Papers on French Seventeenth Century Literature
pfscl
0343-0758
2941-086X
Narr Verlag Tübingen
61
2013
4078
Pascale Thouvenin (éd.): René Rapin, Les Réflexions sur la poétique et sur les ouvrages des poètes anciens et modernes (1684). Édition critique et présentation par Pascale Thouvenin. Paris: Honoré Champion, 2011 («Champion classiques, Série littératures»). 821 p
61
2013
Volker Kapp
pfscl40780215
Comptes rendus 211 publication; a graphic depiction of the play’s action; an introduction to the art of rhetoric as it pertains to the classical theater, including a rhetorical analysis of Émilie’s opening monologue; a brief and rather sketchy chronology covering 1) Corneille’s career, 2) history and politics of the period, and 3) literature, science, and arts; and most original, an essay entitled “Actualité de Cinna,” in which Riffaud argues Corneille’s modernity as a geopolitical thinker. Ranging broadly in this final essay, Riffaud discusses a recent political tendency toward oligarchy and plutocracy as well as the problem of legitimacy. He quotes political scholars and also makes reference to Sarkozy, the Arab uprisings (and the overthrow of tyrants), and finally argues that the self-consciousness of Corneille’s characters in this play, particularly Auguste, is distinctly modern. He concludes: “La tragédie de Corneille atteste ainsi cette émergence de la modernité au XVII e siècle” (p. 237). Finally, the edition ends with a bibliography in which surprisingly the shortest section is “Ouvrages et articles sur Corneille.” It includes only twenty-one items, a number of which contain only brief sections on Cinna. I was particularly struck by the absence of Jacques Ehrmann’s excellent “Les Structures de l’échange dans Cinna.” A further weakness is the absence of anything written on the play in English or even published outside of France. In conclusion, this is a careful, well-crafted edition, with only a few typographical errors (“derrière” instead of “dernière,” p. 30; “luis” instead of “lui,” l.57; “prudence” instead of “clémence,” p. 210; and a linenumbering problem on page 120). There is a rather heavy emphasis on Georges de Scudéry, but Corneille’s rival and opponent provides a novel perspective from which to consider Cinna. Overall, what Riffaud lacks in depth in terms of his analysis of the play, he makes up convincingly in breadth. This is an exceptionally wide-ranging edition that succeeds admirably at placing the play in numerous contexts, thereby illuminating one of Corneille’s greatest tragedies from multiple angles. Nina Ekstein Aurore Évain, Perry Gethner, Henriette Goldwyn (dir.) : Théâtre de femmes de l’Ancien Régime. Volume 3 : XVII e -XVIII e siècle. Saint- Étienne : Publications de l’Université de Saint-Étienne, 2011 (« La cité des dames »). 609 p. On sait que les femmes dramaturges de l’Ancien Régime, en particulier celles du XVII e siècle, ont été redécouvertes grâce aux gender studies dès les années 1990. Outre-Atlantique, plusieurs chercheurs ont ainsi mis en lu- PFSCL XL, 78 (2013) 212 mière une véritable terra incognita 1 et permis de saisir « la condition inhumaine » 2 de ces femmes de lettres. En 1993, Perry Gethner faisait paraître une première anthologie en deux volumes intitulée Femmes dramaturges en France (1650-1750), pièces choisies 3 . Depuis quelques années, il poursuit son entreprise éditoriale en collaboration avec Henriette Goldwyn et Aurore Évain, dont les travaux, plus récents, sont tout aussi déterminants pour le domaine. Et ce à travers la monumentale anthologie du Théâtre de femmes de l’Ancien Régime (trois volumes parus à ce jour 4 , deux à paraître 5 ), couvrant la période du XVI e au XIX e siècle, et réunissant « pour la première fois en France » les pièces d’une trentaine de femmes dramaturges, soit une cinquantaine de pièces 6 . Le troisième volume présente neuf pièces de dramaturges de la fin du XVII e siècle et du début du XVIII e siècle (1680-1725) : 1/ Catherine Bernard : Laodamie, reine d’Épire, tragédie (1689) ; Brutus, tragédie (1690) ; 2/ Mme Ulrich : La Folle enchère, comédie (1691) ; 3/ Catherine Durand : Comédies en proverbes, proverbes dramatiques (1699) ; 4/ Louise-Geneviève de Sainctonge : Griselde, ou la princesse de Saluces, comédie (entre 1692 et 1714) ; 5/ Marie-Anne Barbier : Arrie et Pétus, tragédie (1702) ; Le Faucon, comédie (1719) ; 6/ Madeleine-Angélique de Gomez : Habis, tragédie (1714) ; Marsidie, reine des Cimbres, tragédie (1724). L’anthologie débute par une « Introduction » de Perry Gethner, laquelle précise les évolutions socio-historiques et les caractéristiques esthétiques de la 1 Cecilia Beach, French Women Playwrights Before the Twentieth Century : A Checklist, Greenwood Press, 1994. 2 Henriette Goldwyn, « Femmes auteurs dramatiques au dix-septième siècle : la condition inhumaine », Les Cahiers du dix-septième siècle, vol. IV, n°1, 1990, p. 51- 62. 3 Perry Gethner, Femmes dramaturges en France (1650-1750), pièces choisies, vol. 1 et 2, Tübingen, Gunter Narr Verlag, « Biblio 17 », 1993 et 2002. Voir également la version anglaise : The Lunatic Lover and Other Plays by French Women of the 17th & 18th Centuries, Portsmouth (NH), Heinemann, 1994. 4 Volume 1 : XVI e siècle, 2006 ; volume 2 : XVII e siècle, 2008 ; volume 3 : XVII e - XVIII e siècle, 2011. 5 Volume 4 : XVIII e siècle ; volume 5 : XVIII e -XIX e siècle. 6 Pour en savoir plus sur la description et les objectifs du projet éditorial, voir le site compagnon de l’anthologie (http: / / www.theatredefemmes-ancienregime.org/ ), et tout particulièrement Aurore Évain, « Théâtre de femmes : les enjeux de l’édition » (http: / / www.theatredefemmes-ancienregime.org/ presentation/ ). Comptes rendus 213 période envisagée, la création de la Comédie-Française servant de délimitation chronologique. La distance critique vis-à-vis du règne de Louis XIV, des modèles et des valeurs qui l’accompagnent, s’est accentuée. La nouvelle génération d’autrices en témoigne avec une acuité vive, au point qu’elles « figurent parmi les dramaturges les plus subversifs à l’origine [de] transformations » thématiques (p. 9) : « démantèlement de l’héroïsme » et « décadence du patriarcat », allant de pair avec « l’exaltation des femmes héroïques » (Catherine Bernard, Marie-Anne Barbier) ; émergence du thème de l’amitié féminine (Mme de Sainctonge, Mme de Gomez, Catherine Durand) ; satire morale d’une société mue par l’argent et la cupidité (Mme de Sainctonge) ; cynisme accru envers l’institution du mariage (Mme Ulrich, Mme Durand). Perry Gethner montre que la prise de distance se manifeste aussi à travers un réseau d’intertextualité, les femmes dramaturges se plaisant à reprendre des grands textes classiques (ceux de Corneille et de Racine) tout en leur faisant subir des décalages, sources de connivence avec les lecteurs-spectateurs (Marie-Anne Barbier). Autre domaine d’innovations, celui des formes : sous l’effet de la montée des valeurs bourgeoises, le registre pathétique et larmoyant s’impose progressivement (Catherine Bernard, Mme de Gomez, Marie-Anne Barbier, Mme de Sainctonge), avant de trouver à s’épanouir chez Mme de Graffigny. Des avancées décisives ont également lieu sur le plan éditorial puisque toute cette production, à l’initiative même des dramaturges, vient à être publiée dans des œuvres mêlées ou des œuvres complètes, signe incontestable de l’affirmation d’une persona d’auteur. Perry Gethner rappelle enfin le succès scénique de la plupart de ces pièces, qui atteste la parfaite intégration des femmes dramaturges dans l’univers théâtral de leur époque. Pour preuve ultime, leur ouverture aux nouveaux genres et formes : livrets d’opéra (Catherine Durand) et proverbes dramatiques des théâtres de société (Catherine Durand), gages d’expression libre. En somme, la première qualité de cette anthologie, outre qu’elle redonne sa visibilité à un corpus méconnu du grand public et qu’elle éclaire le contexte dans lequel ces femmes ont écrit, publié et fait jouer leurs pièces, est de souligner combien elles évoluèrent dans des réseaux littéraires et des circuits éditoriaux tout à fait identiques à ceux de leurs homologues masculins. Le présent volume prouve qu’en dépit des préjugés et des accusations qu’elles durent subir (dont le fréquent déni d’auctorialité), les femmes dramaturges osaient s’investir dans les mêmes genres - tragédie et comédie -, se permettaient des incursions dans les mêmes territoires de l’histoire antique et contribuaient largement, elles aussi, aux mutations thématiques et formelles de leur art.
