Oeuvres et Critiques
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0338-1900
2941-0851
Narr Verlag Tübingen
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2008
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Isabelle Degauque, Les Tragédies de Voltaire au miroir de leurs parodies dramatiques d’Œdipe (1718) à Tancrède (1760). Paris : Champion, 2007. 486 p.
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2008
Gilles Plante
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Comptes rendus Isabelle Degauque, Les Tragédies de Voltaire au miroir de leurs parodies dramatiques d’Œdipe (1718) à Tancrède (1760). Paris : Champion, 2007. 486 p. Version refondue d’une thèse soutenue à l’Université de Nantes en 2001, l’étude d’Isabelle Degauque amplifie avec bonheur le chapitre embryonnaire que Valleria Belt Grannis avait consacré, dès 1931, à trente-neuf parodies dramatiques de tragédies de Voltaire dans le cadre d’un survol général du genre parodique au temps des Lumières (Dramatic Parody in Eighteenth-Century France, New York, Institute of French Studies, p. 245-348). Dans le premier chapitre qui sert d’introduction, I. Degauque rappelle le « paradoxe plaisant » de Voltaire, si prompt à manier la satire et à donner des leçons, mais si mauvais joueur lorsque le procédé se retourne contre lui. En reprenant ensuite le corpus de V. B. Grannis puisé dans le répertoire de la Comédie-Italienne et du Théâtre de la Foire, l’auteur révèle une nouvelle parodie (Les Vacances du théâtre de Fuzelier, en 1724, contre Mariamne), en précise une autre (La Nouvelle Joute de Desvalières, parodie de Tancrède, en 1760), et en écarte deux : L’Amant déguisé qui vise plutôt Les Éléments de Roy, en 1754, et Le Grand Turc mis à mort, parodie de Zaïre, après 1774, dont le comique tient davantage au jeu de scène qu’au texte. Les parodistes ont nom Fuzelier, Lesage et d’Orneval ; Riccoboni, Biancolelli et Romagnesi ; Boucher, Cailleau, Carolet, Favart, Gallet, Grandval, Nadal, Pannard, Piron, Pontau, Sticotti, Valois d’Orville, etc., qui ont malmené quinze tragédies de Voltaire, depuis Œdipe, en 1718, jusqu’à Tancrède, en 1760, certaines ayant été parodiées plus ou moins intégralement jusqu’à six fois (Mariamne), cinq fois (Zaïre), quatre fois (Mérope), trois fois (Artémire, Alzire, Mahomet, Sémiramis, Tancrède) ou deux fois (Brutus, Ériphyle), tandis qu’Œdipe, La Mort de César, Zulime, Oreste et L’Orphelin de la Chine n’ont eu droit qu’à une seule parodie. Pour cerner la question, I. Degauque articule son propos autour de quatre grands axes. Dans un premier temps, elle s’interroge sur la nature même de la « parodie dramatique », en scrutant tour à tour les aspects purement dramaturgiques (titres, noms, espace, personnages, intrigue, morale), les frontières entre « comédies critiques » et « comédies satiriques », puis les liens avec la notion de spectacle (théories, jeu, costumes, musique). Une deuxième 164 Œuvres et Critiques partie consacrée à « l’orthodoxie littéraire » aborde le rôle de défenseurs que s’arrogent les parodistes surtout en matière de vraisemblance, avant de critiquer « l’écriture de Voltaire » proprement dite. Suit un exposé qui s’attache à « la dérive du tragique vers le spectaculaire » et à « l’exploitation abusive du pathétique » où l’influence de Shakespeare et de l’opéra se fait sentir, surtout dans les scènes de reconnaissance, et bouscule parfois la règle des bienséances, notamment lorsqu’il s’agit de représenter la mort sur scène. Le dernier volet évoque la part congrue dévolue par les parodistes aux « thèses voltairiennes » dans la mesure où elle se réduit à « la critique du méchant » qui combat l’Infâme, défend « le monolithisme psychologique », dénonce « un théâtre trop pédagogique » qui encombre l’action et bannit carrément « l’abstraction » ou le « débat d’idées » comme étrangers à l’intrigue. Deux tableaux synoptiques, suivis d’une bibliographie, un index onomastique et un index des œuvres citées, complètent l’ensemble. Les scènes parodiques les plus étoffées ou les mieux réussies, qui sont abondantes et adroitement résumées, permettent tour à tour d’illustrer tel ou tel aspect de l’étude selon une méthode qui a l’avantage d’être plus analytique que chronologique. Par leur diversité et leur à-propos, elles offrent un éventail captivant des moyens mis en œuvre par les parodistes pour souligner plus ou moins subtilement les failles ou les lacunes du génie dramatique de Voltaire. On pourra regretter, néanmoins, que le lecteur soit invité à aborder l’étude in medias res et à se contenter d’une brève « réhabilitation de la parodie dramatique » (p. 10-13) en lieu et place d’un véritable préambule qui jette les fondations de la parodie et en campe le décor tout au long du siècle. De même, le bref aperçu sur les écrits théoriques du temps (p. 98-102) appellerait un exposé plus fouillé sur les canons du genre, tout comme un parallèle dans le soin caricatural réservé aux tragédies de Voltaire par rapport aux autres dramaturges contemporains. Au-delà d’une compilation très éclairante et d’une analyse minutieuse fort réussie, au demeurant, qui apportent une mine de renseignements précieux et souvent inédits, il aurait sans doute fallu prendre un peu plus de recul afin d’en tirer des enseignements plus globaux et de mieux dégager, en conclusion, une solide réflexion esthétique sur la parodie et ses enjeux. En cela, l’étude pionnière semble s’étayer sur des choix stratégiques qui révèlent autant les qualités que les carences de la méthode, mais elle n’en ouvre pas moins de nouvelles voies de recherche. D’autres lacunes tiennent aussi à l’exploitation imparfaite de certaines sources. Ainsi, dès les toutes premières lignes de l’étude à propos du « paradoxe plaisant » de Voltaire face aux parodies, une observation du marquis d’Argenson sur Le Temple de Mémoire aurait pu éclairer l’hostilité du dramaturge contre les théâtres forains, dès 1725 (Notes sur les œuvres de théâtre, SVEC 42-43, p. 735). De même, il est un peu étonnant de lire (p. 119) que Persiflès est la « retranscription du chaos et de la confusion ressentis » à la Comptes rendus 165 première de Sémiramis, en août 1748, puisque l’amphigouri était déjà paru sans raison apparente dans le Mercure de septembre 1740 (É. Bourguinat (Le Siècle du persiflage, p. 23-24) et fut joué en privé chez la Dumesnil, dès 1747 (Mouhy, Abrégé du théâtre français t. I , p. 366) et non au Théâtre des Petits-Appartements, en décembre 1747, comme le prétend C. D. Brenner qui confond la pièce avec Ismène de Moncrif (Bibliographical List of Plays in the French Language 1700-1789, n° 9176). En outre, la parodie sans titre de Sémiramis, que Collé attribue à Riccoboni fils en septembre 1748 (Journal, t. I , p. 7-8) semble occultée (p. 450). Enfin, de la mystérieuse parodie de Sémiramis que Voltaire s’était félicité d’avoir déjouée à la cour comme à la ville et que tous les critiques ont imputé à Bidault de Montigny, faute de mieux, depuis deux cent cinquante ans, il aurait été opportun de réexaminer les faits, à défaut d’élargir le champ de recherche et de citer La Cabale de Saint-Foix, qui fut jouée à la Comédie-Italienne en janvier - février 1749 (voir notre article, « Un secret bien gardé : La Cabale de Saint-Foix, parodie muselée de Sémiramis », Cahiers Voltaire, n° 5, 2006, p. 23-50). Par ailleurs, une relecture plus soignée aurait sans doute permis d’éviter maintes coquilles : à côté du patronyme de Theodore Besterman qui est enjolivé systématiquement d’une double consonne finale, le texte pèche par quelques fautes de retranscription (« Tutie/ Tullie », p. 35 ; « 1729/ 1719 », p. 88, etc.), d’orthographe (« rôdées/ rodées », p. 27 ; « emblême », p. 153 ; « accélèreront », p. 232, etc.) ou d’accord (« tragédies fondés », p. 22 ; « toutes les écarts », p. 29 ; « aux tragédie », p. 51 ; « La comédienne s’est risqué », p. 131 ; « des scène », p. 202 ; « les héroïne », p. 340, etc.), ainsi que l’emploi fâcheux des points de suspension pour remplacer « etc. ». En conclusion, l’étude d’I. Degauque, par son ampleur et le souci du détail, présente donc le double mérite d’avoir défriché utilement un sujet d’une richesse très complexe et d’en avoir exploité les ressources selon une approche qui ouvre la voie à de nouvelles recherches sur des textes et dans des archives qui n’ont sans doute pas fini de nous étonner et de nous révéler leurs secrets. Gilles Plante Aurore Evain, Perry Gethner, Henriette Goldwyn (éds.), Théâtre de femmes de l’Ancien Régime 1530-1811. Anthologie en 5 volumes. Volume 2 : XVII e siècle. Publication de l’Université de Saint-Etienne, Collection La Cité des dames, 2008. 622 p. L’anthologie Théâtre de femmes de l’Ancien Régime est un ouvrage de première importance: une édition méthodique permettant au public contemporain
