Papers on French Seventeenth Century Literature
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0343-0758
2941-086X
Narr Verlag Tübingen
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2009
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Jacqueline Duchêne: François de Grignan. Marseille: Ed. Jeanne Lafitte, 2008. 175 p. Bibliographie choisie
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2009
Marie-Odile Sweetster
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Comptes rendus 565 la plus concrète. Il semble que ce soit dans ce dernier domaine que l’influence d’Augustin se fait sentir davantage ; mais derrière la fidélité de surface à l’imaginaire augustinien des « vastes salles », on perçoit un souci, qui est bien propre au XVII e siècle, de fermer l’espace intérieur, d’y mettre de l’ordre et d’atténuer le sentiment d’admiration et d’horreur éprouvé par Augustin face à ces profondeurs sans fin : le cas le plus frappant à cet égard est la Démonstration de l’existence de Dieu de Fénelon. L’article de Brian Stock nous offre un aperçu de l’influence augustinienne sur la littérature anglaise, notamment sur la tradition méditative de la poésie du XVII e siècle et sur les utopies politiques de Thomas More et de Francis Bacon. Le volume se termine par une étude consacrée par Carlo Ossola à une petite anthologie des Confessions largement répandue au XVII e siècle et diffusée aussi bien dans une version latine, les Piissimi in Deum affectus cordis, que dans une réélaboration française, Les plus tendres sentiments d’un cœur envers Dieu : cet ouvrage se configure comme une « miniaturisation » du texte augustinien, dont elle conserve le caractère d’oratio en effaçant complètement la narratio. Les Confessions sont donc assimilées aux Psaumes avec leur tissu continu de prière, ce qui revient à effacer dans l’anonymat la persona de l’auteur, qui occupait autrefois le centre de l’œuvre. L’auteur anonyme de ce recueil fait donc subir au texte le même traitement qu’Augustin réservait à la Bible, faisant souvent de son ouvrage une « narration par citations bibliques ». Federico Corradi Jacqueline Duchêne : François de Grignan. Marseille : Ed. Jeanne Lafitte, 2008. 175 p. Bibliographie choisie. L’auteur de cette excellente biographie fait revivre un membre important de la famille de Madame de Sévigné, son gendre, François de Grignan (1632- 1714), dans le contexte historique et social d’une grande famille aristocratique du XVII e siècle. Jacqueline Duchêne, membre de l’Académie de Marseille, bien connue par ses précédentes biographies de Françoise de Grignan, Bussy-Rabutin, Henriette d’Angleterre publiées chez Fayard, était éminemment qualifiée pour entreprendre ce travail. Elle avait collaboré à la monumentale édition de la Correspondance de Mme de Sévigné, procurée par son époux, le regretté Roger Duchêne auquel le présent ouvrage est dédié : l’éminent spécialiste admirait la personnalité et l’oeuvre du comte de Grignan, « parfait honnête homme », administrateur habile, entièrement dévoué à son souverain, Louis XIV depuis sa nomination comme lieutenant- PFSCL XXXVI, 71 (2009) 566 général de Provence en 1669 jusqu’à sa mort en 1714, au retour de la dernière assemblée qu’il avait présidée. Le gouverneur en titre, le duc de Vendôme, ne montra jamais beaucoup d’intérêt à assumer la charge de gouverneur, malgré les craintes des Grignan qui tenaient à conserver un poste prestigieux dans leur famille. François Adhémar de Monteil, comte de Grignan dont l’ascendance remontait aux Croisades, avait commencé, selon la tradition des familles aristocratiques par une carrière militaire, colonel du régiment de Champagne, puis capitaine des chevau-légers (sic) de la reine Anne d’Autriche. A Paris, il avait dans sa jeunesse fréquenté l’hôtel de Rambouillet, « gage de culture et de manières choisies » (p. 8), il y avait rencontré Mme de Sévigné, jeune veuve à la mode et avait su lui plaire. Sa touffe de cheveux noirs le faisait ressembler à un chat, ses nombreuses conquêtes féminines l’avaient fait surnommer le « Matou » par ses familiers et par les chansonniers. Ses deux premiers mariages l’avaient laissé veuf, le premier lui avait donné deux filles. Le versement de la dot de chacune des deux épouses décédées à ses héritières allait lui coûter bien des soucis financiers. Son troisième mariage avec Françoise Marguerite de Sévigné le fit entrer dans la famille de la célèbre marquise. Celle-ci, passionnément attachée à sa fille, avait compté la garder auprès d’elle à Paris et avait loué une maison dans le quartier du Marais qui devait assurer au trio une demeure confortable. La nomination du comte comme lieutenant-général de Provence en 1669 vint déranger ces beaux projets. Cette nomination représentait pour lui un honneur et un devoir qu’il ne pouvait refuser, mais il comptait bien emmener avec lui sa jeune femme qui pouvait le soutenir dans ses fonctions officielles. Pour elle, c’était une crise de partage dans ses devoirs et ses affections. Bouleversée, elle accouche prématurément à Livry, chez son oncle, en novembre 1669 d’un enfant mâle. En avril 1670, son époux part seul pour la Provence, sa belle-mère ayant fait état des dangers du voyage pour sa fille qui attendait une seconde naissance. Celle-ci, très désireuse de rejoindre son époux, ne pourra se mettre en route qu’en février 1671. Désormais, la vie du couple va être marquée par les allées et venues entre Paris et la Provence. Le comte ne peut négliger ses obligations onéreuses de représentant du roi. Il ne peut s’éloigner de son poste qu’avec la permission d’un ministre. Si le souverain est en guerre, ses représentants sont tenus à remplir leur devoir militaire, de garder leur province contre des incursions possibles de l’ennemi. M. de Grignan est appelé à reprendre la principauté d’Orange qui appartenait à Guillaume d’Orange, ennemi de Louis XIV dans la guerre franco-hollandaise (pp. 57-59, 61-65). Faute de crédits alloués par le ministre de la guerre, l’expédition d’Orange coûte cher Comptes rendus 567 au lieutenant-gouverneur : il a obtenu la victoire sans effusion de sang et reçoit des lettres de félicitations de Colbert, Louvois et de Louis XIV lui-même. D’autres devoirs militaires surgissent au cours de sa longue carrière : il avait dû rassembler des troupes pour une expédition contre la flotte hollandaise, contre Messine (p. 95). Le duc de Savoie qui a adhéré à la ligue d’Augsbourg se révèle un ennemi dangereux sur les frontières. Plus tard, Grignan participe au siège de Nice (p. 132), lutte contre les envahisseurs savoyards (p. 134-136), jusqu’à la défense de Toulon attaquée par les Autrichiens et les Piémontais en juillet 1707, il livre avec vigueur « son dernier combat, décisif» (p. 164), combat épique : « six heures de combat acharné finalement victorieux, six heures d’un combat digne d’un jeune officier, lui qui va avoir soixante-quinze ans » (p. 164). L’autre versant de son activité administrative est celui de la réunion annuelle de l’assemblée des délégués qui doivent approuver le « don gratuit », c’est-à-dire le versement de l’impôt au trésor royal, toujours à court de fonds à cause du coût énorme des guerres. Dès son arrivée en Provence, le comte avait convoqué l’assemblée générale des communautés formée des députés des trente six villes et des sept procureurs, pour éviter les rivalités entre Aix et Marseille, à Lambesc. Le roi demandait 500.000 livres, les députés en avaient proposé 200.000. Chaque année, l’offre de l’assemblée était bien inférieure aux exigences royales et provoquait des négotiations difficiles. Grignan se voit obligé de menacer de dissoudre l’assemblée récalcitrante et de faire appel à Paris. Finalement, ses manoeuvres diplomatiques lui permettent d’obtenir la somme requise, ainsi que les 5.000 livres pour l’entretien de ses gardes, malgré l’opposition des représentants de la famille rivale, les Forbin. Cette situation se répète à chaque assemblée. Au cours de celle de 1671 à Lambesc, naît leur fils Louis-Provence : les députés se proposent comme parrains et se chargent des frais d’un somptueux baptême. Pour soulager leur représentant, le pouvoir royal nomme Forbin-Janson ambassadeur en Pologne. Le roi apprécie évidemment les services et la loyauté de Grignan et estime que le duc de Vendôme manque d’expérience. Une autre difficulté financière surgit avec l’achat du régiment de Joseph de Grignan. La comtesse estime que leur jeune fils Louis-Provence, âgé de 18 ans, devrait prendre la place de son oncle et l’acheter au prix fixé de 22.500 livres. Le comte doit de nouveau emprunter. La famille s’est sacrifiée pour assurer à leur unique descendant mâle un brillant avenir. Elle a arrangé pour lui un mariage avec une jeune fille richement dotée, au prix d’une mésalliance car il faut bien « fumer ses terres » (pp. 145-148). Les deuils viennent frapper la famille en désarroi : Mme de Sévigné « se consume d’inquiétude » au sujet de l’état de santé de sa fille. Prise d’une PFSCL XXXVI, 71 (2009) 568 fièvre continue, elle refuse la visite de sa bien-aimée pour se consacrer à ses devoirs religieux et remplit d’admiration son gendre comme « une femme forte » (p. 148). Pour éviter de tristes souvenirs, le couple Grignan s’installe à Marseille dans la maison de fonction du lieutenant gouverneur. Leur fils, guerroyant en Allemagne, atteint de petite vérole meurt sans descendance en 1703 à Thionville, son régiment passe à son lieutenant-colonel (p. 159). Sa mère, accablée de chagrin, meurt en août 1705. Le comte mourra, toujours au service du roi, fin décembre 1714 : fin d’une famille, fin d’un règne. La seule héritière Pauline de Grignan, marquise de Simiane doit accepter la vente de toutes les possessions de sa famille ; seules lui restent les malles contenant les lettres de sa grand’mère à sa mère, pieusement conservées par celle-ci. Pauline en comprend la valeur et les confie à son cousin Amé- Nicolas, fils de Bussy-Rabutin qui en publie une partie avec celles de son père (pp. 172-173) et fait faire une copie de l’ensemble. Tous les lecteurs et lectrices désireux de mieux connaître la société française du XVII e siècle et quelques-unes de ses grandes figures, trouveront dans cet ouvrage concis, bien documenté sans pédantisme, écrit dans un style vivant et élégant, un complément très appréciable à la Correspondance de Mme de Sévigné, des portraits pleins de verve et de sympathie pour le comte de Grignan et son entourage. Ils éprouveront pour le personnage central toute l’estime et l’admiration que l’auteur a su susciter en sa faveur. On aurait souhaité en annexe une chronologie détaillée par année, un index des noms de personnes et des lieux. (La situation économique explique sans doute ces omissions.) Marie-Odile Sweetser Yvan Loskoutoff : Rome des Césars, Rome des papes : la propagande du cardinal Mazarin. Paris : Champion, 2007. 741 p. In 1650 Gabriel Naudé published the Judgement de tout ce qui a esté imprimé contre le Cardinal Mazarin (s.l.s.d., but Paris, Imprimerie Royale, 1650), in 718 pages, an analytical and critical inventory of the works unfavorable to his patron, Cardinal Mazarin. In 2007, Ivan Loskoutoff published the book reviewed here, a 741-page inventory/ historical analysis of the texts, images, paintings and medals produced that were favorable to Mazarin. In both, there is clarity of presentation and a sympathetic awareness of Mazarin’s strengths; but Loskoutoff sets his analyses in the grand tradition of encomiastic literature in the Western world. Inventory-taking ought not be
