Papers on French Seventeenth Century Literature
pfscl
0343-0758
2941-086X
Narr Verlag Tübingen
61
2008
3568
Discussion
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2008
pfscl35680115
PFSCL XXXV, 68 (2008) Discussion Jean-Marie Valentin : Oui, c’est un apport considérable de montrer que des éléments d’un grand texte ont par eux-mêmes une action et pas seulement l’ensemble, c’est cela qui est, je crois, très important, et c’est au fond le sort de tous ces grands poèmes héroïques, épiques, etc., que l’on connaît depuis la Renaissance. Il y a un autre mot qui m’a beaucoup intéressé, je l’attends un petit peu depuis le début, c’est le mot drame de martyr, comme mode de la tragédie moderne, c’est un aspect extraordinairement important dans le théâtre européen qui unit l’influence de Sénèque bien entendu à la conception chrétienne. Le sujet que vous avez évoqué ici, Madame Garofalo, Olinde et Sophronie est re-traité en Allemagne au début du XVIII e siècle chez Cronegk, et lorsque Lessing attaque au nom des Lumières le drame de martyr qu’il veut absolument liquider, éliminer du théâtre, il s’en prend à Olinde et Sophronie. Ce qui prouve que les littératures étaient elles-mêmes, parfois avec des décalages, mais peu importe, dans un mouvement général européen. Il y a sûrement des questions et des interrogations, ou comme tout à l’heure des adjonctions, des remarques. Cecilia Rizza : Vous avez évoqué ce thème qui est extrêmement important, de la justice pour les gens qui appartiennent à une certaine catégorie, et de la justice pour tout le monde. Mais il y a là un débat qui dépasse les poètes, il y a toute une discussion qui concerne les théoriciens de la justice : c’est, si vous voulez, le problème du rapport entre le pouvoir et la justice, je ne remonterai pas à Machiavel, mais enfin, tout au long de la seconde moitié du XVI e et du XVII e siècles, on discute de ce problème : jusqu’à quel point le pouvoir du roi ou des nobles dépasse les limites de la justice qui vaut pour tout le monde ? Il y a évidemment chez Corneille un écho de ce genre de discussion. Et en ce qui concerne Scudéry, vous avez raison, il cite le Tasse à propos d’Alaric, les discours du Tasse sont un des textes principaux pour Scudéry et toutes ses théories sur l’épopée, et aussi sur le roman ; dans ses préfaces, il parle de lui, il traduit même le Tasse, c’est donc quelqu’un qu’il connaît parfaitement bien, et ses allusions au Tasse viennent de soi , c’est une façon de se donner des titres de noblesse, si vous voulez. 116 Discussion Elena Garofalo : Oui, je n’ignore pas les débats sur l’exacte justice, la justice distributive, c’est le Professeur Ubaldo Floreschi qui m’a nourrie avec ces questions de politique, de morale, mais c’est vrai aussi que j’étais surprise de voir des coïncidences étonnantes au niveau du texte (je pourrais citer le texte de La Jérusalem) et surtout dans la disposition de ces réflexions sur la justice dans un schéma qui rappelle de près les schémas adoptés par Corneille dans Le Cid, et c’est là ce que je trouve surprenant, c’est la délimitation d’un bloc fictionnel qui comprend non seulement une action, mais aussi des réflexions sur la morale, sur la politique, sur la justice. Je suis convaincue que Corneille a approfondi ces débats, mais je crois qu’il y a quand même une corrélation entre les deux poètes.
