eJournals Vox Romanica 58/1

Vox Romanica
vox
0042-899X
2941-0916
Francke Verlag Tübingen
Es handelt sich um einen Open-Access-Artikel, der unter den Bedingungen der Lizenz CC by 4.0 veröffentlicht wurde.http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/121
1999
581 Kristol De Stefani

Louis Remacle, Étymologie et phonétique wallonnes. Questions diverses, Genève (Droz) 1997, 262 p. (Bibliothèque de la Faculté de Philosopie et Lettres de l’Université de Liège 267)

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1999
W.  Müller
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l’éditrice qui, à force d’avoir côtoyé les matériaux pendant des années, arrive à une grande clairvoyance. Elle réussit de la sorte à faire un pas de plus dans de nombreux cas et à dépasser le stade FEW (par ex. 23 N5, 29 N3, 31 N30, 77 N7 et N10) et à corriger même les théories des meilleurs wallonisants (Haust: 109 N1; Remacle: 23 N4; Francard: 31 N30). Une nouvelle fois, on constate que l’atlas wallon se distingue par son travail méticuleux et extrêmement soigné. On souhaite un progrès rapide à cet ouvrage fondamental. W. Müller H Louis Remacle, Étymologie et phonétique wallonnes. Questions diverses, Genève (Droz) 1997, 262 p. (Bibliothèque de la Faculté de Philosopie et Lettres de l’Université de Liège 267) Peu avant sa mort en 1997, le maître des études wallonnes a mis au point un recueil d’articles inédits. Inutile de dire que chacune des vingt-deux contributions est empreinte de son habituelle érudition,de circonspection et de vues originales, sans parler de l’amour du détail soigné. Un bon spécimen à cet égard est le n o 4: L’origine du liég. beûr, fr. bure «puits de mine» (23-30). Après avoir rappelé la théorie de son maître Jean Haust, communément acceptée 1 , il montre les côtés hypothétiques de son étymologie ( anc. h. all. bûr maison établie sur un puits ) et l’illustre par un passage narratif du 15 e siècle qui décrit un puits primitif dépourvu de cabane protectrice (26). Les nombreuses sources lexicographiques et techniques indiquent des sens comme puits, fosse, puisard sur une aire qui s’étend jusque dans le Hainaut français. Ce qui plus est, dans les notaires liégeois des 17 e -18 e siècles apparaît, à côté de puits de mine , une acception plus générale trou, excavation (28s.). Dès lors, le lecteur se laissera facilement convaincre qu’un étymon comme *bora trou, excavation convient infiniment mieux au sens puits de mine qu’une appellation désignant la maison, ceci d’autant plus que des mots appartenant au type bôre (s. f.) trou, creux continuent à vivre dans le sud de la Belgique 2 . Ce sont les termes miniers qui ont de tout temps intéressé l’auteur et dont la Wallonie est si riche et si contributrice au lexique français. L’origine et le f du liég. coufâde, fr. cuffat (45-63; n o 7) commente un mot qui désigne une sorte de tonne, de récipient dans lequel descendait le mineur et qui était aussi utilisé pour remonter le charbon. Son centre géographique est le Borinage et le nord français. Il n’est guère douteux que nous ayons affaire à un membre de la famille de cuve. L’argumentation de l’auteur se situe avant tout sur le plan phonétique. Dans Le français épingle et le wallon spingurlèt (65-84; n o 8), Remacle tranche dans une vieille pomme de discorde étymologique. L’auteur se demande si le modeste mot wallon, qui désigne en effet un petit clou de sabot , n’est pas capable d’amener de la lumière sur le problème de l’étymon. Comme toujours dans ces cas difficiles, il se prononce pour la solution la plus simple: ici, ce serait l’origine spinula, sans idée de croisement avec spicula, mais avec métathèse de lr (*épingleret) en rl. 323 Besprechungen - Comptes rendus 1 M. Pfister, 1995s.: «L’apport de Jean Haust à la lexicologie et à l’étymologie wallonnes», Dialectes de Wallonie 23s.: 81-94, notamment p. 84-86. 2 FEW 1: 435-36. L’étude sur L’origine du verbe «moquer» (132-37; n o 14) part de l’attestation liégeoise ancienne desmocqueler souiller qqn de morve pour l’insulter et rapproche donc moquer de moucher. Dans L’origine du malmédien wèpse «guêpe» (187-204; n o 19), l’auteur réussit vite à démontrer que la métathèse wèspe wèpse n’est due ni à l’ingérence de apis abeille comme le pensait Gilliéron, ni à celle de l’allemand dialectal Wepse guêpe comme le pensait v. Wartburg. Il s’agit tout bêtement d’un procédé phonétique indigène que Remacle découvre dans plusieurs mots wallons de structure similaire. L’auteur était aussi un grand toponymiste. Dans Le toponyme lîri (Wallonie orientale) (101-11; n o 11), il réunit les nombreux exemples de ce type de nom avec force attestations anciennes. Même si toutes les difficultés phonétiques ne sont pas résolues, l’identité avec l’afr. larris terrain en déclivité devient plus que probable. Mais il arrive aussi que l’auteur s’attache à démontrer les faiblesses de la recherche traditionnelle sans en arriver à une solution qui lui soit propre. Ce n’est pas le moindre mérite de l’étude Le toponyme èsneû (85-92; n o 9) d’avoir établi le dossier complet du problème. Ce vénérable type de nom s’est fixé par écrit dès le 9 e siècle: 814 Astanido, 827 Astanetum, etc. Le fait qu’il se trouve à cheval sur la frontière des langues ne simplifie pas les choses. En dehors de la Wallonie, on remarquera en premier lieu Essen (Ruhr), en 874 Astnide, mais aussi des localités flamandes comme Assent. Il est évident que le groupe entier remonte à un seul et même étymon, mais Remacle refuse d’y voir un dérivé du germanique Ast branche . Quoi qu’il en soit, les dix représentants wallons se sont forcément formés sur place à l’aide du suffixe -etum. Dans Le substantif wallon et français banse (15-21; n o 3), Remacle tire son argument principal de la toponymie. Observant que Condes et Condé ( condate), Marne et Maronne ( matrona), Oise et Isère ( isara) laissent conclure à deux accentuations différentes d’un même mot celtique, il envisage pour les deux mots wallons banast (s. f.) sorte de manne et banse (s. f.) manne l’étymon celtique banásta resp. bánasta corbeille . Cette hypothèse aurait un net avantage sur celle de Gamillscheg et de Wartburg: on pourrait se passer du détour via le germanique pour expliquer l’accent initial de bánasta. On voit que, souvent, il faut bien du courage pour reprendre des problèmes mille fois débattus et y apporter des lumières nouvelles. Mais obtiendrait-on des résultats par d’autres moyens? Il est essentiel, en tout cas, d’analyser à fond les faits de la Belgique wallonne afin d’en faire fructifier la recherche romane. Je n’hésiterai pas à qualifier de magistrales les 22 études de Remacle. On peut néanmoins leur trouver un défaut: la modestie de l’auteur, qui n’insiste pas suffisamment sur le caractère bien-fondé de ses remarques 3 . Il n’y a qu’un seul souhait à formuler: on espère que le niveau des études wallonnes continue à être digne de noms comme Jean Haust et Louis Remacle. W. Müller H 324 Besprechungen - Comptes rendus 3 Pour la suite des recherches wallonnes, deux desiderata: 1° Que les indications bibliographiques soient moins allusives. 2° Que les sigles soient expliqués dans chacun des ouvrages.