Vox Romanica
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Francke Verlag Tübingen
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Kristol De StefaniGaston Tuaillon, La Littérature en francoprovençal avant 1700, Grenoble (Ellug, Université Stendhal) 2001, 280 p.
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P. Gresti
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261 Besprechungen - Comptes rendus grand respect. La mise à disposition de ce matériel complétera nos connaissances sur cette région tardivement germanisée et permettra sans doute à la discussion pluridisciplinaire de faire des avancées conséquentes. M. Pitz H Gaston Tuaillon, La Littérature en francoprovençal avant 1700, Grenoble (Ellug, Université Stendhal) 2001, 280 p. Le recueil édité par Gaston Tuaillon offre une anthologie dialectale de l’ensemble du domaine francoprovençal pour les xvi e et xvii e siècles, comblant enfin une lacune dans la publication d’œuvres écrites en langue vernaculaire. En effet, en fonction de la période délimitée, ce volume établit le pont entre l’ouvrage de P. Aebischer 1 et celui de R. Merle 2 et, en fonction du champ, il élargit à tout l’espace ce que S. Escoffier et A.-M. Vurpas ont réalisé pour le Lyonnais 3 . L’auteur, dialectologue familier des réalités savoyardes, a notamment, par son activité de recherche et d’enseignement, approfondi l’étude linguistique du francoprovençal 4 . Gaston Tuaillon rassemble un florilège des œuvres d’expression patoise dont la plupart sont dispersées dans des revues spécialisées. L’objectif didactique louable et associé à la volonté de vulgarisation s’affirme clairement: «Nous avons écrit ces textes francoprovençaux pour aider le plus grand nombre de lecteurs à s’intéresser au contenu des œuvres» (28). De fait, cet ouvrage, rédigé dans un registre courant et optant pour une transcription commode, invite à une lecture aisée qui favorise l’accessibilité de nombreux textes méconnus et souvent difficiles à trouver. Gaston Tuaillon entraîne le lecteur dans une découverte essentiellement culturelle d’un pan de la littérature gallo-romane. D’emblée, le titre apparemment descriptif, La Littérature en francoprovençal avant 1700, balaie le lien paradoxal entre le francoprovençal et la littérature, dénonçant ainsi nombre de préjugés accrochés à la notion de francoprovençal et à son ancienneté. D’une part, qui connaît les monuments de la littérature francoprovençale? Et d’autre part, les dialectophones eux-mêmes ne s’étonnent-ils pas encore souvent sur le fait d’une écriture dialectale? La tradition écrite ne s’est guère développée en patois, langue réservée à la communication orale; d’ailleurs les locuteurs des régions concernées ignorent généralement le terme «francoprovençal». Pourtant, dans ce domaine, des imprimés ont paru et paraissent en patois, témoignant d’une volonté d’écrire et de diffuser, littérature s’entend au sens large de ce qui est rendu public. À titre indicatif, dans le seul Valais romand, on salue le tirage de trois recueils 5 de textes narratifs, de poèmes et de chants dans le courant de l’année 2002. En résumé, dans le domaine francoprovençal, la diglossie a conduit à l’écriture en langue française et à l’emploi quotidien des multiples patois dans la tradition orale. Aussi l’écritu- 1 P. Aebischer, Chrestomathie franco-provençale. Recueil de textes franco-provençaux antérieurs à 1630, Berne 1950. 2 R. Merle, Une naissance suspendue, l’écriture des «patois», Genève, Fribourg, Pays de Vaud, Savoie, de la pré-Révolution au Romantisme, La Seyne 1990. 3 S. Escoffier/ A.-M. Vurpas, Textes littéraires en dialecte lyonnais. Poèmes, théâtre, noëls et chansons (xvi e -xix e siècle), Lyon 1981. 4 G. Tuaillon «Le francoprovençal: progrès d’une définition», TraLiLi 9/ 1 (1972): 293-339. Pour la biographie et la bibliographie de Gaston Tuaillon, cf. Espaces romans: études de dialectologie et de géolinguistique offertes à Gaston Tuaillon. Grenoble 1988: 11-24. 5 É. Dayer, Paroles et Musiques. Témoignages et souvenirs. Patois, français, latin, Sierre 2002 (+ CD audio). L. Reynard, Au temps joyeux de mon enfance, Savièse 2002 (+ CD audio). Le Patois de Savièse, 7. A. Lagger, Chermignon, garde ton patois! Tsèrmegnôn, ouârda lo patouè! Sierre 2002. 262 Besprechungen - Comptes rendus re dialectale résulte-t-elle d’un choix significatif. Dans son anthologie, Paul Aebischer observe «si haut qu’on remonte dans le temps, à Lyon, à Grenoble, en Savoie, dans ce qui fait aujourd’hui la Suisse romande, on constate que l’idéal de qui écrivait peu ou prou était le français, ou, au pis aller, le bourguignon . . . De tout temps, le franco-provençal a été un pisaller; et ce n’est pas d’hier non plus qu’il sert surtout à faire rire» (5). À propos de la fonction d’une écriture francoprovençale, Zygmunt Marzys rectifie avec raison que la première affirmation se rapporte aux chartes et à quelques œuvres religieuses du Moyen Âge. À partir du xvi e siècle paraissent des textes comiques et «depuis, lorsqu’on écrit en francoprovençal, ce n’est pas par ignorance ou par embarras, mais en pleine conscience de la différence spécifique entre cet idiome et la langue de culture, et avec l’intention de tirer des effets littéraires de cette différence même» (VRom 37: 193-94). Contrairement à la scripta francoprovençale, la littérature se rapproche de la langue parlée, localisable du fait que l’auteur écrit dans sa langue maternelle, le patois de son lieu d’origine. Le plan de l’ouvrage de Gaston Tuaillon s’articule sur une division chronologique en quatre périodes à l’intérieur desquelles l’auteur adopte une présentation systématique: l’établissement de la liste des œuvres, une introduction relative à la période, des extraits littéraires et une conclusion partielle. Dans son choix de publication, l’auteur retient les œuvres les plus connues, qu’il estime les plus importantes ou les plus originales (25). Les extraits sélectionnés sont heureusement assortis d’une traduction placée soit sur la deuxième colonne, soit ligne à ligne, et sont accompagnés de commentaires éclairant le contexte de l’œuvre: notices biographique, historique, linguistique et politique. Des résumés relatent la trame de l’intrigue, dégagent les thèmes principaux et rendent la lecture agréable. Étant donné l’objet de l’ouvrage, l’Introduction (7-28) revêt une importance conceptuelle indéniable. La prise de position de Gaston Tuaillon dans le débat définitoire autour de la sémantique des termes «patois», «dialecte», «langue» demeure fondamentale en ce qu’elle place le dialecte, non comme moyen terme quantitatif entre le local et le national ou qualitatif entre l’absence d’écriture et le prestige d’une littérature, mais comme un processus généré par la communication intradialectale 6 , et le patois de telle ou telle localité est une langue. De ce fait, Tuaillon inscrit la variation diatopique au centre de la définition du francoprovençal: «une langue géographiquement variable» (12). La fonction dialectalisante de l’écriture se révèle en raison de la différence situationnelle de la communication écrite par rapport à la communication orale. L’encodage graphique atténue les différences du fait que tous les auteurs se réfèrent au système utilisé en français. Parallèlement, l’acte de lecture s’opère par un transfert automatique dans le patois du décodeur. Cette procédure dialectalisante entraîne deux corollaires: d’une part les graphèmes tels que u ou ch ne revêtent pas toujours la même valeur ni celle qu’ils ont en français, et d’autre part des graphèmes comme z ne représentent pas obligatoirement un phonème. Il en découle l’impossibilité d’une interprétation phonétique basée sur une graphie nécessairement complexe et variée. Néanmoins, Gaston Tuaillon simplifie en transcrivant un certain nombre d’extraits dans la graphie de Conflans «qui permet à tout patoisant savoyard et à tout romaniste connaissant un peu le francoprovençal de comprendre la grammaire et le lexique de Nicolas Martin» (58). Aucune koinè ne s’est développée, aucun dialecte synthétisé n’a affleuré dans ce domaine de sorte que la langue de tel auteur, avec ses caractéristiques lexicales, phonétiques, morphologiques et, le cas échéant, syntaxiques, reste aisément localisable. La Première partie, Le Moyen Âge (29-45), répertorie quatre titres. Durant cette période, les rares textes francoprovençaux remplissent une fonction utilitaire, qu’elle soit religieuse ou sociale. Le nom le plus connu est celui de Marguerite d’Oingt, décédée en 1310, 6 Cf. G. Tuaillon, «La communication intradialectale», in: J.-F. P. Bonnot (ed.), Paroles régionales, normes, variétés linguistiques et contexte social, Strasbourg 1995: 255-64. 263 Besprechungen - Comptes rendus qui a rapporté dans son patois du Lyonnais les expériences mystiques. Pour le Moyen Âge, ces textes et les documents d’archives constituent les seuls témoins du francoprovençal. La Deuxième partie, Le XVIe siècle (49-88), comporte treize titres dont un seul n’avait pas été édité à ce jour. Parmi ces œuvres, l’impression du vivant de l’auteur ne concerne que deux noëls publiés dans des recueils français ainsi que les textes du Savoyard Nicolas Martin et du Grenoblois Laurent de Briançon. Le xvi e siècle inaugure la littérature francoprovençale: «Pour toutes les autres œuvres francoprovençales du Moyen Âge et du xvi e siècle, on peut se demander si ces textes constituent vraiment une littérature. Avec Laurent de Briançon, le doute n’est plus permis; son œuvre, bien que non française, relève de la littérature de France» (50). La tradition écrite francoprovençale acquiert immédiatement ses deux caractéristiques fondamentales. D’un côté, les Farces de Vevey (entre 1520 et 1525) comme l’Histoire de la vie du glorieux sainct Martin (1565) distribuent des rôles en français et en patois. «Ainsi on a commencé très tôt à confier au patois la fonction de servir le burlesque» (69). D’autre part, la naissance de cette littérature se produit au cœur de luttes religieuses et politiques marquées par les tensions entre la Genève protestante et la Savoie catholique, puis entre la Savoie et le Dauphiné. Ces agressions commencent par la lettre avant la saisie des armes: une littérature engagée s’exprime en patois, parfois en termes brutaux. La Chanfon satirique de Jehan des Prez contre les prêtres, peu avant 1535, ouvre la voie. «La littérature en patois a accompagné l’histoire qui, dans cette région, allait modifier durablement le tracé des frontières politiques» (54). La Troisième partie, Autour du règne d’Henri IV (89-142), se fonde sur un cycle d’œuvres polémiques. L’auteur regroupe deux types d’ouvrages: treize textes historiques et cinq textes moraux et comiques. Cette brève période se place sous le signe de la guerre: des tensions entre la France et la Savoie occupée, deux tentatives pour assiéger Genève, les troubles de la Ligue. Textes et chants patois ponctuent les événements. Dans son exposé, Gaston Tuaillon répartit chronologiquement les textes de cette période en cinq étapes. Le premier texte polémique dirigé de Lyon contre le duc de Savoie s’impose comme modèle du genre satirique. En 1589, le pays de Gex est définitivement rattaché au royaume de France: Le Cruel Assiegement de la ville de Gais constitue une refonte d’un poème genevois, La Guerra de Gex. Le ton reste aimable. Selon le contenu et les critères linguistiques, l’auteur est genevois, un Genevois installé à Lyon. Puis, Jean Menenc publie, au début de l’invasion militaire de la Savoie, une chanson destinée à encourager ses compatriotes (97). À Lyon, des prologues aux spectacles de danse et des monologues écrits en patois invitent souvent à rire aux dépens du duc de Savoie. Un seul texte, La Joyeuse Farce à trois personnages (1595) présente des dialogues et évite le sujet politique (98-106). Dans une troisième phase, le cycle de l’Escalade de décembre 1602 célèbre la victoire des Genevois qui refoulèrent les attaquants. Le traité de St-Julien scelle la fin des ambitions savoyardes et le mutisme de la verve polémique de Lyon. En revanche, les textes vengeurs se multiplient à Genève dans les mois suivants. Gaston Tuaillon cite une vingtaine d’incipits de chansons de l’Escalade, mais aucune ne rencontra autant de succès que le Cé qu’é laino (118-19) composé de 68 strophes de décasyllabes qui est devenu l’hymne national de la République et Canton de Genève. Après l’Escalade, l’exposé sérieux de La Sommation de la trompette de Savoye aux Genevois «tranche avec les facéties de toutes les œuvres précédentes» (123). Finalement, en 1603, La Moquerie savoyarde ou l’histoire du Meunier, son fils et l’âne (127-31) conduit à l’apaisement. Elle est constituée de monologues comiques et conclut la campagne de dénigrement dirigée contre le duc de Savoie. Le texte, ne se rattachant pas à un événement particulier, survit longtemps dans le répertoire des conteurs. Aimé Constantin, le dialectologue de Thônes, assure l’avoir entendu, lors d’une foire, autour de 1850 (131). 264 Besprechungen - Comptes rendus La littérature polémique produite durant cette décennie vise à maintenir la ferveur populaire tant à Genève qu’à Lyon. Gaston Tuaillon montre comment «Née des moqueries traditionnelles dont on gratifie ses voisins, la littérature lyonnaise devient militante pour resserrer les liens qui rattachent des sujets fidèles à leur roi courageux et sage» (140-41). Dans la Quatrième partie, Le XVIIe siècle (143-268), la liste des ouvrages s’allonge et les foyers de production se multiplient. En même temps que les genres se diversifient, le théâtre accède à la première place des lettres francoprovençales. La Buyandiri, la lavandière, dotée d’une grande force comique, s’instaure en personnage de théâtre. Dans cette dernière section du recueil, l’auteur obéit essentiellement au devoir de mémoire: «Plus que les autres chapitres de cet ouvrage, celui-ci essaie de lutter contre un oubli immérité» (149). Quatre noms dominent l’activité littéraire: Bernardin Uchard, Jean Millet, Jean Chapelon et Brossard de Montaney. En 1614, le Bressan Bernardin Uchard, représentant du Tiers État aux États généraux, rédigea une œuvre politique, Lo Guémen d’on povro labory de Breissy su la pau qu’el a de la garre (les lamentations d’un pauvre paysan de Bresse sur la peur qu’il a de la guerre) dont Gaston Tuaillon publie trois extraits composant successivement un tableau de la situation paysanne face aux soldats, un hymne à la paix et un chant du bonheur paysan à travailler sa terre (154-64). La Piedmontoise, poème militaire (168-72) comportant des faits héroïques, narre avec réalisme la prise d’un bourg fortifié. L’artisan menuisier grenoblois, Jean Millet, publia une tragi-comédie, La Pastorale de Janin en 1633 (191-97) qui connut quatre éditions du vivant de l’auteur et dix éditions posthumes avec quelques modifications du titre: Pastorale de Lhauda ou Pastorale de la Faye de Sassenage. Un succès unique dans l’histoire de la littérature francoprovençale! Son autre pièce composée de cinq actes, La Pastorale de la constance de Philin et Margoton 1635, ne connaît qu’une édition (200-03). Pendant les vingt-cinq années suivantes, Jean Millet n’imprime plus un seul vers. La production littéraire du Stéphanois Jean Chapelon (1647-94) dépasse 15’000 vers qui nous sont parvenus: dix noëls, une trentaine de poésies susceptibles d’être chantées. Par la gravité des thèmes abordés - évocation de la situation pénible des orphelins, requêtes auprès des autorités, critiques de la politique municipale - et par la tonalité réaliste, il exprime surtout, dans Descripsion de la misera de Santetieve, l’an 1693 et 1694 (240-47), la misère de la ville industrielle, la famine, la souffrance dans des témoignages saisissants. Quant au Bressan J. Brossard de Montaney (1638-1702), il ne publia aucune de ses œuvres (247-57). Une harangue (1685) rédigée dans le patois d’Annecy s’érige comme «premier exemple d’un personnage nouveau dans la littérature en patois francoprovençal, celui de l’indigène ridicule par le patois même qu’il parle, en un lieu où seules d’autres langues sont admises» (258). Ainsi les connotations associées au patois naissent du mépris social. Finalement, Gaston Tuaillon dresse l’inventaire de 46 noëls datant du xvi e ou du xvii e siècle (264-68). L’ouvrage s’interrompt sous le titre En guise de conclusion (269-76). Dans sa prise de congé, l’auteur aspire avoir corrigé l’opinion d’une maigre littérature francoprovençale et pose la question du rapport entre cette littérature et l’imprimé. Avec justesse, il note que, dans le même moment, la littérature d’expression française a davantage brillé dans cette même région: Louise Labbé, Maurice Scève, Calvin, François de Sales, Honoré d’Urfé, Vaugelas. «Aucun texte ne témoigne d’une querelle de langues» (270). Les chansons politiques consolident dans la langue de tous l’opinion publique. La polémique contre le duc de Savoie est écrite en patois. La littérature francoprovençale a connu deux périodes éclatantes: la veine politique à Lyon, à Genève et en Savoie à la fin du xvi e siècle et les œuvres révolutionnaires ou antirévolutionnaires. Enraciné dans la littérature orale, le texte dialectal a d’abord été créé pour être dit, répété, chanté, écouté et mémorisé. L’oralité rappelle que l’imprimé est aléatoire, seule im- 265 Besprechungen - Comptes rendus porte la représentation. Les noëls bressans de Brossard ne sont sortis de presse que plus tard, ils étaient lus, recopiés, appris. Combien d’écrivains patoisants ont confié leurs œuvres à des tiroirs perdus! Par les sujets traités, par la langue choisie et par la perspective adoptée, la littérature francoprovençale s’instaure comme «littérature de la terre des hommes tels qu’ils ont été tout simplement» (275). Durant ces deux siècles, la littérature patoise fut essentiellement urbaine et versifiée, elle se déplacera progressivement vers la matière rurale et s’exprimera dans la prose. Bien que rédigées dans le patois de la localité de l’auteur, ces œuvres étaient et demeurent lisibles, l’intercompréhension et le seuil de tolérance des variantes dialectales écrites atteignant des niveaux élevés. L’anthologie de Gaston Tuaillon invite à une lecture culturelle et narrative de cette littérature; au vu des matériaux rassemblés, une seconde lecture de type linguistique et littéraire s’avérera pourtant tout aussi fructueuse. G. Pannatier H Jacques Monfrin, Études de philologie romane, Genève (Droz), 2001, xi + 1035 p. (Publications romanes et françaises 230) Leggendo l’Avant-propos di questo imponente volume, s’indovina subito almeno una delle chiavi di lettura che le curatrici - G. Hasenohr, M.-C. Hubert e F. Vielliard - hanno voluto proporre ai lettori dei 39 saggi di Jacques Monfrin qui raccolti: inseguire cioè l’immagine che lo studioso «se faisait de la philologie». Si tratta certo di un’immagine ritagliata, secondo un disegno in larga parte soggettivo, all’interno di una bibliografia poderosa (la si veda in extenso alle p. 981-97), che, modellata diversamente, avrebbe potuto portare anche a risultati diversi, e magari ugualmente suggestivi. Ciò che importa, però, è che la selezione di cui questo libro è il risultato rappresenta, mi pare perfettamente, «la rigueur scientifique, la passion du travail bien fait, la lucidité et la ténacité aussi» di Jacques Monfrin: qualità che sono state una costante del suo lavoro filologico (cf. il necrologio scritto da G. Hasenohr e M. Zink in Romania 117 [1999]: 2). E vale per Monfrin ciò che lui stesso scriveva di un grande padre della Filologia romanza, Paul Meyer: «dès les premiers travaux, une indiscutable maîtrise s’impose: netteté de l’exposé, lucidité de la critique» (25). È lo stesso Monfrin a chiarirci del resto che cosa significasse per lui la filologia nelle ultime righe della lezione inaugurale del suo corso di filologia romanza presso l’École des chartes (6 novembre 1958) - che oltretutto è una bella storia della disciplina in Francia durante il xix secolo attraverso i suoi protagonisti - qui opportunamente riprodotta (3-20): «La philologie» scrive dunque Monfrin «impose à l’esprit une discipline qui ne s’oublie pas: elle exige en effet, fixant notre attention sur les détails de la langue, une vigilance de tous les instants; elle interdit la lecture hâtive et superficielle, source non seulement d’erreurs de fait, mais aussi de méprises sur la pensée et sur les hommes» (20). Sarebbe impossibile in questa sede render conto integralmente della ricchezza e della varietà del panorama offertoci dai saggi di Monfrin raccolti nelle Études, e suddivisi nelle quattro sezioni «À l’école de Paul Meyer», «Philologie et histoire de la langue», «Philologie et histoire des textes» e «Philologie et histoire de la culture»: come si vede, lo spettro completo degli interessi di un filologo romanzo è qui rappresentato. E d’altra parte non si vuole nemmeno proporre un’ulteriore scelta, una più angusta e settoriale lettura che risulterebbe, questa sì, mortificante, e riuscirebbe solo a deprimere più del lecito la poliedrica personalità dello studioso. A parziale risarcimento si possono tuttavia segnalare alcuni passaggi che si sono subito dimostrati fondamentali per gli studi di filologia romanza. Comincerei senz’altro con il per molti versi pionieristico articolo sul manoscritto provenzale C