lendemains
ldm
0170-3803
2941-0843
Narr Verlag Tübingen
Es handelt sich um einen Open-Access-Artikel, der unter den Bedingungen der Lizenz CC by 4.0 veröffentlicht wurde.http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/91
2012
37146-147
L’Ulysse de B. Fundoianu-Fondane
91
2012
Ion Pop
ldm37146-1470148
148 Dossier Ion Pop L’Ulysse de B. Fundoianu-Fondane Le personnage mythologique d’Ulysse apparaît très tôt dans la poésie de Benjamin Fundoianu-Fondane. Fundoianu n’avait que seize ans lorsqu’il faisait imprimer trois poèmes encore assez conventionnels, qui glosaient, dans le langage du symbolisme dominant en Roumanie à l’époque, sur le thème de l’attraction magique et trompeuse du chant des sirènes, suggérant une identification du destin poétique avec celui du héros homérique, pris comme repère symbolique de la résistance difficile face au sortilège mortel de la poésie même. Hésitant entre la fascination et la lucidité de l’esprit, le premier Ulysse de Fundoianu, celui des poèmes Ulysse, Sirenele (Les Sirènes), Galera lui Ulysse (La galère d’Ulysse), écrits à l’automne de 1914, semble opter pour une position de relatif équilibre, tant au niveau de l’état d’esprit qu’à celui de la maîtrise des moyens appelés à l’exprimer. La relation avec le message mythologique est encore très stricte, la lecture du modèle se permettant à peine le déplacement/ identification entre le protagoniste de l’Odyssée et le poète, qui imite sa manière de réagir, dans un parallélisme parfait des attitudes visà-vis de la tentation du „chant des sirènes“: „Cântare-le-otr vit i sonor / mai dulce-i decât mierea s rut rii. / i-atunci Ulis, de temerea pierz rii, / Leg pe matelo i de-a m rii pror . / / Apoi, legat i el, putu s-asculte / Divinul cânt al glasurilor multe, / Dar nu putu s-opreasc , s se piard ... / i eu ascult divinele ispite / Ce sufletul îmi fur i dezmiard - / Pân’ lacrima pr pastia mi-o-nghite“ („Leur chant empoisonné et sonore / est plus doux que le miel du baiser. / Et alors, craignant la perte, / Il attacha les matelots à la proue de la mer. / Ensuite, attaché lui aussi, il put écouter / Le chant divin des nombreuses voix, / Mais il ne pût pas arrêter et se perdre… / / Moi aussi j’écoute les divines tentations / Qui volent et caressent mon âme - / Jusqu’à ce que l’abîme engloutit ma larme“ - Ulysse, septembre 1914). 1 De même, dans le deuxième texte, la force de la pensée du matelot Ulysse „maîtrise… les perfides tentations de la perdition“, préférant de se retirer à l’intérieur de soi même („Et il enterre en lui les trésors de rêves“ - avec la mise en évidence du prénom personnel - voir Les sirènes, octobre 1914), 2 suivi par le poète qui affronte à nouveau la magie ambiguë (miel et poison), en risquant l’ „anéantissement“ extatique dans les „ondes éphémères“. Un mois après, dans La galère d’Ulysse, le héros échappe sain et sauf, grâce à la même autocensure - „Il y a du poison, il y a du miel… narcotique et parfum; / Mais le bateau passa, dans un rythme majestueux, lentement, / Car il a pris soin d’échapper aux dangers“… („Eotrav i e miere... narcotic i parfum; / Ci maiestuoas nava trecu în ritm, alene, / C ci a purtat de grij s scape de nevoi“...). 3 L’ordre classique, rationnel, de l’être 149 Dossier fait obstacle aux impulsions incontrôlées de l’âme, en parfaite symétrie avec la discipline prosodique. La reprise du motif dans l’ample poème Ulysse, écrit en français et publié en 1930, une décennie après l’installation de Fondane à Paris, mesure une évolution significative, à la fois de la sensibilité lyrique de l’auteur et de son langage. Pendant les vingt ans qui s’étaient écoulés depuis les vers de l’adolescent de Jassy, Fundoianu - maintenant Fondane - avait eu le temps de mûrir, aux prises, à un niveau supérieur de conscience, avec l’Histoire et ses drames, et de s’engager dans un dialogue fertile et décisif pour sa personnalité avec la pensée existentielle de Léon Chestov, le Russe exilé dans la capitale de France, et d’assimiler les expériences de la modernité poétique européenne, d’Apollinaire à Valery Larbaud et Blaise Cendrars. Car ceux-ci, avec l’intempérance d’un Rimbaud me semblent être les repères fondamentaux de sa nouvelle poétique qui encadre aussi, en le transformant, le thème mythologique que le poète avait déjà exploité. Entre temps, l’étape majeure de son écriture poétique roumaine, marquée par les poèmes de Priveli ti (Paysages), publiés en 1930, mais écrits entre 1917-1923, avait rendu compte du rapide accomplissement de son grand talent, dans un lyrisme témoignant de l’intensification extrême du vécu expressionniste du monde, à travers des images d’un univers élémentaire, mobilisé par des énergies difficiles à dompter par la conscience d’une humanité menacée dans son ordre précaire; d’où l’angoisse à peine dissimulée sous les apparences bucoliques du bourg moldave à demi rural, de „paradis ancien“, pris aussi dans l’inertie des rituels traditionnels juifs. C’était - nous dit le poète lui-même dans la préface de ce volume - un univers poétique construit à bon escient en tant que réplique au spectacle tragique de la première guerre mondiale; mais qui - on l’a vu plus tard - cachait mal les énergies chaotiques provisoirement réprimées, contraintes, au niveau de l’expression poétique, par l’ordre de l’„alexandrin roumain“. Ce monde aux surfaces paisibles et lumineuses, „paradis ancien“, peuplé par des „hommes de boue“, proche de la terre, pris et comme enlisés dans la glèbe primitive, était devenu un fardeau difficile à porter, une tension secrète minait cette sérénité provisoire, exigeant des sorties de secours et des solutions urgentes d’évasion. Le poème liminaire de ce recueil, intitulé Parade, disait l’essentiel de cet état d’esprit, entretenu aussi par la convention poétique symboliste de l’évasion vers des espaces lointains, ayant un exemple majeur, rendu explicite par le poète, dans Le bateau ivre de Rimbaud. Le motif obsédant du voyage - „au fond de l’Inconnu pour trouver du nouveau“, selon les dires de Baudelaire - constitue l’armature de ce poème. Le substitut d’Ulysse est ici Colomb („Mais où est cette terre où s’est réveillé Colomb“) mais l’archétype mythologique odysséen peut être facilement deviné sur les traces du spleen symboliste et de ce désir de fuite vers des horizons infinis: „Ailleurs! Oh, ailleurs! mon âme difforme / mordue par la pluie, et le temps, et la chenille“, „Et si des océans m’appelaient, pianos de ténèbres“, „Je voudrais des massifs de sel où des eaux / mettent dans le poumon de la mine un ventilateur marin“, „j’attends ta venue, trompette de la peur, Catastrophe - / baisers montant aux yeux des mers 150 Dossier avec lenteur“ - ce dernier vers étant signalé en bas de page comme une citation du Bateau ivre. 4 Avec de tels antécédents de l’univers imaginaire, la réapparition du personnage homérique au centre même de la vision poétique de Fondane à partir de 1927, avec la composition de son grand poème Ulysse, ayant une première version achevée en 1929, et imprimée en 1930, n’est pas du tout surprenante; car il concentre en emblème l’obsession la plus mobilisatrice de son lyrisme, illustrée par un poème comme Parade, donnant libre cours à d’autres variations sur le même thème. Entre temps, les options d’une pensée existentielle de Fondane, reflétées, par exemple, dans les essais de La Conscience malheureuse (1936), ainsi que la tendance soi-disant „authenticiste“ - plus générale, au-delà des orientations politiques de gauche ou de droite -, l’accent mis sur les valeurs vitales et ce que Chestov appelait „la lutte contre les évidences“ ont laissé des traces profondes dans la vision du monde du poète. Celle-ci s’est définie progressivement comme expression d’une „poétique existentielle“ - ainsi nommée par les interprètes de son œuvre, tels, par exemple, Monique Jutrin - approfondie aussi par le lecteur spécialisé qui fut Fondane, des œuvres et des personnalités majeures comme Rimbaud ou Baudelaire, ou par le théoricien du Faux Traité d’esthétique publié en 1938. Mais, avant cette date, Fondane avait parfaitement assimilé aussi la poétique moderniste avant-gardiste, du futurisme et du dadaïsme au surréalisme (celui-ci critiqué, néanmoins, sans ambages, comme traître du véritable engagement existentiel de l’écriture) et non moins celle des poètes tels l’Apollinaire de Zone, le Blaise Cendrars de la Prose du transsibérien, ou de Valery Larbaud des Poèmes de A. O. Barnabooth. C’est-à-dire des inaugurateurs ou des adeptes d’un discours poétique du genre „reportage lyrique“, ouvert vers la réalité immédiate, vers le concret du fait et du langage quotidiens, comme dans une sorte de réhabilitation, contre le purisme mallarméen, de „l’universel reportage“ opposé cette fois-ci à l’attitude esthétisante et misant juste sur „les mots de la tribu“, imprégnés par le concret des faits vécus. Il était donc tout à fait naturel que Fondane se fût exprimé, par exemple dans la préface sans titre du numéro spécial de la revue Integral, en 1927 (v. le no. 13-14, de juin-juillet), comme un adepte d’un lyrisme „sismographique“, appelé à inscrire dans le discours l’expérience d’un biographie mouvementée, angoissée et interrogative, méprisante des transfigurations et des médiations artificieuses du vécu et d’une ars combinatoria dévitalisée par son formalisme excessif; un lyrisme de la „panique“, proposé sur les traces de la „beauté convulsive“ proclamée par André Breton et qui supposait, selon Fondane, „l’humiliation“ de la poésie avant qu’elle ne reprenne sa place dans le „chœur“ et, à la limite, une écriture sur du „papier hygiénique“… L’esthétique cédait sa place au vécu, la grande évasion clamée par les symbolistes devenait réalité, le poème en expansion trouvait des repères sur n’importe quel point de la mappemonde, le „bateau ivre“ rimbaldien s’était transformé en paquebot transatlantique, avion, train express traversant les steppes infi- 151 Dossier nies de l’Est… Et, au niveau formel, la technique „simultanéiste“ avait commencé à s’imposer en force. Dans la littérature roumaine, Ilarie Voronca avait fait déjà écho à de telles expériences, en publiant en 1928 son ample poème Ulysse, dont l’acteur symbolique, lui aussi un alter ego du poète, était juste le protagoniste mythologique transposé en paysage parisien, le plus apte à représenter le voyageur/ aventurier par excellence de la modernité. Donc, lorsque, parlant de son Ulysse, Fondane affirme qu’il avait été le premier à introduire le poème de larges dimensions, ancré biographiquement, en rupture avec l’esthétisme cultivé sur des petites surfaces par les principaux poètes contemporains, il avait raison seulement en partie. Plus exactement, dans la lettre adressée à Georges Ribemont-Dessaignes, citée à plusieurs reprises, il prétendait avoir été „le premier à rompre avec la poétique d’alors, le premier à avoir abordé le long poème, le thème unique, le ‘sujet’, et à réintroduire dans le poème un peu de l’homme“. 5 Or, des noms comme ceux déjà cités avaient marché dans le même sens, marquant une implication toujours plus puissante du moi, du sujet, dans un discours qui était loin de miser sur la „chimie“ ou sur l’„alchimie“ verbales, et développé sur des grandes surfaces, selon le prestigieux exemple whitmanien. Mais par rapport à ces expériences du début du XX e siècle ou immédiatement précédentes, l’Ulysse de B. Fondane propose, sans doute, l’expression la plus individualisée d’une implication dans le discours sur un monde vu dans son ampleur globale, suivant la formule de cet „universel reportage“ réhabilité du point de vue lyrique, dans lequel les „figures“ de la poéticité se trouvent massivement concurrencées par l’infusion de „prose“ de la notation d’événements et d’états d’esprit, d’interventions épiques et d’accents dramatiques, de paysages et d’images encadrées selon des découpages personnels, articulés ou mis en tension dans le grand flux du texte. Le héros de l’Odyssée est assumé de la manière la plus explicite comme hypostase du moi, reflet d’une biographie concrète, mais ayant des valences exponentielles, car il n’exprime pas seulement la confession de l’auteur, souvent sans médiation, directe, transitive, qui rassemble les interrogations et les angoisses d’un seul individu, mais aussi les tourments de toute une catégorie de gens, des dépaysés, des apatrides, des émigrés et des déshérités du sort et, à travers et audelà d’eux, de tout un peuple, stigmatisé le long de l’Histoire, du peuple juif. Cette assimilation du prototype homérique est implicitement avouée dès le début, avec des déplacements significatifs d’accent d’une version à l’autre du poème (la deuxième datant des années de la guerre): „Juif, naturellement, et cependant Ulysse“ - dans la version de 1933; et dans la seconde: „Juif, naturellement, tu étais juif, Ulysse“. 6 Or, une telle identification attire tout de suite, comme on a d’ailleurs remarqué dans les lectures précédentes, l’image d’Ahasvérus, le légendaire Juif Errant, l’homme sans paix et sans pays, voyageur tragique, chassé de partout. Un Peter Schlemihl, l’homme qui a perdu son ombre, était devenu lui aussi une variante de celui-ci dans la poésie d’Ilarie Voronca, dans son Petre Schlemihl 152 Dossier roumanisé, de 1932, sur l’horizon des mêmes inquiétudes et terreurs existentielles et dans un contexte historique sombre, qui encourageait son actualisation… Le poème de Fondane débute d’une manière abruptement confessionnelle, en exprimant directement la condition dramatique du poète voyageur solitaire, marqué par le sentiment de la mort, avec l’évocation de la disparition d’Armand Pascal, l’époux de sa soeur Lina: „J’étais un grand poète pour chanter la Joie / - mais je sanglote dans ma cabine, / des bouquets d’eau de mer se fanent dans les vases / l’automne de mon cœur mène au Père Lachaise“. 7 La cendre qui „pèse si lourd dans la valise“ du poète concentre ainsi, dès la première séquence, l’essentiel du message, car le nouvel Ulysse portera toujours avec soi son bagage devenu symbolique, d’une mort, d’une cassure de destin solidaire avec la sienne: „Ami, amis, nous sommes venus de loin ensemble, / unis comme les branches des ciseaux / pépins d’un même fruit / le même rêve à partager, le même pain / la même soif plus grande que le monde. Nous avions de quoi conquérir plus qu’un monde: / nous aura-t-on trompé, rusés? / Sisyphe, vieux Sisyphe que tu es donc usé! / Céderas-tu? consentirais-je / au seul droit de la force? / Ce n’était rien, un piège. / Il ne faut pas céder. Pas d’issue, pas d’issue! / Ils doivent périr ou vaincre ceux qui n’ont point d’issue! “ 8 Il y a, en des vers comme ceux-ci, tout un projet dramatiquement assumé, grandi sur une tension originelle d’essence tragique et avec d’amers accents prophétiques, d’extraction biblique explicite: „J’ai si grande pitié des hommes / je me hais et je m’aime / pardonne-moi d’être vivant, d’écrire des poèmes / je suis encore là mais je parle aux fantômes! / Est-il réponse où non aux questions de l’homme / quelque part? Et le dieu existe-t-il, le Dieu / d’Isaïe, qui essuiera toute larme des yeux / et qui vaincra la mort - / quand les premières choses seront évanouies? “ 9 Mais il y a là, en noyau, aussi le schéma du poème en son entier, qui peut être définie, dans ses grandes lignes, comme une ample tirade d’un protagoniste de théâtre tragique, avec les notes de rhétorique spécifique, avec une solennité et dignité mythiques renforcés par l’intertexte. D’ailleurs, dans la séquence suivante, intitulée Préface, on fait déjà la référence au spectacle de l’Histoire avec majuscule, à la naissance „au monde / au milieu de l’Intrigue“ conçu par le Plan divin, du poète en tant que „personnage inquiétant“, juste par ce que dans „le texte établi de toujours“ il produit des turbulences graves, en opposant „l’ascendant prodigieux, étrange du vivant“ à la préconception abstraite, en s’arrogant - nous dit-on - „le droit de bafouiller les meilleures répliques / d’improviser un monde en marge de l’Auteur / et tout à coup, malgré le Plan, / s’introduire soi-même au sein du personnage / en criant, excédé, vers le public des loges / „Il n’y a pas assez de réel pour ma soif! “ 10 Après une telle Préface, on peut s’attendre à une réinterprétation du repère mythologique exemplaire dans le sens fortement individualisé, d’un tragique moderne. Ulysse devient le représentant d’une humanité souffrante, somme de solitudes sans terme, fasciné ou plutôt poussé vers une aventure à fin prévisible, sombre, se débattant pour arriver à un rivage qui reste à jamais inabordable. L’évocation des grands élans d’évasion de l’univers stagnant des Paysages de- 153 Dossier vient significative, offrant la mesure de l’amer échec actuel: „Je viens d’une petite ville blanche où pissaient les vaches / les soleils débordaient le soutien-gorge des haies, / une odeur de matin qui s’est lavée à l’eau / des fourmis longuement marchaient sur les mains calmes / une chèvre broutait du lait / laitues fraîches vous vous êtes tues, / la chair était si calme - / villes de petits juifs accroché à l’air / les trottoirs étaient des rubans sales, / j’étouffais de bonheur, de dégoût, / ça sentait le pain frais et le hareng salé / l’amour sentait la bouse humide… / …j’ai chanté tout cela, mais je voulais partir, / je voulais l’univers désertique, / je voulais les villes énormes où le soleil est noir / déchirer la chemise des hommes / leur crier ma démence et ma soif…“. 11 Le monde dont le poète s’était détaché en 1923 laisse encore des échos le long de toute la composition, subordonnée à l’obsession de l’évasion marine, du détachement des lieux et des hommes porteurs de la même angoisse et de la même souffrance et aspiration à la libération. Dans une séquence du texte, l’océan le fait „penser à ces plaines de Bessarabie“, 12 avec leurs paysans fuyant, au temps de la guerre, les Autrichiens, une autre appelle encore une interrogation - „J’étais né à Jassy, que cherchais-je à Oran? “ 13 -, ailleurs paraissent les Itzkani de Suceava, point de frontière de l’Empire, l’Olt en tant que rivière repère pour d’autres détachements, l’Ukraine des terrible pogroms, réactualisée par les Juifs rencontrés dans le port de Marseille, effarés sous les yeux des gardiens, par le souvenir des persécutions antisémites russes, mais aussi avec la remémoration d’un voyage heureux à côté de son père, qui le fait pousser une exclamation en contraste avec les réalités âpres de l’actualité: „qu’il est beau dans ses yeux le maïs de la terre moldave“. 14 De proche en proche, la mémoire s’élargit pathétiquement vers les émigrants bibliques archétypiques, avec des renvois au grand Exode et à la traversée de la Mer Rouge, avec „le sanglot du Décalogue“ ou la nostalgie de la „jeune, / la frêle bergère, l’épouse, / la fiancée promise et noire du Cantique / des Cantiques“. 15 Comme, par exemple, dans les amples poèmes „du monde entier“ de Blaise Cendrars ou, en Roumanie, dans l’Ulysse de Voronca, le texte reçoit l’aspect d’un vaste reportage dans lequel les noms anciens appelés dans le discours symboliste pour leur pure musicalité exotique deviennent des points sur une mappemonde de la souffrance des émigrants, descendants tragiques de l’antique Ulysse, „escales“, comme chez les poètes déjà nommés, dans les grandes villes du monde, avec „la vie traînée de climat en climat“. Notons l’absence de l’enthousiasme moderniste de la découverte du grand univers, dû aux facilités du voyage apportées par la technique nouvelle, ce sentiment tonique, au fond, plus proche de celui de Walt Whitman, d’être en quelque sorte le maître de ce monde. Par contre, les vers de Fondane sont marqués par l’interrogation anxieuse de celui qui est voué à une éternelle errance. Une Chanson de l’émigrant, composée en quatrains parfaitement rimés, suggère juste cette prolifération déroutante des repères géographiques, un voyage dont le moule mythique devient contraignant comme un blasphème: „Rameurs d’une vieille fiction, / (quand donc finira le périple? ) / nous naviguons dans le multiple / pays de la malédiction“. 16 Une osmose significative se 154 Dossier produit, pour le lecteur avisé, entre le mythe homérique et celui des Argonautes, auxquels s’ajoute aussi la composante - explicite dans une autre page du poème, déjà signalée - des corvées d’un Sisyphe devenu voyageur, exténué par les efforts toujours et vainement repris de „conquérir le monde“, de trouver l’„issue“. Le motif de l’identification totale du sujet lyrique avec les émigrants malheureux du siècle revient toujours sur le parcours, comme dans la séquence suivante, dans laquelle le costume de marin de l’enfant est loin d’annoncer la nouvelle tenue dramatique, désespérée, d’un Ulysse errant sans rive prévisible: „mon père qu’as-tu fait de mon enfance? / qu’as-tu fait du petit marin au regard bleu? / J’étais heureux, heureux parmi ces malheureux, / le poivre rouge c’était si nouveau! / Plus tard j’ai vu Charlot et j’ai compris les émigrants, / plus tard, plus tard moi-même… / Emigrants, diamants de la terre, sel sauvage, / je suis de votre race, / j’emporte comme vous ma vie dans ma valise, / je mange comme vous le pain de mon angoisse, / je ne demande plus quel est le sens du monde, / je pose mon poing dur sur la table du monde, / je suis de ceux qui n’ont rien, qui veulent tout / - je ne saurai jamais me résigner.“ 17 Il y a là aussi une réplique évidente à l’ancien exotisme symboliste, chercheur, entre autres, des épices rares, parmi d’autres sensations raffinées… Le geste d’identification avec la condition de l’émigrant errant, de cet Ulysse sans Ithaque, revient toujours, tel un leitmotiv du poème. Les états d’esprit sont toujours tendus, contradictoires, oscillant entre la volonté de continuer un voyage qu’on sait sans fin et la tentation de l’abandon, sous le signe de la fatigue, de la solitude et de la désillusion. L’hypostase d’Ulysse Sisyphe connaît de nouvelles reprises, signe d’une vitalité anxieuse, effervescente malgré le permanent contredit de la part du réel. „Assez de tout et pas assez de rien“ 18 - se dit quelque part le poète-voyageur-émigrant, et ailleurs: „Voici la vérité, je suis seul, / seul dans ma propre nuit où mon ombre se couche“. 19 De là, le refus, aussi, de l’hypostase héroïque, radicalement distancée de la figure de l’Ulysse d’Homère: „Je hais le vide et voilà qu’il sonne en mon poème. / Je cogne un front têtu contre les cimes de l’air / je ne suis pas un héros / les applaudissements me gênent, qu’en ferais-je? “ 20 ; ou: „je ne suis pas chiromancien, / mes mots, mes maux sont ceux de tout le monde, / je n’ai rien inventé de nouveau, d’ancien, / la terre est petite, le voyage si long, / plus grande notre soif que celle de Colomb! “ 21 Et une apostrophe adressée au héros même de la mythologie pose d’une manière frontale la question du sens du grand voyage odysséen: „Tu avais une déesse à tes côtés, Ulysse! / - A quoi sert-il de voyager? / Une jarre de lait calme, les cuisses de l’épouse, / les jours comme des pommes tombées dans le verger / …/ - A quoi sert de s’en aller / déjà vaincu, avant d’avoir ouvert la bouche / dans des pays d’où l’on ne reviendra que vieux / plein de sirènes que l’on n’a pas écoutées / de victoires manquées / et le cœur lourd d’avoir résisté à la soif? “ 22 - C’est un reproche par lequel se justifie indirectement le sens même du voyage et qui sera répété à un autre endroit sous la forme suivante, ajout à la première version: „Te voilà tel que qu’au port le fleuve te charrie / vieux cheval de retour, viande de boucherie, / esprit vaincu! / Le creux 155 Dossier s’est emparé du fruit! “ Mais dans la réplique du personnage épuisé résonne encore, malgré tout, l’écho des mondes rêvés: „- Il sonne, plein encore de tout ce qui le fuit! “ Dans un article publié dans le numéro spécial consacré à l’écrivain par la revue Europe, Monique Jutrin mentionne une „dégradation de la figure grecque“, poursuivie le long du poème: „Pénélope devint un nom commun, employé au pluriel, dans une énumération, parmi les „fausses beautés“ - pénélopes usées, juliettes avachies“, notant, par contraste, quelques vers qui apparaissent seulement dans la seconde version du poème: „Le monde est fini, le voyage commence. Il y a encore quelque part un soleil“, ou: „plus grande notre soif que celle de Colomb“. 23 Car, en effet, sur tout le parcours du poème, le flux et le reflux des énergies alternent, on essaie de dépasser les moments de découragement par de nouvelles incitations, nourries du cri des profondeurs de l’être parti à la recherche d’une solution de vie. La séquence dédiée, par exemple, à l’Amérique du Sud (XXIII, Amérique, Amérique…, dédié à Victoria Ocampo) enregistre d’une manière pathétique à la fois une volonté d’enracinement („Que ne puis-je rester un instant sur tes rives, / enfoncer mes racines dans une terre neuve“) et la reconnaissance amère de la condition d’éternel Ahasvérus: „Je suis un étranger, je le sais, / Je n’ai pas de patrie collée à mes souliers, / plus rien qui me retienne à quelque quai du vide…“ 24 A une page suivante, la déroute réapparaît avec le sentiment de la vanité de la démarche et le désir du retour dans le sommeil confus rappelant celui de la „brute“ baudelairienne: „Je ne sais pas la route, il n’y a pas de route / pourquoi me suis-je donc confié à la mer? “, „- Que ne puis-je me mettre au chaud sous mon sommeil, / que ne peut-on ôter son visage du jour / - et dormir sans figure! “ 25 Le texte entier est soutenu ainsi par une paradoxale énergie du désespoir. Concentrée dans le cri devenu leitmotiv du discours, à côté de celui de la soif, lui aussi obsédant, - c’est-à-dire des manifestations d’une vitalité élémentaire toujours déçue, cette énergie apparaît comme consubstantielle et définitoire pour l’homme. La multitude des Ulysse avec laquelle le moi poétique s’identifie résume d’une certaine manière et récapitule les principaux repères existentiels par lesquels sont marqués ces ascensions et ces chutes. Le temps où l’homme pouvait se croire dieu („Etions-nous donc de dieux? “), le temps de la confiance et de la volonté de découvrir et de créer („Si ce monde est mauvais, / que de mondes à naître! “) sont rapidement suivis par la fatigue, l’épuisement, la désillusion: „Allez, allez, il faut s’agripper à la vie! / Et la vie s’est effondrée comme un plancher pourri“) - toutes concentrées dans le voyage archétypique: „Je ne songeais pas, camarades, / qu’un jour nous referions ce voyage d’Ulysse / les bourses vides. Il fut un temps / où nous ne songions pas que notre soif des hommes / et notre soif d’éternité / ne ferait plus qu’une poignée / de fiente, à peine chaude / - d’oiseaux“. 26 Mais, dans le poème suivant: „Ce ne sont pas pourtant des visions d’insomnie. / Je veux! Les îles sont en marche. / Je veux! Voici le sang ancien revenu…“ 27 156 Dossier Une séquence importante du poème, dédiée non pas par hasard au philosophe maître et ami Léon Chestov, affiche en des termes programmatiques ce credo nourri d’un existentialisme d’essence tragique, appelant à un défi de la limite, même en étant conscient de la défaite, mais une conscience éveillée, profondément impliquée: „Peu importe la vue qui voit mais que ne fouette la vision, / qui voit mais ne peut pas mordre à même le monde, / peu importe l’esprit qui n’a soif que de soi“. Même le sens du voyage odysséen se trouve remis en question sous cet angle de l’engagement existentiel lucide, en tant que prise de conscience du fait d’être: „à quoi bon tant de navigateurs, de périples, / de continents nouveaux, de paradis perdus, / de panoplies, de consciences, / où traînent leur ennui les princes de l’exil / parmi les souvenirs de cors et de tueries? / Assez, assez, mon insomnie! / Le monde est là peut-être, mais suis-je bien en lui? / Je passe et il ne reste rien dans le miroir, / pas même un trou / et j’ai beau m’exercer sur les mots hors d’usage / comme on redresse au marteau les clous qui ont déjà / servi, tordus, et qu’on les enfonce à nouveau, / il n’est pas de chanson donnée à tout le monde, / je ne peux pas fermer les yeux, / je dois crier toujours jusqu’à la fin du monde“. Et, tout de suite, une citation de source pascalienne, reprise et commentée par Chestov dans sa Balance de Job: „il ne faut pas dormir jusqu’à la fin du monde“. Si nous nous souvenons de la phrase entière de Pascal - „Jésus sera en agonie jusqu’à la fin du monde: il ne faut pas dormir pendant ce temps-là“ - nous allons recevoir encore mieux le sens de la référence chestovienne de Fondane, en tant que témoin de la souffrance humaine éternisée. Et le moule mythologique dans lequel il inscrit son expérience poétique et humaine ne fait que la modeler plus profondément, en l’attachant à un repère de valeur universelle. Mais, comme il a pu ressortir des gloses précédentes, ce moule est toujours attiré vers sa propre biographie, vers l’événement et l’état d’esprit vécus directement, sans médiation aucune. Disant Ulysse, Fondane dit je - ou nous, comme addition (somme) de mois solidaires dans leur solitude particulière. La partie de „reportage“ plus ou moins „lyrique“ de son poème retient des moments précis, datés selon le calendrier - comme à la fin de la séquence dans laquelle est invoquée, au titre propre, la vie hypostasiée comme mère nourricière, avec son „lait sauvage“, „cri de la chair“, aux „mamelles pleines de sève éparse“, désemparée entre la croissance et la mort, souffrante de toute façon: „Tu souffre. Tu te couches / / à bord du Mendoza, le 30/ VII/ 29.“ - c’est-à-dire exactement au moment du voyage du poète vers l’Argentine. On trouve des références directes en des endroits divers du texte - et quelques-unes d’entre elles ont été déjà mentionnées - avec la même fin, celle d’imprimer une empreinte personnelle sur chaque fait inscrit dans l’image mythologique exemplaire. Sur de telles données s’appuie la suggestion de la critique, regardant la nécessité d’une „lecture existentielle“ de son poème: „La poétique existentielle appelle une lecture existentielle“ - écrit toujours Monique Jutrin, dans une étude heureusement intitulée Un lecteur nommé Ulysse, 28 qui renvoie, par ailleurs, à une formule du poète même - „l’esthétique d’Ulysse“ - de l’étude consacrée à Baudelaire. En effet, dans le chapitre XXXII de 157 Dossier son essai posthume, Fondane opposait à une soi-disant „esthétique du métier acquis“ une autre, - „l’esthétique de la trouvaille“, proclamée par Apollinaire, une „esthétique du risque“ que son Ulysse suggère comme étant „lancée en pleine aventure, reculant de jour en jour cette rentrée à Ithaque“. 29 Il est clair que B. Fondane situe son écriture poétique dans la zone de cette poétique du risque. Au-delà des perfections de l’art, il est intéressé plutôt par ses „propres pouvoirs“, par l’aventure personnelle, par l’expérience existentielle pleinement assumée. Du coup, son Ulysse se présente comme une construction composite au niveau du discours, préférant le vers libre, mais il admet aussi l’articulation stricte du vers et de la strophe, en faisant appel même à l’alexandrin classique et, au-delà de ces préoccupations pour le „métier acquis“, 30 il prend le risque de composer des „tirades“ aux accents pathétiques, d’un protagoniste de drame ou de tragédie, dont l’„Intrigue“ est dont le „Plan“ décidés d’avance sont brouillés par le poète qu’il est, Intrigue et Plan qui sont ceux des conventions classiques du discours. Celui-ci admet aussi, dans son cas, la phrase programmatique, mais qui étale d’une manière accentuée le „cri“ et la „soif“ existentiels, et la „prose“ commune de l’„universel reportage“ qui apporte dans l’espace écrit les données de la réalité immédiatement vécue, à côté, bien sûr, de la métaphore, de la comparaison développée, des „corrélatifs objectifs“ auxquels invite la part d’épique de son vaste poème. Comme nous l’avons dit, sa manière d’écrire n’est pas, techniquement parlant, radicalement différente du discours „whitmanien“ des modernistes simultanéistes et „cosmopolites“ du début du siècle mais l’implication biographique y est évidemment plus profonde. Ilarie Voronca était aussi un être anxieux dans son propre Ulysse de 1928, duquel ne manquait pas la „panique“, l’angoisse de la recherche de soi dans un univers de métropole agitée, mais l’aspect „féerique“ de la „Cité“ y prévalait et la jubilation devant la découverte du miracle quotidien moderne était vécue avec un certain faste et luxe de l’imaginaire, transposés dans l’imagisme flamboyant, de type „baroque“ et maniériste. Fondane propose lui-même une distinction par rapport au poème homonyme du confrère resté encore en Roumanie, avec lequel il avait eu une petite controverse sur le titre des deux écrits, dans son compte rendu sur la version française des vers de Voronca: „J’ignorais alors que j’allais, à mon tour, sous peu, faire un voyage long; avec un vrai bateau, cette fois sur une mer de sang et de chair; voyages aux antipodes, combien amer et décevant, cependant que le sien, dans le songe, était une pure victoire: Que n’ai-je pu, comme lui, voyager sur un chaise, toutes voiles au vent? “ 31 Les traces d’un certain ressentiment n’échappent pas au lecteur de ces lignes, mais ce qui nous intéresse le plus, c’est la mise en évidence de la dimension existentielle, d’expérience vécue, dans son propre poème. Il doit être donc lu dans la perspective de cette interprétation de Fondane lui-même, correspondant à une poétique pour laquelle l’esthétique est seulement une composante d’un discours plus complexe, syncrétique, qui conserve sa cohérence, sans aucune intention „iconoclaste“, comme on l’a d’ailleurs remarqué. Ses libertés sont grandes, mais on peut retenir aussi un 158 Dossier certain côté conservateur, car, gardant souvent les outils hérités de la poésie, il n’est pas réfractaire pour autant à une rhétorique en quelque sorte „théâtrale“ et même une rhétorique de „manifeste“ poético-existentiel. Il laisse passer dans le texte assez d’„impuretés“ entraînées par le flux alluvionnaire du discours, mais son texte est néanmoins plus vertébré qu’un autre poème du moment, l’Homme approximatif de Tristan Tzara, paru en 1935, qui se laisse aller souvent au gré de la dictée automatique surréaliste. Il est peut-être intéressant de noter en passant que Fondane fera quelques années plus tard, dans la revue roumaine d’avantgarde unu (un), l’éloge de Tzara et de son écriture quelque peu pléthorique, considérée comme plus authentique que celle illustrée par la „fête de l’intellect“ proposée par le „puriste“ Paul Valéry… Ulysse partage ainsi sa valeur esthétique avec celle de document existentiel, qui prétend une réception du fait transcrit sur le vif, avec une encre qui refuse de sécher. C’est un texte laissé ouvert aussi après la deuxième version, dans laquelle „l’esthétique d’Ulysse“ est offerte comme une clé pour la „lecture existentielle“, à travers laquelle le moule mythologique reçoit une nouvelle vie, de nouvelles vies, à la mesure des aspirations et des défaites de l’homme du XX e siècle. En se définissant par excellence comme „voyageur“, notre poète dira encore une fois, dans une dernière lettre envoyée à sa femme du camp de Drancy, que „le voyageur n’a pas fini de voyager“. A la différence du héros de la mythologie, il devra rester pour toujours sans Ithaque. On peut noter, pour finir, une sorte de symétrie contrastante entre ce dernier Ulysse el les poèmes de sa première jeunesse. Si son premier Ulysse trouve en lui-même, comme le héros du mythe, la force de résister à la fascination et à la perte par le chant des sirènes, cette fois-ci il est quasi forcé de se livrer à l’abîme: c’est la vie même, hostile et agressive, qui l’oblige à écouter ses chants douloureux et d’accepter, comme en vertu d’un destin tragique, la mort par le chant: „Ulysse, il nous faudra nous quitter; la terre cesse… / Les rats, depuis longtemps, nous on rongé les cordes, / et les mouette picoré la cire de nos oreilles - / / Liés par nous-même, c’est trop / / Veux-tu qu’on se jette à la mer librement? / / J’ai hâte d’écouter la chanson qui tue! “ 32 Mais ce sera une mort chargée de toutes les richesses gagnées dans le combat qui est aussi avec les conventions apaisantes de la poésie, une variante de la lutte de l’homme vivant et souffrant contre les „évidences“, ô combien plus commodes de la raison. 1 B. Fundoianu, „Ulisse”, in: Poezii, Editura Minerva, Bucre ti, 1978, 375. 2 B. Fundoianu, „Sirenele“, Id., 378. 3 B. Fundoianu, „Galera lui Ulisse“, Id., 386. 4 Version française par Odile Serre, voir Benjamin Fondane, Paysages/ Priveli ti, Editura Paralela 45, Pite ti, 1999, 19-25. 5 Cf. Monique Jutrin, Benjamin Fondane ou le périple d’Ulysse, Librairie G. Nizet, Paris, 1989, 112. 159 Dossier 6 Benjamin Fondane; „Ulysse [prologue sans titre]“, in: Le Mal des fantômes, Verdier, 2006, 20. 7 Id., 17. 8 Id., 18. 9 Id., 19. 10 Fondane, „Ulysse (Préface)“, in: op. cit, 21. 11 Fondane, „Ulysse I“, in: op. cit, 24sq. 12 Fondane, „Ulysse IV“, in: op. cit, 26. 13 Fondane, „Ulysse VII“ in: op. cit, 30. 14 Fondane, „Ulysse IX“ in: op. cit, 33. 15 Id. 16 Fondane, „Ulysse X (Chanson de l’émigrant)“ in: op. cit, 37. 17 Fondane, „Ulysse IX“ in: op. cit, 35. 18 Fondane, „Ulysse XII“, in: op. cit, 41. 19 Fondane, „Ulysse XVII“, in: op. cit, 47 20 Id. 21 Fondane, „Ulysse XVII“, in: op. cit, 50. 22 Fondane, „Ulysse XV“, in: op.cit., 45 23 Cf. Monique Jutrin, „Ulysse: poésie et destin“, in Europe, no. 827, mars 1998, 74. 24 Fondane „Ulysse XXIII (Amérique, Amérique..)“ in: op. cit, 47. 25 Fondane: „Ulysse XXVI“, in: op. cit. 58. 26 Fondane: „Ulysse XXIV», in: op. cit., 69. 27 Fondane: „Ulysse XXV», in: op. cit., 69. 28 Voir le recueil d’études Rencontres autour de Benjamin Fondane, poète et philosophe, Ed. Parole et Silence, Paris, 2002, p. 123. 29 B. Fondane, Baudelaire et l’expérience du gouffre, Seghers, Paris, 1947, 360. 30 Ibid. 31 Cf. Monique Jutrin, Benjamin Fondane ou le périple d’Ulysse, op. cit., 91. 32 Fondane: „Ulysse XXIX“, in: op. cit., 73.
