eJournals Vox Romanica 62/1

Vox Romanica
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Francke Verlag Tübingen
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2003
621 Kristol De Stefani

Octovien de Saint-Gelais, Le séjour d’Honneur. Édition critique, introduction et notes par Frédéric Duval, Genève (Droz) 2002, 534 p. (Textes Littéraires Français 545)

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2003
M.  Canal
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274 Besprechungen - Comptes rendus Octovien de Saint-Gelais, Le séjour d’Honneur. Édition critique, introduction et notes par Frédéric Duval, Genève (Droz) 2002, 534 p. (Textes Littéraires Français 545) À peine entrons-nous dans ce livre que F. Duval nous avertit: son premier but est de remplacer l’édition, fautive à tous points de vue, de J. A. James 1 et de contribuer ainsi à la réhabilitation de l’opus magnum d’Octovien de Saint-Gelais. Que le nouvel éditeur soit immédiatement rassuré: l’«injustice a bel et bien été réparée»! Sérieux, précis et soigné, voilà les trois adjectifs qui nous viennent spontanément à l’esprit lorsque nous découvrons le travail de F. Duval. Désormais nous n’avons plus aucune excuse pour négliger ce poème dont l’importance capitale pour l’histoire des idées et de la littérature à la fin du xv e siècle n’est plus à prouver 2 . L’introduction qui précède l’édition du texte proprement dite, comporte une centaine de pages et s’organise en deux grandes sections. La première, après avoir fourni les informations biographiques de rigueur sur Octovien de Saint-Gelais, expose quelques hypothèses quant à la date de composition du Séjour d’Honneur et quelques pistes pour un commentaire littéraire à approfondir. En ce qui concerne la biographie, nous nous devons de signaler que, bien que l’éditeur s’appuie, faute de mieux, essentiellement sur les anciens travaux de l’abbé H.-J. Molinier 3 , H. Guy 4 , G. Colletet 5 et sur les renseignements que l’œuvre poétique d’Octovien lui-même fournit, il ne manque pas de prendre le recul critique nécessaire face à ce genre de documents et de nous enjoindre à une extrême précaution. Il n’en garde que les éléments réellement objectifs et utiles pour guider le lecteur dans un poème où l’autobiographie, sans en constituer le contenu ou le message primordial, sert de «prétexte et d’emblème» 6 . Pour la datation du Séjour, F. Duval reprend le dossier ouvert par J. Lemaire 7 et nuance le terminus a quo et le terminus ante quem fixés par celui-ci en s’aidant des références du texte à des personnages et des événements contemporains à l’auteur; ainsi il conclut que «l’œuvre est en gestation dès 1489 et sa rédaction s’achève après le 14 août 1494» 8 . Le commentaire littéraire s’attache à déterminer, parmi les diverses interprétations proposées par la critique de ces trente dernières années, la leçon à retenir du «traicté de la vie humaine» 9 d’Octovien de Saint-Gelais. Si Le séjour est tributaire d’un certain nombre de traditions littéraires 10 , ce n’est que pour mieux les détourner. Ainsi le titre fait directement référence à des œuvres contemporaines comme Le trosne d’Honneur de Jean Molinet ou Le temple d’Honneur et de Vertus de Jean Lemaire. Or, explique F. Duval, il n’est pas question 1 Octavien de Saint-Gelais, Le Séjour d’Honneur, édité par Joseph Alston James, Chapel Hill 1977 (North Carolina Studies in the Romance Language and Literatures 181). 2 Nous sommes loin aujourd’hui de trouver Le séjour d’Honneur aussi dénué d’intérêt que le prétendait H. Guy au début du xx e siècle. Les analyses de J. Lemaire, F. Cornilliat, D. Ménager, S. Cigada, entre autres, soulignent à chaque fois la subtilité et la richesse dont ce livre fait preuve. 3 Abbé H.-J. Molinier, Essai biographique et littéraire sur Octovien de Saint-Gelays évêque d’Angoulême (1468-1502), Rodez 1910. 4 H. Guy, «Octovien de Saint-Gelays», in: Histoire de la poésie française au XVIe siècle, I L’Ecole des rhétoriqueurs, Paris 1910 (Bibliothèque littéraire de la Renaissance, n.sér. 4). 5 G. Colletet, Vies d’Octovien de Sainct-Gelais, Mellin de Sainct-Gelays, Marguerite d’Angoulesme, Jean de la Peruse, Poëtes Angoumoisins, Paris 1863: 1-69. 6 Le séjour d’Honneur, p. 11. 7 J. Lemaire, «Note sur la datation du Séjour d’Honneur d’Octovien de Saint-Gelais», R 102 (1981): 239-49. 8 Le séjour d’Honneur, p. 21. 9 Le séjour d’Honneur, IV.xxvi. 10 F. Duval ne fait pas état dans cette édition des nombreuses sources du Séjour, mais il annonce un article à paraître dans Romania intitulé «Les sources du Séjour d’Honneur d’Octovien de Saint-Gelais». 275 Besprechungen - Comptes rendus ici de demander l’accès à ce séjour idéal, mais d’en faire cadeau au roi pour qu’il le réinvestisse du véritable honneur; celui que l’acteur acquiert auprès d’Entendement et qui se concrétise avec le «douleureux escript» 11 que le narrateur dédie à Charles viii. Il ne s’agit cependant pas d’appliquer l’idéal de la vita contemplativa à la vita activa, ni à l’exercice du pouvoir, comme l’éditeur semble l’avancer, mais de démontrer à travers l’expérience individuelle qu’il y a deux «séjours d’honneur»; la cour terrestre et la cour céleste, à laquelle l’homme doit se préparer en suivant le chemin de Raison. En ce qui concerne le genre tout nous pousse à rapprocher cette œuvre du pèlerinage de vie humaine: le «type-cadre» introductif du songe; le monde allégorique; le didactisme; la recherche du bonheur . . . Seulement, une fois cette structure posée, Octovien s’amuse aussitôt à la pervertir en faisant de ce cheminement vers le salut divin une terrible quête des plaisirs mondains. À l’instar de la Consolation de Philosophie, le prosimètre devait «garantir une meilleure adéquation entre les paroles d’un personnage, son caractère et la façon dont il les exprime» 12 . Or, encore une fois, l’auteur s’ingénie à brouiller les frontières entre les instances énonciatives de l’acteur et du narrateur, et pour faire tenir à des personnages disqualifiés d’avance, tels que Sensualité, Abus ou Vaine Espérance, des discours dont la rhétorique moralisante ou didactique en fait oublier le message. Bref, nous pensons que si F. Duval ne devait retenir qu’une des qualités de ce poème complexe, il choisirait sans hésiter «l’art du contre-pied» 13 dans lequel l’ambiguïté ne concerne pas la leçon que le rhétoriqueur entend nous donner, mais le jeu qu’il met en place pour faire avancer cette expérience hautement morale. Dans la deuxième partie de l’introduction, F. Duval énonce d’abord les principes et les critères suivis pour l’établissement du texte. Il décrit et compare minutieusement les différents témoins du Séjour: deux manuscrits et trois éditions anciennes. Il aboutit à un stemma à deux branches qui rend difficile le choix entre les deux manuscrits subsistants; il tranche en faveur du témoin A, Paris BNF, fr. 12783 qui, en plus d’être une copie de l’exemplaire de présentation offert à Charles viii, se présente comme quelque peu supérieur au manuscrit B, Paris BNF, fr. 1196. De façon très claire, il expose les principes d’édition (règles de transcription; établissement du texte fidèle autant que possible à A; présentation des corrections, des variantes et des leçons rejetées) qu’il appliquera dans le texte de façon exemplaire. Il examine ensuite la langue de son manuscrit de base qui ne comporte aucune empreinte dialectale particulière et «donne un bon exemple de l’état de la langue à l’extrême fin du xv e siècle, telle qu’elle se pratiquait à la cour et dans les compositions poético-savantes». L’éditeur complète enfin cette étape linguistique par une étude très utile de la versification et donne quelques pistes pour l’analyse des voix et fonctions poétiques de ce prosimètre. Enfin l’introduction s’achève avec la traditionnelle analyse linéaire ou résumé de l’œuvre qui suivra immédiatement. L’apparat critique se complète de trois autres outils: les notes critiques, le glossaire et l’index. Pour en apprécier leur validité et la qualité du texte édité, nous devrions procéder à une lecture et un contrôle systématiques de l’ensemble, ce qui n’est pas possible dans les limites d’un CR; deux passages, arbitrairement choisis (III.2 et III.v) suffiront à illustrer notre propos. Relevons pour commencer la richesse du glossaire qui répond de façon satisfaisante à presque toutes les questions qui lui sont posées. Mais on peut se demander par exemple pourquoi le terme de licterature (I.1.4 et IV.ix.195) n’y figure pas: il n’a pas, à l’époque, le sens que nous lui donnons aujourd’hui, mais désigne tout ce qui est écrit, l’ensemble des connaissances. Toujours dans le glossaire, le lecteur appréciera les compléments critiques 11 Le séjour d’Honneur, IV.xxvi.47. 12 Le séjour d’Honneur, p. 29. 13 Le séjour d’Honneur, p. 51. 276 Besprechungen - Comptes rendus donnés entre parenthèses, qui signalent les néologismes et les analyses dans les différents outils de référence; ceux-ci peuvent se révéler utiles lorsqu’on travaille les œuvres des Grands Rhétoriqueurs. Les notes critiques présentent quelques pistes d’analyse et des commentaires fort intéressants de telle sorte que très égoïstement, nous aurions aimé que F. Duval nous en offre davantage. L’index enfin se présente comme l’instrument le moins abouti, même s’il est vrai que l’éditeur fait un travail remarquable en identifiant tous les contemporains cités par Octovien; notamment pour un public d’étudiants, il aurait été utile de fournir quelques précisions en ce qui concerne les figures mythologiques et certains autres personnages comme: Saturne, Pluton, Neptunus, Tulle, Boëce Le Romain, Senecque. Ainsi, nous relevons parmi les personnifications, à l’entrée Cas Fatal: «frère de Fortune», alors qu’il est dit aux vers III.v. 11119-120: «Frere et mary par naturel edict / De Fortunë». L’indication est non seulement incomplète, elle n’offre (mais cela n’est pas le but de l’index) aucun élément permettant de cerner la personnification et sa fonction. Ceci dit, l’édition s’en sort avec tous les honneurs lors de ce sondage! Nous en voulons pour preuve la comparaison de ces mêmes extraits avec l’édition de J. A. James, comparaison facilitée par la concordance entre les deux éditions que F. Duval propose dans son volume 14 . Il suffit d’une lecture des lignes 4828 aux lignes 5050 de l’édition américaine pour apprécier à sa juste valeur la nouvelle édition. J. A. James mélange ses rares notes critiques et ses variantes, son glossaire est lacunaire (par exemple: entretiennement (l. 4828); clore (l. 4835); discourir (l. 4855) relevés par F. Duval, sont absents), son index inexistant, sa ponctuation induit en erreur et rend le texte difficile d’accès. Contrairement à F. Duval, il n’interprète pas les erreurs de son manuscrit de base et ne s’engage à aucun moment à corriger ou à compléter son texte en fonction des autres témoins, et nous ne parlons pas des erreurs de lecture 15 ! Nous ne pouvons que remercier F. Duval de nous offrir enfin une édition fiable d’un texte-clé au passage du Moyen Age à la Renaissance. C’est avec un plaisir renouvelé que le lecteur suivra désormais Octovien de Saint-Gelais sur les chemins difficiles qui conduisent au Séjour d’Honneur. M. Canal H Marie-Claude De Crécy (ed.): Jehan Wauquelin, La belle Hélène de Constantinople. Mise en prose d’une chanson de geste. Édition critique, Genève (Droz) 2002, 661 p. (Textes littéraires français 547) Im 15. Jahrhundert entstand generell und ganz speziell am Hof der großen Herzöge von Burgund (1363-1477), insbesondere zur Zeit Philipps des Guten (1419-67), eine äußerst große Anzahl an Prosafassungen von zeitlich vorangehenden Versdichtungen. Auch das hier anzuzeigende Werk Jean Wauquelins ist eine dieser zahlreichen Nachgestaltungen. Es entstand, wie man im Prolog erfährt, im Jahre 1448 «selon le contenu d’un petit livret rimé» (14). Diese Vorlage ist eine von einem anonymen Autor im 14. Jahrhundert geschriebene, 15500 Verse umfassende chanson de geste 1 . Inhaltlich geht es bei Wauquelins in 153 jeweils mit einer Überschrift versehenen Kapitel gegliederten Roman, der zur Gruppe der «romans d’action» (LXII) gehört, um die «ystoire 14 F. Duval ne présente pas une bibliographie sommaire ni sur Octovien ni sur le Séjour; à ce sujet, consulter l’article: «Les sources du Séjour d’Honneur d’Octavien de Saint-Gelais», R 121 (2003): 164-91. 15 L’unique intérêt que garde encore cette édition résulte de la reproduction de certaines des enluminures du manuscrit A, BNF. fr. 12783, qui font cruellement défaut à l’édition de F. Duval. 1 Der Text dieses in drei Manuskripten überlieferten Epos wurde ediert von C. Roussel, La Belle Hélène de Constantionple, chanson du XIV e siècle, Genève, 1995 (Textes littéraires français 454).