Vox Romanica
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0042-899X
2941-0916
Francke Verlag Tübingen
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1999
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Kristol De StefaniJean Scheidegger (1926-1999)
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1999
Anne-Marguerite Fryba-Reber
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Jean Scheidegger (1926-1999) Le 29 mars 1999, Jean Scheidegger s’est éteint à Berne. Né à Lausanne le 2 décembre 1926, d’un père emmentalois et d’une mère biennoise, Jean Scheidegger grandit sur les bords du Léman, puis, après la mort accidentelle de son père en 1934, à Bienne. Il avait déjà une place d’apprenti dans une banque quand son professeur de français André Tissot réussit à persuader sa mère de l’envoyer au gymnase: conscient des sacrifices supplémentaires que cette formation représentait pour sa famille, il travailla d’arrache-pied et obtint son certificat de maturité en 1945. C’est alors qu’il s’incrivit à l’université de Berne pour y étudier les langues et littératures françaises et allemandes. En 1949, il fut obligé d’interrompre son séjour à la Sorbonne pour soigner à Leysin une tuberculose, suite du surmenage qu’il s’était imposé pendant ses années d’études. Après sa licence en 1952, il enseigna le français à l’Ecole normale de Thoune en préparant une thèse de doctorat sur Georges Bernanos 1 . En 1962, il fut nommé professeur de français au Gymnase de Bienne où il entreprit une thèse d’habilitation en linguistique qui lui valut le titre de privat-docent en 1977 et celui de professeur honoraire en 1979. Enseignant à l’université de Berne dès 1963, il obtint un poste complet de lecteur de langue française en 1970 et initia des générations d’étudiants aux subtilités de la grammaire française et de la traduction jusqu’à sa retraite en 1991. Sa recherche sur l’arbitraire et la motivation en français et en allemand 2 amenait Jean Scheidegger à un examen critique des thèses de Charles Bally. Le contraste entre le français, abstrait, clair, statique et l’allemand, précis, concret et dynamique, autrement dit le caractère plutôt arbitraire du français (disque) opposé au caractère plutôt motivé de l’allemand (Schallplatte), constitue le fondement de l’argumentation du linguiste genevois, en particulier dans sa Linguistique générale et linguistique française. Fort d’une méthode de linguiste philologue, Jean Scheidegger soumet à une critique serrée la thèse de la motivation relative des signes linguistiques en relevant les ambiguïtés et fluctuations de la terminologie de Bally. Visant à vérifier la motivation par le signifié et celle par le signifiant, sa propre enquête le conduit finalement à nuancer fortement le caractère abstrait du français et le «phénoménisme» de l’allemand. 1 J.-R. Scheidegger, L’œuvre romanesque de Georges Bernanos, Neuchâtel 1956. La soutenance eut lieu quelques semaines avant la mort de son directeur de thèse, Pierre Kohler. 2 J. Scheidegger, Arbitraire et motivation en français et en allemand. Examen critique des thèses de Charles Bally, Berne 1981. Pour une évaluation pondérée de l’apport de cette étude, cf. le compte rendu de P. Wunderli dans cette revue même 42 (1983): 295-300. A l’heure où les débats concernant la clarté du français n’ont rien perdu de leur vigueur 3 , à l’heure aussi où se manifeste un regain d’intérêt pour l’apport de l’École genevoise de linguistique générale, l’étude de Jean Scheidegger, dont la perspicacité et la justesse d’analyse nous font regretter qu’elle soit sa seule publication dans le domaine de la linguistique, conserve toute son actualité et mérite une attention renouvelée de la part des linguistes et des historiens de la linguistique. Berne Anne-Marguerite Fr ba-Reber 385 Jean Scheidegger (1926-1999) 3 Parmi les contributions récentes, on consultera en particulier P. Swiggers, «A l’ombre de la clarté française», Langue française 75(1987): 5-21; H. Meschonnic, De la langue française. Essai sur une clarté obscure, Paris 1997; et J. Trabant, «Die französische Sprache gegen ihr Genie verteidigen», ZFSL 109(1999): 1-24.
