eJournals lendemains 38/152

lendemains
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0170-3803
2941-0843
Narr Verlag Tübingen
Es handelt sich um einen Open-Access-Artikel, der unter den Bedingungen der Lizenz CC by 4.0 veröffentlicht wurde.http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/121
2013
38152

Introduction: Raisonner avec la féerie

121
2013
Jörg Dünne
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5 Dossier Jörg Dünne Introduction: Raisonner avec la féerie „Raisonner avec la féerie, c’est la tuer.“ 1 Telle est la ferme conviction de Paul Ginisty, pionnier de l’histoire littéraire de la féerie, dont la grande popularité sur la scène française commence sous la Monarchie de Juillet pour atteindre son apogée dans la société du Second Empire. 2 Le succès de ce genre théâtral au XIX e siècle n’a guère d’équivalent sur d’autres scènes européennes ou transatlantiques: ni le Zaubertheater viennois ni le teatro de magia dans le monde hispanique ne semblent avoir bénéficié d’une popularité aussi importante que celle de la féerie en France. 3 Pour Ginisty, la féerie relève du domaine de l’imaginaire ‚pur‘ - une opinion qui est déjà celle d’Émile Zola quand il distingue la féerie de l’opérette: „Dans notre enquête moderne, après nos dissections de la journée, les féeries seraient, le soir, le rêve éveillé de toutes les grandeurs et de toutes les beautés humaines.“ 4 La féerie semble être pour Zola, comme pour Ginisty, une espèce de compensation de la triste ou dure réalité moderne, justement parce qu’elle n’aurait pas de rapport direct avec cette réalité et qu’elle permettrait de rêver un monde plus beau. Ginisty constate le déclin de la féerie au début du XX e siècle où celle-ci semble être, à en croire son étude, en pleine décadence, à moins qu’elle ne soit sauvée et ‚conservée‘ dans son état pur et lyrique par la poésie. 5 Et comme s’il s’agissait de démontrer qu’il ne faut pas raisonner avec la féerie, Ginisty, en guise de préface à son étude, nous présente l’histoire de la féerie comme genre sous la forme d’un conte de fées. 6 Le thème de ce conte est la „mauvaise fée“, celle qui n’est pas invitée à la fête et qui, pour se venger, sème le trouble dans le monde féerique, comme la fameuse treizième fée dans la Belle au bois dormant. 7 Ginisty raconte l’apparition de la mauvaise fée comme une histoire allégorique afin de saisir l’histoire de la féerie en tant que genre théâtral à partir d’une fictio personae: pure et merveilleuse au début, comme dans le royaume de Titania du Songe d’une nuit d’été de Shakespeare, les fées contemporaines menacent de dégénérer, de se transformer en figures lascives et vulgaires sur la scène du boulevard parisien, à l’exemple des nombreuses actrices qui jouent aux fées sur les planches parisiennes à partir de la seconde moitié du XIX e siècle et dont le seul mérite consiste à être la maîtresse du directeur du théâtre (il est permis de songer ici à Nana d’Émile Zola, roman dont la protagoniste débute sur scène dans la féerie La blonde Vénus 8 ). Quant à la féerie comme genre théâtral, ses charmes initiaux se voient, toujours d’après Ginisty, de plus en plus ensevelis sous une avalanche de décors et de trucs théâtraux sur la scène du boulevard parisien. Mais est-ce que l’inéluctable présence de la mauvaise fée parmi les bonnes doit uniquement être perçue comme un signe de décadence? La mauvaise fée appa- 6 DDossier raît-elle seulement après coup, est-ce que le royaume de la ‚véritable‘ féerie des origines est exclusivement celui du plaisir et de l’imaginaire purs? Ou bien l’attrait persistant de la féerie ne consiste-t-il pas finalement avant tout dans le fait que son caractère spectaculaire et machinique est très présent dès ses origines, qu’elle est un genre beaucoup plus ambivalent et bien moins pur que Ginisty ne l’admet? Tout au moins autour de 1900, la féerie moderne a indubitablement, comme l’a bien montré Hélène Laplace-Claverie, son côté noir. 9 Dans cette optique, la féerie, loin d’être un genre qui mette en scène exclusivement la beauté pure d’un monde merveilleux ou magique, semble particulièrement apte à saisir une expérience ambivalente de la modernité autour de 1900. C’est en ce sens que les contributions réunies dans ce dossier sur la féerie au tournant du siècle prennent en quelque sorte le contrepied de l’histoire que raconte Ginisty. Au lieu de simplement constater la décadence générale de la féerie autour de 1900 (et de donner tout au plus une faible chance de survie à la beauté pure du merveilleux dans la féerie lyrique, comme le pense Ginisty), ce dossier cherche à s’interroger sur le potentiel novateur qui résulte du transfert de la pratique théâtrale de la féerie autour de 1900 vers d’autres domaines culturels, comme le récit, le cinéma, la photographie, la science et la technique: ainsi, les articles réunis ici soulèvent la question de savoir jusqu’à quel point la féerie peut être regardée comme un genre théâtral qui jette un pont entre différentes pratiques culturelles autour de 1900. Les auteurs qui ont contribué à ce dossier ne sont pas non plus convaincus que la féerie soit un genre avec lequel on ne saurait raisonner: bien au contraire, ils tentent de localiser la féerie au sein de la modernité et même de concevoir la modernité à partir de la féerie. Un tel rapprochement entre pensée de la modernité et féerie semble trouver un point d’appui dans les écrits de Walter Benjamin, qui, lors de la genèse de son Livre des passages, intitule provisoirement son projet une „féerie dialectique“. 10 Au-delà de la féerie comme figure de pensée, il s’agit finalement aussi de soulever la question du rapport entre la féerie et le spectaculaire 11 ou le mélodramatique, 12 deux concepts dont l’importance pour penser la modernité est de plus en plus reconnue. Si l’on veut comprendre la féerie comme une pratique de la modernité, mais aussi comme un concept qui a une portée théorique et critique permettant de saisir certaines caractéristiques de cette modernité, il n’est pas question de limiter la portée du merveilleux moderne à la présence des fées et d’autres apparitions magiques, c’est-à-dire aux fantasmes produits par la féerie au niveau des événements qu’elle représente sur scène. 13 La féerie comme chronotope littéraire 14 et culturel autour de 1900 doit également être abordée à partir des procédés (issus d’abord de la scène de théâtre) qui permettent l’élaboration de tels effets, comme par exemple sa structuration par tableaux et son apothéose, sa mise en scène somptueuse de pièce ‚à grand spectacle‘ qui influe aussi sur ses adaptations dans d’autres médias. C’est peut-être sous la forme d’une „féerie sans fées“, 15 c’est-àdire comme un dispositif du spectaculaire qui oscille entre l’illusion magique et la 7 DDossier conscience technique (oscillation pouvant obéir à des finalités multiples), que l’on arrivera à mieux comprendre la féerie comme une figure de pensée de la modernité. Les contributions à ce dossier montreront que, malgré son apparente décadence, la féerie autour de 1900 est plus vivante et présente des facettes plus variées que jamais auparavant dans son histoire. Pour expliquer cette survie, nous avancerons l’hypothèse que la vigueur de la féerie à cette époque réside précisément dans sa capacité de transformation de son origine scénique vers d’autres contextes techniques et esthétiques. Ce transfert vers d’autres pratiques culturelles ne peut pas seulement être entendu dans le sens de l’adaptation intermédiale, mais il comprend aussi des dynamiques transmédiales et transgénériques. On pourrait même aller jusqu’à prétendre que la féerie moderne est un genre privilégié pour penser le changement et la transformation tout court. Cette capacité prend, certes, son origine, dans les fantasmes que les féeries représentent sur scène, sur écran ou dans des livres, comme par exemple les métamorphoses du corps humain ou bien la transgression de ses forces ‚normales‘. Mais cette capacité de transformation s’étend aussi au pouvoir magique de la parole qui se matérialise et établit ainsi un surprenant court-circuit entre les mots et les choses que les avant-gardes du XX e siècle continueront à explorer. Au-delà du pouvoir du langage, la notion de féerie autour de 1900 apparaît très souvent liée à la technique, notamment à la transmission de messages par télécommunication (téléphone, TSF, etc.) ou bien au transport rapide, mais non sans danger, de personnes dans l’espace ou même dans le temps. Enfin, la féerie a gardé du théâtre religieux et des pièces à grand spectacle une fin en apothéose qui met un terme aux accidents et aux catastrophes. Elle libère dans la communauté des spectateurs une sensation intense, mais toujours éphémère et dépouillée de toute transcendance religieuse ou communautaire. C’est dans ce cadre que les contributions réunies dans ce dossier tenteront de répondre à la question de savoir quelles sont les fonctions culturelles de ces multiples dynamiques transformatrices que la féerie met en œuvre, à la fois sur scène et dans le vaste champ culturel où elle s’étend autour de 1900 grâce aux nombreuses formes qu’elle emprunte. En tant qu’experte de l’histoire de la féerie, Hélène Laplace-Claverie ouvre le dossier avec une contribution sur le sort de la féerie théâtrale en France autour de 1900, qui, loin de pouvoir être décrite comme un genre en déclin, comme le pense Ginisty, doit être plutôt perçue comme étant en métamorphose et faisant preuve d’une grande plasticité. Les deux contributions suivantes sont consacrées aux transformations narratives de la féerie autour de 1900: Isabel Kranz décrit le roman Madame Chrysanthème de Pierre Loti comme un rendez-vous manqué avec la féerie (à la différence des nombreuses adaptations théâtrales ou filmiques dont ce texte a été l’origine), qui fait cependant apparaître très nettement les traits distinctifs du genre. Kirsten von Hagen démontre quant à elle l’importance que la féerie revêt pour la 8 DDossier poétique de la mémoire chez Marcel Proust, où le recours aux transformations magiques de la féerie présente le temps comme une optique déformante. Les effets optiques dont il est question chez Proust renvoient également au cinéma des premiers temps dans lequel la féerie occupe une place de premier ordre, aspect qui sera développé dans deux contributions: Gesine Hindemith met en relation les féeries cinématographiques de Georges Méliès et de Segundo de Chomón avec la tentative de Walter Benjamin de concilier la pensée dialectique de la modernité et de la féerie. Sa contribution soulève la question de savoir jusqu’à quel point la dialectique de la féerie filmique correspond à la dialectique de la modernité en général. À propos du Voyage imaginaire de René Clair, Caroline Surmann montre comment ce cinéaste met à profit le potentiel visuel et spectaculaire de la féerie pour un renouveau de l’esthétique cinématographique dans les années 1920. La contribution de Frank Kessler ouvre un dernier groupe d’analyses qui considèrent la féerie dans le contexte plus vaste de leur époque, et spécifiquement entre la scène, le cinéma et les spectacles publics autour de 1900. Kessler conçoit la féerie comme un „spectacle paradoxal“ où la production technique du merveilleux doit rester cachée afin de provoquer l’étonnement du spectateur, tout en exhibant délibérément sa technicité. En prenant l’exemple de la „fée électricité“, Anne Ortner retrace l’histoire de la féerie scientifique au tournant du siècle comme un terrain d’expérimentation où apparaissent le pouvoir des nouveaux médias mais aussi un questionnement critique à leur égard. Finalement, Kurt Vanhoutte et Dieter Brusselaers comparent l’importance de la féerie comme figure de pensée à celle de la fantasmagorie dans l’œuvre de Walter Benjamin; ils arrivent à la conclusion que, au moins pour Benjamin, la féerie reste attachée à la fixité d’un contexte mythique, alors que la fantasmagorie est considérée sous le signe d’une production performative d’images qui dépasse cette histoire mythique. Ce dossier est issu d’une journée d’étude qui a eu lieu en septembre 2012 dans le cadre du projet de recherche „Die katastrophische Feerie“, conduit à l’université d’Erfurt par Jörg Dünne et Gesine Hindemith avec le soutien de la Deutsche Forschungsgemeinschaft. En complément des études sur les différents champs esthétiques et culturels qui sont sous le charme de la féerie au début du XX e siècle et jusqu’à l’époque contemporaine, nous avons mené un entretien avec le critique de cinéma et compositeur Michel Chion: il a donné en concert, lors de la journée d’étude à Erfurt en 2012, sa pièce TU, 16 adaptation en musique concrète de la Flûte enchantée de Mozart qui entretient maintes relations avec la féerie. Le texte de cet entretien, ainsi que quelques extraits sonores de TU, se trouvent disponibles sur le site internet du projet de recherche: www.uni-erfurt.de/ literaturwissenschaft/ feerie/ materialien/ tu. Pour ceux qui veulent poursuivre les recherches sur la féerie moderne que nous entamons ici, ce dossier se termine par une brève bibliographie de recherche, rassemblée avec le soutien d’Albert Ibáñez Sampol et Cindy Schmidt, les auxiliaires de recherche du projet qui nous ont également aidés à la publication de ce dos- 9 DDossier sier. Nous les remercions pour leur travail, ainsi qu’Anne Marquez pour avoir revu très scrupuleusement les textes de tous les contributeurs dont la langue maternelle n’est pas le français. Enfin, nous savons gré aux éditeurs de Lendemains de la publication de ce dossier. 1 Paul Ginisty: La Féerie, Paris, Michaud, 1910 (voir également sur Internet: http: / / gallica. bnf.fr/ ark: / 12148/ bpt6k241347k), 218. 2 Cf. Roxane Martin: La Féerie romantique sur les scènes parisiennes, 1791-1864, Paris, Honoré Champion, 2007. 3 Cf. au sujet du „Zaubertheater“ viennois Volker Klotz: „Wiener Vorstadttheater“, in: id., Dramaturgie des Publikums, Würzburg, Königshausen & Neumann, 1998, 25-88; au sujet du „teatro de magia“ cf. le Portal comedias de magia de la „Biblioteca virtual Miguel de Cervantes“: http: / / www.cervantesvirtual.com/ bib/ portal/ teatrodemagia/ pcuartonivelf9e1.html? conten=presentacion; cf. aussi Maria Imhof: Schneller als der Schein. Theatralität und Beschleunigung in der spanischen Romantik, Bielefeld, transcript, 2013. 4 Émile Zola: „La Féerie et l’opérette“, in: Œuvres complètes, vol. X, Le Naturalisme au théâtre (1881), ed. Henri Mitterand, Paris, Nouveau Monde, 1968, 179-187, 180. La formule de la féerie comme un „rêve éveillé“ remonte jusqu’aux chroniques théâtrales de Théophile Gautier, qui était un grand amateur de la féerie. Cf. sa revue de Les Pilules du diable, dans son Histoire de l’art dramatique en France depuis vingt-cinq ans, 6 t., Bruxelles, Hetzel, 1858-1859, t. 1, 225-229, 225. 5 Cf. le dernier paragraphe de l’étude de Ginisty, op. cit., 238: „Ce sont les poètes qui nous garderont la féerie, s’anoblissant par la grâce de la pensée et la beauté de la forme.“ 6 Ginisty: „En guise de préface“, op. cit., 7-11, 7sq. 7 La „treizième fée“ ne porte pas encore ce nom chez Perrault, elle n’apparaît que dans la version des frères Grimm: „Dornröschen“, in: Kinder- und Haus-Märchen, t. 1, Berlin, Realschulbuchhandlung, 1812, 225-229. 8 Emile Zola: Nana (1879/ 80), ed. Henri Mitterand, Paris, Gallimard, coll. „folio classique“, 2002, ch. I, 21-51. 9 Hélène Laplace-Claverie: Modernes féeries. Le théâtre français du XX e siècle entre réenchantement et désenchantement, Paris, Honoré Champion, 2007, 95-158. 10 Walter Benjamin: Gesammelte Schriften, t. V/ 1-2, Das Passagen-Werk, ed. Rolf Tiedemann, Francfort-sur-le-Main, Suhrkamp, 1991, vol. 2, 1074. Cf. à ce sujet Isabel Kranz: Raumgewordene Vergangenheit. Walter Benjamins Poetologie der Geschichte, München, Fink, 35-45; cf. aussi les contributions de Gesine Hindemith et de Kurt Vanhoutte / Dieter Brusselaers dans ce dossier. 11 Cf. à ce sujet le fameux essai polémique de Guy Debord: La Société du spectacle (1971), Paris, Gallimard, 1996; cf. aussi les articles réunis par Isabelle Moindrot (ed.): Le Spectaculaire dans les arts de la scène du romantisme à la Belle Époque, Paris, CNRS Éditions, 2006. 12 Cf. à ce sujet Peter Brooks: The Melodramatic Imagination: Balzac, Henry James, Melodrama and the Mode of Excess, New Haven / London, Yale University Press, 1996; Ben Singer: Melodrama and Modernity. Early Sensational Cinema and its Contexts, New York, Columbia University Press, 2001. 13 En même temps, on ne doit pas sous-estimer l’influence qu’ont les fées jusqu’au XX e siècle sur l’évolution des médias techniques, comme le montrent les cinq photographies 10 DDossier connues sous le titre de „Cottingley Fairies“ qui se révélèrent être une supercherie quelque temps après, mais qui firent couler beaucoup d’encre entre 1917 et 1921: deux cousines anglaises prétendaient avoir pris en photo des fées et des gnomes près de leur maison natale. Ces photographies devinrent populaires à un tel point que l’écrivain Conan Doyle, le créateur de Sherlock Holmes, prit la défense des deux filles dans une série d’articles, rassemblés en livre sous le titre The Coming of the Fairies (New York, George H. Doran Company, 1921). Ce débat témoigne du lien étroit qui existe encore au début du XX e siècle entre médias (en tant que moyens de reproduction technique d’images) et médiums - au sens spiritiste - qui font apparaître à un public initié ou même plus vaste des phénomènes qui seraient autrement invisibles. Sur le lien entre média et médium en général, cf. Erhard Schüttpelz: „Mediumismus und moderne Medien - Die Prüfung des europäischen Medienbegriffs“, in: Deutsche Vierteljahrsschrift für Literaturwissenschaft und Geistesgeschichte, 86/ 1, 2012, 121-144. Je tiens à remercier Michel Chion pour avoir attiré mon attention sur l’histoire des Cottingley Fairies, ainsi que sur le film Photographing Fairies (1997), sous la direction de Nick Willing. 14 Dans le sens défini par Mikhaïl Bakhtine: „Formes du temps et du chronotope dans le roman“, in: Esthétique et théorie du roman, Paris, Gallimard, 1978, 235-398. 15 Pour ce terme, cf. l’analyse des féeries de Gustave Flaubert faite par Marshall C. Olds: Au pays des perroquets. Féerie théâtrale et narration chez Flaubert, Amsterdam, Rodopi, 2001, ch. III, 40-67. 16 Michel Chion: TU (1996/ 1977), Paris, Brocoli, 2006.