftsanalyse und auch die Autobiographie eines ‚sozialen Aufsteigers‘ oder „transfuge de classe“ (Eribon 2009: 25). 12 DOI 10.2357/ ldm-2020-0048 81 Dossier Dass ‚Klasse‘ als relevante Kategorie herangezogen wird, um gesellschaftliche Herrschafts- und Ausschlussmechanismen beschreibbar zu machen, fand gerade im deutschsprachigen Raum, wo der Klassen-Begriff lange Zeit aus der Analyse sozialer Ungleichheiten verdrängt und durch andere Bezeichnungen wie ‚Schicht‘ oder ‚Milieu‘ ersetzt wurde, großen Anklang. 13 Bei Eribon wird ‚Klasse‘ jedoch nicht nur als ökonomische Kategorie wieder eingeführt; sie wird in seiner Selbstanalyse des „habitus clivé“, des „gespaltenen Habitus“ (Bourdieu 2002: 116) des/ der transfuge de classe, den Eribon als „das Unbehagen, zwei verschiedenen Welten anzugehören, die schier unvereinbar weit auseinanderliegen und doch in allem, was man ist, koexistieren“ (Eribon 2016b: 12) beschreibt, gerade in ihrem affektiven Gehalt als Klassenscham und als strukturelle soziale Gewalt dargestellt. Sexuelle und soziale Scham, die aus einer inferiorisierten oder devianten Position in Bezug auf Normvorstellungen und die „legitime Kultur“ (Bourdieu) hervorgehen, knüpft Eribon konsequent an die eigene Lebensgeschichte (cf. Kalmbach et al. 2020: 2). Indem sie an die subjektive Erfahrung rückgebunden wird, haftet der Autosoziobiographie ein besonderer epistemologischer Status an. So verfügen die Autor*innen über einen ‚Wissensvorteil‘ aufgrund ihrer sozialen Herkunft, aber auch aufgrund der Distanz zu dieser: weil sie zwei Lebensrealitäten kennen, die der Arbeiter*innenklasse und die der Bildungsbürger*innen, nehmen sie eine Funktion als „Übersetzer des Sozialen“ (Spoerhase 2017: 35) ein, die dem akademisch gebildeten Lesepublikum einen fremden Teil der Gesellschaft erklären (cf. ibid.). Autosoziobiographien übersetzen biographisches ‚Erfahrungswissen‘ über Klassenverhältnisse, sie übersetzen aber auch soziologisches ‚Expert*innenwissen‘, indem sie die Gewalt der Klassengesellschaft mit literarischen Mitteln, die diese personalisieren und konkretisieren, in scheinbarer Unmittelbarkeit darstellen. Das spezifische Wissen über die soziale Wirklichkeit ist dabei an die Person des/ der Autor*in rückgebunden, 14 wobei diese nicht schon als souveränes Autor*innensubjekt über dieses Wissen (etwa in Form von Erinnerungen) verfügt; so charakterisiert etwa Ernaux ihre methodischen Überlegungen zum autosoziobiographischen Schreiben wie folgt: Se pose toujours, en écrivant, la question de la preuve: en dehors de mon journal et de mon agenda de cette période, il me semble disposer d’aucune certitude concernant les sentiments et les pensées, à cause de l’immatérialité et de l’évanescence de ce qui traverse l’esprit (Ernaux 2011a: 297). Als affektives, verkörpertes wie zugleich theoretisches, konzeptualisiertes Wissen wird die Erkenntnis der sozialen Wirklichkeit - auch für die Autor*innen - erst über den Schreibprozess realisiert (cf. Seier 2020: 67). In der Erzählung wird dies über das Motiv der ‚Rückkehr‘ generiert. Die ‚Rückkehr‘ ist in der Autosoziobiographie eine Tätigkeit des Schreibens und Forschens, welche die Vergangenheit mittels historischer Dokumente - Korrespondenzen, Tagebucheinträge und vor allem Fotografien - greifbar zu machen sucht. In dieser Vorgehensweise werden auch die eigenen Erinnerungen bzw. die dabei vermittelten Affekte zu 82 DOI 10.2357/ ldm-2020-0048 Dossier einem solchen Archiv-Material: erst indem diese kontextualisiert, in die sie bestimmenden sozialen und historischen Strukturen rückgebunden werden, wird die Autosoziobiographie zu einer „écriture du réel“ (Ernaux 2011b: 35). Gleichzeitig inszeniert sie die ‚Rückkehr‘ zumeist auch auf Plot-Ebene, als ein (temporäres) Zurückkehren an den Ort des Heranwachsens und zur Herkunftsfamilie. Den Gesprächen mit den Familienmitgliedern kommt dabei der Status von Quellenmaterial zu, das die Autor*innen als Wiederholung, Varianz und Ergänzung ihrer eigenen Erinnerungen zur Rekonstruktion bzw. Wiederaneignung der sozialen Wirklichkeit heranziehen. Dieses „auto-ethnologische“ (Ernaux 2011a: 224) Vorgehen, das Eribon schon auf den ersten Seiten von Rückkehr nach Reims in Szene setzt („Den darauffolgenden Nachmittag verbrachte ich bei meiner Mutter. Mehrere Stunden saßen wir im Wohnzimmer und redeten. Sie hatte einen Fotokarton aus dem Schrank geholt […]“, Eribon 2016: 16sq.), wird häufig auch in der deutschsprachigen ‚Arbeiterkinderliteratur‘ aufgegriffen. Sätze wie „Anruf bei meiner Mutter am 10. April 2018, 12 Uhr. Ich: Warum hast du dich eigentlich nicht gewehrt? “ (Dröscher 2018: 115) oder „Wenige Tage vor dem Tod meiner Mutter hatten wir ein Gespräch, auf das ich über 30 Jahre gewartet hatte“ (Scholz 2019: 121) evozieren eine Form der Mehrstimmigkeit, die als Versuch gelesen werden kann, die eigene Sprecher*innenposition im Schreiben der Autosoziobiographie mitzureflektieren. Sie stehen für eine Praktik der Sorge um die Eltern bzw. Familienangehörigen, die an vielen Stellen auch explizit genannt 15 und von den Autor*innen als Rezipient*innen von Rückkehr nach Reims bei Eribon teilweise auch vermisst wird: „Oft hatte ich beim Lesen den beklemmenden Eindruck, dass er die Menschen seiner Kindheit nur noch einmal schreibend in seine Nähe holt, um sich zu vergewissern, dass sie auch weit entfernt bleiben“ (ibid.: 129). 16 Autosoziobiographie als Sammelband „Der Erfolg des Buchs [Rückkehr nach Reims] verdankt sich nicht zuletzt dem Umstand, dass hier eine Person des öffentlichen Lebens über die Mühen des Aufstiegs als Arbeiterkind erzählt“, schreiben Christina Möller, Markus Gamper, Julia Reuter und Frerk Blome in ihrer Einleitung zum Sammelband Vom Arbeiterkind zur Professur. Sozialer Aufstieg in der Wissenschaft (Möller et al. 2020: 10), der neunzehn autosoziobiographische Aufsätze von Hochschulprofessor*innen über ihren Bildungsaufstieg versammelt. Die Konzeption des Bands wie auch einiger der Beiträge ist dabei explizit an Didier Eribons Retour à Reims angelehnt, worauf einleitend programmatisch hingewiesen wird: Angeregt durch die selbstreflexiven Beiträge Bourdieus und Eribons, in denen sie sich bewusst mit ihrer Herkunft aus der Arbeiter*innenklasse und den damit zusammenhängenden Herausforderungen in ihrer Schullaufbahn und später wissenschaftlichen Entwicklung auseinandersetzen, geht es uns darum, durch die Kombination aus autobiographischen Skizzen und soziobiographischen Analysen eine dichte Beschreibung von der Vielfalt der Erfahrung sozialer Mobilität und deren Reflexion im Spiegel sozialwissenschaftlicher Forschungen zur sozialen Ungleichheit zu gewähren (ibid: 42). DOI 10.2357/ ldm-2020-0048 83 Dossier Im Vergleich mit dem französischen Vorbild tritt eine Verschiebung hervor, die als symptomatisch für die Eribon-Rezeption in deutschsprachigen literarischen und wissenschaftlichen Texten gelten kann: Während Eribon die „autobiographischen Skizzen und soziobiographischen Analysen“ mit Retour à Reims noch zu einem Text verwoben hat, werden im Sammelband die einzelnen Beiträge wieder klar nach Textsorte unterschieden. Denn die autobiographischen Skizzen werden von sozialwissenschaftlichen Aufsätzen zur Thematik ‚Bildungsaufstieg‘ gerahmt, die sie in einen systematischen Diskurs über Ungleichheitsproblematiken einordnen. Wenngleich die „autobiographischen Notizen“ (ibid.: 129) in Differenz zum wissenschaftlichen Kommentar in ihrem epistemischen Gehalt als ‚Erfahrungswissen‘ markiert werden, greifen auch sie nicht ausschließlich auf literarische Darstellungsformen zurück. Autosoziobiographisch sind diese Beiträge insofern, als sie in die bildungsbiographischen Erzählungen Lektüren, Statistiken und an den Fachdisziplinen geschulte Gesellschaftsanalysen einfließen lassen. Dabei unterschieden sie sich stark in Inhalt, Stil und Schwerpunktsetzung in der Erzählung; viele sind sachlich-nüchtern in der Art einer Chronik oder Reportage gehalten, manche legen den Fokus eher auf die Herkunftsfamilie, andere auf den wissenschaftlichen Werdegang. Die Autor*innen sind zwischen 1940 und 1983 geboren, stammen aus proletarischen, bäuerlichen und kleinbürgerlichen Verhältnissen und berichten dementsprechend von unterschiedlichen institutionellen, historischen und sozialen Rahmenbedingungen in ihrem Bildungsaufstieg bis zur Professur. Jedem der Texte ist ein Kindheitsfoto der Autor*innen vorangestellt; mit dieser Bild-Text-Kombinatorik, die das Buchcover der Suhrkamp-Ausgabe von Rückkehr nach Reims zitiert, auf der ein Ausschnitt aus einem privaten Jugendfoto Eribons zu sehen ist, greifen sie ein Imitationsverfahren auf, das etwa auch Daniela Dröscher (2018) und Christian Baron (2020) für ihre Autosoziobiographien gewählt haben. Mit dem Foto setzt Eribon sich auf den gut zwanzig ersten Seiten des Abschnitts „Hontoanalyse“ im Folgewerk La société comme verdict (2013) auseinander. Er bezeichnet seine Abbildung als „pas supplémentaire dans le geste de l’auto-socio-analyse“ (Eribon 2014: 20), der ihn zu folgenden Überlegungen führt: „[Q]u’est-ce qui me relie encore à ce garçon, qu’est-ce qui en moi vient de lui, survit de lui, après tant d’années et tant d’évolutions? “ (Eribon 2014: 21). Damit, wie auch an vielen anderen Stellen, stellt Eribon sein Schreiben in eine Traditionslinie zu Annie Ernaux, in deren Werk die Fotografie eine gewichtige Rolle spielt: oft sind es Bilder aus dem privaten Fotoarchiv, die ihr im Schreiben als Ausgangspunkt dienen. Sie lösen Erinnerungen aus, binden diese an eine „réalité matérielle [et] irréfutable“ (Ernaux 2011a: 8) zurück und stehen zugleich für die Distanz zwischen dem schreibenden Ich der Gegenwart und dem vergangenen, beschriebenen Ich. 17 An Ernaux’ fotografischer Schreibweise nimmt auch unverkennbar einer der Beiträge im Band Vom Arbeiterkind zur Professur Anleihe: Sabine Hark wählt in ihrem Essay „Von wo ich herkomme“ (cf. Hark 2020) einen an Annie Ernaux geschulten, distanzierenden Stil, der in sachlicher Tonlage historische, geographische und soziodemographische Fakten darlegt, die die eigene Bildungsgeschichte rahmen. Das 84 DOI 10.2357/ ldm-2020-0048 Dossier „Herkommen“ wird wie bei Ernaux im Modus der „unpersönliche Autobiographie“ erzählt, „[…] où il s’agit moins de dire le ‚moi‘ ou de le ‚retrouver‘ que de le perdre dans une réalité plus vaste, une culture, une condition, une douleur, etc.“ (Ernaux 2011b: 23). Die distanzierte Haltung zum vergangenen Ich macht Hark in der Wahl des Personalpronomens „sie“ und in Bezeichnungen wie „das Kind“, „die Tochter“, „die Schülerin, die sie jetzt ist“ (cf. Hark 2020) deutlich, mit denen sie von diesem erzählt. Mit dieser Textstrategie, auf die schon Ernaux in Mémoire de fille (2016) zurückgegriffen hat, wird die eigene Vergangenheit zum Untersuchungsgegenstand einer ‚autoethnologischen‘ („être en somme ethnologue de moi-même“, Ernaux 2011a: 224) Analyse und dabei weitestmöglich objektiviert, d. h. in den Bereich der faktualen historischen Wirklichkeit geschoben. Gleichzeitig ruft die Ich-Distanzierung auf textästhetischer Ebene durch die intertextuelle Anspielung einen gewissen Effekt von Literarizität hervor: das französische Vorbild der Autosoziobiographie klingt in der Verschiebung vom ‚ich‘ zum ‚sie‘/ ‚es‘ immer mit. Dass der Text das literarische Modell anklingen lässt und darüber hinaus weitere Autor*innen (Erving Goffman, Virginia Woolf und Bertolt Brecht) anzitiert, rückt ihn in seiner Textästhetik in die Nähe von Retour à Reims. Dieses (wie auch Eribons andere Bücher) ist auch eine Lektüre-Biographie, die die autobiographischen Erlebnisse mit den Texten anderer literarischer, soziologischer und philosophischer Autor*innen - immer wiederkehrend etwa James Baldwin, Simone de Beauvoir, Pierre Bourdieu, Annie Ernaux, Michel Foucault - in Beziehung setzt und in seinen theoretischen Reflexionen mit diesen bzw. aus diesen heraus argumentiert. Damit schreibt er sich in eine Art „Wahlverwandtschaft“ (cf. Kalmbach et al. 2020: 2) unterschiedlicher emanzipatorischer Stimmen ein, die das eigene Projekt in einem kollektiven politischen Rahmen kontextualisieren. 18 Gleichzeitig verbindet Eribon in seinen Texten verschiedene Stillagen, indem er erzählende, stärker literarisch verfasste Passagen mit soziologischen und gesellschaftspolitischen Analysen alternierend aneinanderreiht. Ein ähnliches Verfahren wendet auch der Sammelband-Beitrag „Das UNTEN spürst du immer“ von Klaus Weber (2020) an, der die fünf Abschnitte seines Textes mit kurzen, vom analytischen Essay-Teil durch Zwischenüberschriften abgesetzten literarischen Passagen einleitet. Diese sind durchgängig in Kleinbuchstaben gehalten und ergänzen den Aufsatz mit einer poetischen, von Wortneuschöpfungen durchzogenen Sprache: was an mir ist das sonderbare, dessentwegen ich mich bis heute von den dünkleklugen [sic! ], den jackettfiguren und selbstverständlichkeitsexperten sondere? was an mir lässt diese mir den rücken zudrehen, die worte überkomplex wählen, das rotweinglas bei der abendsoirée feinfingrig drehen, sodass sich mein herkunftsunten mit einer tiefen scham verbindet? (Weber 2020: 351sq.). Hier wird, um nochmal an die eingangs zitierte Bemerkung Eribons zu erinnern, in der Verbindung der beiden Register (literarisch/ soziologisch) das Potenzial der Autosoziobiographie mobilisiert, Klassenverhältnisse zugleich in ihrer persönlichen als auch in ihrer sozialen Dimension zu vermitteln. Den Effekt, soziale Wirklichkeit DOI 10.2357/ ldm-2020-0048 85 Dossier unmittelbar darzustellen, konstruiert sie über Affekte wie Wut oder Scham, in denen die Herkunft des/ der transfuge de classe fortwirkt (cf. Spoerhase 2018: 246sq.) und die mittels literarischer Textstrategien evoziert werden. Auch Weber verflicht seine Lektüren, als Zitate kursiv markiert, in seinen Aufsatz und lässt dabei die ‚Theoretiker*innen‘ der Autosoziobiographie Ernaux - Eribon - Louis nicht unerwähnt: „Annie Ernaux und Edouard Louis - beide Gewährsmenschen für Eribons Schriften - gehen davon aus, dass es eine Grenze zwischen der bürgerlichen und der Arbeiter*innenklasse gibt, habituell sowie sprachlich“ (Weber 2020: 354). Anscheinend bleiben die französischen Vorbilder, die das Genre geprägt und popularisiert haben, die Bezugsgröße, wenn die eigene Klassenherkunft thematisiert wird; auch dann, wenn man sich von ihnen abgrenzt. So merkt Weber kritisch an, […] Eribon schreibt so, als gäbe es nur UNTEN und OBEN - und keinen dritten Weg: Der Zugang zur ‚legitimen‘ Kultur markiert den Anfang einer aufsteigenden Bahn und somit auch des ‚Klassenverrats‘, nicht merkend, dass er mit seinen Worten die Klassenverhältnisse reproduziert, anstatt sie in Frage zu stellen (ibid.: 354, Hervorhebung im Original). Bov Bjerg greift in Serpentinen die Eribon-Bezüge ebenfalls nicht rein affirmativ auf. Anders als Eribon, dem es in seinen Werken darum geht, soziale Determinismen und Herrschaftsmechanismen aufzuzeigen und der dafür ein soziologisch und philosophisch geschultes Denken stark macht (cf. Eribon 2016: 9-13), steht Bjergs Protagonist seiner wissenschaftlichen Disziplin und deren Erkenntnispotenzial skeptisch gegenüber: „Ich misstraute der Soziologie. Ich misstraute dieser Larmoyanz. Das Individuelle wurde typisiert, wurde zurechtgebogen, bis es ins Klischee passte und ins Ressentiment und in die stimmige, ad hoc einleuchtende Geschichte. Legenden, Lügen, Bla, Theorie“ (Bjerg 2020: 122). Serpentinen: Autosoziobiographie als Romanstoff Neben der sozialwissenschaftlichen Auseinandersetzung mit Rückkehr nach Reims ist in der literarischen Rezeption eine gegenläufige Bewegung auszumachen: wie schon Édouard Louis, der das Eribon’sche Motiv des Bildungsaufstiegs des jungen Schwulen aus der Arbeiter*innenklasse zu einer vorrangig literarischen Darstellung verdichtet, greift auch die deutschsprachige Gegenwartsliteratur lieber auf Techniken des Erzählens denn auf solche der Analyse zurück. „Bei ‚Ein Mann seiner Klasse‘ war es mir […] wichtig, allein der Kraft des Erzählens zu vertrauen und keine soziologischen Reflexionen einzuarbeiten […]. Manchmal vermittelt die pure Geschichte mehr klassenpolitische Wahrhaftigkeit als eine wissenschaftliche Abhandlung“, fasst Christian Baron die Unterschiede seines eigenen Buchprojekts zu Rückkehr nach Reims zusammen (Canoglu 2020). Die deutschen Autosoziobiographien scheinen tendenziell wieder klareren Genrezuordnungen zu entsprechen; 19 Herkunft und Klasse werden in ihnen narrativ verhandelt, auch wenn das französische Vorbild als Hypotext Theorie- und Reflexionsgrundlage bleibt. Mit der Feststellung: „[d]er 86 DOI 10.2357/ ldm-2020-0048 Dossier französische Soziologe Didier Eribon hat hierzulande eine Tür aufgemacht. Man redet wieder über soziale Unterschiede“ macht etwa Daniela Dröscher den Einsatz ihrer eigenen Herkunftserzählung deutlich (Dröscher 2018: 20). Diese Bezüge und Parallelen scheinen auch noch in jenen Rückkehrerzählungen zur sozialen Herkunft der Arbeiter*innenklasse durch, die mit dem pacte autobiographique der Einheit zwischen Autor*in, Erzähler*in und Protagonist*in brechen. Während für Annie Ernaux und Didier Eribon der Bruch mit den literarischen Genres des Romans 20 und der Autofiktion 21 eine notwendige Voraussetzung des autosoziobiographischen Schreibens sind, gilt das für die deutschsprachige ‚Arbeiterkinderliteratur‘ nicht mehr. Dass Autosoziobiographien auch (auto-)fiktional erzählt werden können, macht das Fallbeispiel von Serpentinen deutlich. Bov Bjergs Roman greift auf narrativer und ästhetischer Ebene genretypische Merkmale der Textsorte auf und spinnt diese in Wiederholung und Varianz fort, so dass eine Art Meta-Erzählung des transclasse-Narrativs entsteht, in der die Autosoziobiographie selbst zum Stoff wird. Dies wird insbesondere deutlich an Textstellen wie der eingangs zitierten Anspielung auf Rückkehr nach Reims oder an folgendem Zitat, das als mise en abyme Roman und Genre spiegelt: Und alle beschrieben sie ihren Vater präzise, die Soziologen und die Schriftsteller und die Mitschüler und alle Männer, denen ich begegnete und von denen ich las. […] Der Brief an den Vater. Andere Männer, Bildungsmänner, Hochkulturmänner, ahmten den Brief an den Vater nach. Sie verfassten geistreiche Essays und Reportagen, sie schrieben ganze Bücher über und an ihren Vater. Diese abgeschmackte Pose, den unbekannten direkt anzusprechen. Er hört euch nicht mehr, wisst ihr das denn nicht? (Bjerg 2020: 59-60). Was Bjerg hier mit distanzierter Erzählerhaltung beschreibt, greift er zugleich motivisch affirmierend wieder auf, denn Serpentinen ist eine ebensolche autosoziobiographische Rückkehr-Erzählung eines fiktiven Soziologieprofessors, physisch an den Herkunftsort und reflexiv zur Familienals Sozialgeschichte. Während in Retour à Reims die ‚Rückkehr‘ - der Besuch bei der Mutter in der Provinz - als Eingangs- und Schlussszene des Buchs die soziotheoretischen Reflexionen rahmt, wird sie bei Bjerg zum eigentlichen Handlungsstrang gedehnt und verdichtet. Die Rückkehr von Bjergs namenlos bleibendem Protagonisten wird als road trip durch die Herkunftsgegend erzählt; sie bleibt unabgeschlossen (und wird am Ende abgebrochen) in ihrer Intention als Wiederaneignung der eigenen Geschichte und Annäherung an die Vergangenheit genauso wie an eine mögliche Zukunft, die, verkörpert durch den mitfahrenden jungen Sohn, einen Ausbruch aus der sozialen Reproduktion des Lebensverlaufs der männlichen Vorfahren bedeuten würde. Schon Eribon hält in La société comme verdict fest, „qu’un ‚retour‘ n’est jamais terminé et, sans doute, jamais terminable: ni dans le parcours effectif, ni dans la réflexion qui l’accompagne“ (Eribon 2013: 9). In Serpentinen scheitert sie nun vollends, denn alle Personen, mit denen ein Gesprächs- und damit Wiederbegegnungsprozess einsetzen könnte, sind bereits DOI 10.2357/ ldm-2020-0048 87 Dossier tot: der Vater hat sich in den Kindheitsjahren des Protagonisten das Leben genommen, „[a]uch der Abschied von der Mutter misslang, natürlich“ (Bjerg 2020: 135), ebenso der des Jugendfreunds. Ebenso wie Retour à Reims ist Serpentinen eine Auseinandersetzung mit klassenspezifischen Maskulinitätsvorstellungen und deren Rolle im Habitus der sozialen Akteure. Bjergs Protagonist reflektiert auf seiner Reise darüber, wie die habituellen Ansprüche an Männlichkeit in der Arbeiter*innenklasse Gewalt, Alkoholismus und Depression reproduzieren. Aber wo Eribon und sein Schüler Louis aus einer marginalisierten Position - jener der Homosexualität - schreiben, die sie aus dem Männlichkeits-Ideal zunächst ausschließt und schließlich dieses überwinden lässt, und an ihrer eigenen Bildungsbiographie zeigen, wie weit die Nicht-Reproduktion der sozialen Herkunftsklasse mit der Nicht-Reproduktion normativer Geschlechterrollen und schwuler Subjektivierung verwoben ist, interessiert sich Bjerg für die Kontinuitäten von Maskulinität, auch nach erfolgtem Klassenwechsel. Denn der Erzähler ist genauso alkoholabhängig, depressiv und von Suizidgedanken geprägt wie sein Vater und Großvater vor ihm; diese psychische Disposition bindet ihn an seine Herkunft und ist allgegenwärtiger Begleiter seiner Rückkehr-Reise. Der habitus clivé des transfuge de classe manifestiert sich in ihm folglich in einer gespaltenen Haltung zu Männlichkeitsansprüchen: „Ich mochte körperliche, handwerkliche Arbeit. Sie machte mich zum Mann und verband mich mit den anderen Männern. Ich verabscheute körperliche Arbeit. Sie machte mich zum Mann und verband mich mit anderen Männern“ (ibid.: 196). Als wiederkehrendes Motiv durchzieht Serpentinen die Angst des Protagonisten, seine eigenen Gewalterfahrungen und seine Suizidgefährdung an den Sohn weiterzugeben. Die Figur des Sohns, der den Protagonisten auf der Reise begleitet, hat auf der Handlungsebene die Funktion einer dialogischen Infragestellung des „Legenden, Lügen, Familienbla“ (ibid.: 27), das sich über den Selbstmord der Väter ausschweigt. Auf Darstellungsebene wird der Sohn gedoppelt in dem biblischen Gleichnis vom verlorenen Sohn, das als zweiter Referenztext neben Rückkehr nach Reims den Roman durchzieht und wiederkehrend zitiert und paraphrasiert wird. Mit dieser Rückbindung an Vorgänger-Texte steht Bov Bjegs Roman in einer Traditionslinie der französischen Autosoziobiographie. Bei Annie Ernaux und Didier Eribon ist es der Soziologe Pierre Bourdieu, dessen gewichtigen Einfluss auf das eigene Schaffen sie immer wieder erwähnen. „À bien des égards, Retour à Reims s’inscrit dans la filiation de La Distinction“, schreibt Eribon, „[i]l me serait difficile de trouver des mots assez forts pour expliquer à quel point […] avait été considérable sur moi l’influence de son [sc. Bourdieus] travail“ (Eribon 2013: 62), Annie Ernaux spricht von ihrer Bourdieu- Lektüre als einem „choc ontologique violent“ (Ernaux 2002). Bourdieus Soziologischer Selbstversuch (2002), seine auto-socioanalyse, die nicht die individuelle Lebensgeschichte, sondern deren historische und soziale Determinanten fokussiert, und sein Konzept des ‚habitus clivé‘ stehen demnach auch auf formaler und konzeptioneller Ebene Modell für die Autosoziobiographien Ernaux’, Eribons und Louis’. 22 Mit diesen Verfahren der gegenseitigen intertextuellen Bezugnahme entsteht, durch 88 DOI 10.2357/ ldm-2020-0048 Dossier die Chronologie der Werke und die Generationenunterschiede, eine Art neue Genealogie der transfuges de classe, die - auch als Gegenentwurf zu normativen Konzepten von Familie und Herkunft - über die Effekte von Subjektivierung, Politisierung und Identifikation selbst gewählt wird. 23 Auch die deutschsprachige ‚Arbeiterkinderliteratur‘ lässt sich als Einschreibung in eine solche genealogische Literatur-Gemeinschaft verstehen. Conclusio In der Gegenüberstellung der unterschiedlichen Rezeptionsformen der Eribon’schen Autosoziobiographie in den literarischen Textsorten Roman und Essay wurde der Frage nachgegangen, ob das ‚Eribon-Genre‘ denn ein solches ist. Ein erster Blick lässt vermuten, dass gerade die hybride, Genregrenzen überwindende Form, die Rückkehr nach Reims sowohl zur Autobiographie als auch zur soziologischen Analyse und Zeitdiagnose macht, in den deutschsprachigen Rezeptionen wieder auseinanderfällt: während die Schriftsteller*innen Romane verfassen, geben die Sozialwissenschaftler*innen Sammelbände heraus. 24 Bei genauerer Betrachtung fällt aber auf, dass sowohl die wissenschaftlichen Aufsätze persönliche Erfahrungsberichte aufgreifen (bzw. die Sammelbände autobiographische Essays aufnehmen) als auch die Literatur Individuelles in gesellschaftlichen Kategorien (Klasse, sozialer Aufstieg, Maskulinität) verortet - wenn auch nicht in der selben Konsequenz die Gattungsgrenzen zwischen Literatur und Wissenschaft aufgehoben werden wie bei Eribon. Weniger als von einer Hybridisierung muss für die Texte aus dem deutschsprachigen Raum von einer gegenseitigen Affizierung die Rede sein; ‚Autosoziobiographie‘ ist dann vielleicht nicht primär eine Textsorte, sondern zunächst ein bestimmter Modus der autobiographischen Bezugnahme auf soziale Phänomene. 25 Seine besondere Wirkung, seine extensive Rezeption und Adaption durch Leser*innen und in der Literatur im Besonderen, verdankt die deutschsprachige Übersetzung von Didier Eribons Retour à Reims dem enormen Potenzial seiner Übertragbarkeit. Was Eribon über Herkunft, Klassenverhältnisse, Bildungsaufstieg, soziale und sexuelle Scham geschrieben hat, lässt sich ob der analytischen Schärfe seiner Darstellung, welche die genealogische Familienerzählung mit der Politisierung seiner eigenen Lebensgeschichte engführt, auch auf andere Erfahrungen des Übergangs von einer sozialen Sphäre in die andere transferieren, wie auch sein Übersetzer Tobias Haberkorn anmerkt (cf. Mühlhoff 2017): Als Leser*in kann man sich, gerade weil Eribon unterschiedliche Formen der sozialen Differenz, Beschämung und Diskriminierung verschränkt betrachtet, auf verschiedene Weise von dem Text anregen lassen und sich mit ihm identifizieren. Diesem Transfer-Potenzial trägt auch die Pluralität der Rezeptionsphänomene Rechnung. DOI 10.2357/ ldm-2020-0048 89 Dossier Altieri, Riccardo / Hüttner, Bernd (ed.), Klassismus in der Wissenschaft. Erfahrungsberichte und Bewältigungsstrategien, Marburg, BdWi-Verlag, 2020. Aumair, Bettina / Theißl, Brigitte (ed.), Klassenreise. Wie die soziale Herkunft unser Leben prägt, Wien, ÖGB Verlag, 2020. Baron, Christian, Ein Mann seiner Klasse, Berlin, Ullstein, 2020. Bergermann, Ulrike / Seier, Andrea, „Klasse. Zur Einleitung in den Schwerpunkt“, in: ZfM - Zeitschrift für Medienwissenschaft, 19, 2018, 10-21. Bjerg, Bov, Serpentinen, Berlin, Ullstein, 2020. Blome, Eva, „Rückkehr zur Herkunft. 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Spoerhase 2017, Jaquet 2018: 25, Blome 2020 bzw. der Workshop „Annäherung an die Autosoziobiographie“ am 22./ 23.10. 2020 an der Universität Konstanz). 2 Möglich wäre auch, die Textstelle bei Bjerg als Anspielung auf Édouard Louis’ Roman En finir avec Eddy Bellegueule (2014, in dt. Übersetzung Das Ende von Eddy, 2015) zu lesen; cf. dazu FN 62 in Blome 2020: 561. 3 Der Klassen-Begriff wird in den Autosoziobiographien unterschiedlich und tendenziell unbestimmt verwendet und zielt funktional auf die Beschreibung struktureller sozialer Diskriminierung, Unterdrückung und Gewalt. Bei Eribon, Ernaux und Louis finden sich „classes populaires“, „classe(s) ouvrière(s)“ und „classe(s) dominante(s)/ dominée(s)“. „Arbeiter*innenklasse“ wird in diesem Sinne hier und im Folgenden als Sammelbegriff verwendet. 4 Cf. etwa auch die Veranstaltungsreihe „Vom Unbehagen in der Fiktion“, einer Kooperation von fünf deutschen Literaturhäusern, bei der Autor*innen, Kritiker*innen und Wissenschaftler*innen den Boom des autofiktionalen Erzählens in der Gegenwartsliteratur diskutieren: www.literaturhaus.net/ projekte/ vom-unbehagen-in-der-fiktion. 5 Das hängt auch mit den Publikationsstrategien des Suhrkamp-Verlags zusammen, die nach dem Erfolg der deutschsprachigen Übersetzung von Les Années / Die Jahre 2017 und sicher auch im Hinblick auf den Erfolg von Rückkehr nach Reims in schneller Abfolge Ernaux’ frühe autosoziobiographische Texte Der Platz (2019), Eine Frau (2019) und Die Scham (2020) veröffentlicht haben. 6 Dessen Titel hier für den Aufsatz übernommen wurde. 7 Cf. Altieri/ Hüttner 2020, Aumair/ Theißl 2020, Seeck/ Theissl 2020, Möller et al. 2020. DOI 10.2357/ ldm-2020-0048 91 Dossier 8 Cf. www.franceculture.fr/ sociologie/ comment-retour-a-reims-est-devenu-un-best-sellersociologique (letzter Zugriff: 25.06.21). 9 Etwa die Rezensionen zur deutschsprachigen Veröffentlichung aus der NZZ, Tageszeitung, Welt und Süddeutschen Zeitung auf www.perlentaucher.de/ buch/ didier-eribon/ rueckkehrnach-reims.html (letzter Zugriff: 25.06.21). 10 Cf. exemplarisch: Eiden-Offe 2017, Bergermann/ Seier 2018, Friedrich 2018, Altieri/ Hüttner 2020, Aumair/ Theißl 2020, Seeck/ Theißl 2020, Möller et al. 2020. 11 Etwa Oliver Nachtwey in Die Abstiegsgesellschaft (2016). 12 Zur Diskussion um die Begriffe ‚transfuge de classe‘/ ‚transclasse‘ und ihren deutschen Entsprechungen ‚Klassenflüchtige*r‘/ ‚Klassenübergänger‘ cf. Jaquet 2018: 20. 13 In Resonanz auf die, u. a. durch die emphatische Rezeption von Rückkehr nach Reims mitentfachte, Wiederkehr der Klassen-Debatte wird ‚Klasse‘ in Deutschland vermehrt unter dem - ursprünglich aus dem Kontext des US-amerikanischen Feminismus der 1970er- Jahre kommenden - Begriff des ‚Klassismus‘ diskutiert (zu dem Andreas Kemper und Heike Weinbach allerdings bereits 2009 eine Einführung geschrieben haben); cf. Kemper/ Weinbach 2016. 14 Wobei laut Eribon schon die soziale Positionierung des/ der transfuge de classe dieses Wissen zu evozieren scheint: „[…] le transfuge de classe est spontanément sociologue […]“ (Eribon 2016a: 150). 15 Cf. Dröscher 2018: 7, Scholz 2019: 129. 16 Der Problematik ist sich Eribon durchaus bewusst: „Il convient en effet de souligner qu’en décrivant la violence du monde social telle qu’on la perçoit, telle qu’on l’analyse, on exerce, en même temps, une certaine violence sur les autres, qui se retrouvent impliqués dans ce qu’on écrit sans avoir rien demandé […]“, Eribon 2016a: 67. Cf. insbesondere auch Eribon 2016a: 67-89. 17 Für eine ausführliche Auseinandersetzung mit der Funktion der Fotografie im Schreiben Annie Ernaux’ cf. Sykora 2019. 18 Zum durch Lektüren und Intertextualität evozierten Verfahren der Identifikation mit Vorgängertexten und -autor*innen als Merkmal der transclasse-Erzählungen cf. auch Blome 2020: 560-567. 19 Eine Ausnahme ist hierbei Daniela Dröscher mit Zeige deine Klasse. Die Geschichte meiner sozialen Herkunft (2018), die ihre Herkunftserzählung mit Versatzstücken aus Literatur, Soziologie und Popkultur verwebt und dem Erzähltext mit Fußnoten und typographisch abgehobenen Einschüben beifügt. 20 „Depuis peu, je sais que le roman est impossible. Pour rendre compte d’une vie soumise à la nécessité, je n’ai pas le droit de prendre d’abord le parti de l’art, ni de chercher à faire quelque chose de ‚passionant‘, ou d’‚émouvant‘“, Ernaux 2001a: 422. 21 „[…] l’auto-analyse [d. h. das Verfahren der Autosoziobiographie] se situe à l’opposé de l’autofiction: rien ne doit y être fictionnel, et c’est la vérité, ou en tout cas la véridiction, c’està-dire le souci du dire-vrai, qui y prime“, Eribon 2016a: 17. 22 Cf. dazu auch Spoerhase 2018: 236-243. 23 Eva Blome spricht in diesem Zusammenhang von einer „‚transclasse‘-communio“, cf. Blome 2020: 560. 24 Für diesen Hinweis danke ich Claude Haas. 25 Diese Überlegung geht auch vom ursprünglichen, adjektivischen Gebrauch des Begriffs („auto-socio-biographique“) aus, cf. FN 1. 92 DOI 10.2357/ ldm-2020-0049 Dossier Delphine Edy Transfuge(s) de classe, de genre, de culture… Pour Thomas Ostermeier, tous les détours mènent à Reims Retour à Reims, le spectacle hybride de Thomas Ostermeier, entre film documentaire et performance théâtrale et musicale, prend appui sur le texte tout aussi composite de Didier Eribon et connaît un succès retentissant: créé en anglais à Manchester en juillet 2017 dans le cadre du Manchester International Festival, il a été repris à Berlin à la Schaubühne, puis transposé en français et en italien, et une nouvelle version allemande sera présentée au public berlinois en 2021. Peu nombreux sont ceux qui se souviennent que le texte d’Eribon, paru en 2009 chez Fayard, n’a pas rencontré l’accueil que l’on est en droit de s’imaginer dix ans plus tard. La journaliste Chloé Leprince choisit d’ailleurs, au moment de la première française du spectacle, de rappeler „comment Retour à Reims est devenu un bestseller sociologique“ en retraçant la réception de ce livre: Retour à Reims rencontre un accueil minimaliste dans le champ académique. Un tel accueil souligne la question du statut de cet essai à sa sortie (Leprince 2019). Le fait qu’il n’y ait que de „rares recensions de Retour à Reims dans les deux ans qui suivent sa parution“, aurait donc à voir pour la journaliste avec le genre du texte (ibid.). Est-ce le choix de l’écriture à la première personne qui dérange ses habituels lecteurs académiques? Car, comme le signale Benoît Ladouceur, enseignant de sciences économiques et sociales, ce livre n’est pas un livre de sociologie à proprement parler. C’est un livre personnel dans lequel Didier Eribon revient sur une partie de sa vie qu’il a occultée durant de longues années (Ladouceur 2011). Pourtant, pour le sociologue Paul Pasquali, cette „autobiographie d’un intellectuel de première génération“ articule „des analyses sur la famille de l’auteur avec des réflexions sur les classes populaires en général“ (Pasquali 2011: 159-160). La réception par la presse généraliste apparaît „a contrario enthousiaste, volubile, et varié[e]“ (Leprince 2019). Jean-Louis Jeannelle (Le Monde) salue un „essai où [Eribon] emprunte à la tradition littéraire du récit de retour“, en racontant „l’histoire de vies qui se sont croisées sans vraiment s’être rencontrées“ (Jeannelle 2009). Jérôme Duuis (L’Express) y voit „le formidable coming-out social“ d’un Eribon „sociologue de sa propre autobiographie“ qui livre un véritable „roman familial des origines“ (Duuis 2009: 107). Pour Christine Ferniot (Télérama), Retour à Reims s’entend comme un „beau récit tendu [qui] mêle la réflexion intellectuelle sur l’identité et l’histoire singulière et intime“ (Ferniot 2009: 69): DOI 10.2357/ ldm-2020-0049 93 Dossier A l’autobiographie, le philosophe Didier Eribon a préféré une autre forme littéraire - qui rappelle celle d’Annie Ernaux, souvent citée. Elle lui permet d’exprimer les tâtonnements d’une vie et montre les batailles permanentes d’un homme dominé par la violence d’une société de classes (ibid.). Ce qui semble avoir contribué au succès éditorial de Retour à Reims, un ouvrage vendu à plus de 65 000 exemplaires en l’espace de six ans, alors qu’„à 1 300, on estime souvent qu’un livre de sciences sociales est déjà un succès correct“, se trouve donc bien du côté de sa dimension littéraire, soulignée par les recensions critiques (Leprince 2019). „Récit de retour“, „histoires de vie“, „autobiographie“, „roman familial“, tous ces termes mettent en lumière la construction d’une forme, et l’on saisit mieux ce que dit Annie Ernaux de l’écriture en creux dans ce texte: Eribon offre ici un exemple magnifique de la vie éclaircie [...] dans une démarche d’écriture qui lie étroitement l’intime, le social et le politique, unit le corps usé d’une mère à la division injuste d’une société à changer (Ernaux 2009: 118). Comment comprendre alors que la traduction allemande de Tobias Haberkorn parue en 2016 se soit révélée immédiatement un best-seller, avec des ventes s’élevant à presque 90 000 exemplaires en un an? D’autant qu’on ne compte plus les interviews d’Eribon dans la presse allemande et les conférences données en Allemagne et en Autriche. Il apparaît alors nettement que c’est dans le cadre de l’opération de transposition, qui relève à la fois de la traduction et du transfert culturel, que l’expérience du transfuge de classe qu’est Eribon s’actualise Outre-Rhin et semble renvoyer à une réelle nécessité allemande, notamment celle de trouver des explications à la résurgence de l’extrême-droite. Par ailleurs, le regain d’intérêt en France pour l’ouvrage réédité en 2018 semble coïncider avec la mise en scène d’Ostermeier que les spectateurs découvrent à l’été 2017 en Grande-Bretagne puis à Berlin et New York, avant même que la version française ne soit créée à Paris début 2019. C’est l’un des effets de notre monde globalisé: quand Ostermeier, reconnu comme l’un des plus grands metteurs en scène européens actuels, crée un spectacle, de nombreux sites et critiques relaient l’information. 1 La version scénique permet donc de (re)découvrir ce texte, et le processus de transposition se voit démultiplié dans le passage à la scène. En effet, l’approche de la réalité, notamment sociale et politique, mérite souvent un déplacement, un détour par l’étranger, Jean-Pierre Sarrazac nous rappelle d’ailleurs à ce sujet que „le détour permet le retour“ (Sarrazac 2004: 14): „Le pas de côté, le détour par ce qui est étranger ne peuvent [en effet] que favoriser un regard de re-connaissance du réel“ (Sarrazac 2002: 38). Il faudrait donc se détourner du texte original d’Eribon pour mieux revenir à lui et à Reims, cette ville devenant ainsi un lieu quasi mythique, celui de l’anagnôrisis, chacun pouvant dès lors trouver un nouvel accès au réel et à sa propre identité, ce qui explique pour Dirck Linck le succès du livre en Allemagne: 94 DOI 10.2357/ ldm-2020-0049 Dossier Vor allem aber ist sie [die Aufmerksamkeit] ein Effekt von Eribons Darstellungsverfahren, das darauf angelegt ist, in greller Beleuchtung die Realien des Sozialen zur Erscheinung zu bringen (Linck 2016: 41). Il s’agit dès lors d’engager un parcours qui prend appui sur le texte hybride transgenre d’Eribon et d’opérer un détour par la scène théâtrale afin de mieux comprendre comment celle-ci actualise le texte au cours d’un processus transmédial et transculturel, ce qui permettra de mieux cartographier la notion de transfert, dont il semblerait qu’elle a à voir avec le débordement. Un texte transgenre Les extraits de critique déjà cités l’ont établi: Retour à Reims n’est pas seulement „un grand livre de sociologie et de théorie critique“ comme le note l’éditeur sur la quatrième de couverture (Eribon 2018). Entreprendre ce retour vers Reims s’apparente aussi pour Eribon à retrouver cette „contrée de moi-même“, comme aurait dit Genet, d’où j’avais tant cherché à m’évader: un espace social que j’avais mis à distance, un espace mental contre lequel je m’étais construit, mais qui n’en constituait pas moins une part essentielle de mon être (Eribon 2018: 13). Cette allusion à Jean Genet n’est pas anodine. Elle fait directement référence au poème „Voleur II“ dont il existe deux versions (Nottet-Chedeville 2018: 147): VOTRE ÂME est de retour des confins de moi-même [„Bohême“ Prisonnière d’un ciel aux paresseux chemins en 1945] Où dormait simplement dans le creux d’un poème [„poëme“ en 1945] Une nuit de voleur sous le ciel de ma main. Tout comme Genet semble chercher dans l’écriture la manière d’être au plus près de lui-même en nous offrant sa „bohème“ rimbaldienne, son errance dans la solitude de sa jeunesse, Eribon emprunte le chemin du retour pour se retrouver et mieux se comprendre. Cette „contrée“ ou ces „confins de moi-même“ en tant que territoire limite n’en sont-ils pas d’ailleurs que plus reconnaissables par celui-là même qui vit dans cette semblable extrémité, tout aussi proche et conscient de la frontière? C’est d’ailleurs ce que semble suggérer édouard Louis lorsqu’il s’écrie à propos de sa découverte, à l’âge de 18 ans, de Retour à Reims: „ce livre est l’histoire de ma vie“ et précise: Retour à Reims retrace […] la trajectoire d’un jeune gay qui grandit dans les classes populaires de Reims, dans un monde pauvre et dépossédé de presque tout, et qui va lutter pour s’éloigner du milieu de son enfance pour s’inventer autrement, devenir quelqu’un d’autre. Il fuit Reims et s’installe à Paris. […] Et il se transforme tellement, il s’éloigne tellement de sa famille et de la classe sociale dans laquelle il a grandi que quelques années après son départ DOI 10.2357/ ldm-2020-0049 95 Dossier pour Paris il n’est plus capable de parler à sa famille; […] ils ne se comprennent plus (Eribon 2018: I-II). Au travers de ce livre, Louis reconnaît immédiatement sa propre vie, le processus d’identification fonctionne à plein et pourtant - et il le dit lui-même - „ce n’était pas vrai“, c’était une „erreur“, mais „c’est cette erreur, le fait que j’ai cru que c’était mon histoire, qui a fait que ce livre a eu autant d’impact sur moi“ (ibid.: II-III). Si le texte d’Eribon apparaît dans un premier temps comme „un espace à l’intérieur duquel on peut se reconnaître“, il s’avère, dans un deuxième temps, davantage un „espace de fantasme“ au sein duquel „l’erreur dans l’identification […] produit des effets sur la réalité“ (ibid.: III). En ce sens, la ville de Reims est à la fois un lieu réel, celui de l’enfance et de la jeunesse d’Eribon, mais il est aussi un „lieu[x] symbolique[s] inspiré[s] par un lieu d’expérience et de lieux réels“, non pas „parcourus par les personnages de fiction“, mais par la personne bien réelle de Didier Eribon (Grassin 2000: X). Il n’est donc pas étonnant que Retour à Reims soit à l’origine de nombreux échos: Annie Ernaux publie en 2013 Retour à Yvetot, et si Louis n’écrit pas „Retour à Hallencourt“, c’est pourtant bien ce retour qu’il met en œuvre dans son dernier ouvrage Qui a tué mon père, paru en 2018, qui se conçoit comme une réponse à son premier livre En finir avec Eddy Bellegueule, le retour se comprenant comme une réponse à la fuite nécessaire de ce monde perçu comme hostile. Mais Retour à Reims conduit aussi le documentariste Régis Sauder à tourner Retour à Forbach, un film documentaire que l’on a pu découvrir sur les écrans en 2017, dans lequel il revient, comme ses prédécesseurs, sur une partie volontairement occultée de sa vie, sur ses origines populaires, le quartier ouvrier de son enfance, sa honte sociale. 2 Cela corrobore par ailleurs pleinement le sentiment d’Eribon qui raconte au début de Retours sur Retour à Reims comment, „après la parution de Retour à Reims, en octobre 2009, [il] fu[t] submergé par un courrier considérable ininterrompu“, autant de traces de lecteurs saisis par cet „essai d’auto-analyse“, comme on peut le lire sur la quatrième de couverture, ce qui tend à prouver que la dimension autobiographique se trouve dépassée, débordée par la reconnaissance collective (Eribon 2011: 7). Ernaux, dans l’article qu’elle consacre au livre, l’exprime en des termes très justes: Difficile de rendre compte de toute la réflexion et de toute l’émotion que suscite la lecture du livre parcouru par les vibrations d’une révolte d’une mémoire humiliée, par une sorte particulière de mélancolie, analysée dans une très belle page, celle de l’être arraché à son premier monde (Ernaux 2009). Cette „révolte“, cette „mémoire“, ce „premier monde“ qu’évoque Ernaux, Eribon ne les perçoit dans un premier temps que de manière personnelle, il le raconte d’ailleurs ouvertement lors d’une conversation avec Ostermeier et le dramaturge Florian Borchmeyer au moment où l’équipe artistique travaille sur ce spectacle à Berlin. S’il s’interroge encore, avant la publication, sur le genre de son livre - lui dont certains 96 DOI 10.2357/ ldm-2020-0049 Dossier textes théoriques, comme Réflexions sur la question gay sont aujourd’hui des références des Gender Studies - il prend rapidement conscience de la transgression générique qu’il a opérée, à son insu: Es war für mich sehr schwierig, dieses Buch zu schreiben, und als ich es meiner Herausgeberin schickte, war sie sehr glücklich. Und dann schickte ich ihr eine Nachricht und sagte: „Ich möchte, dass wir die Veröffentlichung zurückziehen.“ Sie sagte mir: „Aber es ist schon in der Druckerei, das Buch wird erscheinen.“ Ich dachte: Es ist Wahnsinn, das zu tun - für mich, für meine Familie. Das ist ein zu persönliches Buch. Aber tatsächlich habe ich hunderte Briefe von Menschen erhalten, die mir sagten: Sie beschreiben da mein Leben. Also habe ich mir gesagt: Das ist keine individuelle Erfahrung. Es ist eine kollektive Erfahrung, die sich bislang nicht ausdrücken konnte. Also hatte ich - um Sartres Begriffe zu übernehmen - eine Art Übergang von der Serialität zum Kollektiv vollzogen (Eribon 2016b: 22). C’est pourquoi ce texte est transgenre, au sens du genre littéraire. Merete Stistrup Jensen et Marie-Odile Thirouin ont montré dans leur ouvrage Frontières des genres. Migrations, transferts, transgressions que la notion de genre s’est déplacée: Elle ne relève plus d’une norme mythique, mais se constitue dans l’écart avec cette pseudonorme. C’est le jeu avec les frontières, qu’on respecte, qu’on refuse, qu’on dépasse, qu’on brouille, qui définit aujourd’hui le champ littéraire en expansion (Stistrup Jensen / Thirouin 2005: 7). Le préfixe ‚trans-‘ permet donc de montrer comment la généricité de Retour à Reims „déstabilis[e] l’horizon générique classique, dès lors qu’il y a décloisonnement des genres canoniques“, pour parler avec Jacqueline Dangel (2011: 156). En dépassant le simple ouvrage théorique, en introduisant une part de subjectivité autoréflexive et, surtout, en racontant à la première personne l’histoire de celles et ceux qui se découvrent alors transfuges de classe, Retour à Reims déplace le genre, ce qui d’ailleurs nous rappelle que c’est „le texte [qui] génère le genre et non l’inverse“ (Stistrup Jensen / Thirouin 2005: 6). Par ailleurs, ce constat déborde sur la scène de théâtre, car l’interaction entre la scène et le texte permet elle aussi de reposer la question du genre. Le texte hybride et transgenre d’Eribon, en véritable écho à son identité de transfuge de classe ou de ‚transclasse‘ se voit en effet actualisé dans son transfert sur la scène au sens deleuzien du passage de l’état en puissance à celui d’en acte (Jacquet 2014). La scène théâtrale intermédiale comme lieu de l’actualisation Ostermeier a beaucoup travaillé ces dernières années sur la question de la montée de l’extrême droite, conjuguée à celle de l’échec de la gauche. Après avoir proposé une version remarquée de Professor Bernhardi d’Arthur Schnitzler en 2016, 3 opéré un détour par Reims en 2017, puis être revenu aux textes classiques d’Ödön von Horváth, en mettant en scène Italienische Nacht en 2018 et Jugend ohne Gott en 2019, Ostermeier démultiplie le Retour en mettant en scène quatre autres versions DOI 10.2357/ ldm-2020-0049 97 Dossier du spectacle: à la version anglaise Returning to Reims de 2017 font suite une version allemande Rückkehr nach Reims en 2018, la version française début 2019, ainsi qu’une version italienne Ritorno a Reims en novembre 2019, alors qu’une nouvelle version allemande est attendue pour 2021 à Berlin. Ce faisant, Ostermeier a réussi à créer en quatre ans un véritable dialogue entre littérature de répertoire et littérature contemporaine, entre des écrivains qui s’approchent au plus près des mécanismes concrets qui permettent à l’idéologie de l’extrême-droite de s’installer et à ses adeptes de s’emparer du pouvoir, et d’autres qui s’attachent à faire exister les victimes des mécanismes dudit pouvoir. Dans une interview réalisée en 2020, 4 Ostermeier explique qu’en choisissant les textes qu’il met en scène, il chausse surtout ses „lunettes matérialistes“, pour montrer comment „das gesellschaftliche Sein bestimmt das Bewusstsein“; il se positionne en tant que „matérialiste historique“, rappelant ainsi que c’est „la situation matérielle [qui] fait la vie des gens“. Dans cette dynamique, le texte d’Eribon revêt un statut particulier, comme le metteur en scène le précise ailleurs: Pour moi, le fait que Retour à Reims conjugue cette double dimension à la fois analytique et biographique a été un facteur décisif. L’analyse est renforcée par le fait que tout ce que décrit l’auteur est vécu (Ostermeier 2018: 6). En effet, Ostermeier a depuis toujours à cœur de „démasquer les puissants et [de] percer à jour les structures du pouvoir“ (Ostermeier 2016: 61). Ce qu’il recherche, c’est une littérature capable de faire tomber les masques, celle qui associe les dimensions sociologique, psychologique et anthropologique aux questions de pouvoir: comment les individus ont-ils une chance de s’épanouir malgré le poids des contraintes? Mais cette recherche ne peut se penser sans la dimension humaine, c’est-à-dire sans les acteurs et le public. Le metteur en scène s’empare donc d’un texte lorsqu’il pressent que sa vérité peut se révéler peu à peu, que le sens peut être pluriel, c’est-à-dire que l’œuvre est suffisamment ouverte et universelle pour tendre vers une forme de transtemporalité; il en propose alors un choix de résolution avec son équipe artistique, car c’est par l’action qu’il cherche à percer l’énigme du texte. Si la dimension autobiographique du vécu joue un rôle décisif dans le choix du metteur en scène de créer ce spectacle, l’opération de transfert sur le plateau engage un processus d’éloignement, une distanciation du texte et donc de la parole d’Eribon: Ostermeier part de la parole de l’homme, de son vécu, pour déplier une réalité de plus en plus globale, qui déborde à travers les discussions des personnages pour atteindre les spectateurs qui sont en mesure d’engager un dialogue avec leur propre histoire. Sur le plateau, c’est le décor d’un studio d’enregistrement qui se voit reconstitué; Tony, ingénieur du son et propriétaire du studio, le prête à son ami Paul pour qu’il puisse enregistrer la voix-off de son documentaire sur Eribon, celle-ci étant prise en charge par Katy/ Catherine (en fonction des versions), une de ses amies comédiennes. Le cadre dramaturgique est posé. 98 DOI 10.2357/ ldm-2020-0049 Dossier La première partie du spectacle est consacrée à l’enregistrement de la voix-off - un montage du texte - du film documentaire, projeté sur grand écran en fond de scène. Ce qui pourrait apparaître de prime abord comme une illustration visuelle et scénique de livre se révèle bien plus une mise en perspective de ce texte, première étape de la distanciation orchestrée sur scène. En effet, Irène Jacob, la voix-off française, le souligne: La pensée d’Eribon ne doit pas s’imposer mais se proposer au spectateur comme le déroulement d’une réflexion intime et sociologique. Cette pensée se découvre à l’instant même où elle se prononce, ce n’est pas un prêche. Thomas m’a donné à lire l’essai de Kleist, De l’élaboration progressive des idées par la parole, qui parle du processus du discours et de l’écoute: on peut développer une pensée parce que l’écoute de quelqu’un permet de poser des mots, d’être face à ses interrogations et d’avancer dans la réflexion (Nordey 2019: 9). Le film documentaire s’ouvre sur des images en gros plan d’un Eribon visiblement absorbé par ses pensées dans le TGV qui relie Paris à Reims. Celles-ci sont entrecoupées par des images de la banlieue rémoise, parkings vides, autoroute et lotissements se déplient devant nos yeux. Puis Eribon arrive chez sa mère qu’on découvre dans son environnement quotidien, elle a sorti des photos, les passe en revue avec son fils. Autour d’un café, ils évoquent des souvenirs, parfois oubliés, ce sont des échanges entre mère et fils touchants, empreints de bienveillance et d’affection. Puis, à nouveau le train, en sens inverse, et nous voilà avec Eribon à Paris dans une librairie, comme si la visite chez sa mère avait déclenché de nouvelles réflexions, suscité des désirs de lecture. S’ensuit une scène de complicité dans un café typiquement parisien avec Geoffroy de Lagasnerie. Alternent par la suite de nouvelles images du sociologue dans le TGV , démultipliant le Retour, avec des images de son passage en 1989 dans l’émission Apostrophes, animée par Bernard Pivot, où il évoque Michel Foucault et Georges Dumézil. C’est de cette émission dont il est question dans Retour à Reims: Je fus stupéfait, il y a peu, d’apprendre que, en me voyant un jour dans une émission de télévision, il s’était mis à pleurer, submergé par l’émotion. Constater qu’un de ses fils avait atteint à ce qui représentait à ses yeux une réussite sociale à peine imaginable l’avait bouleversé. Il était prêt, lui que j’avais connu si homophobe, à braver le lendemain le regard des voisins et des habitants du village et même à défendre, en cas de besoin, ce qu’il considérait comme son honneur et celui de sa famille (Eribon 2018: 32). De vieilles photos de Reims sont aussi projetées, ainsi que des extraits d’archives: un discours de Jacques Duclos, des réunions du parti communiste, des manifestations d’ouvriers, des images de 1968, Prague, les manifestations, les grèves et, à nouveau, l’orchestration dynamique du retour avec des images d’aujourd’hui, celles des vestiges de l’usine qui a embauché le père d’Eribon dès sa sortie de l’école, mais aussi des photos d’ouvriers d’aujourd’hui qui regardent face caméra: des visages cernés, burinés par des années d’efforts, parfois des yeux rieurs, une esquisse de sourire; des hommes et des femmes, des jeunes et des moins jeunes tels DOI 10.2357/ ldm-2020-0049 99 Dossier qu’on en croise aujourd’hui dans des quartiers populaires. Souvent leur corps est abîmé, leur béquille en est le témoin. Puis des images d’époque de l’usine Peugeot située dans le quartier du Port Colbert de Reims: on aperçoit des hommes sur une chaîne de montage, puis des femmes, toutes portent une blouse qui contraste avec les mini-jupes et les pantalons pattes d’éléphants qu’elles renfilent à l’issue de leur journée de travail. Des plans fixes de l’usine VMC , Verreries Mécaniques Champenoises, une usine qui fonctionna entre 1911 et 2009, devenue une immense friche industrielle et dont l’année 2020 consacre la fin de l’existence puisqu’elle est à ce jour presque entièrement démolie. Sur ces images tournées par Sébastien Dupouey, on découvre de vieux joints en caoutchouc de bocaux en verre abandonnés à même le sol, des vitres brisées, une ancienne pancarte „Une place pour chaque chose, chaque chose à sa place“, rappelant de manière cruelle et ironique qu’il n’y a pas de mobilité sociale possible. Le plan fixe suivant montre un pavillon mitoyen délabré qui jouxte les restes du complexe industriel et côtoie des arbres sans feuilles en cette saison hivernale, images de désolation, suivies sans transition d’un reportage d’époque où des gens s’agglutinent aux caisses alignées d’un hypermarché, vision autrement apocalyptique de la société de consommation. Rupture de rythme: on suit alors Eribon qui remonte une ruelle et s’arrête devant le numéro 9, la maison de son enfance aujourd’hui rénovée, celle décrite dans son livre: Le mot „maison“ correspond mal à ce dont il s’agissait: un cube de béton collé à d’autres cubes de béton, posés de chaque côté d’une allée parallèle à d’autres allées identiques. Tous ces logements se composaient, sur un seul étage, d’une pièce principale et d’une chambre (que nous occupâmes donc à quatre, comme auparavant). […] Quelques mètres carrés de jardin agrémentaient l’ensemble d’une touche de verdure (Eribon 2018: 95-96). Puis, à nouveau, sans transition, des images nocturnes de l’avenue de l’Opéra avec l’Opéra Garnier en perspective, symbole du patrimoine culturel, suivies de celles de jambes de spectateurs gravissant les marches, de leurs verres de vin s’entrechoquant dans le foyer: chaussures, vêtements, bijoux, gestuelle, serveurs tout habillés de blanc, tout est marqueur social. Eribon et Lagasnerie sont également présents, on les voit entrer puis on les retrouve de dos, dans leur loge: si Eribon a aujourd’hui accès à ce temple de la culture, sa conscience de classe n’a visiblement pas disparu. L’enchaînement avec des images d’aujourd’hui du lycée Clémenceau de Reims avec un focus sur un jeune élève qui semble ne pas trouver sa place, crée un parallèle très suggestif. Les images du clip de Françoise Hardy „Tous les garçons et les filles de mon âge“ sont le moyen d’introduire la question de l’homosexualité, le sentiment d’être différent, la douleur qui l’accompagne. Puis, nous revenons dans le TGV et ce sont les images du film La Belle et la Bête avec Jean Marais dans le rôle-titre qui apparaissent, un Jean Marais que le père d’Eribon ne manquait jamais d’insulter en raison de son homosexualité. Ses paroles à l’attention de Belle à la fin du film „Je ne pouvais être sauvé que par un regard d’amour“ sont des mots à peine 100 DOI 10.2357/ ldm-2020-0049 Dossier couverts qui racontent le parcours intime de l’auteur condamné au départ pour découvrir que les termes ‚bienveillance‘, ‚tolérance‘ et ‚respect de la différence‘ peuvent le sauver. Dupouey établit enfin une association visuelle avec le quartier de la cathédrale et ses ruelles où Eribon découvre la réalité de l’homosexualité, les ‚lieux de drague‘, les toilettes publiques où il n’est jamais descendu. Puis, on découvre les images d’un club gay d’aujourd’hui, lieu de mixité sociale où des hommes en costume en côtoient d’autres tatoués, des hommes de toute génération mais aussi quelques femmes et surtout, une immense file d’attente sur le trottoir au cœur de la nuit, symbole du désir de se retrouver. Cette première partie s’achève sur des images de la triste cité HLM Orgeval à Reims où Eribon a habité avec sa famille entre ses treize et ses vingt ans. Katy s’interrompt pour manifester son désaccord. Dans les cinq versions du spectacle, cette première partie est similaire, seul le texte est traduit et interprété dans la langue de l’actrice qui joue Katy: Nina Hoss assure les versions anglaise et allemande, Irène Jacob la version française, Sonia Bergamasco la version italienne, et Isabelle Redfern la nouvelle version allemande de 2021. A l’issue de la première partie du spectacle, Katy interroge donc les choix du réalisateur, les coupes qu’il opère dans le texte, la sélection des images du documentaire et leur montage, l’adéquation du texte de la voix-off et des images projetées… et c’est donc bien une véritable discussion politique qui s’engage sur le plateau: Que peut-on vraiment dire? Quelles sont les forces politiques à l’œuvre? Comment remettre efficacement le système en question? Comme l’explique Irène Jacob, „le spectacle questionne la façon dont on écrit une histoire, et même l’histoire de France, ce qu’on choisit de raconter ou non“ (Nordey 2019: 14). Les échanges dont nous sommes témoins dans cette deuxième partie entre le réalisateur et la comédienne, mais aussi avec l’ingénieur-son interrogent ouvertement l’évolution politique des cinquante dernières années: la perte de vitesse de la gauche, la montée du populisme et de l’extrême-droite, la notion de classe sociale, la responsabilité de la gauche dans l’abandon d’un projet de société progressiste. Au moment où le documentaire reprend, après l’interruption provoquée par Katy, la sélection des images projetées est différente en fonction des versions: celles de jeunes activistes qui luttent contre le Front National dans les versions anglaise et allemande se voient remplacées par d’autres, montrant des manifestations de gilets jaunes dans la version française, ce choix soulignant la volonté d’être au plus près de l’actualité au moment des répétitions de cette troisième version et qui a à voir avec le fait que le théâtre de Thomas est „un théâtre de l’instant“. Il veut qu’on ait l’impression que les acteurs inventent ce qu’ils disent sur le moment, qu’ils réagissent, que les situations se jouent au présent (Nordey 2019: 11). Il y a par ailleurs d’autres ajouts, des images de François Hollande, d’Emmanuel Macron et d’autres images de gilets jaunes sur les Champs Élysées fin décembre 2018, rappelant la force et la place du présent. DOI 10.2357/ ldm-2020-0049 101 Dossier Plus encore, dans cette deuxième partie, la partition dramaturgique se trouve de plus en plus prise en charge par les personnages, qui apparaissent comme des prolongements d’Eribon: en replongeant chacun dans sa propre histoire et en conjuguant leur histoire individuelle à l’Histoire collective, ils nous offrent une nouvelle lecture de la violence sociale, un véritable miroir de notre temps. À la fin de l’enregistrement, Katy regrette que le „cadre“ posé par Eribon dans son livre soit absent, même si elle comprend le choix de Paul de ne pas revenir à quelque chose de personnel et d’être plus politique. En effet, le récit débute par la mort de son père et se termine sur l’évocation du père: Mon propre père? Le cœur serré, je repensai à lui et regrettai de ne pas l’avoir revu. De ne pas avoir cherché à le comprendre. Ou tenté autrefois de lui parler. D’avoir, en fait, laissé la violence du monde social l’emporter sur moi, comme elle l’avait emporté sur lui (Eribon 2018: 247). Dans les versions anglaise et allemande, le passé de Nina Hoss rencontre celui de la comédienne qu’elle incarne. En prononçant les mots „mon père“, et après les heures passées à avoir incarné la voix d’Eribon, c’est son propre père qu’elle évoque: 5 issu d’une famille ouvrière, de père communiste, il est témoin dès son enfance de la violence sociale dont son propre père est victime et s’engage toute sa vie dans des luttes très concrètes. Paul, touché par ce récit, propose d’enregistrer et de réfléchir à intégrer cette partie dans son documentaire. À partir de ce moment-là, la projection reprend en fond de scène: Hoss raconte comment son père rejoignit le parti communiste, étudia la philosophie puis s’établit à Stuttgart en tant que soudeur, car c’est là la place d’un communiste. Il y fonda un syndicat indépendant, puis créa le parti vert allemand qu’il quitta finalement par divergence d’opinion sur la participation allemande à la guerre en Afghanistan en 2001. Il s’investit alors dans l’aide aux peuples d’Amazonie et c’est sur ces images de Willy Hoss au cœur de la forêt amazonienne, projetées via le portable de Katy, que s’achève le spectacle: Tony a rejoint Paul et Katy, ils regardent tous les trois les images sur le portable, un halo de lumière tamisée les enveloppe, il recrée l’intimité autour de la figure du père qui déborde du cadre initial, comme si le père d’Eribon, puis le père de Katy devenaient des figures de transfert universelles. Dans la version française, c’est Blade Mc Alimbaye, artiste d’origine normande et d’ascendance sénégalaise, qui prend en charge la narration en racontant l’histoire de son grand-père, autre écho de la violence sociale. Cet ancien tirailleur sénégalais, immigré de la première génération, s’est battu sous le drapeau français et a vécu le massacre de Thiaroye commis par l’armée française en 1944 alors que des Sénégalais, tout juste rentrés des camps de prisonniers, réclamaient l’argent qui leur était dû pour leurs loyaux services. Tony prend la place de Catherine au pupitre, Paul se met à filmer, Tony raconte, et le récit devient de plus en plus intime là-aussi, Paul et Catherine finissent par l’entourer, ils regardent ensemble la dernière photo du grandpère et les premières notes du morceau „Février noir“ issu de l’album Bleu: point zéro (2015) résonnent: 102 DOI 10.2357/ ldm-2020-0049 Dossier J’ai la peau corbeau, m’a fait savoir l’administration / Radote l’intégration, je les attends depuis trois générations / Grand-père, la chair à canon, les y’a bon, les jours précaires / Souviens-toi, Le Havre était une ville négrière. Dès le début de la deuxième partie, Tony (interprété par Ali Gadema dans les versions anglaise et allemande) avait été invité par Paul à interpréter son dernier morceau. À chaque fois, il est question d’interpeller sur les violences sociales, le racisme, d’inciter parfois à la révolte, ce qui rappelle que l’une des premières vocations de ce genre musical était de témoigner et dénoncer des injustices sociales. Dans la version italienne, c’est un rappeur d’origine nigériane qui prend le relais au micro et dans la nouvelle version allemande, c’est l’histoire du père d’Isabelle Redfern qui servira de fil conducteur à l’épilogue du spectacle, un Noir américain, recruté par la Navy, stationné en Allemagne où il rencontrera la mère d’Isabelle Redfern. Celle-ci racontera son expérience du racisme aux États-Unis et en Allemagne, engageant un dialogue avec Amewu Nowe, un rappeur noir berlinois. Conclusion Le récit à multiples épaisseurs qui nous est livré sur scène, la mise en abyme des images du documentaire, spectacularisé sur la scène au cœur de l’espace où se crée la représentation, questionnent la fabrique des représentations, à la fois artistiques mais aussi sociales: quelle image donnons-nous de nous-mêmes? Que percevons-nous des autres? Que cachons-nous? Qui sommes-nous? Toutes ces questions renvoyant au leitmotiv de la dramaturgie d’Ostermeier, „‚Who’s there? ‘, une sorte de fil rouge […] de son appréhension des raisons, qui, de manière générale, le poussent à faire du théâtre“ (Ostermeier 2016: 88). Dans cette performance transmédiale, les actions et les récits des personnages invitent à la réflexion. Une réflexion qui est de l’ordre de la pensée, mais qui s’opère par la réflexion au sens physique, c’est-à-dire par le retour d’une onde dans le milieu dont elle provient, et incite à l’action. Comme le dit un journaliste du New York Times (Brantley 2018): Those of us watching from our seats may extrapolate that since Ms. Hoss and associates are doing a political play, shouldn’t we too be part of the political discussion? Of course, we should. And we are. Le détour par l’Allemagne du texte d’Eribon, mis en scène par Ostermeier, rend ainsi possible le retour en France avec un effet de réfraction du texte qui le fait résonner dans le présent des spectateurs et engage alors une deuxième réception du texte puisque le spectacle donne à redécouvrir le texte. Ainsi donc, le texte du ‚transclasse‘ devient un transfuge de genre et de média, l’intermédialité faisant ici directement écho à l’intersectionnalité. Le théâtre politique d’Ostermeier qui interroge et réinvente le réel est en ce sens un véritable théâtre du débordement et de l’urgence, celui d’une réfraction incessante du texte qui a peut-être manqué aux Français lors de la publication de Retour à Reims en 2009. DOI 10.2357/ ldm-2020-0049 103 Dossier En actualisant ce texte au sens deleuzien, Ostermeier ouvre un entre-deux dialogique avec les spectateurs, interrogeant les mécanismes de domination et d’oppression à maints niveaux: les spectateurs, les trois personnages en scène, le documentaire et le texte d’Eribon sont les différents acteurs de cette narration du pouvoir qui déborde du cadre et des frontières pour créer entre les individus des relations fortes permettant d’envisager un véritable espace de partage. D’Eribon aux spectateurs, Ostermeier esquisse un arc tendu qui permet de réinterroger nos rapports aux mots, aux images et à notre histoire. Brantley, Ben, „Review: Returning to Reims and Those European Working-Class Blues“, in: The New York Times, 11/ 02/ 2018. Dangel Jacqueline, „Genre, généricité et trans-généricité: le personnage d’Œdipe en énigme tensionnelle de la tragédie de Sénèque à l’épopée de Stace“, in: Bulletin de l’Association Guillaume Budé, 1, 2011, 154-173. 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Stistrup Jensen, Merete / Thirouin, Marie-Odile (ed.), Frontières des genres: migrations, transferts, transgressions, Lyon, Presses universitaires de Lyon, 2005. 1 Pour une vision plus claire, cf. le site de référence „Théâtre-contemporain“ (www.theatrecontemporain.net/ spectacles/ Retour-a-Reims-21845), le site culturel franco-américain „France-Amérique.com“ (https: / / france-amerique.com/ fr/ returning-to-reims-an-essay-by-didiereribon-on-stage-in-new-york), mais aussi l’article d’Hervé Guay, intitulé „Théâtres documentaires et transformation du réel“, in: Spirale, été 2018, 84-87. 2 Une série documentaire de France Culture, datant de septembre 2017 et intitulée „Voyage transclasse, histoires de ceux qui ont quitté leur milieu d’origine“ et notamment le quatrième épisode, rend particulièrement bien compte de cette dimension sérielle du retour, www. franceculture.fr/ emissions/ lsd-la-serie-documentaire/ voyage-transclasse-histoires-de-ceuxqui-ont-quitte-leur-milieu (diffusée entre le 18 et le 21 septembre 2017, dernière consultation le 18 décembre 2020). 3 Delphine Edy, „Professor Bernhardi de Thomas Ostermeier: un ‚monument intime‘. Redécouvrir un théâtre d’hier pour notre monde d’aujourd’hui“, in: Witold Wolowski (ed.), Le Théâtre à (re)découvrir. Intermédia, intercultures, Berlin, Peter Lang, 2018, 119: „La première française du Professor Bernhardi, mis en scène par Thomas Ostermeier au Théâtre National de Bretagne à Rennes en janvier 2017 peut donc être qualifiée d’inédit spectaculaire puisqu’elle est la seule depuis plus d’un demi-siècle“. 4 Publication à venir: Thomas Ostermeier, „Théâtre du réel pour aujourd’hui. Interview“, in: Pratiques, 191-192, décembre 2021: Textes et Scènes aujourd’hui, ed. Delphine Edy / André Petitjean. 5 Dans la version anglaise, le père n’est pas explicitement nommé, dans la mesure où il appartient à l’histoire politique et syndicale allemande. DOI 10.2357/ ldm-2020-0050 105 Dossier Raffael Hiden Das Theater als For(u)m der Darstellung soziologischer Erkenntnisse: Didier Eribons Autosozioanalyse als künstlerisches Reenactment? Wir haben die Kunst, damit wir nicht an der Wahrheit zugrunde gehen. Friedrich Nietzsche Die soziologische Relevanz von Rückkehr nach Reims erschließt sich nicht nur aus wirkungs- und rezeptionsgeschichtlicher Perspektive, sondern insbesondere aus sozialtheoretischer: Didier Eribon veranschaulicht darin seine Art von „Autosozioanalyse“ (Eribon 2017a: 20), die zugleich immanenter Teil einer als Zyklus konzipierten ‚Theorie des Subjekts‘ ist - während der Lektorats- und Korrekturphase fungierte dieses programmatische Sujet sogar noch als Untertitel von Rückkehr nach Reims. Diese allgemeine Perspektivierung folgt demnach dem Anspruch einer Subjektivierungstheorie, die jegliche Form von „Selbstanalyse […] als Sozioanalyse verstanden wissen will“ (Eribon 2018: 84). Dabei überlagern sich, so die These dieses Beitrags, sozialphilosophische Begründungsanliegen des Soziologischen mit kritischen Eingriffen in gesellschaftliche Konflikt- und Diskursräume, die in der Folge kritisch oder affirmativ anschlussfähig bleiben. Denn erst durch die „Art, mich als schreibendes Subjekt in mein Schreiben zu verwickeln“ (Eribon 2016: 26) entfalte sich das Potenzial einer Verbindung zwischen diskursiven Regeln und deren autosoziologischer Transformation. Diese These stützt sich zunächst auf den irreduziblen Anspruch Eribons, soziologisches Forschen nicht im deskriptiv-analytischen Sinne zu betreiben, sondern stets (auch) als normative Praxis der Neuformierung gegebener Subjektivierungsformen. Die für Eribon exemplarische Verquickung von autofiktionaler Narration und soziologischer Gegenwartsdiagnose verfolgt dabei das Ziel, eine alternative Form soziologischen Schreibens voranzutreiben, der ein „epistemologischer Bruch mit den spontanen Denk- und Selbstwahrnehmungsweisen der Individuen“ (ibid.: 45) als Folie einer Neuerfindung von Subjektivität dient. Sein Projekt sei daher „nicht nur eine Autobiografie und nicht nur ein politischer Essay, sondern beides zusammen“ (Eribon 2017b) - eine Variation auf die selbstreflexive Wirklichkeitsbeziehung im Sinne einer Soziologie als Lebensform; der sowohl auf der Ebene der Beschreibung als auch auf der Darstellung bewusst ist, dass „das Persönliche nicht vom Politischen zu trennen ist“ (Eribon 2016: 16) und insofern in seiner Tendenz als soziologisch-essayistisches Formexperiment anzusehen ist. Der Beitrag gliedert sich in drei Abschnitte: Zunächst werden die Grundzüge der Eribonschen Theoriebildung herausgearbeitet und besonders am Beispiel von Rückkehr nach Reims als empathische Form soziologischer Praxis ausgewiesen. Dabei 106 DOI 10.2357/ ldm-2020-0050 Dossier wird auf das Konzept der ‚Gründungsszenen‘ (Farzin/ Laux 2014) zurückgegriffen, um zumindest anhand von drei Dimensionen die narrativen Eigentümlichkeiten dieser Art von ‚Autosoziologie‘ in den Blick zu bekommen. Der zweite Abschnitt diskutiert die ‚Übersetzung‘ von Rückkehr nach Reims in den theatralen Raum anhand der Bühnenfassung von Thomas Ostermeier für die Schaubühne Berlin (2017) und deren wichtigste Inszenierungselemente wie Rezeptionsstränge. Im dritten Teil wird dann dargelegt, dass dieser intermediale Transfer nicht als bloßer Übersetzungsmechanismus zu deuten ist, sondern durchaus als (Re-)Konfiguration der Textgrundlage. Schließlich entfaltet, so die Schlussfolgerung, die theatrale Adaption das Potenzial zur resignifzierenden Auseinandersetzung mit der soziologisch konturierten Textvorlage, wenngleich dieser Bruch mit vielschichtigen Ambivalenzen zu kämpfen hat. I. Autosoziobiografisches Schreiben als soziologische Praxisform Mit Tobias Haberkorns deutscher Erstübersetzung (2016) von Retour à Reims (franz. 2009) erlangt Didier Eribon (wohl endgültig) den Status eines der bedeutendsten Medienintellektuellen (cf. Moebius/ Schroer 2008) des deutsch-französischen Kultur- und Wissenschaftsfeldes. Das Buch avanciert zum öffentlich wie auch innerakademisch breit rezipierten Werk, das sowohl zum Auslöser kontroversieller Debatten im Feuilleton wird als auch mannigfaltige sozial- und kulturwissenschaftliche Diskurse initiiert. Naheliegend ist dabei, dass sich dieser weitreichende Erfolg (wenn nicht ausschließlich, aber doch) im entscheidenden Maße aus der untraditionellen Form nicht-fiktiver Erzählung begründen lässt, die unauflöslich mit soziologischer Reflexion verwoben wird. Eribons Perspektive begnügt sich eben nicht mit dem gesellschaftstheoretisch beschreibenden Verständlich-Machen sozialer, politischer, wirtschaftlicher und kultureller Transformationsprozesse seit den 1990er Jahren, sondern verknüpft diese mit dem eigenen Lebensweg bzw. arrangiert die persönliche Laufbahn als narrativen Ankerpunkt der zeitdiagnostischen Darstellung. Diese Projektionsfläche arrangiert somit ein Sujet, das die Situation der Aufsteigerintellektuellen und dessen Klassenfluchttendenzen weg vom Herkunftsmilieu geradezu paradigmatisch bespricht, aber zugleich auch aufmerksam ist für die Brüchigkeit dieser Erzählform im Rahmen von herkömmlichen Erfolgsnarrativen. Gerade dadurch verändert sich das gängige Erzählprinzip soziologischer Gesellschaftsbilder, das zumeist strukturelle Zusammenhänge aus einer distanziert-beobachtenden Perspektive nachzeichnet. Demgegenüber gewährt die Eribonsche ‚Politisierung des soziologischen Ichs‘ das Potenzial der rezeptionsästhetischen ‚Teilnahme‘ am Geschehen, was diese ihrer tendenziellen Ausrichtung nach in die Nähe autoethnografischer Zugänge bringt. Diese lassen sich folgendermaßen beschreiben: Davon überzeugt, dass Lebensgeschichten niemals nur von der Person handeln, die sie schreibt, dass in der eigenen Geschichte vielmehr Anschlussmöglichkeiten für die Geschichten vieler anderer verborgen sind, machen AutoethnographInnen sich selbst zu Gegenstand DOI 10.2357/ ldm-2020-0050 107 Dossier und Medium ihrer Forschung. Im Schildern liminaler Episoden aus ihrem eigenen Leben versuchen sie, in einen Dialog mit sich selbst und den RezipientInnen zu treten, in dem Bedeutung konstituiert und performative Erkenntnis gewonnen werden kann (Ploder 2011: 155). Diese Perspektive bedingt demnach einen epistemologischen Wechsel von der „Zuschauertheorie des Wissens“ (Arno Barmé) zur Narration der persönlichen Involviertheit in diesem Zeitgeschehen. Die Schwerpunktverschiebung setzt damit bei einem gemeinsam geteilten Erfahrungs- und Sinnzusammenhang an, der nicht zuletzt dazu imstande ist, einen Resonanzraum zwischen Leserschaft und Text aufzuspannen. Vom Gesichtspunkt der Narration aus betrachtet, wandeln sich somit auch die Erfahrungsebenen durch die Lektüre: von der Beschreibung gesellschaftlicher Struktur- und Dynamisierungsprozesse hin zu einer diese mitschreibenden und schlussendlich einschreibenden Praxis in ebendiese. Gerade die Teilhabe an dem durch das Erzählen sich konstituierenden Erinnerungszusammenhang, fördert den rezeptionsästhetischen Kontakt zur Leserschaft und schafft insofern eine Dialogebene. „[A] personal text can move writers and readers, subjects and objects, tellers and listeners into [a] space of dialogue, debate, and change“ (Holman 2005: 764). Rückkehr nach Reims lässt sich insofern als Zwischen-Gattung beschreiben, der es um die Friktion von soziologischer Gesellschaftsanalyse und persönlichem Erleben geht. Während das Genre der soziologisch informierten Zeitdiagnose den „Problematisierungshorizont von Zeitdiagnosen immer [an] die Gesellschaft als Ganze und nicht soziale Gebilde und Emergenzebenen unterhalb der Gesellschaft adressiert“ (Lim 2017: 419), öffnet Eribons formalästhetische Variation das Potenzial für singuläre Erfahrungsschichten und Selbstbezeugungsdimensionen. Während sich Autobiografien aus der Narration des Selbst aus den Quellen des Selbst speisen und Biografien als „Schreiben über den Anderen“ (Prager 2018: 3) aufzufassen sind, will Eribon mit seiner ‚Autosoziologie‘ eine entpersonalisierende Perspektive auf das Selbst entfalten, der es weniger um das Verständlich-Machen der individuellen Person als vielmehr um deren generativen Konstitutionsbedingungen geht. Dieser gehe es darum, den „determinierenden Einfluss der sozialen Welt auf die Subjektkonstitution“ (Eribon 2016: 16) herauszuarbeiten. Eine so konturierte „‚soziologisierende‘ Darstellung“ (Eribon 2017: 19) der persönlichen Lebensgeschichte schließt darüber hinaus auch explizit an Pierre Bourdieus habitustheoretische Selbstanalysen (2002) an und reiht sich über den genuin soziologischen Diskussionszusammenhang hinaus ein in eine besonders für die letzten Jahren bedeutsame Art der literarisch grundierten Selbsterkundung. Vergleichbare (französische) Schreibprojekte finden sich ebenso bei Annie Ernaux, die sich selbst als „Ethnologin ihrer selbst“ begreift, sowie bei Édouard Louis, der seine Texte ohnehin mit Eribon in Verbindung bringt. Im deutschsprachigen Raum - um hier nur eine Auswahl anzuführen - wird diese neue Form autobiografischen Schreibens von Christian Baron (2020), Steffen Mau (2019) und unlängst von Deniz Ohde (2020) sowie durchaus auch von Sandra Gugic (2020) praktiziert. Gattungstheoretisch sind diese Perspektivierungen durchaus als Reaktualisierungen von Michel Leiris’ ethnologischer Poetik (cf. Albers 2018) zu deuten. 108 DOI 10.2357/ ldm-2020-0050 Dossier Mit dem empirisch grundierten Konzept der ‚Gründungsszenen‘ (Farzin/ Laux 2014) jeglichen Theoretisierens soll nun der argumentative Übergang zu einer Auffassung von Soziologie als Lebensform geschaffen werden. Theorien entstehen in dieser Akzentuierung weniger aus abstrakten Überlegungen, sondern vielmehr aus einem konkreten sozialen Problemhorizont, der sozusagen als Initialzündung der soziologischen Theoriebildung aufzufassen ist. Auf der Bühne der Theorieproduktion werden sodann die diese auslösenden Faktoren im Rahmen von Szenen verhandelt; das heißt, Theorien sind stets mehr als Instrumentarien, mit denen neue Perspektiven auf die soziale Welt eröffnet werden, sondern vielmehr deren Applikation, im Sinne eines Zugangs zur sozialen Welt. Theorien, das sind demnach „empirisch prägnante Miniaturen soziologisch virulenter Fragen und Phänomene“ (Farzin/ Laux 2011: 410), sie sind daher keine Sichtweisen auf die Gesellschaft und auch keine Beobachtungen über gesellschaftliche Zusammenhänge, sondern spätmodernen Lebensformen inhärent. Diese anwendungsbezogene Verdichtung des Theoretisierens als bedeutungsgenerierende Praxis ist daher die ideale Voraussetzung, um das Anliegen des sich neu formierenden Genres der Autosoziobiografie nachzuvollziehen. Eribon unterstreicht diese Perspektivierung in einer Selbstauskunft über die programmatische Ausrichtung von Rückkehr nach Reims: Mein Buch ist nicht als Roman aufgetreten, sondern präsentierte sich vielmehr als ausdrücklich soziologisches und theoretisch-kritisches Werk, das auf einer „autobiographischen Erzählung“ fußt und dessen „Figuren“ nichts Fiktives an sich haben (Eribon 2018: 70). Die Berücksichtigung und Sichtbarmachung der Relevanz biografischer Aspekte für das soziologische Interesse rekurriert insofern auf ein ‚soziologisches Ich‘, ein Selbst, das sich und sein Leben mit soziologisch inspirierten Reflexionsmodi verständlich machen will. Darin ist eine elementare Differenz zu einer vordergründig beobachtenden, d. h. gesellschaftliche Strukturzusammenhänge aufdeckenden Soziologie (Metaperspektive) auszumachen, die vielmehr eine lebensformende Praxis mit dem Soziologischen konstituieren will. Der dadurch eingeleitete Effekt besteht darin, sich von vorgelagerten Sinnattributionen zu befreien, denn „[n]ur ein epistemologischer Bruch […] ermöglicht es, die Systematik der sozialen Reproduktion und freiwilligen Selbstexklusion […] zu verstehen“ (Eribon 2016: 45). Hierbei geht es offensichtlich nicht um die Erfassung von Wirklichkeit auf der Basis repräsentativer Daten, sondern viel eher um die differentielle Wiederholung dieser Formen des Realen. Diese theoretische Neujustierung weiß, dass schon die als Wirklichkeitswissenschaft operierende Soziologie performativ wirkt, das heißt gerade durch die Weise des Abbildens soziale Formationen gleichzeitig konstruiert und perpetuiert. Die daran anknüpfende Kritik wandelt sich dann zu einer expliziten Gesellschaftskritik, deren wesentliches Ziel darin besteht, das Werden neuer, alternativer Lebens- und Subjektivierungsformen einzuleiten. Soziologisches Theoretisieren erfüllt bei Eribon somit auch eine heuristische Funktion, die unmittelbar Übergänge zum Leben herstellt. DOI 10.2357/ ldm-2020-0050 109 Dossier Von der soziologischen Introspektion zur Inskription des Soziologischen im Leben Um das gemeinsame Wirkungsfeld zwischen soziologischer Selbstbefragung und soziologischer Zeitdiagnostik im Detail darzulegen, wird in diesem Abschnitt ein Dialog zwischen Pierre Bourdieus soziologischem Selbstversuch und Eribons daran anknüpfende Autosoziobiografie angeregt, der von Chantals Jacquets Überlegungen zur Nicht-Reproduktion sozialer Macht flankiert wird. Das von Bourdieu entworfene Habitus-Konzept beschreibt einen generativen Mechanismus, der die Denk-, Handlungs- und Wahrnehmungsschemata von Akteuren prägt und der im Sozialisationsprozess erworben wird. Der Erwerb dieses Schemawissens operiert nicht auf intentionaler, reflexiver und sinnkonstituierender Ebene, sondern ist vielmehr als Praxis aufzufassen, die zuvorderst über den Körper vollzogen wird; der Habitus rekurriert somit auf Akteure, die praktischen Sinn durch implizite Wissensformen - im Sinne eines knowing how - herstellen. Das zum „Körper gewordene Soziale“ (Bourdieu/ Wacquant 1996: 161) verinnerlicht somit die für das jeweilige Feld prägenden objektiven Strukturen und arrangiert dadurch ein relativ stabiles Orientierungsgerüst subjektiver Handlungsdispositionen. Dieses inkorporierte Wissen reproduziert sich weniger auf kognitiver Ebene als vielmehr in den lebensweltlichen Routinen und über inkorporierte Anforderungen der jeweiligen Feldlogik. Allerdings resultieren aus dieser postulierten Verschränkung zwischen Habitus und Feld und der damit einhergehenden Klassifikationsschemata in Form von Homologiebildungen Probleme im Verständlich-Machen von sogenannten ‚Klassenübergängern‘ (Chantal Jacquet). Bourdieu selbst hat diese Diskrepanz bereits in seiner habitustheoretischen Selbstanalyse bedacht und mit der Konzeption eines ‚gespaltenen Habitus‘ aufzulösen versucht. Dieser formiert sich gerade zwischen differenten Feldanforderungen und organisiert das soziale Gefüge damit vertikal, sozusagen als „dynamische Kampffelder“ (Reckwitz 2008: 50). Ihre Besonderheit erlangen diese liminalen Akteure aus ihrem Heraustreten aus den vorstrukturierten Schemawissen und der dadurch ermöglichten Destabilisierung von Inkorporierungsprozessen. Hierbei geht es nicht mehr um klassenspezifische Somatisierungsformen, sondern um eine reflexive und mitunter evaluative Bezugnahme auf die ursprünglich erworbene Habitusformation. Besonders deutlich tritt dabei die fehlende Berücksichtigung widerständiger - das heißt mit dem (erworbenen) Habitus brechender - Praxen hervor. Die Bourdieusche Analyse verbleibt notwendigerweise im Typischen, Präpersonalen und Durchschnittlichen, als ob der homo sociologicus in allem das letzte Wort behalten sollte (Sloterdijk 2019: 286). Im Dialog mit seiner eigenen Soziologie kehrt sich diese Konzeption dann bei Bourdieu zu einer Art von Selbstbezichtigung um, die sich besonders aus der offenen Konfrontation des Intellektuellen mit seinem Herkunftsmilieu ergibt. Um hier wieder auf den Rahmen von Gründungsszenen zurückzukommen: Bourdieus Wille zur 110 DOI 10.2357/ ldm-2020-0050 Dossier Sichtbarmachung der „gesellschaftlichen Bedingungen“, die „den Akt der Objektivierung ermöglichen“ (Bourdieu 2000: 173), zielt zuvorderst auf die Aufschlüsselung der Konstitutionsbedingungen der akademisch konturierten Selbstanalyse ab. Es gehe ihm daher weniger um die „gelebte Erfahrung des wissenden Subjekts“ (ibid.) als vielmehr um die strukturelle Analyse derjenigen Faktoren, die das Selbst überhaupt erst zu einem (intellektuellen) Subjekt haben werden lassen. Er [Bourdieu] gibt Schlüssel zum Verständnis seiner intellektuellen Geschichte und seiner Hinwendung eher zur Soziologie als zur Philosophie, […] ohne sich mit den Gründen zu befassen, die früher ansetzen und seinen schulischen Erfolg und seinen sozialen Aufstieg erklären (Jacquet 2018: 11sq.). Während Eribon sehr detailreich seine persönlichen Schamerfahrungen schildert, und diese stets soziologisch zu kontextualisieren weiß, thematisiert Bourdieu sich selbst vordergründig aus der Perspektive des Überläufers. Bourdieus Methodik der ‚teilnehmenden Objektivierung‘ vermag es dabei, die subjektive Involvierung als relationalen Bezug gegenüber einem Forschungsgegenstand transparent zu machen, indem sie die prägenden sozialen Bedingungen ihres Entstehens aufschlüsselt. Das Verfahren zielt daher darauf ab, die „Objektivierung des Subjekts der Objektivierung“ (Bourdieu 2004: 172) voranzutreiben, um dadurch die Praxis des Analysierenden relational zum untersuchten Gegenstandsbereich zu denken: das Selbst bei Bourdieu beansprucht insofern eine Kritik der epistemologischen Ermöglichungsbedingungen des homo academicus, 1 während Eribon vielmehr subjektive Erlebnisse und besondere Emotionsstrukturen (besonders Scham 2 ) des Klassenüberläufers mit seinen soziologischen Instrumentarien zum Ausdruck bringt. Gerade darin erkennt Eribon auch das Defizit von Bourdieus Selbstversuch, das unvermeidliche Ambivalenzen im Entwicklungsgang seiner akademischen Laufbahn ausspart: „Er traut sich nicht wirklich, sich selbst zu exponieren, seine Auskünfte weisen unübersehbare, wesentliche Lücken auf. Er verschweigt mehr, als er offenlegt“ (Eribon 2016: 153). Bourdieus Selbstversuch ist demgegenüber eher anti-autobiografisch konzeptualisiert, das heißt, der methodologische Schwerpunkt liegt auf der Objektivierung der im übergelaufenen Milieu tradierten inkorporierten Strukturen. Ebendieser Bereich arrangiert für Bourdieu eine Konflikt- und Machtzone, die im Sinne einer Gründungsszene seines Theoretisierens zu lesen ist: erst durch den objektivierenden Vortrag der akademischen Position wird ein Bezug zum ursprünglichen Habitus hergestellt, wodurch die Basis geschaffen wird für die Skizzierung wechselseitiger Einflussfaktoren beider Milieus. Was Bourdieu hier [im soziologischen Selbstversuch] beschreibt, ist also nichts weniger als die Geburt einer Theorie und einer bestimmten theoretischen Einstellung, mithin einer gesteigerten Reflexivität und Sensibilität aus einem Leiden an einer Welt, die nicht die seine ist, in der er mit seinem Habitus immer wieder aneckt und die ihn immer wieder auszustoßen versucht (Grabau 2020: 93). DOI 10.2357/ ldm-2020-0050 111 Dossier Eribon hat demnach die bourdieusche Selbstanalyse und die dafür eingesetzten Instrumentarien fortgeführt, erweitert und modifiziert. Chantal Jacquet (2018) wiederum kommt das Verdienst zugute, das „weite Land zwischen den Klassen“ begriffsanalytisch aufzuarbeiten wie theoretisch anzureichern. Ihre heuristische Zusammenführung kulminiert im Mechanismus der Nicht-Reproduktion von Habitusformen und wendet sich somit explizit gegen die reproduzierende Weitergabe der für Bourdieu zentralen vier Kapitalsorten. Demgegenüber führt Jacquet den Begriff der ‚Transclasse‘ ein, um „ein Individuum zu bezeichnen, das den Übergang von einer Klasse zu einer anderen vollzieht“ (Jacquet 2018: 20). Dabei geht es um die Praxis des Hinübergehens, weniger um dessen Resultat - Jacquets Interesse lässt sich vielmehr im „Transit zwischen zwei Klassen“ (ibid.) verorten. Die Praxis der ‚Complexion‘ zielt darauf ab, das transformative, das Herkunftsmilieu hinter sich lassende Handlungspotenzial von Akteuren offenzulegen. Die Nicht-Reproduktion bringt die Möglichkeit der Erfindung einer neuen Existenz innerhalb einer bestehenden Ordnung ins Spiel, ohne daß [sic] sich eine soziale Umwälzung oder eine Revolution ereignet hätte (Jacquet 2018: 14). Nicht-Reproduktion ist das entscheidende Kriterium einer Subjektivierungstheorie, die die Mobilität und Liminalität von Klassenübergängern in den Blick nimmt und Subjekte als Impulsgeber begreift, die dazu imstande sind, die aus der Vergangenheit sich formierenden und schließlich deren Lebenswege vorzeichnenden Mechanismen zu unterwandern. An dieser Schwelle arrangieren sich gerade jene „Sozialfiguren der Gegenwart“ (Moebius/ Schroer 2010), die als ‚Transfuge‘ oder eben ‚Überläufer‘ zu bezeichnen sind und von denen gleichsam ein öffentlichkeitswirksamer wie wissenschaftsdiskursiver Reiz ausgeht. Diese Schwellenfiguren schwimmen daher nicht mehr „wie Fische im Wasser“ (Bourdieu/ Wacquant 2006: 161), sondern treten aus dem Fluss der Routine heraus, halten diesen dadurch gleichsam auf Distanz und spielen damit. II. Rückkehr als Figuration soziologischen Palimpsestierens a) Die Textvorlage Rückkehr nach Reims entzieht sich einer gattungstheoretischen Einverleibungskategorie ebenso wie einem klar umrissenen Rezeptions- und Wirkungsverlauf. Vielmehr überkreuzen sich darin verschiedene Erzählweisen, werden unterschiedliche narrative Stilmittel miteinander kombiniert, sodass es wohl nicht überzogen ist zu konstatieren, dass Eribons Text selbst als eine ‚Zwischen-Gattung‘ begriffen werden kann. Dafür sind zumindest drei relevante Ebenen auszumachen: erzählerische Betroffenheit, soziologisches Referat und rezeptionskritische Polemik gegenüber der Psychoanalyse. Eribon spannt dadurch ein dichtes Netz zwischen diesen Ebenen und verwebt sie zu einem Mosaik soziologischer Gesellschaftsanalyse mit autobio- 112 DOI 10.2357/ ldm-2020-0050 Dossier grafischen Stilmitteln. Im Zusammenspiel zwischen subjektiver Nähe und analytischer Distanz entpersonalisiert sich somit die Erzählerfigur, wodurch nicht klar bestimmt werden kann, wer denn eigentlich spricht; dieser zu konstatierende Status der Unsicherheit unterstreicht zugleich den essayistischen Charakter des Textes. Indes zeigt diese narrative Liminalität auch generell die polyphone Situation des (zumindest soziologisch gefärbten) Erzählens auf, überlagern sich darin doch verschiedene Perspektiven - Sohn, politisch Engagierter, Soziologe/ Journalist/ Biograf, Homosexueller - in einer Sozialfigur; von daher lässt sich das von Eribon versierte Unternehmen einer Subjektivierungstheorie in seiner Anlage transdisziplinär und in seinem Anliegen intersektional verorten. Diese Neuformierung autosoziologischen Schreibens, verstanden als eine Implementierung soziologischer Praxis im persönlichen Leben, lässt sich demnach in die allgemeine Entwicklungstendenz aktueller Soziologien eingliedern, die wieder Interesse zeigt an (neuen) Formen kritischer Gesellschaftsanalyse (cf. Moebius/ Schäfer 2006). Die wohl für die gesamte Geschichte des soziologischen Denkens virulente Nachfrage nach Gesellschaftsdiagnosen wird hierbei gerade durch die Konstitution der Sozialfigur des Rückkehrers abgedeckt, dessen Zeugenschaft als vielschichtiger Authentifizierungsakt beglaubigt wird. b) Theatrale Adaption In der Regie von Thomas Ostermeier erfährt Rückkehr nach Reims seine erste deutschsprachige Theateradaption an der Schaubühne Berlin (2017). Das Setting dieser theatralen Bearbeitung entspricht den bereits angedeuteten Übergangsfigurationen zwischen soziologischer Gesellschaftsbeschreibung und dem Wirken der darin subjektiv zu besetzenden Positionen: In einem Tonstudio kommen die Schauspielerin (Nina Hoss) und der Filmemacher (Hans-Jochen Wagner) zusammen, um einen Dokumentarfilm zur Entstehungsgeschichte von Eribons Rückkehr aufzunehmen. Ostermeier hat dafür gemeinsam mit Eribon noch einmal die Arbeiterbezirke in Reims aufgesucht und verwendet diese filmischen Rückblenden als Basis für seine Inszenierung. Nina Hoss spricht das Voice-Over zu dem filmischen Essay ein, wodurch die Konzentration ganz auf die darin zum Ausdruck gebrachten Thesen über die frühere sozialistische Arbeiterschicht und dem sich davon entfremdeten Eribon gelegt wird. Desillusionistisch folgt die Stückentwicklung somit den Entfremdungsprozessen einer ganzen Klasse, während zugleich Eribons Übertritt in das akademische Milieu einsichtig wird. Diese Öffnung einer Passage zwischen gesellschaftlichen Entwicklungen und subjektiven Aneignungsprozessen gesellschaftlicher Teilhabe charakterisieren somit sowohl das Stückkonzept und die Figurenkonstellation als auch den zugrundeliegenden Text. Im weiteren Verlauf legt Ostermeier den inszenatorischen Fokus dann klar auf die praxeologische Nachzeichnung der Figur des Klassenübergängers, der zunächst davon überzeugt ist, dass die bewusste Abwendung von seinem Herkunftsmilieu eine schambesetzte Reaktion auf die homophoben Tendenzen des Vaters ist. Erst DOI 10.2357/ ldm-2020-0050 113 Dossier in der Folge schiebt sich eine neue interpretative Deutungsebene im gängigen Narrativ ein, inauguriert durch die reflexive Auseinandersetzung mit der eigenen Biografie - die vordergründige soziale Scham des Klassenübergängers sei in diesem Kontext daher als subversive Praxis zu akzentuieren. Denn nicht so sehr das sexuelle Schamempfinden gegenüber den familiären Normvorstellungen, sondern vielmehr die Angst vor dem gesellschaftlichen Urteil sei es gewesen, die den Entfremdungsprozess wesentlich motiviert hätten. Ostermeier stilisiert diesen als ästhetisches Prinzip seiner Bühnenfassung und öffnet in rezeptionsästhetischer Hinsicht die Figur des Rückkehrers als Projektionsfläche der Gegenwartsverständigung zwischen Bühne und Publikum. Nina Hoss wird zur Figur, die die „Trope der Wendung“ (Butler 2001: 10) vollzieht, indem sie sich ihres habituellen Mantels zu entledigen versucht. Sie schreibt sich (zunächst) als Nina Hoss in Eribons Deutung ein und berichtet von ihrem marxistisch engagierten und später in der Grünen Bewegung wirkenden Vater. Auf elementarer Ebene problematisiert sie somit das autosoziobiografische Narrativ und befragt dieses aus der Sicht ihrer Biografie: ihre Performance folgt insofern einer differentiellen Wiederholungspraxis. Hoss ringt in ihrer Rolle mit sich um Erklärungen, so wie Eribon in seinem Text mit sich ringt. […] Sie fühlt sich in ihrem eigenen Werdegang ertappt, wird nachdenklich (Kühnert 2018). Im Fortgang der Stückentwicklung und besonders im letzten Teil der Inszenierung spitzt sich die Dramaturgie zu und löst sich von der eribonschen Vorlage. Dann wird Hoss bzw. ihr familiäres Herkunftsmilieu zur handlungstragenden Figur, sie ist es dann, die den Text zitierend transformiert; diese sich entfaltende Figur ist nichts anderes als ein weiterer differentieller Modus des Rückkehrens, der dadurch den Möglichkeitsraum für daran anschließende Inskriptionen entfaltet. Das Script erfährt somit eine ‚ästhetische Verlebendigung‘ (Georg W. Bertram), das heißt, eine poetische Intervention am Plot, ein Sich-Einschreiben in die Vorlage, das die Bruchlinien der bloßen Zeitgenossenschaft unterwandert und durch die „verändernde […] Kraft der Wiederholung“ (Waldenfels 2001: 12) fortgeschrieben wird. Diese Konstellation ist dann nicht nur als soziologische Praxis des Wieder-Holens oder Wieder-Schreibens von Wirklichkeit, sondern - im relationalen Sinne - als wieder-setzen zu betrachten - einem Abschaben habitueller Schemata und dem neuen Konfigurieren autosoziologischer Zusammenhänge. Die praxisbezogene Figur des Rückkehrers dient hierfür als paradigmatisches Beispiel soziologischen Palimpsestierens. Ostermeiers dramaturgische Figurenzeichnung lenkt dafür den Fokus weniger auf die sexuelle Scham des Homosexuellen als vielmehr auf die sozialen Mechanismen klassenbedingter Exklusionsprozesse. Im Einklang mit Eribons Anspruch, seine Erfahrungen des Klassenwechsels weniger „über sexuelle Scham […] als über soziale“ (Eribon 2016: 19) offenzulegen, konstituiert Ostermeiers Figurenkonstellation daher einen Resonanzraum, der mit biografischen Episoden am Beispiel der Biografie von Nina Hoss problematisiert wird. 114 DOI 10.2357/ ldm-2020-0050 Dossier III. Theatrales Einschreiben als Versinnlichen des Sozialen Der hier beschriebene Nexus zwischen Soziologie und Theater sollte einsichtig machen, dass dieser Dialog auf zeitlicher Ebene entlang einer subversiven Zitierpraxis arrangiert ist. Gesellschaft wird dabei als Text (Pierre Legendre) verstanden, die sich durch ständige Wiederholungen aktualisiert, zugleich aber auch offen ist für Bedeutungsverschiebungen. Jede Realitätskonstruktion, darüber hat Alfred Schütz ausführlich berichtet, ist selbst Teil des Wirklichen. Gerade diese Akzentuierung ermöglicht es gleichsam, den theatralen Raum zwar nicht als direkten Übergang zum Leben zu deuten, aber als Möglichkeitsraum, der dieses aus einer gewissen Distanz heraus problematisiert. Das heißt, als einen Rahmen, der den lebensweltlichen Rahmen imaginativ (weiter-)verhandelt und dadurch „neue Sichtweisen auf die Welt durch ästhetische Argumente“ (Bohrer 2015: 348) befördert. Es geht dabei nicht um repräsentative Widerspiegelungen des Realen, sondern um die imaginative Konferenz von Zeichen, Wissensordnungen und Lebens- und Denkformen. Um eine Distanz von der unmittelbaren Lebenswelt zu bewirken, in der „sinnreflexive Gebilde“ (Seel 1993: 38) arrangiert werden. Denn die Bühne ist keineswegs eine unbewegliche Fläche, und es gibt im Theater Weisen des Handelns/ Schauens (acting), die sowohl die Schauspieler*innen als auch das Publikum auf und abseits der Bühne in Bewegung bringen (Butler 2019: 14sq.). Diese Modi arrangieren sich dann „nicht nur als intellektuelle, sondern auch als aisthetische Praxis“ (Böhler 2018: 76). Im Unterschied zur wissenschaftlichen Methodik wird dabei weder die Wahrheit entdeckt noch die Wirklichkeit repräsentiert, sondern Ereignisse versammeln dieses Suchen in einem Resonanzraum der Ko- Präsenz. Noch vor der kulturalisierten Formung und Sedimentierung von Ideen operiert die theatrale Ver-handlung soziologischer Stoffe optativ, das heißt „Möglichkeiten eröffnend“ (Schmid 1998: 10). Jenseits der Repräsentation von Wirklichkeit problematisieren diese ästhetischtheatralen Praxen dann den eingeübten Dualismus zwischen Wissenschaft und Politik auch auf zeitlicher Ebene: „Im Hinblick auf den sozialen Prozess geht es der Wissenschaft (oder allgemeiner, der Erklärung) um die Vergangenheit, der Politik (oder allgemeiner, der Wahlhandlung) aber um die Zukunft (Abbott 2019: 92). Das Versinnlichen sozialer Formen mit künstlerischen Instrumentarien ist ein Ereignis, indem sich diese Temporalitätsstrukturen überkreuzen - woraus sich neue Perspektiven einer „lebensbezogenen Sozialwissenschaft“ (Kruse 1999: 266) entfalten lassen. Das nur der Kunstform des Theaters Vorbehaltene besteht dementsprechend im Versinnlichen eines gegebenen Inhalts (Autosoziobiografie) durch das „subjektive Lebendigmachen“ (Simmel 2008: 118) der Schauspieler*innen. Am Beispiel von Eribons Textgrundlage wird somit besonders deutlich, welche speziellen Reibungsflächen sich zwischen soziologischen mit künstlerischen Wissenskulturen ergeben, die auch Zygmunt Bauman im Auge hat: DOI 10.2357/ ldm-2020-0050 115 Dossier Soziologie ist ein fortlaufender Kommentar zu den Erfahrungen des Alltags; sie bietet Interpretationen an, die sich von anderen Interpretationen nähren und diese im Gegenzug speisen. Statt mit ihnen zu konkurrieren, teilt sie ihre Mittel mit anderen mit der Interpretation menschlicher Erfahrung befaßten Diskursen (wie Literatur, Kunst, Philosophie) (Bauman 2015: 318). Resümee Didier Eribon hat eine autosoziobiografische Wende im aktuellen Diskurs der Sozial- und Kulturwissenschaften eingeleitet. Er hat die etablierte Gattung mit den Mitteln einer starken Reflexivität aktualisiert und mit den Instrumentarien soziologischer Gegenwartsdiagnostik verwoben - die Praxis der ‚Zeugenschaft‘ fungiert dafür als Ankerpunkt. Indes entwickelt Eribon damit zugleich eine soziologische Theorie, die im Feld der Subjektivierungstheorie zu verorten ist. Der intermediale Transfer in den theatralen Raum bündelt diese Theoriebildung und schreibt diese Akzentuierung mit künstlerischen Ausdrucksformen fort, was insbesondere am Fallbeispiel von Thomas Ostermeiers Adaption deutlich wird. Die dort entwickelte ‚Sozialfigur des Rückkehrers‘ fungiert als autosoziologisch konturierte Diagnosefigur, die im Sinne einer rezeptionsästhetischen Projektionsfläche für weit gestreute und mitunter disparate Einverleibungsgesten genutzt werden kann. Diesen sich darin bündelnden Milieudeskriptionen und mit autobiografischen Rückblenden ausgestatteten Narrativen ist stets ein Transzendierungsstreben inhärent, das auszudrücken scheint: Selbst wenn die sozialen Determinanten der personalen Identität nicht durch den Klassenübergang abgelegt werden können, so zeigen sie doch auf, dass die Transformation stets möglich ist und insofern immer auch als Modell herangezogen werden kann. Zu problematisieren ist dabei jedoch, ob sich die scheinbar intendierten und kollektiv gewünschten Emanzipationsbestrebungen ausschließlich durch den Vorschlag des Sozialaufstiegs herstellen lassen oder ob nicht vielmehr auch andere Praxen alternative Widerstandsgesten befördern können. Denn es ist wohl nicht von der Hand zu weisen, dass „im Zentrum der Autosoziobiografie meist Individuen [stehen] und nicht mehr oder weniger anonyme soziale Prozesse ohne individuellen Protagonisten“ (Spoerhase 2017: 36). Generell ist den künstlerischen Fortschreibungsformen, wie auch den realen Vorlagen, inhärent, dass sie ihr Herkunftsmilieu zusehends als Ressource in das kompetitive Spiel der Statutsbehauptung einbringen. Gerade durch diesen performativen Akt der Hervorbringung des eigenen Selbst im Rekurs auf die abgelegten Determinismen der sozialen Herkunft resultiert jedoch mitunter das Dilemma einer affirmativen Fortschreibung individueller Erfolgsgeschichten. Um diesem den Wind aus den Segeln zu nehmen, wird es zukünftig wohl nötig sein, sich stets zu fragen, ob nicht die anvisierte Authentizitätsstrategie als Selbstimmunisierung gegenüber kritischen Einwänden eingesetzt wird, das heißt zu problematisieren bleibt, ob bei dem aktuell zu beobachtenden Boom autosoziobiografischer bzw. autofiktional konturierter Literatur nicht doch auch das Risiko identitätspolitischer Einverleibung zu konstatieren 116 DOI 10.2357/ ldm-2020-0050 Dossier ist oder zumindest die als Beglaubigungsgeste eingesetzte Zeugenschaft den kritischen Anschluss vergleichbarer Erlebnisberichte verstellt. In der Folge könnte das bedeuten: viele, in sich geschlossene, authentische ‚Zeugen‘, die disparat und lose nebeneinander auftreten und sich, gerade in ihrer Abgeschlossenheit gegenüber neuen Narrativen der Emanzipation, selbst immunisieren. Gerade eine reflektierte Verquickung von soziologischen und ästhetisch-theatralen Instrumenten der Gegenwartsverständigung, so die These, bietet jedoch das erkenntnisstiftende Potenzial zum Ausweg aus diesem Labyrinth. Abbow, Andrew, Prozessuales Denken. Reflexionen über Marx und Weber, Hamburg, Hamburger Edition, 2019. Albers, Irene, Der diskrete Charme der Anthropologie. Michel Leiris’ ethnologische Poetik, Göttingen, Konstanz University Press, 2018. Arbeitstagung der DGS Sektion Soziologische Theorie, „Gründungsszenen soziologischer Theorie“: Delmenhorst, Hanse-Wissenschafts-Kolleg (HWK) vom 27./ 28.01.2012, in: Zeitschrift für Soziologie, 40, 5, 2012, 410-411. Bauman, Zygmunt, Vom Nutzen der Soziologie, trad. Christian Rochow, Frankfurt/ Main, Suhrkamp, 2015 [1990]. Beck, Ulrich, Risikogesellschaft. Auf dem Weg in eine andere Moderne, Berlin, Suhrkamp, 2016 [1986]. Bohrer, Karl Heinz, Das Erscheinen des Dionysos. Antike Mythologie und moderne Metapher, Berlin, Suhrkamp, 2015. 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Zeitdiagnose als Heuristik und Wissensform“, in: Soziologische Revue, 40, 3, 2017, 405-414. Louis, Édouard, Wer hat meinen Vater umgebracht, trad. Hinrich Schmidt-Henkel, Frankfurt/ Main, Fischer, 2019. Moebius, Stephan / Schroer, Georg (ed.), Diven, Hacker, Spekulanten: Sozialfiguren der Gegenwart, Frankfurt/ Main, Suhrkamp, 2010. Moebius, Stephan / Schäfer, Gerhard (ed.), Soziologie als Gesellschaftskritik, Hamburg, VSA, 2006. Ploder, Andrea, „The Power of Performance. Methodologische Neuorientierungen in den Sozialwissenschaften“, in: Gerda Lechleitner / Christian Liebl (ed.), Jahrbuch des Phonogrammarchivs der Österreichischen Akademie der Wissenschaften, Göttingen, Cuvillier, 2011, 139- 169. Reckwitz, Andreas, Das Ende der Illusionen. Politik, Ökonomie und Kultur in der Spätmoderne, Berlin, Suhrkamp, 2020. —, Die Gesellschaft der Singularitäten. Zum Strukturwandel der Moderne, Berlin, Suhrkamp, 2017. 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Waldenfels, Bernhard, „Die verändernde Kraft der Wiederholung“, in: Zeitschrift für Ästhetik und Allgemeine Kulturwissenschaft, 46, 1, 2001, 5-17. 1 Zur dynamischen Lesart des Habituskonzepts schreibt zum Beispiel Joseh Jurt: „Dass Bourdieu selbst, der aus einer einfachen Postbeamtenfamilie bäuerlichen Ursprungs stammte, mit der Professur am Collège de France die höchste akademische Stufe erklomm, widerspricht nicht seiner Habitustheorie, die nun gerade nicht eine mechanische Determination durch das Milieu annimmt, sondern eine flexible Wirkung der frühen Prägung“ (Jurt 2010: 11). 2 Eribon führt zur Analyse der vielschichtigen Schamstrukturen in Gegenwartsgesellschaften die Methode der Hontoanalyse ein, wenngleich er konstatiert, dass die „hontologische Realität der sozialen Welt“ (Eribon 2017: 38) dadurch nicht übergangen werden kann. 118 DOI 10.2357/ ldm-2020-0051 Dossier Maiwenn Roudaut Le transclasse et la reconnaissance Proposition de lecture de Retour à Reims Le présent article entend faire un pas de côté par rapport à la problématique générale de l’ouvrage consacré à la réception de Didier Eribon en Allemagne et interroger la problématique du ‚transclasse‘, à partir d’une proposition de lecture de Retour à Reims du point de vue des théories contemporaines de la reconnaissance. C’est en particulier la théorie d’un des philosophes critiques allemands les plus connus actuellement, à savoir Axel Honneth, qui constituera le noyau de la contribution, en tant notamment qu’elle a donné lieu depuis trois décennies à un véritable renouvellement de la problématique de la reconnaissance en philosophie. Au-delà des nombreux échos intellectuels et philosophiques entre le parcours de Didier Eribon et d’Axel Honneth, il s’agit d’interroger la pertinence du point de vue épistémologique de la reconnaissance, et plus particulièrement de la lutte pour la reconnaissance, 1 pour saisir le phénomène du transclasse tel qu’il est analysé par Chantal Jaquet dans son ouvrage Les Transclasses ou la non-reproduction. En effet, Chantal Jaquet met d’emblée en doute la pertinence de ce point de vue de la lutte pour la reconnaissance pour saisir toute la complexité du phénomène. Cherchant à remplir la tâche ardue d’interroger philosophiquement la problématique de la non-reproduction et de ce fait de fonder „un concept du singulier“ (Jaquet 2014: 15), la philosophe met en garde contre la lutte pour la reconnaissance qui, selon elle, „encourt toujours le risque d’enfermer l’individu dans des déterminations fixes et abstraites, par définition reconnaissables: la Femme, l’Ouvrier, l’Homosexuel, le Bourgeois, le Patron etc.“ (ibid.: 108). C’est l’inverse que cherche à démontrer la présente contribution, à savoir la pertinence et l’apport même du point de vue de la lutte pour la reconnaissance par rapport à celui de la non-reproduction, et ce en revenant tout d’abord sur l’opposition épistémologique entre connaissance et reconnaissance invoquée par Chantal Jaquet, puis sur la dialectique de l’invisibilité et de la visibilité sociale et sur la négativité de l’expérience sociale des tranclasses et enfin sur les enjeux collectifs de ces questionnements concernant „la sphère d’extension de la liberté“ (ibid.: 7). Au point de vue de la lutte pour la reconnaissance qu’elle identifie à une base conceptuelle étant celle de l’identité, Chantal Jaquet oppose celui de la non-reproduction, fondé sur le concept de ‚complexion‘ inspiré de Spinoza: „Le concept de complexion incite […] à prendre en considération les différences fines, la particularité des êtres, et à penser les relations conflictuelles en terme de connaissance plutôt que de reconnaissance“ (ibid.: 109). Cette opposition entre connaissance et reconnaissance est assez commune en philosophie. 2 Dans ce passage, Chantal Jaquet donne la préséance épistémologique au point de vue de la connaissance sur celui de la reconnaissance pour saisir notamment le phénomène du transclasse. C’est effectivement ce qu’invite à penser le vocable français de „re-connaissance“, qui, de par sa construction même, incite à concevoir la reconnaissance comme une forme DOI 10.2357/ ldm-2020-0051 119 Dossier renouvelée (et donc augmentée) de connaissance du sujet. Elle est à la fois identification de celui-ci et expression de sa valeur morale au sens large (Ricœur 2004: 36). Mais il est à noter que lorsque l’on passe à l’allemand, cette relation n’est plus aussi évidente. Le terme Anerkennung, même pris indépendamment de la tradition philosophique hégélienne dont il est issu, n’entretient pas le même type de relation avec le terme Erkennen (ou même Erkenntnis) qui désigne la connaissance en allemand. Le préfixe Anque l’on trouve dans le vocable allemand met d’emblée au centre la dimension à la fois phénoménologique et intersubjective du processus de reconnaissance. Pour comprendre l’enjeu épistémologique de cette distinction entre connaissance et reconnaissance, il faut par ailleurs revenir à la lecture que propose Axel Honneth du prologue du roman bien connu de Ralph Ellison intitulé en français Homme invisible, pour qui chantes-tu? Le thème de l’invisibilité sociale, qui est central pour Ellison dans ce roman, est également au centre de l’article de Honneth qui entend montrer par là d’où parle sa théorie de la reconnaissance. L’invisibilité de cet homme invisible ne relève pas, comme le dit le narrateur dans le prologue, d’une particularité physiologique, d’un „accident biochimique survenu à [son] épiderme“ (Ellison 1969: 37). Cette invisibilité ne dépend aucunement du narrateur lui-même qui est bien un être „de chair et d’os, de fibres et de liquides“ (ibid.). Elle est en réalité le fait de ceux qui le regardent, „elle tient à la construction de leurs yeux internes, ces yeux avec lesquels, par le truchement de leurs yeux physiques, ils regardent la réalité“ (ibid.). Le narrateur, qui était parti de l’idée selon laquelle les gens refusaient simplement de le voir, en conclut à une déformation de leurs yeux internes. L’invisibilité est ici à prendre au sens métaphorique. Ce passage montre que l’expérience décrite n’est pas l’expérience d’une indifférence, mais bien d’une ignorance, d’un mépris délibérés. Quelques lignes plus loin, le lecteur apprend que le narrateur est une personne de couleur noire qui désigne peu à peu les „autres“ comme les „Blancs“. L’humiliation que subit le narrateur relève d’une „déformation de la capacité de perception des êtres humains à laquelle est liée la reconnaissance“ (Honneth 2006: 243), c’est ainsi que l’analyse Honneth dans son article. Il en conclut que, contrairement à ce que l’on pourrait penser a priori, c’est la reconnaissance qui est première, et non la connaissance. Cela est vrai génétiquement pour Honneth, c’est-à-dire que la reconnaissance constitue, avant même la connaissance, la première relation du petit enfant à ses parents (en particulier à sa mère) et donc la première étape de la constitution du sujet. Mais cela vaut également pour les adultes dans la mesure où c’est dans la relation intersubjective que se constitue le sujet social. De ce point de vue, on pourrait dire dans les termes de Chantal Jaquet que pour être connu en tant que complexion, c’est-à-dire comme un „assemblage complexe et singulier de déterminations physiques et mentales liées entre elles“ (Jaquet 2014: 101), l’individu doit au préalable être reconnu, être validé par les autres. Pour Honneth, la reconnaissance est un besoin humain primaire qui passe par la prise de conscience de l’image que les autres ont du sujet et qui seule peut mener l’individu à développer 120 DOI 10.2357/ ldm-2020-0051 Dossier une „relation intacte à soi-même“. 3 Honneth prend au sérieux la dimension intersubjective de la constitution du sujet, et de ce fait l’interpénétration du social et de l’individuel dans ce processus de construction en-dehors duquel rien n’existe. En ce sens, la constitution même du sujet est d’emblée définie comme un processus qui échappe à tout figement. Il ne s’agit donc aucunement de voir confirmée une identité substantielle particulière (et donc encore moins de se la voir imposer) dans la mesure où un tel noyau identitaire authentique du sujet n’existe pas selon Honneth. Or c’est bien cette notion d’identité qui pose problème à Chantal Jaquet. Pour elle en effet, si le concept d’identité est tout à fait légitime dans le cadre politique des combats pour la reconnaissance de certaines minorités invisibilisées, il n’est pas opérant dans le cadre de la philosophie, même politique. Aussi, tout se passe comme si selon la philosophe de la non-reproduction, identité et reconnaissance étaient deux concepts indéfectiblement liés. Cela relève notamment de son analyse critique des justifications philosophiques a posteriori des luttes pour la reconnaissance telles qu’elles émergent dans les années 1960-70 en Amérique du Nord et se déploient à partir des années 1990 sur l’ensemble de la planète. Cependant, Honneth lui-même est amené, à la faveur de discussions avec divers penseurs des luttes pour la reconnaissance politique des différences, 4 à préciser son concept de reconnaissance et à rejeter également le concept de l’identité au profit d’un concept de constitution processuelle du sujet à travers différentes dimensions de la reconnaissance qui lui est accordée par autrui: une dimension d’abord affective, puis une dimension juridique auquel le sujet peut prétendre en tant que sujet de droits et une dimension personnelle liée à sa contribution sociale. La reconnaissance est donc une validation par autrui qui se joue à divers niveaux du processus de constitution de soi mais dont le contenu n’est jamais défini au préalable. Aussi la reconnaissance a-t-elle également une dimension formelle et normative pour Honneth. À l’inverse, il semble que le point de vue de la connaissance, fût-il en lien avec l’idée de complexion plutôt qu’avec le concept d’identité, soit plus exposé à la substantialisation que ne l’est le point de vue de la reconnaissance. La connaissance implique en effet toujours un objet de la connaissance elle-même, objet qui se dérobe sans cesse dans le cas d’un sujet humain singulier. Ainsi, non seulement le concept de reconnaissance développé par Honneth échappe-t-il au figement identitaire critiqué par Chantal Jaquet, mais il est également à même de penser ce que celle-ci appelle „les différences fines“ (Jaquet 2014) dans la mesure où il prend en compte les divers aspects de sa vie dans lesquels l’individu a besoin de la reconnaissance d’autrui. Chez Eribon par exemple, on retrouve bien les trois dimensions de la reconnaissance telle qu’analysée par Axel Honneth. Il y va à la fois d’une reconnaissance affective nouée dans les relations parentales ou amicales, d’une reconnaissance cognitive et générale passant par les relations de droit, ainsi que d’une reconnaissance sociale liée au parcours singulier d’un individu. Ou plutôt devrait-on dire qu’il y va chez Eribon du déni de reconnaissance et de ses implications dans ces différents domaines et dans les relations de ces différentes dimensions de la reconnaissance entre elles. Or, il s’agit bien là d’un autre atout de la théorie honnethienne de DOI 10.2357/ ldm-2020-0051 121 Dossier la reconnaissance par rapport à la question de la connaissance et de la non-reproduction, à savoir qu’elle se fonde sur la privation de reconnaissance et sur la négativité du social pour interroger les mécanismes de ce que le philosophe francfortois définit comme la „déformation de la capacité de perception“ des autres donneurs de sens. 5 Si c’est bien l’invisibilité qui est première chez Axel Honneth, c’est aussi que son positionnement épistémologique est celui de la négativité du social. En cela, Axel Honneth reste fidèle à la première génération de la Théorie critique qui cherchait à déterminer une normativité critique à partir des ‚pathologies du social‘. Il s’agit donc dans cette partie de saisir les implications du positionnement épistémologique de Honneth (évoqué dans la première partie) sur son appréhension du social et d’interroger sa pertinence quant au phénomène du transclasse. Le point de départ de la théorie de Honneth consiste à réfléchir à la justice sous une autre forme que celle qui domine alors la philosophie politique et sociale, à savoir la justice institutionnelle liée à la réalisation de l’État de droit. Honneth, lui, entend montrer que la justice ne se réduit pas à l’octroi de droits, individuels ou même collectifs. Elle déborde très largement la problématique de l’État de droit et est bien plutôt à saisir à partir des expériences renouvelées de l’injustice. Le projet d’origine 6 d’Axel Honneth est en effet de montrer en quoi le sentiment d’injustice lui-même fait sens et dans quelle mesure il est possible de le prendre en compte pour ouvrir sur une conception plus complète de la réalité et donc de la justice sociale. Dans La Lutte pour la reconnaissance, il part, pour définir chacune des formes de reconnaissance nécessaire à une relation intacte de l’individu à soi-même, des différentes formes de déni de reconnaissance observées dans la société (la privation d’intégrité physique dans la blessure ou le viol, la privation de droits dans la discrimination, la privation de dignité dans l’invisibilisation professionnelle et sociale). L’intérêt de ce positionnement réside dans le fait de concevoir plus largement la justice que ne le font les théories libérales traditionnelles et surtout d’interroger le mécanisme de cette négativité à partir d’une réflexion sur la production des normes dans le domaine social. De ce point de vue, il est intéressant de constater que dans les exemples de transclasses analysés par Chantal Jaquet, et en particulier chez Didier Eribon, ce n’est pas tant l’invisibilité que la visibilité sociale qui pose problème. Il y a la honte d’être vu dans les lieux de socialisation gay à Reims, mais aussi la gêne occasionnée par la rencontre fortuite de son grand-père laveur de carreaux qui lui fait craindre d’être identifié comme issu d’un milieu social inférieur. L’analyse de l’insulte comme moment constitutif de la subjectivité gay que l’on trouve à la fin de l’ouvrage résume assez bien cette expérience de la visibilisation malheureuse. C’est une scène proche de celle qu’écrira plus tard Édouard Louis dans le premier chapitre de son roman En finir avec Eddy Bellegueule et où Didier Eribon reprend les développements sur l’insulte qu’il avait proposés dans Réflexions sur la question gay: Chaque fois, l’acte réitéré de la désignation injurieuse qui m’était adressée venait me transpercer comme un coup de couteau, me terroriser aussi, car il signifiait qu’on savait ou subodorait ce que j’étais, alors que j’essayais de le cacher, ou qu’on m’assignait un destin, celui 122 DOI 10.2357/ ldm-2020-0051 Dossier d’être à jamais soumis à cette omniprésente dénonciation et à la malédiction qu’elle prononçait. On m’exposait en place publique (Eribon 2018: 204). L’insulte est considérée comme un stigmate, elle est ce qui dans le langage fait advenir le déni de reconnaissance, lui donne une visibilité tout en nommant, en assignant le sujet qui en est le destinataire. C’est tout le pouvoir performatif du langage, mais aussi de la norme sociale qui est mis en exergue dans ce passage. L’insulte répétée entérine le pouvoir des normes sociales qui n’ont de cesse de se réactualiser, créant ainsi également un espace du hors-normes. En arrière-plan de ces réflexions, on retrouve la référence à la pensée de la norme chez Michel Foucault, mais on pense également à une autre référence qui est d’autant plus intéressante qu’elle permet de faire un retour à la problématique de la reconnaissance: Il s’agit de Judith Butler qui, dans Bodies that matter, mais aussi dans Excitable Speech, relie également cette notion de performativité du langage à l’insulte et au déni de reconnaissance en se référant à Foucault et à Hegel. Pour Butler, la négativité de la visibilisation relève de ce que toute relation intersubjective est avant tout le signe de la vulnérabilité humaine. Toute relation intersubjective est assignation, arraisonnement d’un sujet à une identité normée dont le sujet lui-même a besoin pour assouvir son désir de reconnaissance: „Le pouvoir ne peut agir sur le sujet que s’il impose à son existence des normes qui la rendent reconnaissable“ (Butler 2009: 111-112). C’est sur ce point de la ‚reconnaissabilité‘ du sujet que, dans un échange autour de la réception de Foucault dans les sciences humaines et sociales, Butler s’oppose à la conception honnethienne de la reconnaissance selon laquelle tout déni de reconnaissance n’est qu’une reconnaissance (positive) manquée. 7 Elle se place de ce fait en amont d’Axel Honneth en tentant de démontrer que pour être reconnu selon la conception de Honneth, le sujet doit être aussi rendu reconnaissable par les normes qui le produisent, ce qui donne au désir de reconnaissance une dimension ambivalente qui n’est, aux yeux de Butler, pas assez interrogée par Axel Honneth. Il n’en reste pas moins que le point de vue de la reconnaissance adopté par les deux philosophes permet d’interroger, au-delà de la dimension juridique, la production des normes sociales et du hors-norme. Pour Butler comme pour Honneth, le hors-norme ne relève aucunement d’un sujet originel qui échapperait à l’assignation, ou si le hors-norme est le lieu de l’inassignable, c’est au sens de l’inintelligible et donc du déni de reconnaissance pour parler en termes honnethiens. Il n’est pas le lieu du sujet libre. Cette ambivalence de la norme est d’ailleurs très bien mise en évidence par Eribon lui-même qui écrit dans Retour à Reims qu’il se méfie des injonctions à être a-normal et qui montre que celui qui est désigné comme contrevenant à la règle n’en désire pas moins faire partie des gens normaux. Il est de ce fait tout à fait remarquable de constater que pour Eribon, assumer ce qui dans son milieu d’origine était considéré comme anormal a été une porte de sortie vers un autre milieu où la présence de personnes issues de son milieu d’origine est considérée elle-même comme hors-norme. On le voit, l’identification à la norme perçue comme une forme de malédiction peut donc être transférée d’un domaine à l’autre et n’en est pas moins violente et douloureuse pour le sujet qui pourtant ne peut se DOI 10.2357/ ldm-2020-0051 123 Dossier constituer qu’au travers de la norme, qu’en elle. D’une certaine manière, même le hors-norme relève de la norme et de ce fait, l’opposition entre liberté et déterminisme est invalidée par l’expérience du transclasse. Pour Eribon, il n’est pas pertinent d’opposer force transformatrice ou libératrice et autoreproduction sociale. Comme il le dit à la toute fin de l’ouvrage en citant Sartre, on ne peut faire quelque chose que de ce qu’on a fait de nous. C’est une perspective tout à fait essentielle dans la mesure où elle donne la préséance au déterminisme social et au pouvoir des normes qui s’inscrit jusque dans le psychisme de l’individu. Par conséquent, l’expérience du transclasse elle-même invite à inverser la perspective de la non-reproduction. Dans le discours de la non-reproduction, la visibilisation malheureuse est avant tout perçue comme preuve du caractère trans-, de l’entre-deux spécifique au transclasse et de la plasticité des identités sociales. 8 Cela tient au fait que le phénomène du transclasse soit envisagé du point de vue de l’exception individuelle. À l’inverse, l’intérêt de la perspective de la reconnaissance est bien de partir du pouvoir du collectif comme nous venons de le voir, c’est-à-dire de ce que le social fait de nous. Ainsi, les deux points de vue étudiés ici offrent une appréhension différente de l’individu et du social. Ils ouvrent également à une interprétation différente des enjeux émancipatoires dans les sociétés contemporaines. Comme l’indique Chantal Jaquet dans l’introduction de son ouvrage, l’enjeu de cette réflexion sur les transclasses est de définir l’extension de la sphère de liberté individuelle. Dans ce contexte, la question de la lutte, notamment dans sa dimension collective, est centrale. Pour les penseurs de la reconnaissance dans le sillage de Honneth, la lutte pour la reconnaissance fait naturellement écho à la philosophie hégélienne, même si ces philosophes, dont Honneth lui-même, ne partent pas tant de la Phénoménologie de l’Esprit que des écrits d’Iéna. 9 Pour Honneth, la dimension de la lutte est à la fois pensée du point de vue individuel et collectif. Elle émane de l’écart qui se creuse entre les attentes morales de l’individu en termes de reconnaissance et la réalité de l’expérience du mépris. C’est en ce sens que les sentiments d’injustice qui se manifestent dans la honte ou la colère ont une dimension normative chez Honneth. Ils sont d’une certaine manière le moteur même de la révolte et de la lutte. Mais les attentes dont il est question sont également historiquement variables et collectives. En effet, elles relèvent des normes propres à une société historiquement située mais qui sont susceptibles d’être bousculées et redéfinies par les luttes notamment. Dans La Lutte pour la reconnaissance, Honneth définit ainsi la „lutte sociale“: „Il s’agit du processus pratique au cours duquel les expériences individuelles de mépris sont interprétées comme des expériences typiques d’un groupe tout entier, de manière à motiver la revendication collective de plus larges relations de reconnaissance“ (Honneth 2000: 194). Ainsi, l’horizon d’attente éthique (sittlich) d’une société est susceptible d’être élargi grâce aux luttes collectives qui, par le passé, ont déjà montré leur force de transformation. Dans une interview donnée à Estelle Ferrarese et Marc Bessin entre autres (Bessin et al. 2007: 145-152), Axel Honneth le dit très bien: Il a été influencé par l’appréhension de soi des classes ouvrières de la Ruhr, où son père travaillait en tant que médecin, et a notamment 124 DOI 10.2357/ ldm-2020-0051 Dossier constaté qu’il n’y allait pas seulement de luttes pour plus de pouvoir économique ou simplement une meilleure redistribution des richesses, mais aussi d’une certaine conception de l’honneur et du mérite qui était bafouée. Ce ‚contact‘ de sa famille bourgeoise avec le prolétariat industriel de la Ruhr l’a rendu sensible à la dimension symbolique et normative des conflits de classe. De ce point de vue, et malgré son origine sociale et ses expériences éducatives très différentes de celles de Didier Eribon, Honneth rejoint une dimension elle-même très présente dans Retour à Reims, et qui est pour une part ignorée par le point de vue de la non-reproduction. En effet, Chantal Jaquet cherche surtout à expliquer les causes et les mécanismes de la non-reproduction, mais elle ne s’arrête pas sur les enjeux collectifs de ce processus, si ce n’est dans la toute dernière phrase de son ouvrage où elle indique que le transclasse ne doit pas être considéré comme l’avenir de l’homme „car l’objectif n’est pas de passer solitairement les barrières de classe, mais de les abolir pour tous“ (Jaquet 2014: 231). Cela tient au fait que la perspective ouverte par le point de vue de la non-reproduction est une perspective avant tout individuelle, mais qui passe à côté de toute une part de la dimension collective de l’expérience sociale. Dans Retour à Reims, la question de la définition collective des thèmes importants et des combats (notamment politiques) à mener pour les ouvriers prend pourtant une place centrale. On peut s’interroger sur le statut de ces passages. Il ne s’agit en rien de digressions ou de réflexions annexes ou incidentes à la trajectoire du transclasse qui est décrite dans cet ouvrage, mais ces passages participent bel et bien de la dynamique de l’ouvrage et la dépassent même. En un sens, ils relèvent du processus de ‚retour‘ et de recueillement propre à la perspective d’Eribon, c’està-dire de la nécessité pour le transclasse de tenter d’harmoniser ou à tout le moins de relier dans un même mouvement les deux „verdicts sociaux“ (Eribon 2018: 230) dont il est marqué. Mais on peut également comprendre ces passages comme devenant premiers finalement par rapport à la seule question de la trajectoire du transclasse. Il n’est pas anodin par exemple que le dernier mot d’Eribon dans l’épilogue soit celui de la „vengeance“ qu’il reprend à Annie Ernaux. Il s’agit en effet pour le transclasse de „venger sa race“ (ibid.: 241), celle des dominés. Cette perspective finale, qui est aussi celle des combats qui dépassent largement le cadre de la seule trajectoire personnelle, 10 invite le lecteur à lire sous un angle nouveau les passages consacrés, au centre de l’ouvrage, à la classe ouvrière et à son engagement politique. Le point de vue de la reconnaissance permet de comprendre cette continuité qui relie l’expérience du mépris vécue au niveau individuel, l’idée de constitution d’une relation intacte à soi-même qui inclut le retour individuel sur les destins collectifs et enfin le façonnement d’un horizon nouveau par les luttes collectives. Dans ce contexte, ce n’est plus la trajectoire individuelle du retour qui est première, mais bien le rôle de l’intellectuel qui est également mis en avant par Eribon: C’est donc la tâche qui incombe aux mouvements sociaux et aux intellectuels critiques: construire des cadres théoriques et des modes de perception politiques de la réalité qui permettent non pas d’effacer - tâche impossible - mais de neutraliser au maximum les passions négatives à l’œuvre dans le corps social et notamment dans les classes populaires; d’offrir DOI 10.2357/ ldm-2020-0051 125 Dossier d’autres perspectives et d’esquisser ainsi un avenir pour ce qui pourrait s’appeler, à nouveau, la gauche (ibid.: 160). Pour Eribon, les mouvements sociaux, autant que les intellectuels ‚critiques‘, ont un rôle à jouer dans la redéfinition des cadres de la normativité sociale. Il réitère ce point de vue dans l’épilogue: le rôle des théories critiques au sens large du terme est d’être en mesure de reformuler les priorités en prenant en compte la négativité sociale. Mais elles sont selon lui aussi à même de le faire dans des termes qui permettent la nécessaire mise à distance émotionnelle de cette négativité. Il s’agit donc de prendre en compte cette expérience sociale négative de la domination mais aussi d’être en mesure de la détourner, de la retourner en son contraire pour qu’elle puisse être à même de définir de nouvelles ‚perspectives‘. Cette conception est somme toute très proche de celle défendue par Axel Honneth, et ce malgré une appréhension différente de la théorie critique. Pour lui, le rôle du théoricien critique consiste à être capable de traduire les expériences sociales négatives en une forme cohérente et audible au niveau de l’espace publique critique. Il joue un rôle pour faire advenir la lutte sociale, pour montrer en quoi les expériences individuelles relèvent aussi d’une expérience de domination qui concerne un groupe tout entier. Pour ce faire, il faut que le théoricien interroge lui-même la pertinence des concepts dont il a l’usage et qui dominent sa discipline. Il doit être en mesure de remettre cette domination-là en question et de renouveler l’extension de ces concepts à partir de sa propre perspective critique. C’est le sens de la théorie honnethienne de la lutte pour la reconnaissance qui cherche, à partir d’un concept dominant la philosophie (la reconnaissance hégélienne), non seulement à en proposer une réactualisation, mais aussi à en déterminer les limites. Dans le cas de Didier Eribon comme dans celui d’Axel Honneth, l’engagement du philosophe dépasse largement la seule problématique individuelle. Il participe d’un processus collectif nécessaire à l’extension du domaine de la liberté qui pourtant ne trouve pas sa place dans la théorie de la non-reproduction développée par Chantal Jaquet. Ainsi, la lecture de Retour à Reims proposée dans cette contribution a essayé de montrer que le verdict sans appel de Chantal Jaquet concernant la perspective de la lutte pour la reconnaissance est peut-être un peu rapide. Il s’agit en effet d’un point de vue qui éclaire non seulement tout un pan de l’ouvrage de Didier Eribon, mais qui ouvre également une perspective plus large sur les enjeux du phénomène du transclasse que ne le fait celui de la non-reproduction. Il permet notamment de montrer dans quelle mesure cet ouvrage et cette écriture auto-sociobiographique proposée par Eribon peut être lue comme un acte d’engagement d’un individu particulier pour „venger sa race“ invisibilisée, mais au-delà de cela aussi comme un acte militant cherchant à redéfinir et à motiver l’engagement des intellectuels qui demeure une problématique extrêmement actuelle dans nos sociétés contemporaines. Dans L’Ordre du discours, Michel Foucault écrit: „Il se peut toujours qu’on dise le vrai dans l’espace d’une extériorité sauvage; mais on n’est dans le vrai qu’en obéissant aux règles d’une ‚police‘ discursive qu’on doit réactiver en chacun de ses discours“. C’est 126 DOI 10.2357/ ldm-2020-0051 Dossier dans cet interstice de la réactualisation que s’ancre potentiellement le travail de redéfinition et de subversion de l’intellectuel pour une émancipation de la société. Bessin, Marc / Ferrarese, Estelle / Murard, Numa / Voirol, Olivier, „Le motif de tout conflit est une attente de reconnaissance. Entretien avec Axel Honneth“, in: Mouvements, 1, 49, 2007, 145- 152. Butler, Judith, Bodies that matter: on the discursive limits of „sex“, New York, Routledge, 1993. —, Excitable speech: A politics of the performative, New York, Routledge, 1996. —, „Retour sur les corps et le pouvoir“, in: Incidence, 4-5, 2009, 99-113. Ellison Ralph, Homme invisible, pour qui chantes-tu? , Paris, Grasset, 1969. Eribon, Didier, Retour à Reims, Paris, Flammarion, 2018. Honneth, Axel, La Lutte pour la reconnaissance, Paris, Cerf, 2000. —, „Invisibilité: sur l’épistémologie de la ‚reconnaissance‘kk“, in: id., La Société du mépris. Vers une nouvelle théorie critique, Paris, La Découverte, 2006, 225-244. Honneth, Axel / Saar, Martin (ed.), Michel Foucault. Zwischenbilanz einer Rezeption. Frankfurter Foucault-Konferenz 2001, Francfort-sur-le-Main, Suhrkamp, 2003. Hunyadi, Mark (ed.), Axel Honneth. De la reconnaissance à la liberté, Lormont, Le Bord de l’eau, 2014. Jaquet, Chantal, Les Transclasses ou la non-reproduction, Paris, P.U.F., 2014. Louis, Édouard, En finir avec Eddy Bellegueule, Paris, Seuil, 2014. Renault, Emmanuel, „Théorie de la reconnaissance et négativisme méthodologique“, in: Alain- Patrick Olivier / Maiwenn Roudaut / Hans-Christoph Schmidt-am-Busch (ed.), Nouvelles perspectives pour la reconnaissance. Lectures et enquêtes, Lyon, ENS Éditions, 2019, 137-148. Ricœur, Paul, Parcours de la reconnaissance. Trois études, Paris, Stock, 2004. 1 D’après le titre de l’ouvrage séminal d’Axel Honneth, voir bibliographie. 2 Paul Ricœur revient sur cette opposition dans Parcours de la reconnaissance qui débute par une analyse lexicographique du concept de reconnaissance. Il évoque également la reconnaissance en son sens cognitif dans la première étude, mais le fait à partir de Kant et du concept de Rekognition. Notre contribution se penche plus spécifiquement sur le concept hégélien d’Anerkennung qui est analysé dans la troisième étude de Ricœur. 3 C’est en effet le point de départ de Honneth que l’on peut concevoir comme étant sa conception de l’autonomie du sujet. Il parle d’une relation intacte du sujet à lui-même (intakte Selbstbeziehung). 4 Dans les années 2000, au moment où son ouvrage sur la reconnaissance est publié dans sa version française, Honneth discute avec divers philosophes anglo-saxons, en particulier Charles Taylor, Marion Iris Young et Nancy Fraser, et s’en démarque quant à son appréhension du concept de reconnaissance. Il reproche notamment à Charles Taylor qui fonde son interprétation de la reconnaissance sur le concept rousseauiste d’authenticité et revendique une politique de la différence, de réduire la question de la reconnaissance à des problématiques typiquement nord-américaines et d’occulter tout un pan des luttes sociales pour la reconnaissance et de leurs enjeux. 5 D’après le concept de George Herbert Mead qui constitue une référence importante de la Théorie critique. DOI 10.2357/ ldm-2020-0051 127 Dossier 6 Les recherches récentes qui font le bilan de la pensée honnethienne sur 30 années ont montré que le philosophe de Francfort s’était progressivement éloigné de ce projet originel; Cf. M. Hunyadi et E. Renault. 7 Cf. le volume publié par Axel Honneth et Martin Saar à l’occasion de la Frankfurter Foucault- Konferenz de 2001 dans lequel Judith Butler publie un article intitulé „Noch einmal: Körper und Macht“, version allemande du texte „retour sur le pouvoir et les corps“ cité dans la bibliographie. 8 „Le transclasse ne peut être compris que dans ce mouvement du passage par lequel il fait l’expérience d’une transidentité et de la dissolution du moi personnel et social. Il se déclasse au risque d’être toujours déplacé. Il est out of place, à la frontière entre le dedans et le dehors“ (Jaquet 2014: 221). 9 Le texte très connu de Hegel concernant la dialectique du maître et du serviteur n’est pas le point de départ de la plupart des penseurs de la lutte pour la reconnaissance, en particulier Honneth, Renault et Ricœur. 10 „Mais pourquoi nous faudrait-il choisir entre différents combats menés contre différentes modalités de la domination? “ (Eribon 2018: 245). 128 DOI 10.2357/ ldm-2020-0052 Dossier Marion Biet (Re)penser Retour à Reims avec un accent: la mobilité de classe au prisme des langues et de la mobilité géographique Le 29 mai 2018, je faisais partie des quelques 400 personnes présentes dans l’amphithéâtre de l’Université de Vienne pour suivre l’intervention de Didier Eribon sur son livre La société comme verdict, 1 organisée par Andrea Seier (tfm | Institut d’études de théâtre, film et médias) et Jens Kastner (Académie des Beaux-Arts de Vienne). J’avais découvert ses livres Retour à Reims (et sa traduction allemande Rückkehr nach Reims) et La société comme verdict un an plus tôt au travers de leur réception dans le milieu universitaire germanophone. 2 Hasard du calendrier et de ma situation entre l’Autriche, l’Allemagne et la France, je retrouvais Eribon une semaine plus tard, le 5 juin, à l’Université de Iéna (Allemagne) pour une deuxième conférence sur „Les limites des mouvements sociaux: réflexions sur les classes, l’âge et la politique“, avec une modération de Klaus Dörre (Université de Iéna, Institut de sociologie). Le contexte particulier de ces deux ‚rencontres‘ à l’étranger et de mon expérience de lecture de ses livres a sensiblement influencé ma perception des enjeux interculturels et linguistiques de la mobilité de classe. Partant de ces deux conférences, je voudrais proposer dans cet article une (re)lecture de Retour à Reims qui s’intéresse à la dimension linguistique dans le phénomène du transfert de classe. Dans un premier temps, je détaillerai le dispositif respectif des deux interventions pour, dans un deuxième temps, analyser le rôle des langues (étrangères, régionales, patois, sociolectes et accents…) dans le phénomène de la mobilité de classe. 1. Dispositifs linguistiques et cadres universitaires à Vienne et Iéna Au-delà d’une reformulation et d’un approfondissement productifs de thèses entendues une semaine plus tôt à Vienne, l’intervention de Didier Eribon à Iéna a aussi été l’occasion d’un changement linguistique. À Vienne, la conférence et la discussion se sont déroulées en anglais, ce qui impliquait, certes, la maîtrise d’une langue étrangère par une grande partie de l’auditoire, 3 mais permettait également à des non germanophones ou francophones de pouvoir participer à la discussion. L’université de Iéna a, pour sa part, fait le choix d’organiser une traduction simultanée de la conférence diffusée par l’intermédiaire d’écouteurs distribués au public, permettant ainsi à Eribon de s’exprimer en français et au public de poser des questions en allemand. Face à l’affluence (environ 350 personnes), le nombre d’écouteurs se révéla cependant vite insuffisant - tout comme les chaises -, ce qui conduisit certain/ es spectateur/ trices à quitter la salle dès le début ou au cours de la conférence. À première vue cette différence dans le dispositif linguistique peut sembler anodine tellement il DOI 10.2357/ ldm-2020-0052 129 Dossier est commun d’y avoir affaire dans le milieu universitaire. Mais cela sous-tend pourtant un rapport aux langues (dominantes) dans le cadre universitaire qu’il peut être intéressant de replacer dans un contexte sociologique. Partant de cet aspect, je voudrais me pencher sur le rapport entre mobilité de classe, mobilité géographique et langue dans Retour à Reims, mais aussi, plus généralement, dans l’expérience de la mobilité de classe. Il s’agira donc d’abord de revenir sur le parcours de Eribon et de voir comment les langues sont liées à son origine sociale. Puis, au travers de la métaphore spatiale largement utilisée pour décrire le phénomène de la mobilité de classe et souvent rattachée à un jugement moral, nous nous pencherons sur la place accordée à l’accent et la mobilité géographique dans les parcours de „transclasses“ 4 (Jaquet 2014: 11). Enfin, nous conclurons cet article en mettant en évidence un nouvel aspect du racisme des classes sociales dominées. 2. L’apprentissage des langues étrangères dans le parcours scolaire, une question de classe sociale Lors de ses apparitions publiques à Vienne et à Iéna, Eribon a fait montre d’une timidité surprenante que lui-même ne manqua pas de souligner, s’étonnant par exemple qu’autant de monde soit venu pour l’entendre. À Vienne, cette timidité s’est manifestée de façon plus évidente encore en prenant la forme de commentaires métalinguistiques: Eribon s’est excusé plusieurs fois pour son accent et ses difficultés à prononcer le titre de son livre, Retour à Reims, en allemand Rückkehr nach Reims, tout en s’efforçant d’utiliser ce dernier plutôt que le titre original français. L’intérêt ici n’est pas tant de savoir d’où vient cette gêne, qu’elle soit réelle ou jouée pour coller à la ‚coquetterie bourgeoise‘ et à l’idéal de l’intellectuel polyglotte - bien que cette question soit également pertinente du point de vue de l’habitus de classe. 5 Il ne s’agit pas non plus de faire une analyse psychologique ou linguistique de sa prestation. Cependant, ses commentaires métalinguistiques et sa ‚timidité‘ sont intéressants dans la mesure où ils mettent au jour une sensibilité linguistique dans les interactions situées dans le cadre universitaire et permettent ainsi d’engager une réflexion sur le rôle des langues dans le transfert de classe, et en particulier dans le parcours qu’Eribon décrit dans Retour à Reims. Car les langues n’échappent pas aux déterminations sociales. Dans Retour à Reims, Eribon revient, en effet, sur la manière dont sa classe sociale a conditionné son parcours scolaire et en particulier ses choix de langues au collège et lycée (Eribon 2010: 180). Il décrit avoir rapidement arrêté le grec ancien, bien qu’étant brillant, et presque renoncé au latin car ces deux langues lui paraissaient peu utiles. Puis, au lycée, contrairement à l’ami auquel il aspire de ressembler, il décide d’apprendre l’espagnol plutôt que l’allemand qu’il a automatiquement détesté et ne comprendra que plus tard que cette décision découle bien plus de son habitus de classe que d’un choix délibéré: „En réalité, je croyais choisir et j’étais choisi, ou plutôt capté par ce qui m’attendait“ (ibid.: 181). Car ce choix de l’espagnol l’éloigne inconsciemment des classes où le niveau scolaire, mais aussi social, est 130 DOI 10.2357/ ldm-2020-0052 Dossier plus élevé et rend compte d’une règle implicite que seules les personnes de niveau social supérieur connaissent. Le dégoût automatique de l’allemand éprouvé par le jeune Eribon se comprend donc, a posteriori, comme une résultante de son milieu social - et de son milieu géographique, car le Nord-Est de la France est longtemps resté marqué par le traumatisme des guerres avec l’Allemagne, comme en témoignent les termes et expressions péjoratives en référence à tout ce qui y touche dans le langage de sa famille (ibid.: 36-37). Si le choix de l’espagnol en seconde langue vivante a plutôt contraint Eribon à „végéter au milieu des plus mauvais élèves du lycée“ (ibid.: 181), l’anglais, au contraire, a contribué de plusieurs façons à son transfert social. C’est d’ailleurs la récitation d’un poème de Noël, appris dans un cours d’anglais de sixième, qui provoque la prise de conscience progressive d’une coupure entre sa famille et le monde extérieur. Ne comprenant pas l’anglais, la mère d’Eribon lui reproche de faire exprès d’exhiber ses connaissances et donc de vouloir lui montrer sa supériorité (ibid.: 83). Il est intéressant de remarquer que l’anglais reste porteur d’une forme de supériorité pour la mère d’Eribon: À la fin du lycée, elle est d’autant plus surprise par la décision de son fils de ne pas poursuivre des études d’anglais ou d’espagnol que seules les études de langue constituent pour elle l’assurance d’un poste de professeur et donc d’un avenir sûr, les autres cursus comme médecine et droit lui paraissant d’emblée inconcevables (ibid.: 90). Par ailleurs, bien qu’il ne fasse pas d’études d’anglais, les langues continuent de jouer un rôle très important pour le jeune Eribon. Et ce sont en partie ses compétences en anglais qui vont lui permettre de sortir de sa précarité économique au terme de sa deuxième année à l’université. Au concours de l’IPES, 6 Eribon est le seul candidat à être admissible aux épreuves orales. Il réussit tout juste les épreuves de sociologie mais brille en anglais, ce qui lui assure une très bonne note, ainsi que le statut et la bourse d’„élève-professeur“ pour trois ans (ibid.: 192). Avec cette bourse, Eribon acquiert une certaine indépendance économique et peut se concentrer sur ses études. Mais elle lui permet aussi une première mobilité géographique: Eribon quitte le domicile familial et s’installe, dans un premier temps, dans le centre-ville de Reims, puis à Paris (ibid.: 193). Ce lien entre mobilité et langues apparait de nouveau lors du lancement de sa carrière universitaire avec la sortie de son premier livre dédié à l’œuvre de Foucault qui est rapidement traduit dans de nombreuses langues - „pays“ écrit Eribon (ibid.: 239). La traduction de son livre marque, en effet, une étape importante, car elle lui ouvre, à l’étranger, les portes de l’université qui lui étaient restées fermées en France suite à son échec à l’agrégation: il est invité à participer à des colloques, à donner des conférences, c’est-à-dire à prendre part au milieu universitaire, délaissant progressivement le journalisme (ibid.). Il est ici intéressant de remarquer le rôle joué par sa forte mobilité internationale car, comme Eribon le souligne, la légitimation de son statut de théoricien et d’écrivain en France, au moins à ses yeux, repose tout autant sur le succès de son livre (et de la figure de Foucault) que sur ses nombreuses interventions à l’étranger qui en découlent. Ces deux aspects compensent le rôle qu’auraient joué l’habitus de classe et la reproduction sociale par le système scolaire DOI 10.2357/ ldm-2020-0052 131 Dossier français (ibid.: 240). Retour à Reims se termine d’ailleurs par la remise du Brudner Prize à Yale en 2008 consacrant cette reconnaissance, 7 après l’évocation de ses nombreux voyages „en Europe, en Amérique latine et, surtout, aux États-Unis“ (ibid.). De fait, ses livres et son activité d’enseignement aux États-Unis lui permettent d’obtenir un poste de professeur d’université en France, à Amiens, et donc d’être enfin légitimé par le système universitaire français un an après la remise de ce prix. Au vu de l’importance de la dimension internationale dans sa carrière et son processus de légitimation, on pourrait formuler l’idée que le retour à Reims est d’abord un retour en France - le temps passé à l’étranger pouvant être considéré comme une étape liminale dans son parcours universitaire et mais aussi dans celui de ‚transclasse‘. Les conférences de Vienne et de Iéna s’inscrivent dans le prolongement de son parcours académique à l’international et montrent, d’une certaine façon, la double fonction des langues, qui peuvent à la fois favoriser la mobilité géographique et sociale et donc servir dans le processus de légitimation 8 et porter la trace du milieu d’origine et des mécanismes de reproduction sociale - une idée déjà formulée par Bourdieu, qui considère que „ce qui s’exprime à travers l’habitus linguistique, c’est tout l’habitus de classe dont il est une dimension, c’est-à-dire, en fait, la position occupée, synchroniquement et diachroniquement, dans la structure sociale“ (Bourdieu 1982: 85). Partant de ce constat, il semble important de se pencher sur l’importance de la dimension linguistique dans le transfert de classe et son rapport à la mobilité géographique. Car si Eribon ne s’étend jamais trop sur l’influence des langues étrangères une fois ses études terminées, parlant plus volontiers d’expérience à l’étranger plutôt que sur la forme concrète des échanges qu’elles entrainent, 9 la dimension linguistique, et en particulier l’importance des accents, n’est pas tout à fait absente de sa réflexion. 3. Langues naturelles et langues apprises: les ‚transclasses‘ et la peur de l’accent Dans son livre Les transclasses ou la non-reproduction, Chantal Jaquet remarque que la mobilité géographique est une étape courante dans le parcours des ‚transclasses‘, comme ont pu également le constater auparavant Pierre Bourdieu, Annie Ernaux et John Edgar Wideman, pour n’en citer que quelques-uns. 10 Elle correspond à l’envie d’échapper au milieu d’origine et, dans le même temps, au lieu géographique dans lequel celui-ci s’inscrit: Cette distance intérieure se double très vite d’une distance extérieure. De mentale elle devient spatiale lorsque le malaise interne se traduit par la migration lointaine. Le déclassement s’opère le plus souvent par déplacement tant il est vrai que deux mondes ne peuvent coexister dans le même espace et avoir lieu dans le même camp. Dès lors, le changement historique de classe se présente comme un éloignement géographique, un passage de frontière, séparant la ville et les champs, la capitale et la province, le centre et les faubourgs, les banlieues huppées et les cités dortoirs, les pays développés et les pays en voie de développement… (Jaquet 2014: 143). 132 DOI 10.2357/ ldm-2020-0052 Dossier Cette mobilité géographique, résumée par la phrase de Jaquet „changement de classe, changement de place“ (ibid.), s’observe également dans le parcours d’Eribon qui, comme nous l’avons vu, s’éloigne de Reims, de la province, pour Paris, la capitale, puis part à l’étranger pour des périodes plus ou moins longues. La coupure due à la mobilité géographique n’est pas totale ni immédiate; dans un premier temps, Eribon continue de rendre visite à ses parents le dimanche à Reims, de même que ses séjours à l’étranger n’impliquent pas la rupture complète avec la France. Jaquet souligne d’ailleurs que „quelle que soit sa volonté de couper les ponts, le transclasse est toujours rattaché à une origine, qu’il la revendique ou non“ (ibid.: 136). Ce rattachement plus ou moins revendiqué peut notamment se manifester dans le lien qu’entretient un/ e ‚transclasse‘ avec la langue, et en particulier avec son accent ou dialecte. Car les lieux géographiques sont également associés à des formes linguistiques particulières, ce que décrit très bien Ernaux dans La Honte: Descendre du centre-ville au quartier du Clos-des-Parts, puis de la Corderie, c’est encore glisser d’un espace où l’on parle bien français à celui où l’on parle mal, c’est-à-dire dans un français mélangé à du patois dans des proportions variables selon l’âge, le métier, le désir de s’élever. […] Tout le monde s’accorde à trouver laid et vieux le patois, même ceux qui l’emploient beaucoup, et qui se justifient ainsi, ‚on sait bien ce qu’il faut dire mais ça va plus vite comme ça‘ (Ernaux 1997: 57). De fait, comme le fait remarquer Bourdieu, si parler est une compétence innée, parler la langue légitime, c’est à dire parler ‚bien français‘, sans accent ni sociolecte, est une compétence qui en „dépendant du patrimoine social, retraduit des distinctions sociales dans la logique proprement symbolique des écarts différentiels ou, en un mot, de la distinction“ (Bourdieu 182: 42). L’habitus de classe ne s’entend donc pas seulement dans le choix des langues étrangères que l’on apprend ou pas à l’école du fait de son conditionnement social, comme l’allemand dans le cas de Eribon, il s’entend aussi, et surtout, à travers celles qu’on cherche à désapprendre, ou au contraire à apprendre, en fonction de sa classe sociale d’origine: Eribon explique ainsi que sa mobilité de classe est étroitement liée au désapprentissage de la langue de son milieu social et géographique d’origine et à l’apprentissage de celle de la bourgeoisie (principalement parisienne), et requiert donc un contrôle permanent de sa manière de parler tant elle est susceptible de trahir ses origines sociales et géographiques. C’est pourquoi toute mobilité de classe entraine nécessairement une forme de bilinguisme: Réapprendre à parler fut tout autant nécessaire: oublier les prononciations et les tournures de phrase fautives, les idiomatismes régionaux […], corriger l’accent du Nord-Est et l’accent populaire en même temps, acquérir un vocabulaire plus sophistiqué, construire des séquences grammaticales plus adéquates… bref, contrôler en permanence son langage et son élocution. […] Par la suite, et c’est encore le cas aujourd’hui, je serai au contraire très attentif, en me retrouvant au contact de ceux dont j’avais désappris le langage, à ne pas utiliser des tournures de phrase trop complexes ou inusitées dans les milieux populaires […], et je m’efforcerai de retrouver les intonations, le vocabulaire, les expressions que, bien que les ayant relégués dans un recoin reculé de ma mémoire et ne les employant plus guère, je n’ai jamais DOI 10.2357/ ldm-2020-0052 133 Dossier oubliés; pas tout à fait un bilinguisme, mais un jeu avec deux niveaux de langues, deux registres sociaux, en fonction du milieu et des situations (Eribon 2011: 108-109). Cette expérience de désapprentissage et de honte linguistique est partagée par de nombreux ‚transclasses‘, à commencer par Bourdieu, qui, d’après Eribon, parlait béarnais avec son père et présentait donc un accent qu’il s’appliqua à „corriger une fois arrivée à Paris (dans la honte mêlée de l’origine sociale et de l’origine géographique), et qui ressurgissait de temps à autre au détour d’une conversation“ (ibid.: 167). Cette forme particulière de bilinguisme n’est pas propre à la France, bien que le contexte historique et politique tende à renforcer la honte sociale et géographique qui en découle. L’imposition d’une langue commune était observable dans les couches sociales élevées de Paris dès le XVII e siècle et donna déjà naissance à une langue officielle (cf. Bourdieu 1982: 29). Cependant, la Révolution contribua nettement à imposer l’idée de l’État-nation „sous la forme de la ‚république une et indivisible‘ - affirmée telle et justement parce que le royaume de France était divers et divisé en multiples entités aux statuts, lois, langues très variés“ (Blanchet 2019: 76). Dans Ce que parler veut dire, Bourdieu, qui s’était déjà intéressé à la domination linguistique, décrit le phénomène de la co-émergence de l’État-nation et d’imposition d’un „marché linguistique unifié“ à travers une langue officielle „obligatoire dans les occasions officielles et dans les espaces officiels (École, administrations publiques, institutions politiques, etc.), cette langue d'État devient la norme théorique à laquelle toutes les pratiques linguistiques sont objectivement mesurées“ (Bourdieu 182: 27). En effet, cette conception de la république exclut toute forme d’hétérogénéité que pourrait représenter une pluralité linguistique - une idée qui perdure encore, comme le confirme en 1992 l’ajout dans la Constitution française de la phrase: „La langue de la République est le français“ (cf. Blanchet 2019: 87). Dans son livre Discriminations: combattre la glottophobie, Blanchet souligne bien le caractère idéologique et discriminatoire de ce particularisme de la Constitution française qui „postule que le français est la seule langue possible (il n’y a pas d’autres langues qui seraient qualifiables de ‚non-officielle‘)“ et implique que la participation à la vie sociopolitique se fasse exclusivement en français (ibid.: 88). Cette domination linguistique va de pair avec une dépréciation de toute autre forme, dite ‚impure‘ ou ‚laide‘, du langage (les dialectes, patois, langues régionales, mais aussi les sociolectes et dans certains cas les langues étrangères) qui ne correspondrait pas „à la norme théorique“, au „français“ standardisé de la classe dominante. 11 La hiérarchisation des usages du français se manifeste notamment, d’après Blanchet, dans la référence très courante à l’idée de ‚maîtrise‘ de la langue qui „contribue d’ailleurs à faire croire, à tort, qu’on est ‚bilingue‘ seulement quand on ‚maîtrise parfaitement‘ les deux langues sous leurs formes standardisées comme si on en était ‚locuteur natif‘ […]“ (ibid.: 56). L’idéal de ‚maîtrise‘ de la langue n’est qu’une façon de s’assurer de la domination linguistique car „la seule façon de rendre une langue ‚maîtrisable‘, c’est de la réduire artificiellement à une petite partie, circonscrite et sélective, de ses formes et usages - en l’occurrence, pour le français, à un français standardisé, scolarisé, normalisé […]“ 134 DOI 10.2357/ ldm-2020-0052 Dossier (ibid.). 12 De cette hiérarchisation des langues découle pour les ‚transclasses‘ la nécessité d’un désapprentissage de la langue du milieu social et/ ou géographique d’origine, ainsi que la peur constante de se trahir par son langage ou son accent. C’est pourquoi, malgré la métaphore spatiale couramment employée, ‚l’ascension‘ sociale n’entraine pas nécessairement un gain et peut même représenter une perte, car elle n’est possible qu’à condition de se défaire de son langage et de son accent et, donc, de rompre en partie le lien avec ses origines sociales et géographiques. Avoir un accent implique un déplacement et met en évidence que le français standard de la classe dominante n’est pas „la langue maternelle“, et donc „qu’on ne fait pas vraiment partie de ce groupe“, ce qui provoque souvent un sentiment d’illégitimité, comme le rappelle Eribon à propos des émotions contradictoires que peuvent éprouver les personnes qui changent de classe: L’attrait, la fascination qu’exerce le milieu intellectuel […] n’empêche nullement qu’il provoque chez ceux qui y entrent par effraction, et sans en avoir possédé les codes depuis toujours, un profond sentiment de malaise, allant jusqu’au désarroi créé par l’incertitude de soi, qui débouche parfois sur de la colère, de la fureur, du dégout, de la haine à l’encontre de certains de ses occupants ‚naturels‘: quel transfuge de classe n’a pas vécu cela, à un moment ou à un autre, […] à savoir cette impression permanente d’être un étranger qui ne parle pas la langue de l’univers dans lequel il arrive, et qui comprend que, malgré tous les efforts passés, présents et à venir, il ne parviendra jamais à l’apprendre vraiment, à la maîtriser comme on maîtrise une langue maternelle […] (Eribon 2014: 214-215). Cependant, il est important de souligner que différents accents n’ont pas les mêmes connotations suivant les contextes, et conduisent ainsi à des degrés divers de stigmatisation ou de discrimination (ou de légitimation dans de plus rares cas). Ces discriminations sont également en lien étroit avec une mobilité géographique supposée ou réelle. Dans ce sens, la France est particulièrement „glottophobe“. 13 L’analyse du lien entre la langue et la classe sociale dans Retour à Reims s’applique donc également aux langues étrangères. Dans la dernière partie de cet article, je voudrais revenir sur la métaphore de la langue maternelle et de l’immigration utilisée pour décrire les difficultés rencontrées lors du transfert de classe. Il s’agira alors de proposer un retournement de cette image pour penser l’étranger/ ère comme figure de projection de ce désir de mobilité sociale, inspirant, de ce fait, une attitude de rejet et de haine de la part des classes sociales défavorisées. 4. De la mobilité de classe comme immigration de l’intérieur à la menace de l’immigration extérieure comme mobilité de classe illégitime L’analyse de Retour à Reims a permis de mettre en évidence le lien entre mobilité sociale, mobilité géographique et plurilinguisme. Ce lien n’est pas tout à fait nouveau, et a, d’ailleurs, souvent pris la forme d’une analogie avec l’expérience des migrant/ es, notamment chez Ernaux qui se voit comme une „immigrée de l’intérieur“ (Ernaux 2003: 35), métaphore reprise et développée par Jaquet: DOI 10.2357/ ldm-2020-0052 135 Dossier Le transclasse se voit assigné à une nouvelle résidence après sa mutation. Il vit un transport de classe et son voyage s’apparente à une forme de transhumance ou d’immigration. C’est pourquoi il apparait comme un transfuge ou plus exactement encore comme un immigré de l’intérieur, pour reprendre les mots d’Annie Ernaux. Cette formule que l’écrivaine utilise par analogie avec l’immigration extérieure pour penser sa trajectoire au sein de la société française restitue la double dimension de la distance, l’éloignement géographique et le dépaysement mental, l’exil intérieur que connait le transclasse, parce qu’il est séparé de ceux qui étaient autrefois les siens, tout en étant parfois à mille lieux de son nouveau milieu (Jaquet 2014: 143-144). Cette analogie, qui revient plusieurs fois dans l’analyse théorique du transfert de classe par Jaquet, sert à décrire le sentiment de déracinement provoqué par le transfert. En effet, l’expérience du transfert implique nécessairement une distance avec la classe d’origine comme avec la classe d’arrivée qui ne peut être abolie et condamne à subir „le sort des immigrés de retour au pays natal: il est un étranger dans son propre pays“ (ibid.: 152). C’est pourquoi les personnes ‚natives‘ de sa classe d’origine, conscientes de ce transfert, soupçonnent souvent le/ la ‚transclasse‘ de les avoir trahies et le/ la mettent au défi de prouver son appartenance à sa classe d’origine (ibid.: 153). Dans le même temps, la classe d’arrivée renvoie le/ la transclasse à ce sentiment d’imposture permanent provoqué par son rapport aux langues. Ainsi, l’analogie avec la figure de l’étranger/ ère, permet de saisir la position liminale dans laquelle se trouve le/ la ‚transclasse‘. Mais elle peut tout aussi bien se lire dans l’autre sens, car, inversement, elle implique également un rapprochement entre la situation de l’étranger/ ère et du/ de la ‚transclasse‘, et donc la possibilité de confondre ces deux positions dans leurs ressemblances: si les ‚transclasses‘ sont des ‚immigré/ es de l’intérieur‘, les étranger/ ères sont des ‚transclasses‘ potentiel/ les. Les deux ont en commun la mobilité géographique, la pluralité linguistique et, cela semblerait logique, aussi la prétention à une élévation sociale. C’est pourquoi, nombre de lois et d’instances sont là pour leur rappeler leur place, comme la nécessité de faire de la ‚maîtrise‘ du français une condition nécessaire au processus de ‚naturalisation‘, de même que le discours autour du concept d’assimilation des étranger/ ères qui repose principalement sur la négation de tout particularisme qui mettrait en péril l’indivisibilité de la nation. Ce renversement de l’analogie entre ‚transclasse‘ et ‚étranger/ ère‘ est plus intéressant encore au regard de l’analyse de l’évolution politique de la classe ouvrière proposée par Eribon dans Retour à Reims, en particulier en ce qui concerne le rôle du Front National et le „raidissement raciste“ de sa famille (Eribon 2011: 150). Eribon interprète ainsi le racisme de sa mère „et le mépris virulent qu’elle (fille d’un immigré! ) afficha toujours à l’égard des travailleurs immigrés en général, et des ‚Arabes‘ en particulier“ (ibid.: 151) comme une stratégie de défense, dans la mesure où le rabaissement d’un autre groupe social lui permet de se rassurer sur la valeur de sa propre classe. Le racisme grandissant de ses parents mène à une mobilité géographique: sa mère et son père déménagement en banlieue, à Muizon, pour ne plus vivre à proximité de „ce qu’ils percevaient comme une intrusion grosse de menaces 136 DOI 10.2357/ ldm-2020-0052 Dossier dans un monde qui leur avait appartenu et dont ils se sentaient peu à peu dépossédés“ (ibid.: 148). Cette mobilité est réinterprétée par ses parents comme le signe d’une modeste ascension sociale. Par ailleurs, Eribon remarque que le racisme est généralement d’autant plus grand quand l’identité de classe tend à disparaître (cf. ibid.: 152-153); car l’identification se fait dès lors plutôt avec la nation, le territoire national et la langue nationale qu’avec la classe sociale et conduit à substituer à l’opposition entre ‚nous‘ 14 , ‚ouvrier/ ères‘, ‚gens d’en bas‘ et les ‚bourgeois/ es‘ et ‚gens d’en haut‘ l’opposition ‚Français/ es‘ et ‚étranger/ ères‘, „les gens d’en haut étant perçus comme favorisant l’immigration et ceux d’en bas comme souffrant dans leur vie quotidienne de celle-ci, accusée d’être responsable de tous leurs maux“ (ibid.: 135). Eribon attribue ce changement d’identification aux médias et à la politique, en particuliers aux partis de gauche qui ont effacé „du discours politique de la gauche toute idée de groupes sociaux en conflit les uns avec les autres“ (ibid.: 136). On pourrait cependant argumenter ici que le conflit entre groupes sociaux n’a pas disparu mais s’est bien déplacé, le groupe des ‚étranger/ ères‘ ayant remplacé celui des dominant/ es aux yeux des classes dominées. Ces dernières reprochent aux ‚étranger/ ères‘ de vouloir échapper à leur classe sociale d’origine en immigrant en France, c’est-à-dire qu’elles voient dans leur mobilité géographique (réelle ou non pour les descendant/ es d’immigré/ es) l’expression d’un potentiel transfert de classe qui menacerait leurs propres droits: Dès lors, le groupe, dont la mobilisation comme horizon de perception de soi a été dissoute par la gauche, se reconstitue autour de cet autre principe, national cette fois: l’affirmation de soi comme occupant „légitime“ d’un territoire dont on se sent dépossédé et chassé - le quartier où l’on habite et qui remplace le lieu de travail et la condition sociale dans la définition de soi-même et de son rapport aux autres. Et, plus généralement, l’affirmation de soi comme maître et possesseur naturel d’un pays dont on revendique le bénéfice exclusif des droits qu’il accorde à ses citoyens. L’idée que d’ „autres“ puissent profiter de ces droits - le peu que l’on a - devient insupportable, dans la mesure où il apparaît qu’il faut les partager et donc voir diminuer la part qui revient à chacun. C’est une affirmation de soi qui s’opère contre ceux à qui l’on dénie toute appartenance légitime à la „Nation“ et à qui l’on aimerait refuser les droits qu’on tente de maintenir pour soi-même au moment où ils sont remis en cause par le Pouvoir et ceux qui parlent en son nom (ibid.: 153). J’avancerais donc l’hypothèse que le racisme des classes sociales défavorisées peut se comprendre comme une inversion de la métaphore de la mobilité de classe. En effet, si la mobilité de classe est liée à la mobilité géographique et aux connaissances linguistiques, il devient évident que les migrant/ es et réfugié/ es soient perçu/ es comme un danger pour les classes sociales moins aisées, justement car on leur attribue un potentiel, voire une volonté, de réaliser une ascension sociale souvent impossible pour les classes sociales défavorisées. En projetant leur désir de mobilité sociale sur les migrant/ es et réfugié/ es, les classes sociales défavorisées les perçoivent comme une menace pour leurs propres droits. Cette hypothèse se trouve en partie confirmée par le programme hautement xénophobe et glottophobe DOI 10.2357/ ldm-2020-0052 137 Dossier du Rassemblement National (anciennement FN ), les théories du ‚grand remplacement‘ alimentées par les sphères d’extrême droite et, conjointement, par la reconnaissance ambiguë des capacités linguistiques des migrant/ es, 15 notamment en France. Conclusion Cet article n’avait pas pour prétention de renouveler la recherche en sociolinguistique ni de présenter une analyse approfondie et fondamentalement nouvelle par rapport à celle proposée par Eribon des mouvances d’extrême droite. Il s’agissait bien plus d’inscrire cette réflexion dans la lignée des „relectures“ 16 de ses livres et donc d’entrer en discussion avec ses textes pour en montrer à la fois la richesse mais aussi les limites potentielles. Les deux conférences publiques d’Eribon à Vienne et Iéna ont constitué le point de départ de cette relecture en mettant au jour la nécessité de „penser avec un accent“, 17 c’est-à-dire de prendre conscience de la manière dont la langue peut rendre compte de manière subtile des effets de déterminations sociales dans le parcours des ‚transclasses‘ et en particulier dans celui d’Eribon. Cet aspect est d’autant plus important qu’il s’agit d’un récit autobiographique, car comme l’écrit Derrida: „De tous les points de vue, qui ne sont pas seulement grammaticaux, logiques, philosophiques, on sait bien que le je de l’anamnèse dite autobiographique, le je-me du je me rappelle se produit et se profère différemment selon les langues. Il ne les précède jamais, il n’est donc pas indépendant de la langue en général“, un aspect trop souvent oublié (Derrida 1996: 54). Enfin, la réflexion sur les langues et la mobilité a permis de renverser l’analogie couramment établie entre l’expérience des ‚transclasses‘ et celle des ‚étranger/ ères‘ et de proposer un nouveau regard sur les ressorts possibles du racisme des classes défavorisées. Ce renversement montre également la pertinence d’une approche intersectionnelle, qui fait parfois défaut dans Retour à Reims, 18 notamment en ce qui concerne le rapport aux langues dont le caractère discriminatoire et glottophobique est rarement perçu (Blanchet 2019: 25). Blanchet, Philippe, Discriminations: combattre la glottophobie, 2 e édition, Limoges, Lambert- Lucas, 2019. Bradotti, Rosi, „Thinking with an accent“, in: Dominique Fougeyrollas-Schwebel / Florence Rochefort (ed.), Penser avec Françoise Collin. Le féminisme et l’exercice de la liberté, Donnemarie-Dontilly, iXe, 2016, 597-626. Bourdieu, Pierre, Ce que parler veut dire, Paris, Fayard, 1982. Derrida, Jacques, Le monolinguisme de l’autre, Paris, Galilée, 1996. Duchêne, Alexandre, „Néolibéralisme, inégalités sociales et plurilinguisme: l’exploitation des ressources langagières et des locuteurs“, in: Langage et société, 136, 2011, 81-108. Duchêne, Alexandre / Moyer, Melissa / Roberts, Celia (ed.), Language, Migration and Social Inequalities. A Critical Sociolinguistic Perspective on Institutions and Work, Blue Ridge Summit, Multilingual Matters, 2013. Eribon, Didier, Retour à Reims, Paris, Flammarion, 2010. 138 DOI 10.2357/ ldm-2020-0052 Dossier —, La société comme verdict, Paris, Flammarion, 2014. —, Rückkehr nach Reims, trad. Tobias Haberkorn, Berlin, Suhrkamp, 2016. —, Gesellschaft als Urteil: Klassen, Identitäten, Wege, trad. Tobias Haberkorn, Berlin, Suhrkamp, 2017. Ernaux, Annie, La Honte, Paris, Gallimard, 1997. —, L’écriture comme un couteau, Paris, Stock, 2003. Jaquet, Chantal, Les transclasses, ou la non-reproduction, Paris, PUF, 2014. Kleinau, Elke, „Dieses verstörende Gefühl, an einem Ort zugleich zu Hause und fremd zu sein“, in: Karolin Kalmbach / Elke Kleinau / Susanne Völker (ed.), Eribon revisited - Perspektiven der Gender und Queer Studies, 2 e édition, Wiesbaden, Springer, 2020, 31-45. Thompson, Vanessa E., „Von der Rückkehr nach Reims zur Vielfalt der Kämpfe“, in: Karolin Kalmbach / Elke Kleinau / Susanne Völker (ed.), Eribon revisited - Perspektiven der Gender und Queer Studies, 2 e édition, Wiesbaden, Springer, 2020, 125-141. Wietschorke, Jens, „‚Impostors in the Ivory Tower‘. Zur wissenschaftlichen Performanz von Bildungsaufsteiger/ innen“, in: Thomas Etzemüller (ed.), Der Auftritt. Performanz in der Wissenschaft, Bielefeld, transcript, 2019, 75-92. 1 La conférence a eu lieu quelques mois après la parution de la traduction allemande de La société comme verdict par Tobias Haberkorn. 2 Par exemple lors du workshop „Queerfeministische Praktiken, Theorien und das soziale Feld“ du groupe de recherche Gender / Queer Studies und Medienwissenschaft qui s’est tenu à l’université de la Bauhaus de Weimar le 5 mai 2017, soit un an après la parution de la traduction allemande de Retour à Reims. 3 À ma connaissance, aucune personne intervenue n’était de langue maternelle anglaise, ni parmi les modérateurs et modératrices ni au sein du public. 4 Dans cet article j’utilise le terme de ‚transclasse‘ proposé par Chantal Jaquet dans Les transclasses ou la non-reproduction pour décrire les personnes qui réussissent à changer de classe et donc à se soustraire à la reproduction sociale. 5 Cf. par exemple Wietschorke 2019. 6 D’après Eribon, IPES signifie „Institut pédagogique de l’enseignement secondaire“ (Eribon 2011: 191). 7 Eribon rend son prix après l’annonce de l’attribution du Brudner Prize 2011 à David Halperin qu’il accuse d’avoir plagié son livre Une morale du minoritaire paru chez Fayard en 2001. 8 Il serait également intéressant de se pencher sur l’ambiguïté du plurilinguisme, souvent obligatoire dans le monde académique, et à son rapport à la mobilité de classe. 9 Cette omission dans Retour à Reims est d’autant plus dommage que, comme le souligne Wietschorke, l’expression orale est un aspect central de la performance académique: „Unbestreitbar ist die gesprochene Sprache der zentrale Aspekt wissenschaftlicher Performanz. Ohne den sprachlichen Vortrag ist der wissenschaftliche Auftritt nicht denkbar; in der Beherrschung der wissenschaftlichen Terminologie, einer souveränen Vortragsweise und einer möglichst glasklaren Hochsprache zeigt sich, wer einer akademischen Karriere gewachsen sein könnte und wer eher nicht“ (Wietschorke 2019: 80). 10 Cf. la description du parcours de John Edgar Wideman par Jaquet (cf. Jaquet 2014: 92). 11 „C’est donc seulement lorsque apparaissent les usages et les fonctions inédits qu’implique la constitution de la nation, groupe tout à fait abstrait et fondé sur le droit, que deviennent indispensables la langue standard, impersonnelle et anonyme comme les usages officiels DOI 10.2357/ ldm-2020-0052 139 Dossier qu’elle doit servir, et, du même coup, le travail de normalisation des produits des habitus linguistiques“ (Bourdieu 1982: 31). 12 Une idée déjà développée en détail par Derrida dans Le monolinguisme de l’autre, cf. Derrida 1996. 13 Blanchet définit la glottophobie comme: „Le mépris, la haine, l’agression, le rejet, l’exclusion, de personnes, discrimination négative effectivement ou prétendument fondés sur le fait de considérer incorrectes, inférieures, mauvaises certaines formes linguistiques (perçues comme des langues, des dialectes ou des usages de langues) usitées par ces personnes, en général en focalisant sur les formes linguistiques (et sans toujours avoir pleinement conscience de l’ampleur des effets produits sur les personnes)“ (Blanchet 2019: 44). 14 Ce que souligne déjà Ernaux dans La Honte: „Bretons, Marseillais ou Espagnols, tous ceux qui ne parlent pas ‚comme nous‘ font partie, à des degrés divers, des étrangers“ (Ernaux 1997: 45). 15 Cf. notamment les travaux de recherche d’Alexandre Duchêne sur le rapport entre compétences linguistiques plurilingues et inégalités sociales (cf. Duchêne 2011, Duchêne/ Moyer/ Roberts 2013). 16 Cf. notamment la publication interdisciplinaire Eribon revisited - Perspektiven der Gender und Queer Studies, (Kalmbach/ Kleinau/ Völker 2020). 17 J’utilise cette expression en référence à Rosi Braidotti qui fait le lien entre l’accent belge et la position marginale (plus ou moins revendiquée) de Françoise Collin dans le paysage intellectuel féministe français et international. Braidotti voit justement dans cet accent la condition même de cette singularité de pensée et d’écriture, dans la mesure où sa marginalisation permet d’échapper à l’hégémonie de la pensée imposée par le français standard. Braidotti rappelle que Françoise Collin se décrivait comme „l’immigrée blanche“ pour signifier la „minor variation within a major variation“ de son langage, l’accent belge par rapport au français (parisien) standard (cf. Braidotti 2016: 610). 18 C’est un aspect souligné à plusieurs endroits dans Eribon revisited - Perspektiven der Gender und Queer Studies, en particulier dans les articles respectifs de Elke Kleinau et de Vanessa E. Thompson qui reprochent à Eribon de ne pas s’intéresser assez au passé colonial de la France dans son analyse du racisme, mais aussi dans la façon dont il a luimême réussi son transfert social, et de mettre quasiment au même plan son expérience de ‚transclasse‘ et d’homosexuel avec l’expérience de Baldwin et Wideman (cf. Kleinau 2020: 36, Thompson 2020: 131). 140 DOI 10.2357/ ldm-2020-0053 Dossier Traduire, lire et étudier Retour à Reims dans les pays germanophones Table ronde avec Bernard Banoun, Tobias Haberkorn, Yasmin Hoffmann et Christoph Reinprecht Le vendredi 20 novembre 2020 s’est tenue une table ronde en ligne autour de la réception de Didier Eribon dans les pays germanophones, organisée par Elisabeth Kargl et Bénédicte Terrisse (Université de Nantes). Étaient réunis - Tobias Haberkorn, traducteur de Retour à Reims et de La Société comme verdict. Auteur d’une thèse en littérature comparée à l’ EHESS et à la FU Berlin en cotutelle, publiée sous le titre Das Problem des Zuviel: Welt in Sprache bei Rabelais und Montaigne chez lmverlag Berlin. - Yasmin Hoffmann, traductrice littéraire, en premier lieu d’Elfriede Jelinek, et enseignante à l’université Paul Valéry Montpellier. Elle a encadré pendant quelques années le programme Goldschmidt où elle a fait la connaissance de Tobias Haberkorn. - Christoph Reinprecht, professeur de sociologie à l’université de Vienne. Il a travaillé sur Retour à Reims avec ses étudiant.e.s. et dans le cadre de ses recherches sur les questions des inégalités. La table ronde était animée par Bernard Banoun, professeur de littérature allemande contemporaine, il avait invité Didier Eribon lors d’un colloque sur les masculinités (2012). Traducteur littéraire entre autres de Thomas Jonigk, lui-même dramaturge et auteur d’une adaptation théâtrale de Retour à Reims. Nous en livrons ici une transcription revue et corrigée. Bernard Banoun (BB): L’intitulé du colloque „Transfuge, transfert, traduction: la réception de Didier Eribon dans les pays germanophones“ est plus large que celui de la table ronde, consacrée à un texte en particulier, Retour à Reims / Rückkehr nach Reims: un auteur français, exporté en Allemagne, connaît, par le fait même de ce colloque, un retour en France, il s’agit donc d’un transfert aller et retour. Nous nous concentrerons aujourd’hui sur le déplacement France ⟶ Allemagne / pays germanophones. La table ronde porte sur la traduction de Retour à Reims en allemand, son contexte et ses conséquences. Il s’agit donc de traduction, Übersetzung, au sens propre: dans une autre langue, vers l’allemand. Mais aussi de traduction au sens culturel, c’est-à-dire qu’un texte passe, pas seulement sur le plan verbal, d’une culture à une autre, d’un espace dans un autre, de l’espace français vers l’espace germanophone: le texte lui-même aura un effet sur la sphère d’arrivée et sera peutêtre aussi transformé par elle. Le titre de Didier Eribon le plus fortement traduit et reçu dans un très grand nombre de langues est Retour à Reims, texte de 2009, DOI 10.2357/ ldm-2020-0053 141 Dossier traduit en allemand en 2016 par Tobias Haberkorn. C’est un texte en partie autobiographique, en partie une analyse de soi et en même temps une analyse politique. L’auteur vient d’un espace situé géographiquement près de Reims (donc: la province et périphérie de la province) et d’une classe sociale défavorisée. Le sujet du livre est ainsi le changement d’espace et le changement de classe de ce personnage ayant quitté son milieu d’origine pour Paris où il fait des études. La composante minoritaire est multiple: le personnage est gay et entre dans un milieu intellectuel français totalement étranger à sa classe d’origine. Un thème important du livre est celui de la honte, là encore à plusieurs niveaux: honte de l’origine et honte de ne pas avoir fréquenté sa famille pendant des années. Commençons par le contexte de la traduction: quand et comment la traduction at-elle vu le jour et a-t-elle été publiée? Tobias Haberkorn (TH): La traduction allemande a paru avec sept ans de retard par rapport au texte français. En 2009, quand l’essai est paru en France, plusieurs éditeurs allemands ont un exposé sur leur table mais ne jugent pas le livre suffisamment intéressant pour le traduire. Je ne savais rien de tout cela lorsqu’en 2014 je suis tombé sur un texte à propos de la traduction anglaise de Retour à Reims, qui venait de paraître chez un éditeur américain. Ça m’a intéressé et j’ai donc acheté ce livre. Ce n’est qu’à ce moment-là que j’ai fait connaissance avec ce texte, alors qu’il était bien connu dans la discussion française. Dès les vingt ou trente premières pages, j’ai eu envie d’essayer de le traduire, d’une part, parce que j’envisageais à l’époque de devenir traducteur moi-même, et aussi parce qu’il me semblait qu’il était urgent de traduire ce texte, pour ses qualités littéraires, mais aussi pour les thématiques abordées, notamment la question de la classe sociale et du transfuge de classe, qui me semblaient être pratiquement absentes de la discussion allemande à ce moment-là. J’ai donc commencé à faire un premier ‚exposé‘ que j’ai envoyé à un éditeur, et en parallèle j’ai candidaté au programme Goldschmidt où j’ai été accepté. J’ai participé à ce programme en travaillant sur l’exposé du texte et en essayant d’approcher différents éditeurs, et notamment Suhrkamp, qui s’est laissé convaincre. La traduction a pris le temps qu’il fallait, le texte est paru en mai 2016. Yasmin Hoffmann (YH): C’est la troisième fois que je me confronte à ce texte d’Eribon. Lorsque Tobias a présenté ce texte en 2015 lors du programme Goldschmidt, la question première qui s’est posée à nous a été celle du genre, dans tous les sens du terme, puisque le programme Goldschmidt s’adresse à de jeunes traducteurs littéraires et de surcroît de jeunes auteurs qui ont besoin de soutien. Face à ce texte, nous nous sommes demandé ce que c’était: est-ce de la théorie, est-ce une biographie, est-ce une autobiographie sociologique? En dernière instance, la question a été celle de la valeur littéraire de ce texte. Mérite-t-il d’être pris dans un programme de traduction littéraire? La question a été très vite tranchée, nous avons tous convenu qu’il s’agissait d’un texte qui avait une valeur littéraire certaine. Ça a été mon premier contact avec le texte d’Eribon. Et ensuite je n’ai pas eu à encadrer le travail de Tobias, étant donné qu’il a travaillé avec Frank Heibert, à Berlin. Moi, je 142 DOI 10.2357/ ldm-2020-0053 Dossier m’occupais plus des boursiers qui traduisaient de l’allemand vers le français. Néanmoins, à la fin de l’atelier, nous avons fait une petite lecture scénique de chacun des textes. La question de savoir dans quelle mesure ce texte appelle une autre traduction, au sens d’un autre medium, m’est apparue à ce moment-là. Ce qui fait que je n’ai pas du tout été étonnée que ce récit se retrouve sur des planches. Personne ne pouvait prévoir, évidemment, ce succès. 1 Une question à Tobias, très directe. Est-ce que, à partir du moment où votre traduction est passée au théâtre, a été adaptée, réécrite par Thomas Ostermeier, estce que vous avez été associé, êtes-vous associé en termes de droits d’auteurs, ou est-ce que vous êtes dessaisi de votre traduction? TH: Dans le contrat qu’un traducteur signe avec un éditeur allemand, ou en tout cas celui que j’ai signé, il y a une passation de tous les droits d’adaptation pour tous les formats (télévision, théâtre) à l’éditeur. J’ai un pourcentage sur ce que l’éditeur perçoit de la Schaubühne ou d’autres théâtres qui veulent adapter le texte. J’ai été étonné du peu d’argent que devait donc toucher l’éditeur Suhrkamp pour ces représentations-là. Cela est compensé par un pourcentage que j’ai heureusement - un tout petit - sur les ventes (Didier Eribon en a un lui aussi, un peu plus grand que moi), qui sont au-delà de 100 000 exemplaires. Ce sont les pratiques normales du métier. Un autre point a été moins habituel: Il a fallu que je sois très insistant pour que mon nom soit mentionné sur le site internet de la Schaubühne - pour signaler qu’il s’agissait bien de ma traduction. Au départ, le théâtre refusait de le mentionner en disant qu’il y avait tant de personnes qui avaient contribué à la version jouée sur scène - ce qui est vrai, ce n’est pas uniquement le texte du livre qui est dit sur la scène. Mais quand j’ai vu ensuite que plus de la moitié de la représentation théâtrale consistait en une lecture du texte, j’ai de nouveau insisté et obtenu que mon nom soit mentionné. Cela dit, une version audio du livre vient de sortir en allemand, lue par Thomas Ostermeier, et tout le marketing de cet audio-livre omet qu’il y a un traducteur. Cela suggère presque que Ostermeier a fait sa propre traduction, alors qu’il lit simplement la mienne. C’est non seulement fâcheux, au point qu’on peut se demander s’il n’y a pas effectivement une volonté de me dessaisir de la traduction. C’est aussi illégal. Les lois sur la propriété intellectuelle stipulent qu’une traduction est une création et que le traducteur doit être mentionné avec une œuvre au même titre que son auteur. BB: Christoph Reinprecht, en tant que sociologue, avec un accès théorique à ce texte, comment le voyez-vous? Comme texte littéraire ou comme texte théorique? Christoph Reinprecht (CR): On a l’impression que c’est un texte entre les deux: ni un texte littéraire, ni un texte scientifique classique, du point de vue germanique, en tout cas. L’univers des sciences sociales, la manière d’écrire des textes dans les pays germanophones, diffère un peu de la manière française. J’ai découvert le livre en 2009, alors que j’étais chercheur invité à l’université de Paris 8, et nous avons beaucoup discuté du texte. En France, le texte m’a semblé beaucoup plus cohérent qu’en Allemagne ou en Autriche. C’est seulement en lisant la traduction allemande DDossier qu’une sorte d’inconfort s’est installé (on dit „irritation“ en allemand), que la question du genre littéraire du texte s’est posée pour moi. Avec mes étudiants, nous avons découvert à la fin d’un semestre, après avoir beaucoup travaillé sur ce texte et sur la langue, que la question était finalement „qui parle? “. Est-ce un personnage littéraire, est-ce l’auteur, Didier Eribon, au sens d’un individu, un intellectuel, ou est-ce une position scientifique? Le texte, avec sa manière de dessiner des méandres entre le littéraire, le biographique, l’autobiographique et le scientifique, l’analytique, pose cette question. 144 DOI 10.2357/ ldm-2020-0053 Dossier construit souvent d’une manière très différente. C’est notamment la syntaxe qui m’a posé des difficultés intéressantes. Un troisième point, qui a peut-être été un peu moins remarqué dans la discussion autour du livre en allemand, est que Eribon est aussi un auteur polémique qui peut s’attaquer à des adversaires parfois nommés et cités; mais il peut aussi implicitement faire allusion à certains courants de pensée présents dans la scène intellectuelle et médiatique française qui ne sont pas facilement identifiables pour un public allemand. Je pense par exemple à une certaine vulgate psychanalytique contre laquelle Eribon s’insurge régulièrement. Il a fallu trouver un moyen de rendre audibles en allemand ces débats implicites dans le texte. YH: J’aimerais reprendre deux notions lancées par Christoph Reinprecht et mentionnées par Tobias Haberkorn. Il y a d’abord la notion d’‚irritation‘, à propos de ‚qui parle? ‘, et l’autre aspect: M. Reinprecht a dit une chose importante: le texte ne se lit pas de la même façon en France qu’en Allemagne. J’y ai repensé en visionnant une captation du spectacle de la Schaubühne avec en fond un morceau de film. Cette sociologie de la France périurbaine, rattachée aux aspirations de la classe ouvrière, au modèle de l’ascension sociale, je connais ça du côté français. Je ne vis pas cela en Allemagne. Quand je prends le TGV , que je vais à Reims ou à Amiens, je traverse cette France. Je la connais. Le contexte, c’est ça aussi. On peut peut-être déjà lancer la question à laquelle on répondra seulement tout à l’heure: Tobias a mentionné la psychanalyse, la réflexion politique, le retour sur le marxisme. Pourquoi ce texte at-il eu une autre fonction en Allemagne? En Allemagne, ce texte, j’ai l’impression qu’il remplit un vide. Il prend la place de quelque chose qui n’existe pas. Ça tient à quoi, au statut du texte? à l’évolution politique et sociale très différente entre la France et l’Allemagne, concernant la classe ouvrière? BB: Cela rejoint la question du moment de réception. Dans quelle mesure l’année 2016 était-elle une sorte de kairos, de moment plus brûlant, plus pertinent pour la réception de cette traduction en Allemagne? CR: C’est une question très intéressante. La France et l’Allemagne sont des pays qui se connaissent bien et en même temps, il y a toujours des images sur l’autre qui sont très fortes, qui jouent un très grand rôle. Dans le contexte de l’université, trois éléments permettent d’expliquer que le texte a eu un écho très fort parmi les jeunes intellectuel.le.s et les médias, et pas tellement parmi les collègues établis des sciences sociales à l’université. Ces derniers étaient assez réservés sur ce texte. Ils trouvaient qu’il manquait une vraie terminologie sociologique, qu’il manquait Weber etc. Dans les sciences sociales, il est inapproprié, presque interdit, dans nos pays, de parler de soi-même, d’utiliser le ‚je‘. L’idée qu’un auteur a une biographie et que cette biographie joue un rôle, ou qu’on puisse écrire un développement narratif en mêlant une analyse relevant des sciences sociales est une chose très compliquée chez nous. Que quelqu’un écrive sur soi-même et en même temps propose une analyse de la société a eu un effet libérateur. D’autre part, c’est vrai qu’il y a un vide: c’est la classe sociale. La notion de classe sociale a complètement disparu depuis vingt ou trente ans, malgré un certain retour il y a une dizaine d’années. Cependant, DOI 10.2357/ ldm-2020-0053 145 Dossier dans les textes de sciences sociales, le lien avec sa propre vie n’était jamais fait. Plus personne ne posait la question „d’où je viens“, en liant la question de l’appartenance sociale au ‚je‘. Ici, une personne fait une analyse de la société contemporaine qui est liée à lui-même. Les gens se sont dit alors: c’est vrai, la classe sociale joue un rôle. C’est un sentiment qui était beaucoup plus fort chez les jeunes que chez les collègues ‚établis‘. Pour les universitaires en sciences sociales, cette notion de classe n’était pas claire dans le livre. Enfin, 2016, c’est un autre moment que 2009. 2016, c’est l’année après ce qu’on a appelé la ‚crise des réfugiés‘. C’est un contexte de crise, où beaucoup de monde, beaucoup de ces lecteurs se sont engagés, ont essayé de contribuer à la solution de cette crise. Le ‚je‘ joue un rôle. Même si la suite a été beaucoup plus compliquée. En France, en 2009, c’était plutôt le contexte Annie Ernaux, avec lequel il était sans cesse comparé. C’était la référence en matière d’écriture de biographie sociologique, non fictive. C’était quelque chose qui n’existait pas en Allemagne ou en Autriche. Chez Elfriede Jelinek ou Thomas Bernhard, il y a beaucoup d’éléments biographiques mais ils sont traités autrement. Ce sont quelques-unes des raisons qui expliquent le succès étonnant de ce livre outre-Rhin. BB: À ce propos, je voudrais mentionner un compte rendu du livre par Dirck Linck dans la revue Merkur en 2016 intitulé „Die Politisierung der Scham“, qui évoque cet aspect de la ‚classe‘ et la question de la disparition des classes sociales, question peut-être éclairée par le livre dans le contexte allemand, mais qui est aussi une donnée qui existe dans la vie politique et sociale française. La social-démocratie aurait remplacé la question des classes par des questions culturelles ou d’identité, reléguant au second plan la classe comme appartenance collective. On sait les conséquences que cela peut avoir jusqu’à nos jours. TH: Il est évident que la société allemande a nié la question des classe sociales encore plus fortement que la société française, et Rückkehr nach Reims a été un élément majeur dans la remise en question de ces faits sociaux. La masse des livres, autobiographiques ou purement sociologiques, qui ont paru sur cette thématique depuis quelques années en témoigne. Quant au succès étonnant du livre en Allemagne, j’ajouterais une remarque sur la technique littéraire de Didier Eribon. Je pense que le mode de description et d’analyse que Eribon a trouvé pour rendre compte de son propre parcours social - de son histoire de transfuge de classe - confère à son livre un caractère hautement transposable. Il permet une lecture identificatoire même pour des personnes dont l’expérience personnelle peut être tout autre. Beaucoup de gens m’ont dit avoir été très touchés par le livre bien qu’ils ne soient ni homosexuels, ni venant d’un milieu ouvrier, ni d’un milieu socialement défavorisé. Ils parvenaient à retrouver une partie de leur propre biographie dans les luttes que Eribon met au jour dans Retour à Reims. La quête de la subjectivation, qui est l’histoire racontée dans Retour à Reims, cette quête concerne tout le monde, quelles que soient les circonstances. Tout le monde se heurte à des normes sexuelles, des normes sociétales, des normes imposées par la famille. Dans Retour à Reims, Eribon a trouvé deux langages pour écrire cela: l’un est extrêmement 146 DOI 10.2357/ ldm-2020-0053 Dossier concret, c’est le récit de ses expériences vécues. Mais, imbriqué dans ce récit concret, il y a le langage théorique et analytique. Eribon livre sa vie, c’est-à-dire une expérience particulière, et en même temps une généralisation de cette vie qui situe son cas individuel sur le plan des identités collectives, sociales. Cette généralisation, qui ajoute un niveau d’abstraction, rend lisibles et transposables les mécanismes qu’il décrit pour quelqu’un qui a fait peut-être une autre expérience mais dont les difficultés se situent néanmoins dans la même logique sociale. Je pense que c’est justement le grand degré d’abstraction du livre qui facilite une lecture identificatoire, car les mécanismes sociaux se répètent dans des circonstances diverses. Cela ne veut pas dire que le parcours de Didier Eribon est équivalent à celui d’un enfant homosexuel issu d’un milieu aisé, ni à celui d’un immigré ou d’une femme estallemande. Mais ça explique le succès du livre dans beaucoup de milieux. Beaucoup d’Allemands de l’Est se sont retrouvés dans les difficultés que Eribon décrit, devant changer leur habitus afin de s’adapter au monde des gens bien comme il faut. Cela vaut également pour un grand nombre d’Allemands issus d’un monde rural et traditionnel qui, comme moi-même, se sont installés à Berlin ces vingt ou trente dernières années. Ils font partie d’une vague de migration géographique et sociale qui a reconfiguré l’ordre social du pays. Je pense que cette reconfiguration permet d’expliquer à la fois le vide autour des questions de classe et la puissance avec laquelle ces questions reviennent depuis quelques années. Pour qu’une théorie des classes sociales aussi différenciée que celle de La distinction de Bourdieu puisse devenir une grille de lecture universelle, il faut qu’il y ait un centre, il faut savoir quelle est la bourgeoisie à laquelle tout le monde aspire ou que tout le monde déteste et qui en tout cas domine l’ordre symbolique. En Allemagne, du fait de la décentralisation du pays, avec sa structure régionale, la bourgeoisie était pendant longtemps régionalisée. Cela ne veut pas dire qu’il n’y avait pas de mécanismes d’exclusion sociale, mais ceux-ci n’étaient pas homogènes dans l’ensemble du pays. Avec l’émergence de Berlin comme nouvelle capitale, une capitale qui était symboliquement vide et où les règles de la domination sociale devaient être renégociées, toute une série de phénomènes d’observation, de distinction, de tentatives pour se situer dans le rang social ont acquis une nouvelle virulence. Retour à Reims décrit quelque chose qu’on n’aurait pas su nommer auparavant parce qu’on disposait de peu de modèles d’analyse dans l’espace germanophone. YH: Je me suis longuement posé la question suivante: dans ce transfert, quelle est la fenêtre par laquelle en Allemagne on regarde ce texte? Par quel trou de serrure? Par quel judas on regarde? Qu’est-ce qu’on exclut quand on regarde à travers un judas? Dans ce dispositif optique par lequel on regarde l’autre, il y a bien sûr la notion de traîtrise et de trahison. Dans cette narration sociologique, la notion de traîtrise, dans tous les sens du terme, est au centre. La classe ouvrière s’est sentie trahie. Elle a été trahie et pas seulement par la gauche. Elle a été trahie par les promesses d’une industrie délocalisée, par l’externalisation du prolétariat. Le pauvre bougre est resté, mais le prolétaire, il est en Asie. Il y a tous ces problèmes-là. Ce n’est que maintenant qu’on peut faire une critique du marxisme. Est-ce qu’Eribon fait la critique DOI 10.2357/ ldm-2020-0053 147 Dossier du marxisme? Il amorce une réflexion qui peut avoir lieu aujourd’hui. Traître, transfuge, il n’y a pas que le transfuge de classe. BB: Le question de la porte, la fenêtre, par lesquelles on voit, posée par Yasmin Hoffmann nous conduit à évoquer la réception théâtrale. Je dirai quelques mots de cette réception française et allemande, avec un décalage de sept ans. Il est manifeste que la réception allemande est plus forte, plus vaste pour ce qui est des chiffres de vente en Allemagne qu’en France. À cause de l’époque, mais peut-être aussi à cause de l’espace médiatique et de la personnalité de l’auteur. La chambre d’échos médiatiques est plus vaste en Allemagne, avec une pluralité de réceptions dans les journaux. Il y a aussi en Allemagne un effet de nouveauté, ainsi que l’absence de surdétermination qui existait en revanche en France à cause de Bourdieu. Notamment, dans les années 2009, il y avait en France une forme de marginalisation de Bourdieu, le texte n’a pas été aussi fortement reçu, et aussi de marginalisation d’Eribon lui-même, pour diverses raisons dans divers contextes. Ce passif n’existait pas dans l’espace germanophone. Pour donner un exemple: Ulrich Peltzer, un auteur très politique, voyait en Eribon l’intellectuel français et l’écrivain aussi faisant écho à ses préoccupations personnelles. La réception est donc au moins triple: médiatique, intellectuelle et artistique. Le livre n’est pas reçu en réaction à la réception théâtrale, il y a eu d’abord le livre, puis le théâtre, alors qu’en France, le texte serait revenu par le théâtre, entraînant une nouvelle réception. Il est assez fréquent que la scène soit un lieu d’exposition. Il y a eu plusieurs mises en scène théâtrales: la plus célèbre est celle de Thomas Ostermeier à la Schaubühne. En début d’année [2020] est donnée une mise en scène de Thomas Jonigk à Cologne, totalement différente. On relève dans toutes ces mises en scène des effets de mise à distance: la volonté de traduire sur la scène le caractère hybride ou non-homogène du texte de départ, son caractère narratif, biographique, et la distance réflexive par rapport à ces données. Il n’y a pas d’adaptation, en tout cas à ma connaissance, qui soit un simple récit, une représentation de l’enfance et de la jeunesse d’Eribon. Nicole Kandioler (question du public): En enseignant le texte de Eribon à la Bauhaus Universität de Weimar, on a été confronté au besoin parmi les enseignants et les étudiants de faire un coming-out de leurs origines. Est-ce que vous avez été confronté à ce besoin de parler de ses propres origines? Un besoin que le ‚je‘ de Eribon suscite. CR: Le travail sur le texte a déclenché en effet une sorte d’autoréflexion. Les étudiants ont eu besoin de parler d’eux-mêmes mais aussi de parler de ces expériences pour lesquelles on n’a pas les mots habituellement dans les séminaires à l’université, par exemple la question de la violence des rapports de classe, qui est au centre du livre d’Eribon. La violence, soit c’est quelque chose de très abstrait, on parle de violence des camps de concentration, on parle de la violence de la police, mais pas de la violence à laquelle on peut être confronté soi-même dans son parcours personnel; ou la question de la trahison, qui est très importante, ou la honte. L’approche intersectionnelle a ouvert une porte: Retour à Reims ne racontait pas seulement l’histoire 148 DOI 10.2357/ ldm-2020-0053 Dossier d’une personne d’origine ouvrière mais aussi la biographie d’une personne qui a été poussée par son orientation sexuelle vers la grande ville, ce qui lui a donné la capacité de s’éloigner de sa famille. Eribon, c’est aussi quelqu’un qui nous rappelle que la famille n’est pas forcément un cadre bienfaisant ou bienveillant. J’ai proposé aux étudiants de faire un travail auto-sociologique ou une auto-socio-analyse pour valider le séminaire, aussi un peu dans la tradition de Bourdieu. Beaucoup d’étudiant.e.s se sont saisi.e.s de cette occasion. La plupart de leurs récits avait un niveau de réflexivité impressionnant. Le défi était bien d’éviter de tomber dans un récit très privé, très subjectif ou au contraire d’écrire quelque chose de très abstrait. Il fallait rester d’une certaine manière dans le point de vue sociologique: devenir soi-même objet de l’analyse sociologique et réfléchir à son propre positionnement dans la société. C’est une chose que l’on connaît bien de la sociologie féministe, mais qui est resté en-dehors des séminaires plus généraux sur les inégalités sociales. BB: Christoph Reinprecht, dans quel type d’enseignement en sociologie avez-vous travaillé avec les étudiant.e.s sur Retour à Reims? CR: Le contexte dans lequel j’ai développé ce séminaire était d’essayer de déconstruire la notion de ‚Herkunft‘, de l’origine sociale. Pourquoi? Parce que dans le contexte des pays d’immigration que nous sommes, toutes les questions d’immigration et d’intégration sont liées à la question de l’‚origine‘ (‚Herkunft‘). Il y a beaucoup de livres sur la question, notamment le très beau livre de Saša Stanišić (la traduction française par Françoise Toraille est parue en 2021 sous le titre Origines chez Stock). Qu’est-ce que l’origine? Ce qui était frappant dans ce débat avec les étudiants, c’est que finalement l’origine a une dimension réelle, biographique, mais est aussi socialement construite. Cette interaction entre le réel - c’est une chose à laquelle on revient toujours, on est tenu par ça - et d’un autre côté la construction sociale, le rapport de force dans notre société a été une question importante dans le débat. Les étudiants ont remarqué que ce n’était pas seulement une question subjective, biographique, mais que c’était aussi une question de construction sociale et que les deux éléments sont toujours en interaction. Chez Eribon, ce retour, ce n’est pas seulement un retour aux origines, c’est bien sûr un retour à certaines images ou certaines constructions. TH: On a parlé d’‚intersectionnalité‘, un mot qui n’est pas utilisé dans le livre par Didier Eribon, même si l’on reconnaît tout de suite qu’il s’agit là d’un cas exemplaire de deux différents aspects minoritaires, social et sexuel. Je suis très intéressé par cette question du Bekenntniszwang: le texte contraint les lecteurs à se déclarer. C’est tellement dérangeant de lire ce texte qu’on se sent tout de suite obligé de dire d’où on vient, comment on se situe soi-même sur le plan social et sur le plan des origines. Je pense qu’on peut observer dans la première réception médiatique dans le ‚Feuilleton‘ allemand une tendance à catégoriser ce texte dans un débat sur les défauts de notre parti de centre-gauche au pouvoir, c’est à dire du SPD . En effet, Eribon présente la gauche au pouvoir, celle du Parti socialiste en France, comme un parti politique qui trahit les classes populaires. Si l’on s’arrête à ce niveau de lecture, DOI 10.2357/ ldm-2020-0053 149 Dossier le problème posé par le livre au public allemand est, d’une certaine manière, circonscrit et résolu par une condamnation de l’Agenda 2010 du gouvernement Schröder. En réalité, le caractère dérangeant du livre va beaucoup plus loin parce que la question de la classe sociale, même à travers le prisme intersectionnel ‚race, class, gender ‘, ne peut être représentée que sur le mode de la négation. Aujourd’hui, dans les entreprises, dans la publicité, dans la société qui se pense moralement intègre et cosmopolite, il y a une place en termes d’inclusion pour les origines ethniques diverses, de même que pour les identités sexuelles diverses. Mais l’identité de classe inférieure, il n’est possible de la représenter que sur le mode négatif. Je ne vois pas comment on peut appartenir à la classe bourgeoise tout en restant fidèle à une origine ouvrière, ou de classe sociale infériorisée. Donc la classe sociale reste la chose plus difficile et aussi la plus invisible, la plus cachée dans le jeu social. La trace qu’elle laisse, c’est la mauvaise conscience, au sens de culpabilité refoulée. Dans l’adaptation théâtrale de Thomas Ostermeier, mais aussi dans les interviews qu’il a données, le motif de la mauvaise conscience était central: „Qu’est-ce que nous avons fait pendant toutes ces années où la situation politique s’est dégradée tandis que notre carrière dans le milieu culturel allait de plus belle? “ C’est ce qu’il semblait vouloir dire après l’année 2016, suite à la montée du AfD , du Brexit et de l’élection de Donald Trump. C’est aussi la question qu’a soulevée Nina Hoss, la comédienne qui a tenu à jouer le rôle central dans l’adaptation. La notion de la mauvaise conscience est moins présente dans le discours français, peut-être parce qu’elle est très protestante. C’est le versant bourgeois de la „honte de l’origine sociale“ dont parle Eribon. Transcription et rédaction: Elisabeth Kargl et Bénédicte Terrisse 1 Bernard Banoun: le programme franco-allemand Georges-Arthur Goldschmidt, du nom du traducteur et écrivain, cofinancé par la France et l’Allemagne, met en présence, tous les ans, 5 ou 6 traducteurs français et 5 ou 6 traducteurs allemands en herbe qu’il fait travailler ensemble, une partie du temps à Berlin, une autre au collège des traducteurs d’Arles, avec comme tuteurs une traductrice ou un traducteur français et une traductrice ou un traducteur allemand. lendemains Etudes comparées sur la France / Vergleichende Frankreichforschung Ökonomie · Politik · Geschichte · Kultur · Literatur · Medien · Sprache 1975 gegründet von Evelyne Sinnassamy und Michael Nerlich Herausgegeben von Evelyne Sinnassamy und Michael Nerlich (1975-1999), Hans Manfred Bock (1988-2012) und Wolfgang Asholt (2000-2012) Herausgeber / directeur: Andreas Gelz Wissenschaftlicher Beirat / comité scientifique: Clemens Albrecht · Wolfgang Asholt · Hans Manfred Bock · Corine Defrance · Alexandre Gefen · Roland Höhne · Dietmar Hüser · Alain Montandon · Beate Ochsner · Joachim Umlauf · Harald Weinrich · Friedrich Wolfzettel Redaktion / Rédaction: Frank Reiser, Cécile Rol Umschlaggestaltung / Maquette couverture: Redaktion / Rédaction Titelbild: Didier Eribon (Grafische Gestaltung: Louise Plessier) lendemains erscheint vierteljährlich mit je 2 Einzelheften und 1 Doppelheft und ist direkt vom Verlag und durch jede Buchhandlung zu beziehen. Bezugspreise: Abonnement Printausgabe jährlich: Institution € 82,00, Privatperson € 59,00 (zzgl. Porto); Abonnement Printausgabe + Online-Zugang jährlich: Institution € 96,00, Privatperson € 67,00 (zzgl. Porto); Abonnement e-only jährlich: Institution € 85,00, Privatperson € 62,00; Einzelheft: € 26,00 / Doppelheft: € 52,00 Kündigungen bis spätestens sechs Wochen vor Ende des Bezugszeitraums. Änderungen der Anschrift sind dem Verlag unverzüglich mitzuteilen. Anschrift Verlag/ Vertrieb: Narr Francke Attempto Verlag GmbH + Co. KG, Dischingerweg 5, D-72070 Tübingen, Tel.: +49 (0)7071 97 97 0, Fax: +49 (0)7071 97 97 11, info@narr.de. lendemains, revue trimestrielle (prix d’abonnement : abonnement annuel edition papier : institution € 82,00, particulier € 59,00 (plus taxe postale) ; abonnement annuel edition papier plus accès en ligne : institution € 96,00, particulier € 67,00 (plus taxe postale) ; abonnement annuel en ligne : institution € 85,00, particulier € 62,00 ; prix du numéro : € 26,00 / prix du numéro double : € 52,00) peut être commandée / abonnée à Narr Francke Attempto Verlag GmbH + Co. KG, Dischingerweg 5, D-72070 Tübingen, tél. : +49 (0)7071 97 97 0, fax : +49 (0)7071 97 97 11, info@narr.de. Die in lendemains veröffentlichten Beiträge geben die Meinung der Autoren wieder und nicht notwendigerweise die des Herausgebers und der Redaktion. / Les articles publiés dans lendemains ne reflètent pas obligatoirement l’opinion de l'éditeur ou de la rédaction. Redaktionelle Post und Manuskripte/ Courrier destiné à la rédaction ainsi que manuscrits: Prof. Dr. Andreas Gelz, Albert-Ludwigs-Universität Freiburg, Romanisches Seminar, Platz der Universität 3, D-79085 Freiburg, eMail: andreas.gelz@romanistik.uni-freiburg.de, Tel.: +49 761 203 3188. Gedruckt mit freundlicher Unterstützung der Dr. Jürgen und Irmgard Ulderup Stiftung. © 2021 · Narr Francke Attempto Verlag GmbH + Co. KG Druck und Bindung: CPI books GmbH, Leck Gedruckt auf alterungsbeständigem Papier. ISSN 0170-3803 l’esperance de l’endemain Ce sont mes festes. Rutebeuf BUCHTIPP Jürgen Erfurt Transkulturalität - Prozesse und Perspektiven 1. Auflage 2021, 363 Seiten €[D] 29,90 ISBN 978-3-8252-5542-8 eISBN 978-3-8385-5542-3 Der Band befasst sich mit kulturellen Verflechtungs- und Austauschbeziehungen. Er geht davon aus, dass sich Gemeinschaften wie Individuen mit ihren Sprachen, Literaturen, Medien nicht in ethnisch abgeschlossenen, sprachlich homogenen und territorial abgegrenzten Räumen konstituieren, sondern durch Verflechtungen, die sich im Wesentlichen aus Migration, Mobilität und Kontakt ergeben. Er geht der Frage nach, was es bedeutet, wenn sich Kulturen in ihrer Verschiedenheit begegnen und der Kontakt zwischen ihnen auf Aushandlungsprozesse angewiesen ist. Anliegen des Buchs ist, einige der für Transkulturalität zentralen Forschungsfelder und Konzepte wie Hybridität, Translatio, migrantisches Schreiben, Erinnerung, Sprachbiographie, Diaspora, Kosmopolitismus u.a. zu diskutieren und hierbei die Bedeutung von Sprache, Sprachen und Mehrsprachigkeit im Kontext von Transkulturalität auszuloten. Narr Francke Attempto Verlag GmbH + Co. KG \ Dischingerweg 5 \ 72070 Tübingen \ Germany Tel. +49 (0)7071 97 97 0 \ Fax +49 (0)7071 97 97 11 \ info@narr.de \ www.narr.de BUCHTIPP Christine Fourcaud / Matthias Springer Frühkindlicher Fremdsprachenerwerb in den « Elysée-Kitas » Schnupperstunde Französisch in den Münchner städtischen Kindertageseinrichtungen 1. Auflage 2021 269 Seiten €[D] 29,90 ISBN 978-3-8233-8488-5 eISBN 978-3-8233-9488-4 Das deutsch-französische Programm Elysée-Kitas führt die Kinder im frühen Alter an die Mehrsprachigkeit heran, legt so einen wichtigen Grundstein für deren sprachliche, soziale und kognitive Entwicklung und bildet einen nachhaltigen Impuls zur Förderung einer europäischen Mehrsprachigkeit. Kinder brauchen einen Akt des Fabulierens (acte de fabulation collectif), der gemeinschaftsbildend und sinnstiftend wirkt. Mehrsprachigkeit unterstützt in diesem Sinne die Herausbildung eines Wir-Gefühls und regt als kreativer Akt kollektiver Bildungskraft und Teilhabe die Identitätskonstruktion an. Dennoch unterliegt sie Vorurteilen, denen vorliegendes Buch begegnet: Sollten sich Kindergartenkinder mit fremdsprachlichem Hintergrund nicht erst die deutsche Sprache aneignen, bevor sie sich einer weiteren Fremdsprache zuwenden? Sind sie beim Erwerb einer dritten Sprache nicht überfordert? Hat Mehrsprachigkeit einen negativen Einfluss auf deren kognitive, sprachliche und soziale Entwicklung? Die Münchner Feldstudie beantwortet diese Fragen. Narr Francke Attempto Verlag GmbH + Co. KG \ Dischingerweg 5 \ 72070 Tübingen \ Germany Tel. +49 (0)7071 97 97 0 \ Fax +49 (0)7071 97 97 11 \ info@narr.de \ www.narr.de
