Vox Romanica
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Francke Verlag Tübingen
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Kristol De StefaniLa langue religieuse italienne avant le Concile de Trente (des Origines à la première moitié du XVIe siècle).
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Franco Pierno
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La langue religieuse italienne avant le Concile de Trente (des Origines à la première moitié du XVI e siècle). Éléments pour un système en diachronie 1. Introduction Dans les pages qui suivent, on tachera de dégager dans une perspective diachronique les lignes directrices d’une approche linguistique de la langue religieuse italienne avant le Concile de Trente (1545-63), ainsi que de ses traits caractéristiques. Cette perspective s’impose comme une condition fondamentale pour la compréhension du fonctionnement d’une langue qui, avant tout, doit son identité au déroulement et aux changements de l’histoire de l’Église et de l’histoire religieuse en général. Notre but consiste à fournir les premiers éléments fondateurs d’une vision systématique de la langue religieuse italienne et, par conséquent, à en cerner l’identité en tant que «langue de spécialité». À ce propos, force est de constater que les approches scientifiques disponibles pour l’étude de cette thématique nous laissent encore sur notre faim 1 . En revanche, il existe bien des études concernant les traits les plus caractéristiques d’autres langues de spécialité («lingue speciali»; cf. Cortelazzo 1988: 247-51), en italien, langues déterminées par des contextes de communication spécifiques: langages techniques, scientifiques, juridiques, économiques, etc. Ces langues de spécialité peuvent constituer des ensembles langagiers uniques, dont la spécificité est due à leur fonctionnalité ainsi qu’à leur appartenance à un secteur de connaissances et/ ou d’activités spécifiques 2 . Dans leurs différentes évolutions internes ont été repérés des traits communs concernant la formation du lexique, la morpholo- 1 Les études qui présentent une approche plus générale du problème de la langue religieuse sont peu nombreuses et, dans la quasi totalité des cas, ne concernent que des époques bien déterminées: pour le Moyen Âge l’on peut consulter Casapullo 1999: 175-82; 201-18; pour les XV e , XVI e , respectivement, Tavoni 1992: 35-46 et Trovato 1994: 149-60. L’anthologie «des langues de l’Église» de Maraschio/ Matarrese 1998 présente en revanche une large palette de textes, parmi lesquels plusieurs inédits. Pour ce qui concerne les caractères de la langue religieuse, les auteures esquissent dans leur introduction des remarques intéressantes à propos des «dichotomies» caractérisant l’histoire de la langue ecclésiastique («latin-langue vulgaire»; «sacralité-accessibilité»; «écriture-oralité»; etc.). Nous renvoyons en outre au chapitre «lingua religiosa in Italoromania» (Pierno à paraître). 2 «Una varietà funzionale di una lingua naturale, dipendente da un settore di conoscenze o da una sfera di attività specialistiche, utilizzata nella sua interezza, da un gruppo di parlanti più ristretto della totalità di parlanti la lingua di cui quella speciale è una sua varietà, per soddisfare i bisogni comunicativi (in primo luogo quelli referenziali) di quel settore specialistico» (Cortelazzo 1988: 246). gie lexicale, la morphosyntaxe et l’organisation textuelle. Par ailleurs, la langue religieuse italienne post-tridentine a également été considérée par certains spécialistes comme un système cohérent, au point de représenter, grâce à l’action uniformisante de l’Église, un jalon déterminant vers la formation de l’italien standard 3 . Une analyse systématique de la langue religieuse d’avant le Concile se présente, au contraire, bien hérissée de difficultés, étant donné la quantité et la variété des genres textuels religieux: textes bibliques, textes liturgiques officiels et privés, textes mystiques, manuels de spiritualité et de dévotion, sermons, récits hagiographiques, études théologiques, commentaires exégétiques, etc. Ce mare magnum pourrait, peut-être, décourager une approche généralisée, au profit d’une étude plus articulée qui considère chaque genre religieux comme une variété à part entière. À ce propos, on mentionnera un passage de l’introduction de la récente anthologie Lingue della Chiesa (Maraschio/ Matarrese 1998: II): L’obiettivo dovrà insomma cercare di comprendere tutti i campi sui quali ha operato un’istituzione tipicamente della parola come quella ecclesiastica. Solo in tal modo gli sarà possibile «far vedere» i tratti caratterizzanti le diverse lingue della chiesa durante i secoli, fornendo, di un quadro linguistico e complesso, un’immagine non troppo sfocata che consenta analisi puntuali, ma anche paragoni a vasto raggio. Il s’agit donc de repérer, parmi tous ces textes produits à des époques différentes et conçus pour les contextes et les destinataires les plus disparates, les structures linguistiques ayant une profondeur historique, «les diverses formes de la durée» 4 , bref, de «distinguer le stable du mouvant» 5 , afin d’établir une hiérarchie de phénomènes du système de la langue religieuse italienne. 2. Diachronie de la langue religieuse et mise en évidence des traits caractéristiques internes 2.1 Introduction Notre reconstitution s’est fondée exclusivement sur les travaux critiques qui jusqu’à maintenant se sont intéressés à ce sujet, à savoir les études philologiques et surtout linguistiques concernant les textes religieux italiens. Les résultats ont été d’abord organisés en deux périodes, articulées autour des événements les plus dé- 58 Franco Pierno 3 Au Concile de Trente et pendant la période de la Contre-Réforme qui s’en suivit, l’Église renforça d’un côté la défense du patrimoine en langue latine (surtout pour ce qui concerne la traduction de la Bible et le rite de la Messe), mais retrouva de l’autre un rôle essentiel dans la pastorale en langue vulgaire, par le biais de ses moyens de propagande et de diffusion, à l’instar des protestants, devenant ainsi une véritable «institution du langage» (cf. Pozzi 1997a: 39). 4 Fernand Braudel, cf. Wüest 1979: 23. 5 Wüest 1979: 23. terminants de l’histoire de l’Église (et de la religion en contexte italien) avant le Concile de Trente (1545-63): (1) des Origines (IX e siècle) à l’apparition des Ordres mendiants (première moitié du XIII e siècle) 6 , et (2) de l’apparition des Ordres mendiants au Concile de Trente. D’un point de vue linguistique, et pour plusieurs raisons, la Réforme a été considérée comme un événement important, mais non discriminant: les divisions et les courants qui ont caractérisé le mouvement de la réforme protestante en Italie n’ont pas permis une vraie cohérence interne; la durée de son influence en contexte italien a été brève, face à la montée et au pouvoir de la Contre-Réforme; enfin, l’on observe une absence presque totale d’études concernant l’apport linguistique des textes religieux de la Réforme en contexte italien 7 . Dans un deuxième temps, l’organisation interne de ces deux périodes a été structurée suivant les genres textuels religieux. Cette démarche nous a semblé nécessaire, vu le nombre élevé des genres religieux, mais aussi leurs spécificités, les différents contextes d’origine et leurs divers publics. Enfin, on a essayé de mettre en évidence les traits caractéristiques internes de la langue religieuse, dégagés d’un genre ou bien d’un groupe de genres, à une époque déterminée. À ce propos, plutôt que les détails phonétiques, morphologiques et syntaxiques, on a privilégié les tendances les plus générales qui nous ont semblé les plus utiles à illustrer le cadre global de la langue religieuse en contexte italien. 2.2 Les textes des Origines (avant les Ordres mendiants) Entre le IV e et le IX e siècle, dans les milieux religieux, le besoin d’une communication plus large a provoqué, d’un côté, la formation d’un latin ecclésiastique de plus en plus éloigné de la grammaire reconnue 8 et, de l’autre, l’accélération du processus de fragmentation de l’unité linguistique de l’Empire romain, ce qui a donné lieu à la naissance de langues intermédiaires, latino circa romançum (cf. Avalle 1970: ix), situées entre la norme et ce que devaient être les parlers proto-romans. Il s’agissait d’une variation diastratique (ainsi que diaphasique et diamésique), qui marquera un tournant dans la formation même des premières langues vulgaires, selon un processus linguistique qui fit que les exigences dictées par la transmission 59 La langue religieuse italienne avant le Concile de Trente 6 François d’Assise (1118-1226) fonde les frères mineurs (franciscains) en 1210, Dominique Guzman (1170-1221) les frères prêcheurs (dominicains) en 1215. 7 Cette recherche a été menée, par exemple, en contexte français, grâce à l’analyse de la langue de Jean Calvin et de son influence sur le français du XVI e siècle (cf. à ce propos Higman 1998). 8 Saint Augustin déjà désobéissait volontairement à la norme du latin classique, disant préférer les formes de l’usage qui étaient plus compréhensibles (par ex. ossum au lieu de os; cf. Varvaro 1995: 145). Pour la formation du latin chrétien et ecclésiastique, cf. surtout Mohrmann 1958-77. du message religieux s’emparèrent des usages communs des langues pour les réélaborer et les remettre en circulation avec un impact incontestable sur la formations des locuteurs. À partir du ix e siècle, dans le territoire géolinguistiquement italoroman, commencent à apparaître les premiers documents témoignant non seulement de l’éloignement de la norme latine, mais aussi de la lente formation de langues autonomes. Parmi ces documents, certains constituent des messages religieux: le Graffito des catacombes de Sainte Commodille (IX e siècle) 9 , la Résistance de Saint Clément (xii e siècle) 10 et la Formula di Confessione (XI e siècle) 11 témoignent à la fois de la naissance d’une langue religieuse déjà articulée en différents genres et des premiers efforts de production en langue vulgaire. Ces documents proviennent de la zone médiane de l’Italie, notamment des alentours de Rome et de l’Ombrie orientale, territoire dont le cœur étaient l’abbaye du Mont Cassin et les autres monastères appartenant à l’ordre bénédictin. Ce réseau de monastères formait l’ossature de la vie culturelle d’une population dont ils étaient les principaux points de repères sociaux et économiques (cf. Miccoli 1974: 431s.). À partir des directives données par le Concile de Tours (813), préconisant l’emploi de la rustica romana lingua dans les sermons, débute officiellement l’histoire de la prédication en langue vulgaire (cf. Rusconi 1994; pour l’aspect linguistique: Librandi 1993: 339-40; Bolzoni 1984: 1041-45). En contexte italien, cependant, le seul témoin de la prédication des Origines, ce sont les Sermoni subalpini, recueil de vingt-deux sermons provenant de l’aire piémontaise, datant des XII e -XIII e siècles (cf. l’édition critique de Babilas 1968). La structure de ces sermons était fort simple: une citation biblique (le thema), traduite en langue vulgaire, suivie d’un commentaire se composant de paraphrases selon le schéma du sermo antiquus, ainsi nommé parce qu’il date de l’époque ‘antique’ des Pères de l’Église. 60 Franco Pierno 9 C’est la fameuse inscription murale: non dicere illa secrita a·bboce (cf. Redon 2002: 28) qui s’inscrit dans le genre des normes liturgiques réglant le rite de la Messe et qui, officiellement, étaient seulement en langue latine (cf. aussi Sabatini 1987: 19-31). 10 Le texte est inscrit sur une fresque du cycle de la Vie de Saint Clément dans l’église inférieure de la Basilique San Clemente de Rome (cf. Redon 2002: 224-26). Il appartient au genre du récit hagiographique; l’épisode se trouve dans la Passio Clementis (avant le VI e siècle). À l’instar d’une bande dessinée, les paroles commentent et animent la scène qui illustre le coup de force tenté par Sisinnius contre saint Clément, qui venait de célébrer la messe dans la maison du païen. Par miracle, Sisinnius et ses subalternes se retrouvent à enlever non pas le saint, mais seulement une pierre. Des phrases en langue vulgaire (qui accompagnent les dessins représentant Sisinnius et ses hommes et consistent en ordres et imprécations: Falite dereto colo palo Carvoncelle ‘Carboncello, toi, soulève derrière avec le pieu! ’; Abertel traite Gosmari ‘Tirez, Albertello, Gosmari! Fili de le pute traite ‘Tirez, fils de putes! ’) alternent avec une phrase en latin (attribuée à Dieu ou à Saint Clément: Duritiam cordis vestri saxa traere meruistis ‘A cause de la dureté de vos cœurs vous avez mérité de tirer des pierres’). 11 Il s’agit probablement d’un calque de la formule latine utilisée lors du sacrement de la confession, donc d’un texte du genre liturgique; cette formule est organisée selon le schéma «demande (du confesseur) - réponse (de la personne confessée)» jusqu’à la bénédiction et l’absolution finale (cf. Petrucci 1994: 64-69). De la zone médiane de l’Italie proviennent aussi les premiers exemples de poésie religieuse en langue vulgaire, le Ritmo di Sant’Alessio, venant des Marches, et le Ritmo Cassinese (Contini 1960/ 1: 7-13; 15-28). Ces poèmes datent d’entre la fin du XII e et le début du XIII e siècle. En empruntant les modèles métriques de la littérature gallo-romane (l’octosyllabe et le décasyllabe de l’ancienne poésie française), ces poèmes traitent les thèmes de la mystique monastique dans le langage des ménestrels, en opposant l’idéal divin à l’idéal terrestre. Toujours de la zone du Mont Cassin provient la Passio cassinese, datant d’entre le XII e et le XIII e siècle. Il s’agit de trois vers qui décrivent les pleurs de Marie face à la mort du Christ et qui concluent une Passione latine: le passage linguistique du latin à la langue vulgaire est aussi marqué par un changement d’écriture: de la beneventana pour le latin à la caroline pour les trois vers en vulgaire (cf. Baldelli 1987: 44-47; Casapullo 1999: 205). La Passio est ainsi l’un des témoins d’une tradition fragmentaire de l’Italie médiane qui se situe, par ailleurs, à la base de l’expérience poétique des laude et de Jacopone da Todi (dont l’on traitera ci-dessous) 12 . 2.3 Traits caractéristiques dans les documents des Origines Jusqu’au IX e siècle, le message religieux était véhiculé presque uniquement en langue latine; dès que le message religieux commence à se servir des idiomes communs, il se dessine une situation de diglossie, le latin et les parlers locaux cohabitant dans le même texte et ayant des rôles différents: le latin doit faire face aux lacunes, surtout lexicales, des parlers locaux en matière de religion, alors que ces derniers semblent puiser à des structures et des formes du langage parlé. Les principaux traits de cette diglossie sont donc les suivants: - la structure phonétique demeure ancrée dans les parlers locaux et, dans le cas des textes des Origines, elle montre surtout les caractéristiques de la zone médiane de l’Italie (à l’exception, évidemment, des rares textes qui proviennent du Nord). Le bétacisme (vlatin initial b-), typique surtout pour la zone du Mont Cassin, est assez courant, par ex. dans le Ritmo cassinese (cf. Trifone 1992: 544- 61 La langue religieuse italienne avant le Concile de Trente 12 Il existe d’autres textes pouvant s’inscrire dans cette tradition: la Lauda dei servi di Maria Rayna potentissima (avant 1254) transmise dans des manuscrits provenant de plusieurs zones italiennes: toscane, médiane, septentrionale (cf. Casapullo 1999: 204); la Lamentatio beate Marie de Filio, des Abruzzes (début du XIV e s.; cf. Breschi 1992: 471). Des Marches, région où il existait une vie spirituelle assez intense grâce à la présence des bénédictins, des franciscains du courant spirituel et des ermites du pape Célestin V, et qui avait exercé une certaine influence sur la littérature religieuse de l’Italie médiane, proviennent les fragments de la Leggenda del Transito della Madonna (cf. Breschi 1992: 472). Ces textes présentent des caractéristiques métriques communes (lais de type français composés en alexandrins). Encore de la zone médiane, mais du milieu judaïque, provient l’Elegia giudaica, poème qui appartient au genre des kinoth (élégies liturgiques chantées pendant le neuvième jour du mois d’Ab), du début du XII e siècle. Écrite en caractères hébraïques, dans ce que Contini 1960/ 1: 35 a appelé «une koinè judaïque de l’Italie médiane», ses traits morphologiques ne permettent pas une localisation plus précise (cf. aussi Redon 2002: 262-63). 45; 1994: 558-60) et dans le Graffito qui présente, de plus, un renforcement phonétique et postérieur du bétacisme (a· b boce) qui illustre une certaine fidélité à la langue parlée; il reste pour autant absent de la Formula di confessione (cf. Mattesini 1992: 510-12; 1994: 518-20) et du Ritmo marchegiano, qui se situent déjà en dehors de l’aire influencée par le Mont Cassin; - la structure phonétique et la morphologie montrent que l’emploi des niveaux diastratiques les plus bas est étroitement lié à la formation, encore instable à cette époque-là, de langues interrégionales. Les documents de la zone médiane et bénédictine confirment l’existence d’une koinè de l’Italie centrale, en présentant des phénomènes communs, à part le bétacisme: métaphonie, conservation de groupes consonantiques latins «consonne + l», etc. (cf. Trifone 1992: 545). Il en va de même pour les textes septentrionaux: les Sermoni mélangent traits piémontais et français, témoignant ainsi d’une koinè franco-piémontaise (cf. Clivio/ Danesi 1978; Danesi 1976; Stella 1994a: 76-81); - le lexique est le résultat d’une situation bipolaire où le lexique latin ou latinisé représente assez souvent un registre élevé du langage (technicismes, contextes bibliques et liturgiques, etc.) alors que le lexique vulgaire est employé pour exprimer les faits de la vie quotidienne, terrestre. Dans la Formula, le verbe raccar, d’origine dialectale et encore utilisé dans certaines aires de l’Italie médiane (dans les Abruzzes il existe raccà ‘déraciner, arracher’, cf. Ghinassi 1971; Liver 1972), cohabite avec le vocabulaire latin du sacrement de la confession; dans le Graffito, le terme secrita reprend et transforme phonétiquement le terme secreta, qui appartenait au vocabulaire du canon de la messe en vigueur depuis la réforme liturgique de Charlemagne (cf. Sabatini 1987: 15-19); dans la Résistance de Saint Clément, le texte latin correspond à la langue de Dieu (ou de Saint Clément), opposée au lexique populaire et, même, grossier (fili de le pute) de Sisinnius et de ses complices. Dans les Sermoni, d’un point de vue lexical, l’on retrouve une situation diglossique: des calques et des citations latines entières alternent avec des mots d’origine gallo-romane ou franco-piémontaise (cf. Stella 1994a: 76-81). Dans le Ritmo cassinese comme dans le Ritmo marchegiano, alors que les réjouissances physiques et terrestres sont exprimées par des termes vulgaires et populaires, souvent empruntés au langage des jongleurs médiévaux, le modèle de la vie consacrée à la connaissance de Dieu et à la prière se fonde sur des insertions lexicales latines; - la syntaxe, en revanche, semble hésiter entre une conformité aux modèles latins et le langage parlé, même dans les documents les plus proches de l’officialité, ce qui illustre une volonté d’autonomie assez forte: la Formula qui, tout en dérivant de modèles latins, présente des structures syntaxiques très proches de la langue orale, comme, par exemple, la structure «possessif suivi d’un nom», qui est typique de la zone médiane de l’Italie (cf. Castellani Pollidori 1966, 1967- 70); dans l’Iscrizione, relève de l’oral l’ordre des pronoms dans l’impératif falite (= fagliti = fac (il)li te) «complément d’attribution -li- + complément d’objet direct -te-» (cf. Raffaelli 1987: 56). 62 Franco Pierno 2.4 Les traductions de la Bible Ce n’est qu’à partir du milieu du XIII e siècle que commencent à paraître des traductions de la Bible en langue italienne 13 . Le corpus de manuscrits le plus ancien et le plus fiable provient de l’aire toscane; il date de la seconde moitié du XIII e et du début du XIV e siècle. Malgré les premiers travaux philologiques 14 qui ont entrepris l’exploitation linguistique de ces textes 15 , les traductions bibliques manuscrites n’ont cependant pas encore bénéficié d’études suffisantes, mettant en évidence leur rôle au sein de la linguistique diachronique italienne. En revanche, au cours de ces dernières années, les versions imprimées des siècles suivants (de la seconde moitié du XV e siècle jusqu’au XVII e ) attirent de plus en plus l’attention des historiens de la langue 16 . La première bible imprimée en langue vulgaire, traduite par le moine camaldule Malerbi 17 , parut à Venise en août 1471 18 , inaugurant un cycle d’éditions et réim- 63 La langue religieuse italienne avant le Concile de Trente 13 À la base des efforts les plus récents de la philologie italienne consacrés à l’étude de ces versions vernaculaires manuscrites (XIII e -XIV e ), il faut situer les contributions de Berger 1894 et de Vaccari 1930. Si les recensements ainsi que les reconstructions généalogiques de ces derniers demeurent incontournables, leurs hypothèses concernant la parution de la première traduction intégrale de la Bible, qui remonterait au milieu du xiii e s. d’après l’un (Berger 1894: 417) et au XIV e s. d’après l’autre (Vaccari 1930: 900a), sont moins fiables. Les études récentes (cf. le status quaestionis établi par Lobrichon 1998 et Ramello 1992) se bornent à constater l’existence de traductions manuscrites partielles aux XIII e -XV e s., avant les premières versions imprimées intégrales datant de 1471 (voir ci-dessous). 14 Les premiers travaux émanent de l’école philologique de l’Université de Turin (Facoltà di Magistero), où, à partir des années soixante-dix, sous la direction d’Anna Cornagliotti et de Giuliano Gasca Queirazza, ont été rédigés des mémoires de maîtrise qui visaient notamment à la reconstitution ‘lachmanienne’ des livres de l’Ancien Testament (cf. Ramello 1992: 126). Ensuite, la relève a été assurée par la Fondazione Ezio Franceschini (Certosa del Galluzzo, Florence) et l’École Française de Rome, qui, en 1991, ont réuni leurs efforts en vue de la réalisation et de l’étude d’un répertoire des versions vernaculaires de la Bible précédant l’invention de l’imprimerie (cf. Leonardi 1998, où ont paru les premiers résultats de cette collaboration). 15 Les traductions bibliques avaient indirectement engendré une langue qui paraissait discutable déjà à leurs contemporains. Au XIV e siècle, le dominicain Jacopo Passavanti se plaignait de la pauvreté lexicale de la langue vulgaire qui, à son avis, était inadaptée à une traduction du texte sacré (cf. Leonardi 1996: 175-76). Un autre dominicain du XIV e siècle, Domenico Cavalca, auteur de textes spirituels, favorable à la Bible en langue vulgaire et traducteur lui-même (des Actus Apostolorum), préconisait une traduction ad verbum, à savoir un respect de l’ordo verborum de la Vulgata. Ce respect ne devait pourtant pas empêcher la compréhension (dans le cas de termes latins intraduisibles), ni l’utilisation d’explications supplémentaires (cf. Barbieri 1992/ 1: 320, 323-24). 16 Cf. Barbieri 1992 pour une bibliographie des traductions en italien imprimées entre la seconde moitié du XV e s. et pendant tout le XVI e s. 17 Niccolò Malerbi (1422-81/ 88), entra en 1470 dans le monastère camaldule de Sant’Apollinare in Classe, près de Ravenne. L’année suivante, il s’établit au monastère de San Michele de Lemo à Venise. Au sein de l’ordre, il eut surtout des charges culturelles: enseignement du latin aux confrères, rédaction des procès verbaux des assemblées, etc. (cf. Barbieri 1992/ 1: 15-35). 18 En octobre 1471, également à Venise, fut imprimée par Adam de Ammergau une autre traduction de la Bible, plagiat de celle d’août (cf. l’édition, assez contestable, de Negroni 1882-87). pressions qui continuera jusqu’en 1567, après le Concile de Trente (au total vingtsix éditions, cf. Barbieri 1989). Cette Bible, grâce à son parcours éditorial qui s’étale sur presque tout un siècle, traverse la période peut-être la plus délicate de l’histoire de la langue italienne, au cours de laquelle on assiste à la formation d’une langue commune, surtout grâce à l’impulsion donnée par les Prose della volgar lingua de Pietro Bembo de 1525. C’est pourquoi elle offre un bon point d’observation pour l’évolution d’un aspect de la langue religieuse de cette époque, celui de la traduction biblique qui était, d’ailleurs, le plus répandu. En mettant en évidence le rôle des corrections en imprimerie 19 , les recherches de Pierno 1999, 2000 ont esquissé une analyse des changements phonétiques, morphologiques, syntaxiques et lexicaux survenus pendant l’histoire éditoriale de la Bible «Malerbi», et apporté quelques résultats significatifs. Lors de la deuxième édition (qui date de 1477-78), Girolamo Squarzafico, humaniste originaire du Nord de l’Italie (cf. Allenspach/ Frasso 1980), aidant Malerbi dans la révision du texte, semble viser à une plus grande uniformité de certains caractères septentrionaux (cf. Pierno 1999: 431-32). Les rééditions successives domineront le marché des traductions bibliques, en imposant le modèle linguistique établi par Squarzafico, avec des oscillations dues moins à une politique linguistique qu’à la simple initiative des typographes. En effet, jusqu’à l’édition de 1535 (cf. Barbieri 1992/ 1: 253- 54), on n’enregistre pas de changements importants: il s’agit toujours d’une langue vulgaire qui, d’un point de vue syntaxique, relève du latin de la Vulgata, mais qui présente une base morphologique toscane avec des caractéristiques d’origine septentrionale (cf. Pierno 1999: 433-34). L’édition suivante, imprimée par Bernardino Bindoni en 1541 (cf. Barbieri 1992/ 1: 279-80) révèle, par contre, que certaines exigences, propres aux milieux littéraires, commencent à apparaître aussi dans le langage de la traduction biblique. Cette édition, en effet, avait été réalisée suivant le modèle d’une autre traduction, celle d’Antonio Brucioli, humaniste florentin 20 , parue en 1532 à Venise et manifestement en «lingua toscana». Brucioli venait de réaliser un produit qui allait devenir un modèle tantôt rejeté, tantôt suivi par les versions suivantes, depuis les versions contemporaines jusqu’à la version italienne de la Bible du protestant Giovanni Diodati, Italien de Lucques (publiée d’abord en 1607 et, ensuite, en 1641). Connaissant l’hébreu et le grec, en traduisant l’Écriture Sainte, Brucioli privilégia une certaine fidélité, même syntaxique, aux sources originelles. Il en résulte que quelques corrections visent à recourir à une langue tosco-florentine, du moins dans les textes, comme par exemple les Évangiles, censés être les plus lus par le public (cf. Pierno 1999: 435). Cependant, l’édition de 1541 ne marqua pas un tournant dans l’histoire linguistique des éditions «Malerbi»; les éditions suivantes enregistreront une croissance 64 Franco Pierno 19 Dans le sillage méthodologique tracé par Trovato 1994, qui a été le premier à s’apercevoir de l’importance du travail linguistique exercé dans les imprimeries aux XIV e et le XV e siècles. 20 Brucioli, humaniste florentin, accusé de luthéranisme, fut exilé en 1529 à Venise, terrain propice pour les imprimeries, pas encore menacé par le pouvoir de l’Inquisition romaine. significative des calques du latin ainsi que le retour d’éléments de koinè septentrionale, éliminés dans les versions précédentes, ce qui se manifeste surtout dans les trois dernières éditions, imprimées entre 1566 et 1567 et approuvées par l’Inquisition, les seules à avoir le placet requis pour publier des traductions de la Bible (cf. Pierno 1999: 435-37). En fait, le Concile de Trente, malgré l’âpreté du débat, n’avait pas interdit la traduction de la Bible dans les langues vernaculaires ni la publication de ces traductions (cf. Coletti 1983: 189s.; D’Agostino 1989: 31s.) 21 : les décisions prises d’abord par l’Index de 1559 de Paul IV et, ensuite, par l’Index de 1564 ne feront que confirmer la nécessité de l’autorisation du Saint Office. Néanmoins, ces restrictions entraînèrent la naissance d’une vraie diaspora des traducteurs de la Bible qui, pour éviter de tomber sous les griffes des inquisiteurs, préféraient se rendre à l’étranger, dans les villes françaises ou suisses ouvertes aux nouveautés de la Réforme et riches en ateliers d’imprimerie. Massimo Teofilo, moine obéissant, était pourtant un esprit libre qui ne craignait pas la confrontation et la discussion et fréquentait des intellectuels très proches des courants protestants (cf. Morviducci 1976; Perini 1967). En 1551, à Lyon, il publia son Nuovo Testamento, texte caractérisé par des choix linguistiques strictement tosco-florentins, dont il rend compte dans l’Apologia, également publiée à Lyon en 1551 pour se défendre des attaques de ses détracteurs. Déclarant l’inutilité d’une obséquieuse obéissance à la syntaxe des sources, Teofilo souligne la valeur communicative d’une langue, à savoir son rôle véhiculaire de concepts, en dépit de sa forme 22 . Dans ce cas, selon lui, la langue ne peut être que le tosco-florentin (qu’il appelle «toscano»), qui est la langue la plus apte à traduire l’Écriture Sainte, à cause de sa clarté, de son autorité et de sa diffusion 23 . L’importance de ce texte, d’habitude négligé, pour l’étude de l’histoire de la langue italienne, a d’abord été remarquée par Droz 1971: 243-53. Plus récemment, à part Barbieri 1992/ 1: 145-49, c’est Trovato 1998: 151-55 qui s’est penché sur les positions linguistiques de Teofilo, en mettant en relief leur différence par rapport aux préfaces et 65 La langue religieuse italienne avant le Concile de Trente 21 Cf. aussi le Decretum de canonicis scripturis et le Decretum de editione et usu sacrorum librorum (sessio 4 et 8 aprilis 1546). 22 «I più moderni, non meno pii e dotti, hanno tradotto dal greco sì, ma in più luoghi . . . furono troppo scrupolosi. La onde hebber talvolta tanta cura di non mutare o parola o ordine di parole, di non turbare, anzi schiarire i turbati periodi e hiperbati, . . . io ho hauta grandissima riverenza, e ho a la Sacra Scrittura, ma però più al sentimento che a le parole sue, più a la segnificazione che al suono» (Teofilo 1551: 4). On aperçoit dans les mots de Teofilo une allusion ponctuelle à Brucioli, qui, à cette époque-là, était le seul à avoir traduit le texte biblique en se basant non seulement sur la Vulgate, mais aussi sur les sources hébraïques et grecques. Par ailleurs, la langue en tant que moyen de communication ainsi que l’importance de son utilité, au détriment de la forme, étaient des concepts circulant depuis quelques années et présents dans le traité Dialogo delle lingue de Sperone Speroni (Venise 1542). 23 «La nostra traslazione, che qual si sia altrui, fedele: di poi più chiara, più facile, e più toscana»; «Che cosa ha di più la latina (quanto lingua) e la greca, che la toscana hoggi a tutta l’Italia nota? » (Teofilo 1551: 5.22). aux frontispices des Bibles traduites et publiées dans la Genève calviniste à la même époque par les exilés italiens religionis causa, à savoir le Nouveau Testament publié par Jean Crespin en 1555 24 , celui de Giovan Luigi Pascale publié la même année 25 , et celui, probablement traduit par Filippo Rustici, publié en 1562 26 . Ces traductions déclarent toujours, dans le frontispice ou bien dans l’introduction, avoir choisi une langue commune et «italiana», et affirment surtout leur hostilité au «toscanismo», terme emblématique désignant toute dérive provoquée par une toscanisation à tout prix, ce qui pourrait, avec l’appui d’autres documents et en considérant la politique linguistique menée par Jean Calvin, amener à supposer l’existence d’une querelle de la langue parmi les Italiens expatriés à Genève (cf. Pierno 2004) 27 . 2.5 Traits caractéristiques dans les traductions de la Bible (de leur parution jusqu’au Concile de Trente) Les traductions de la Bible - peut-être le genre religieux le plus important avant le Concile de Trente - reposent essentiellement sur le texte de la Vulgata latine, surtout d’un point de vue lexical et syntaxique. Elles montrent une adhésion à ce modèle et une interaction constante avec lui. Elles sont pourtant responsables aussi de la diffusion d’une langue vulgaire fondée sur le toscan. 2.5.1 Phonétique et morphologie En ce qui concerne la phonomorphologie, les traductions bibliques furent l’un des véhicules les plus efficaces pour la transmission et la circulation d’une langue à base toscane, même si les traits phonétiques et morphologiques locaux, dans le cas des bibles réalisées en dehors de l’aire toscane, n’étaient pas absents. Au XIII e siècle déjà, avant même l’époque des grands écrivains florentins, le dominicain Do- 66 Franco Pierno 24 Nuovo Testamento, [Genève], Jean Crespin, [15]55 (cf. Barbieri 1992/ 1: 336-37). 25 Nuovo Testamento, italien et français [de Robert Estienne], [Genève], Gian Luigi Pascale, 1555 (cf. Barbieri 1992/ 1: 338-40). 26 Bibbia, [Genève], François Du Ron, 1562 (cf. Barbieri 1992/ 1: 352-57). 27 Dans le cadre des études linguistiques concernant les traductions bibliques on ne saurait oublier les travaux de Luisa Ferretti Cuomo, qui s’est consacrée aux textes des juifs italiens et à leur langue «judéo-italienne». Ses études sur l’histoire linguistique de la communauté juive italienne montrent l’aspect variationnel d’un italien à l’usage religieux et interférant non pas avec le latin, mais avec l’hébreu du texte traduit. À titre d’exemple, dans une traduction d’aire romanesque du livre de Jonas, cette interférence est caractérisée par un respect absolu de l’ordo verborum du texte originel, afin de ne pas en violer la structure syntaxique, qui est elle même dotée de signification, étant le résultat de la tradition orale transmise par les interprètes du texte sacré (cf. Cuomo 1988: 7). En même temps, cette langue montre un effort littéraire ne s’appuyant pas sur le toscan, mais produisant un «giudeo-romanesco» de haut niveau, grâce à une recherche assidue de régularité à tous les niveaux: de la graphie à la phonétique et à la morphologie (cf. Cuomo 1988: 7-8.108). menico Cavalca estimait qu’il fallait traduire le texte biblique en toscan, qu’il considérait comme la langue commune, tout en respectant l’ordo verborum du latin (cf. Barbieri 1992/ 1: 323-24). D’ailleurs, les prologues ou les lettres dédicatoires des premières traductions manuscrites, toujours sous le contrôle des milieux dominicains, montrent une orientation commune vers une langue claire et de base toscane, malgré leur attention pour le latin de la Vulgata (cf. Leonardi 1996: 187). Quant à la langue de la princeps de Malerbi (1471), elle n’a pas encore été étudiée de façon systématique; les seules données utiles découlent de l’analyse de la lettre dédicatoire (qui est la partie la moins représentative sous un angle linguistique) 28 et révèlent un toscan de base constellé de calques du latin de la Vulgata, avec des caractéristiques de koinè septentrionale, sans les particularités linguistiques propres à la Vénétie (cf. Paccagnella 1997: 196-98). Il s’agit d’un compromis linguistique dû, probablement, aux manuscrits d’aire toscane utilisés par Malerbi et, dans le cas du livre de l’Apocalypse, au plagiat que celui-ci aurait fait de la traduction de Cavalca (cf. Curioni 1847, et surtout Barbieri 1992/ 1: 61-62) 29 . La base phonomorphologique des éditions suivantes demeurera le toscan, malgré les corrections apportées pour un public du Nord de l’Italie 30 . En faisant abstraction de la traduction du moine Teofilo, qui ne sera réimprimée que deux fois 31 , ce sont les éditions de la traduction biblique d’Antonio Brucioli, dont le succès est comparable à celui des éditions «Malerbi», qui diffuseront encore une langue à la morphologie fortement toscanisée. La langue de Brucioli présente des caractères qui s’inscrivent dans la prose florentine de la première moitié du xvi e siècle, avec quand même des libertés considérables vis-à-vis des normes puristes de Bembo, d’autant plus flagrantes chez un humaniste auteur de commentaires du Decameron, n’hésitant pas à fournir aux lecteurs «non toscani» un glossaire, persuadé de l’utilité politique (voire sociale) de la connaissance de la langue toscane; Brucioli semble donc s’inscrire dans le sillage théorique et «florentiniste» tracé par Machiavel, ou plutôt par le Discorso intorno alla nostra lingua, dont le secrétaire flo- 67 La langue religieuse italienne avant le Concile de Trente 28 Il s’agit d’un texte divisé en sept chapitres, adressé à «Maestro Laurentio», frère franciscain et professeur de théologie. Malerbi y avoue toutes les difficultés qu’il a dû affronter, ainsi que l’aide reçue par Laurentio (cf. l’étude de Barbieri 1992/ 1: 37-70). 29 Malerbi, par ailleurs, dans la préface d’une autre de ses traductions, celle de la Legenda Aurea de Iacopo de Varagine, publiée en 1478, avait déjà manifesté un certain souci à l’égard de la langue à utiliser afin de se faire comprendre de tout «le peuple des ouailles éparpillé dans la péninsule italienne», en arrivant même à demander l’aide d’un correcteur florentin (cf. Quondam 1983: 659-61). 30 Les corrections les plus importantes demeureront celles de l’édition de Squarzafico (la deuxième de 1477-78), où l’on constate, par exemple, d’un point de vue phonétique, un changement systématique de l’article florentin il el, l’élimination du -e final (typiquement toscan) dans les formes du passé simple de la troisième personne du singulier qui ont l’accent sur la dernière syllabe (appelloe, comandoe . . . appellò, comandò . . .). D’un point de vue morphologique, on observe une préférence pour les terminaisons -eti; -ati de la deuxième personne du pluriel: impératif, Godete Godetive (Mt 5, 12); subjonctif présent, vogliate vogliati (Mt 5, 17). 31 En 1556 et en 1565 (cf. Barbieri 1992/ 1: 341-43, 363). rentin est reconnu être l’auteur (cf. Dionisotti 1980: 202; Paccagnella 1993; Trovato 1994: 52-53) 32 . 2.5.2 Lexique et syntaxe Pour ce qui est du lexique, l’autorité de la Vulgata est évidente. Cornagliotti 1974 démontre que, dans les premières traductions manuscrites de la Bible qui remontent aux XIII e -XIV e siècles, l’interaction entre la langue vulgaire de la traduction et la langue de départ, le latin de la Vulgata, a provoqué la formation: - de calques lexicaux présentant de nouvelles formations suffixales (par ex. aretta ‘petit autel’ arulam) ou préfixales (par ex. amuovere ‘faire bouger vers’ admovere); - de nouveautés lexicales d’un point de vue morphologique (par ex. spendato ‘dépensé’ expensum); - de nouveautés lexicales tout court (par ex. vesputelli ‘chauves-souris’ vespertiliones). Gasca Queirazza 1976: 665 remarque à ce sujet qu’en tenant compte des hypothèses selon lesquelles les premières versions bibliques en langue italienne se situeraient dans la première moitié du XIII e siècle, il faudrait une nouvelle réflexion méthodologique en lexicographie italienne, concernant les premières attestations et la transmission du lexique. La présence de gloses interlinéaires dans ces manuscrits a également suscité des réflexions d’ordre lexicographique et lexicologique: ayant comme but d’expliquer un calque latin, ces gloses permettent d’absorber des latinismes qui, une fois expliqués, deviennent autonomes et vont intégrer le vocabulaire du texte, moins pour remédier à une pauvreté lexicale que pour satisfaire l’attrait pour les cultismes et les préciosités (cf. Pollidori 1998: 116). Des gloses lexicales apparaissent également dans la traduction de Malerbi, ce qui garantira la survie de cette pratique lexicale et lexicographique jusqu’à la seconde moitié du XVI e siècle. Par ailleurs, comme on l’avait dit ci-dessus, la Bible traduite par Malerbi peut offrir un excellent point d’observation pour l’évolution de cette facette de la langue religieuse écrite. Les changements lexicaux survenus pendant l’histoire éditoriale de la Bible Malerbi témoignent toujours d’un certain attachement au latin de la Vulgata, du moins jusqu’à l’édition de 1535 incluse (cf. Barbieri 1992/ 1: 253-54), tout en gardant aussi des éléments du lexique de la koinè septentrionale (cf. Pierno 1999: 431-34). L’édition suivante, imprimée par Bindoni en 1541 (cf. Barbieri 1992/ 1: 279-80) révèle un certain intérêt pour la phonomorphologie et le lexique tosco-florentin de la version de Brucioli. 68 Franco Pierno 32 Cependant, la syntaxe demeure fidèle aux sources latines et hébraïques (cf. Del Col 1987: 167), ce qui sera remarqué par les traducteurs successifs: de Massimo Teofilo, qui traduisit le Nouveau Testament paru à Lyon en 1551, à Filippo Rustici, à qui est attribuée la traduction parue à Genève en 1562 (cf. Trovato 1998: 156-57). Cependant, les éditions postérieures à celle de 1541 enregistreront une augmentation significative des calques du latin ainsi que des caractères de koinè septentrionale, même pour ceux éliminés dans les versions précédentes, tendance qui se manifeste surtout dans les trois dernières éditions, imprimées entre 1566 et 1567 et approuvées par l’Inquisition. Cela peut amener à supposer qu’un lexique plus proche de la source latine originale légitimait, en quelque sorte, la traduction de la Bible, qui pouvait poser des problèmes sérieux pendant la période qui suivit le Concile de Trente (cf. Pierno 1999: 435-38). D’un point de vue plus général, l’importance lexicologique des traductions bibliques de cette période, surtout à partir du XVI e siècle, a été soulignée par Tesi 1994: 72-83, qui, dans son étude sur le passage de certains mots clé grecs en Europe et leur évolution sémantique, a pu remarquer le rôle de ces traductions dans la sélection du lexique des langues romanes, notamment de l’italien. Cette autorité reposait sur le prestige de la Vulgata, qui influençait les versions de la Bible en langues vulgaires, en dépit des textes grecs et hébreux. Un exemple de cette lexicalisation, c’est la traduction du terme k ατ στρω , qui, dans la Vulgata, se transforme soit en subversio (2Tim ii, 14) soit en eversio (2Pt ii, 6), ce qui conditionne la traduction en langue vulgaire ( subversione dans la traduction de Malerbi); cette solution est adoptée aussi par les glossaires «grec - latin», où la priorité était donnée à la signification biblique des entrées. Par ailleurs, les premiers textes de littérature religieuse, les mêmes qui, au XVI e siècle, constitueront les références du toscan littéraire, gardèrent ce patrimoine lexical (cf. Tesi 1994: 80-82). Cependant, dans les milieux intellectuels, la parution des éditions polyglottes incluant aussi le texte grec favorisera un premier démantèlement de la structure sélective du lexique mise en place par les versions bibliques en langue vulgaire. L’importance de la source originale des textes bibliques (d’abord latins, mais aussi grecs et hébreux) détermina aussi une syntaxe de la langue vulgaire axée sur le latin et, parfois, aussi sur l’hébreu. Non seulement les éditions de la Bible Malerbi, mais aussi celles des traductions de Brucioli témoignent d’un attachement à la syntaxe des textes originaux, ce qui provoqua des structures compliquées, voire de véritables anacoluthes (cf. Paccagnella 1984: 149). 2.6 La prédication Après la période du sermo antiquus, les ordres mendiants sont les grands protagonistes de la prédication aux XIII e et XIV e siècles. L’activité homilétique constituait l’enjeu central de l’activité religieuse des franciscains et des dominicains, s’inscrivant dans le cadre d’une réflexion sur le rôle de la parole, qui avait eu lieu entre la fin du xii e et la première moitié du xiii e siècle (cf. Casagrande/ Vecchio 1991; Delcorno 1986) 33 . 69 La langue religieuse italienne avant le Concile de Trente 33 La contribution peut-être la plus importante à la réflexion médiévale sur l’emploi et le rôle de la parole était celle du dominicain Cavalca, qui avait écrit deux traités: le Pungilingua et les Frutti della lingua (cf. Casagrande/ Vecchio 1991: 110-12). La naissance même de l’Ordo praedicatorum dénonce, par ailleurs, la nécessité d’une mise à jour des méthodes de la prédication ainsi que d’une attention majeure aux exemples rhétoriques et d’art oratoire donnés par les institutions civiles, notamment l’Université (cf. Antonelli 1982: 685-87). Ainsi, le modèle scolastique va s’imposer, le sermo modernus dont la structure est plus articulée que celle de l’antiquus, avec plusieurs divisions et distinctions du discours (cf. Casapullo 1999: 180). À ce propos, il faut attribuer une valeur emblématique au corpus des sermons de l’un des plus grands prédicateurs de cette époque, le dominicain Giordano de Pise, notamment les sermons du Quaresimale fiorentino, datant de 1305-06 (cf. l’édition avec commentaire linguistique de Delcorno 1974) 34 . Giordano de Pise applique à la prédication le modèle du sermo modernus provenant des milieux universitaires. Pour illustrer une vérité doctrinale ou théologique, l’on part d’un thema (une citation tirée de la Bible), qui est soigneusement divisé (divisio) afin de pouvoir en analyser chaque mot; à son tour, chaque divisio peut s’articuler autour des diverses significations du mot (distinctiones). Cela donne lieu à une structure syntaxique et logique assez complexe (cf. Delcorno 1986: 533; 1987: 474-75), dont le langage peut varier sur plusieurs registres: du registre savant à celui de la vie quotidienne, jusqu’à l’utilisation de phénomènes typiques de l’oralité (cf. Librandi 1993: 346; Delcorno 1974: 298). Il y a à la base de ce schéma rigide une doctrine dont la prédication médiévale (à l’instar de l’exégèse biblique) se sert pour interpréter l’Écriture Sainte, la doctrine dénommée «des quatre sens». C’est l’application d’un système d’interprétation biblique figurée, qui s’était développé à la fin de la période patristique et au Moyen Âge et selon lequel il fallait chercher dans chaque texte quatre sens différents (cf. Grant 1967: 101). Un distique qui circulait encore à la fin du XVI e siècle illustre ces quatre sens: Littera gesta docet, quid credit allegoria Moralis quid agas, quo tendas anagogia 35 Face à la prédication scolastique et dans le cadre du renouveau religieux qui caractérisa la société chrétienne dès la fin du xiv e siècle, il se développe une prédication populaire, représentée surtout par le corpus des sermons de Bernardin de Sienne (1380-1444; cf. l’édition de sermons de Sienne de 1427 par Delcorno 1989). Bernardin, visant avant tout à une transmission simplifiée et directe du message 70 Franco Pierno 34 Cf. aussi les éditions modernes d’autres sermons moins connus de Giordano de Pise: Iannella 1997; Marchioni 1992. 35 «La lettre nous enseigne les hauts faits du passé, L’allégorie ce qu’il faut croire, / Le sens moral ce que nous devons faire, L’anagogie le but vers lequel aller» (traduction de Grant 1967: 102). À titre d’exemple, voici une application grossière, mais efficace, aux versets de l’Épitre aux Galates (4, 22s.), où «Jérusalem» peut se comprendre de quatre façons différentes: 1) historiquement c’est la ville des Juifs, 2) allégoriquement c’est l’Église du Christ, 3) au sens moral c’est l’âme humaine, 4) au sens anagogique elle nous élève vers la cité céleste, notre mère à tous. religieux, explore toutes les possibilités offertes par la langue vulgaire, notamment les parlers locaux 36 , puisant aussi à la littérature des exempla, qui était fondée sur la narrative bourgeoise de tradition médiévale (cf. Delcorno 1986: 543). Gardant toujours le schéma du sermo modernus ainsi que les quatre sens de l’interprétation biblique, il rend son discours plus simple en s’appuyant sur des stratégies communicatives telles que les techniques de mémorisation (cf. Bolzoni 1984: 1048-53), les marqueurs phraséologiques appartenant à la langue orale 37 , l’altération du lexique par le biais de suffixes populaires 38 . Dans le sillage de la prédication de Bernardin de Sienne se situe une prédication interrégionale, née des adaptations interdialectales réalisées par des prédicateurs itinérants, dont il ne nous reste que des reportationes en latin ou dans une langue vulgaire normalisée sur un modèle latin (cf. Tavoni 1992: 38-41). Symbole du succès et du déclin de cette prédication populaire, la prédication dénommée «mescidata» (‘mélangée’) qui avait constitué un véritable genre littéraire pendant la seconde moitié du XV e siècle (cf. Lazzerini 1971, 1989; Paccagnella 1973), assumera un rôle d’éducateur linguistique du peuple des auditeurs (cf. Tavoni 1992: 40). Les prédicateurs «mescidati» créaient, en se servant du latin biblique et des langues locales, un amalgame linguistique visant à faire rire le public et, par conséquent, à faire mieux passer le message 39 . Ces tendances ont provoqué, pendant le XV e siècle, la décadence très rapide du modèle scolastique. Les nouveautés introduites par l’humanisme provoqueront par ailleurs la naissance d’un nouveau type de prédication, à savoir la prédication humaniste, phénomène élitiste limité à la Curie romaine et aux confréries florentines (cf. Delcorno 1987: 474-75) qui s’inscrit dans la réaction à la prédication instaurée par Bernardin et son école (cf. Delcorno 1987: 476; Tavoni 1992: 39). Quoi qu’il en soit, entre la seconde moitié du XV e et la première moitié du XVI e siècle, les sermons contribuèrent surtout à une diffusion de la langue toscane littéraire, fondée sur les textes florentins du XIV e siècle et promue par les Prose de Bembo. Cela se voit aussi bien dans une prédication élevée telle que celle du franciscain Cornelio Musso, ancien élève de Bembo à l’Université de Padoue qui avait 71 La langue religieuse italienne avant le Concile de Trente 36 Bernardin même le confirme: «Quando io vo predicando di terra in terra, quando io giogno in uno paese, io m’ingegno di parlare sempre sicondo i vocaboli loro; io avevo imparato e so parlare al lor modo molte cose. El mattone viene a dire el fanciullo, e la mattona la fanciulla». (Predica xxiii, cité de Tavoni 1992: 38). 37 À titre d’exemple: des interjections telles que doh (typique de Sienne); oimé, oimé; des mots épelés (pe-co-ro-ne); des mots onomatopéiques (la brebis: be be; le chat: mio, mio). 38 À titre d’exemple: giovinozzo, porcaccia, arboscellini, monacuccio. 39 Ce n’est pas un hasard que les plus célèbres prédicateurs «mescidati» soient deux élèves de Bernardin de Sienne: Roberto Caracciolo de Lecce et Jacopo della Marca, provenant de l’Italie du Sud (cf. Delcorno 1986: 536), dont le degré d’«interrégionalité» linguistique est tellement élevé que l’on ne peut pas distinguer avec certitude des vrais traits locaux (cf. Delcorno 1969- 70: 151). C’est surtout dans l’Italie du Nord que la prédication «mescidata» deviendra un véritable genre à part entière grâce à l’activité du franciscain Bernardin Tomitano de Feltre et des dominicains Valeriano Soncino et Gabriele Barletta. publié un recueil de sermons en 1554 (cf. Marazzini 1994: 273; Librandi 1993: 361), que dans une prédication aux allures plus populaires comme celle de Girolamo Savonarola, prédicateur dominicain d’origine ferrarraise, actif pendant les années quatre-vingt du xv e siècle et qui s’adressait à ses auditeurs florentins en leur langue (cf. Matarrese 2000). 2.7 Traits caractéristiques de la prédication L’origine orale et les contextes de réalisation des sermons ont eu pour conséquence une augmentation rapide et consistante du degré de variation de la langue religieuse. Parmi les traits les plus caractéristiques, on constate: - une tendance interrégionale, accentuée par la prédication des ordres mendiants, notamment celle des franciscains. Il s’agit de la diffusion et de l’évolution d’une langue vulgaire religieuse (cf. Casapullo 1999: 179) dont les traits étaient moins localisés (dans le cas de Saint François et des franciscains, cf. les analyses de Baldelli 1988: 126-29), ce qui confirme un message religieux destiné au plus grand nombre et soumis à des déplacements fréquents; - l’exploitation des possibilités offertes par la langue vulgaire non seulement sur la base du latin, mais aussi en puisant aux ressources des parlers locaux et à l’oralité. C’est Bernardin de Sienne qui promeut une prédication où les termes de la langue vulgaire employés sont déterminés par le lieu de la prédication et le contexte oral. Son exemple sera suivi par la prédication «mescidata»; - entre la seconde moitié du XV e siècle et la première moitié du XVI e , surtout d’un point de vue phonétique et morphologique, le toscan littéraire joue un rôle prépondérant. Dans ses sermons, Savonarola emploie le florentin moyen et contemporain aussi bien que celui archaïsant et provenant du vocabulaire du xiv e siècle (cf. Matarrese 2000: 235), ce qui ne peut pas être uniquement imputé à son scribe florentin qui travaillait toujours sous son contrôle (cf. Marazzini 1993: 97; Tavoni 1992: 201-05). Comme on l’a rappelé ci-dessus d’ailleurs, l’activité de Cornelio Musso montre que la diffusion des théories «bembistes» dans la prédication pendant la première moitié du XVI e ne se fera pas attendre (cf. Maraschio/ Matarrese 1998: 192-94). - D’un point de vue lexical, la diglossie caractérise aussi la prédication des ordres mendiants, notamment celle de Saint François et des franciscains, où un lexique aux accents populaires (surtout provenant de l’Ombrie, dans le cas des franciscains) se mélange à des mots latins et des latinismes probablement connus des auditeurs, destinés à combler la lacune lexicale des technicismes bibliques (cf. Librandi 1993: 341-42; Baldelli 1997: 8). Dans la langue du dominicain Giordano de Pise, par exemple, les termes qui visent un auditoire de bas niveau alternent avec les premières attestations du vocabulaire philosophique et théo- 72 Franco Pierno logique créées sur la base de calques du latin (cf. le glossaire de Delcorno 1974) 40 . - Quant à la syntaxe, l’élément le plus frappant, c’est la présence des marqueurs typiques de l’oralité, qui se sont maintenus dans le passage de l’oral à la version écrite. Ces marqueurs représentent en premier lieu l’élément oral et populaire face à l’hégémonie de la parole écrite (cf. Bologna 1982: 729s.). Il s’agit surtout de formations verbales à fonction allocutive ou conative, de constantes répétitions de mots, d’interjections, de déplacements. Tous ces éléments se retrouvent chez les plus importants prédicateurs de l’époque: Giordano de Pise (Delcorno 1974: 298; Librandi 1993: 346) 41 ; Bernardin de Sienne (cf. Bolzoni 1984: 1049s.; Castellani 1982; Delcorno 1989; Fioravanti Melli 1975; Pasquini 1982; Sollazzi 1980a; Sollazzi 1980b; cf. N37); Girolamo Savonarola 42 (cf. Matarrese 2000: 243-44) 43 . Dans les sermons de la fin du XV e et du début du XVI e siècle, la présence des marqueurs d’oralité a aussi été mise en évidence à l’aide des méthodes de la linguistique pragmatique (cf. Fox 1987a; 1987b et Berretta 1990). Les recherches menées par Librandi 2000 se sont concentrées sur les sermons d’une sœur florentine, Dominique de Paradiso (cf. l’édition critique de Librandi/ Valerio 1999), femme visionnaire et prophétesse, proche de Savonarola. Ses sermons s’adressaient non seulement à ses consœurs, mais aussi, au fur et à mesure que sa réputation s’affirmait, à un public plus élargi. Librandi 2000: 213-23 met en relief notamment les «vides discursifs» et les mécanismes de cohésion qui ne sont pas fondés sur une régularité anaphorique (comme dans les sermons construits selon les règles classiques de la rhétorique), s’appuyant en revanche sur des points de repère personnels que la sœur pouvait rappeler au public par le biais de références pronominales ou lexicales. Il s’agit donc d’une prédication dictée surtout par des exigences d’ordre pratique, ce qui justifie aussi la fréquence des déplacements (à gauche) et les connexions syntaxiques résolues par un che subordonnant de valeur générale, qui favorisent la progression du discours (cf. Librandi 2000: 228-34). On constate aussi que la présence des mar- 73 La langue religieuse italienne avant le Concile de Trente 40 Quelques exemples du vocabulaire théologique et philosophique: allegare ‘addurre prove’; convertimento ‘trasformazione, soprattutto la Transustanziazione’; forme ‘essenza’; speculazione ‘meditazione’ (cf. Casapullo 1999: 182). 41 Chez Giordano de Pise, on observe l’emploi de propositions exclamatives et interrogatives, et de questions rhétoriques: «Or tu diresti: ‹Ben veggio ch’è così di noi che vegnamo dopo lui, ma di quelli che passaro dinanzi che diremo? ›» (cf. Librandi 1993: 346). 42 Cf. aussi l’étude de Varvaro 1984, consacrée au repérage du parlé, des traits de l’oralité, dans un sermon de Simone da Pozzo datant de 1392. 43 Le discours de Savonarola, prévoyant la diffusion par l’écrit, est plus surveillé que celui de Bernardin de Sienne; cependant, il présente également des connecteurs pragmatiques (cioè, ecco, or, orsù, etc.), des exemples d’ellipse grammaticale («dobbiamo essere tutti uniti all’orazione: tutti uno core e tutti una anima»), des anacoluthes («chi caverà el muro, gli rovinerà addosso»), des déplacements à gauche d’un constituant de la proposition, remplacé par la suite par un pronom: «Queste cerimonie da captar benivolenzia le sanno far troppo bene e’ tiepidi». queurs d’oralité dans d’autres textes religieux de la même époque est due d’abord au rôle prépondérant joué par les sermons dans les messages religieux au XV e et XVI e siècle. 2.8 Les autres écrits religieux (des Ordres mendiants au Concile de Trente) En reprenant une définition de Tavoni 1992: 43, on regroupera ici les autres textes de la communication religieuse: textes poétiques, textes liturgiques (pour la liturgie commune, mais aussi des prières privées), mystiques, spirituels, hagiographiques (parmi lesquels l’on compte les exempla tirés de la vie des saints), ainsi que les livres de dévotion et les catéchismes. Cette abondante production est due d’abord à l’essor des ordres mendiants, dont la portée spirituelle et sociale avait à tel point influencé la société du xiii e siècle que les besoins de communication religieuse en langue vulgaire s’étaient multipliés (cf. Antonelli 1982; Bologna 1982). Abstraction faite des traductions bibliques qui constituent un genre à part entière (cf. §2.4.), nombreuses sont les traductions d’ouvrages des pères de l’Église (cf. Delcorno 1998: 9-11) ainsi que les hagiographies (cf. Delcorno 1998: 11-14), le plus souvent d’aire toscane et provenant surtout des milieux franciscains. À ces derniers revient le mérite d’une abondante production et d’une grande diffusion d’écrits concernant la vie et les œuvres de Saint François d’Assise. Parmi ces textes, le plus important est le recueil des Fioretti de la fin du XIV e siècle (cf. l’édition de Casella 1926), traduit du latin (Acti beati Francisci et sociorum eius, début du XIV e siècle; cf. Petrocchi 1957a; 1957b) 44 . À partir du XIV e siècle, les milieux religieux étaient freinés dans leur mouvement: décadence des mœurs, abus, ingérences dans les pouvoirs politiques et économiques. Cependant, entre le XIV e et le XVI e siècle, on peut constater une augmentation de la production de textes religieux, ce qui s’explique justement par la crise que l’Église traversait et qui avait donné lieu à des mouvements spontanés qui tâchaient de faire renaître l’esprit des origines par le biais d’activités caritatives et spirituelles; le mouvement peut-être le plus important fut celui de l’Osservanza 45 . Entre temps, pendant la seconde moitié du XVI e siècle, la diffusion des textes religieux avait commencé à se servir de l’imprimerie. Toute cette production permit la diffusion de textes fortement dialectalisés, mais aussi l’interpénétration de dialectes différents, ce qui prouve une certaine indépendance du degré de variation linguistique des communications religieuses par rapport à la «toscanisation» des XV e -XVI e siècles (cf. Bruni 1983: 3-4). Depuis quelques années, on compte un 74 Franco Pierno 44 Il y a aussi des œuvres qui concernent d’autres protagonistes de l’ordre franciscain, telle que la traduction de la Vita di fra Ginepro. Pour une étude de la dimension narrative de ces textes, basée sur l’analyse des temps verbaux, cf. Baldelli 1997. 45 Mouvement de renouveau spirituel qui commence à la fin du XIV e s., ayant pour but la remise en vigueur des règles premières de l’ordre bénédictin et des ordres mendiants, l’Osservanza donna lieu à un certain rigorisme moral ainsi qu’à une véritable tension mystique. nombre élevé d’études et d’éditions critiques (avec commentaire linguistique) au sujet de cette production, en particulier: - les récits hagiographiques ainsi que les recueils d’exempla 46 ; - les traités de dévotion et de spiritualité 47 ; - les textes destinés surtout aux ecclésiastiques 48 . Tous ces textes constituaient souvent, en amont, la base de préparation pour des prédicateurs qui n’avaient pas toujours une profonde formation théologique et qui devaient constamment réveiller l’intérêt des fidèles. Pour ce qui concerne les documents liturgiques et les apocryphes, on en est encore au recensement des manuscrits et des imprimés (cf. Balboni 1961, 1978; Landotti 1975; Garavaglia 1998 pour les textes liturgiques; cf. Cornagliotti 1976b pour les apocryphes d’aire italienne). En revanche, les textes mystiques attirent beaucoup plus l’attention. Ce genre, fondé sur la possibilité de s’élever à la divinité par un effort de volonté et non par les capacités intellectuelles, remonte au XIII e siècle 49 et, au fil des siècles, définit ses éléments: le manque de confiance dans le langage traditionnel, considéré comme sémiologiquement impuissant, provoque la recherche d’un nouveau langage, de figures rhétoriques transgressives (telles que 75 La langue religieuse italienne avant le Concile de Trente 46 Cf. la Vita di san Petronio, traduction en langue vulgaire du début du XIV e d’un texte latin inconnu du XII e siècle, provenant de l’aire bolognaise (cf. Corti 1962); le Libru di lu transitu et vita di misser sanctu Iheronimu de 1473 (cf. Bruni 1983: 3-4; édition critique de Di Girolamo 1982); la Leggenda della Beata Eustochia sicilienne de 1488-1510 (édition critique de Catalano 1950); le Libero de frai Gilio ligure de la fin du XIV e siècle, adaptation génoise des Dicta Beati Aegidii, recueil de sentences et d’exempla attribués à Egidio, premier compagnon de Saint François; la Lamentazione de la gloriosa Matre di Cristo d’Urbano Vigerio et la Leggenda de Sancta Elizabeth figlia de lo re de Ungaria, datant du début du XVI e et provenant de l’aire de Savona (Ligurie) (cf. Tavoni 1992: 290-95); la Legenda aurea, publiée à Venise en 1475 et traduite du latin (l’auteur du texte original étant Jacopo da Varagine) par Niccolò Malerbi (cf. Marucci 1993). 47 Cf. le recueil de préceptes moraux pour jeunes épouses, la Via de lo Paraiso ligure datant du début du XVI e s. (cf. Borghi Cedrini 1984); le traité sur l’oraison et la contemplation Giardino di orazione, imprimé une première fois en 1494 à Venise, et réimprimé pendant la première moitié du XVI e s. (cf. Stanislao da Campagnola 1971); La Scala del Paradiso, attribué à Saint Augustin, qui eut un certain succès et fut traduit plusieurs fois (il existe une édition critique de la version sicilienne; cf. Lalomia 2002); le Grisostomo, paraphrase de l’homélie de Saint Jean Chrysostome, datant environ de 1342 et provenant de la zone de Pavie (Lombardie) (cf. Bongrani/ Morgana 1992: 92-93; 1994: 105-08; Stella 1994c: 180-84); le Dialogo de sam Gregorio en vorgà ligure, datant du XVI e s. (cf. Porro 1972 et l’édition critique, Porro 1979). 48 Cf. le Trattatello sulla Messa de Giacomo Traversagni, datant du début du XVI e et provenant de l’aire de Savona (Ligurie); le Vocabulista ecclesiastico, d’origine ligure, sorte de glossaire pour un public ecclésiatique ignorant le latin, publié pour la première fois en 1480 (cf. Marazzini 1987); l’Interrogatorio volgare compendioso et copioso, manuel pour la confession provenant de l’aire bolognaise et datant des années cinquante et soixante du XV e s. (cf. Bellotti 1994). 49 Cf. le recueil édité par Levasti 1935, qui couvre la période qui s’étend du De contemptu mundi du pape Innocent III (vers 1160) à Simone de Cascia (XV e siècle); ou Getto 1967, qui s’occupe même de textes du XX e s. l’oxymoron, le paradoxe, la catachrèse) ainsi que l’exploitation de la dualité sémantique de mots agissant à la fois sur le plan divin et sur le plan humain (cf. Baldini 1998: 750-52). Ce langage de l’«ineffabile» a ses racines chez Dante, qui représente le point où la tradition rhétorique-littéraire rencontre la tradition mystique-religieuse et qui permet l’entrée des termes «ineffabile» et «ineffabilitade», témoins d’un vocabulaire qui prendra son essor avec Sainte Catherine de Sienne 50 (cf. Colombo 1987: 53-71). Ce sont les textes des femmes mystiques des XVI e -XVII e siècles qui ont fait davantage l’objet du travail des linguistes et des philologues. On mentionnera en particulier l’anthologie incontournable de Pozzi/ Leonardi 1988 qui est enrichie d’un lexique de termes mystiques (739-46) et l’étude de Pozzi 1988 qui examine le langage de la mystique féminine, notamment celui de Sainte Marie Maddalena de’ Pazzi (1566-1607) 51 . Il s’agit d’un code verbal qui, fortement influencé par le contact direct avec la divinité, force les barrières de la grammaire et du lexique et, par conséquent, est dénommé «transgressif», mais qui, en même temps, s’avère être un véritable réservoir de langue orale 52 . 2.8.1 La poésie religieuse (à partir du XIII e s.) Dans le sillage tracé par les premiers textes poétiques religieux de l’Italie médiane se situe le Cantico di frate Sole composé par Saint François d’Assise à la fin de sa vie (vers 1224). Ce texte, dont le manuscrit autographe n’a pas été conservé, a été transmis par d’autres sources, parmi lesquelles le manuscrit d’Assise 338 (cf. l’édition critique établie par Branca 1994). Écrit en prose rimée, divisé en versets assonancés, il a la forme d’un psaume et porte nettement la marque de son modèle biblique. Tout en demeurant un cas unique, ce texte représente l’intérêt des franciscains pour l’élément populaire et sa transmission en langue vulgaire (cf. Casapullo 1999: 202-03). Malgré l’influence du texte biblique, la langue du Cantique garde sa spécificité: série d’adjectifs appliqués non seulement à Dieu, mais aussi à 76 Franco Pierno 50 Catherine de Sienne (1347-80), appartenant à l’ordre dominicain des «Mantellate», fut une protagoniste de la vie ecclésiale de son époque, plaidant pour le retour du pape Grégoire XI à Rome et manifestant son souci de l’unité et de l’indépendance de l’Église. Bien que ne sachant pas écrire et ne connaissant pas le latin, elle laisse derrière elle une œuvre considérable. 51 Étudié encore par Pozzi, qui s’est aussi occupé de la mystique Angela da Foligno, qui a vécu entre le XIII e et le XIV e siècle (cf. Pozzi 1992b). 52 L’intérêt pour les femmes mystiques demeure, et donne lieu à des éditions récentes des œuvres de Catherine Vigri, ferrarraise (Foletti 1985; cf. aussi Maraschio/ Matarrese 1998: 111-13; Degl’Innocenti 2000) et de Sainte Francesca Romana, romaine, qui dictait ses visions à son directeur spirituel, Giovanni Mattiotti, qui les réunit dans un ouvrage, les Visioni (cf. Vignuzzi 1992, ainsi que Librandi 1993: 371-73 qui s’occupe de toutes les deux). L’approche linguistique de ces textes du XV e s. s’avère importante dans la mesure où l’on considère la vivacité du témoignage, visant à transmettre et à garder la fraîcheur de l’expérience mystique et, donc, à enregistrer de façon fidèle tous les mots. Le cas des femmes mystiques a aussi suscité des études de linguistique concernant le rapport entre les femmes et l’histoire de la langue italienne (cf. Marcato 1995; Vignuzzi/ Bertini Malgarini à paraître). ses créatures (appelées frate et sora), structures syntaxiques qui s’articulent autour de la préposition per 53 , qui a donné lieu à des interprétations grammaticales diverses (Baldelli 1997: 30-32; Pozzi 1992a). D’un point de vue phonomorphologique et lexical, la langue du Cantique est le vulgaire d’Ombrie, notamment d’Assise: skappare ‘échapper’ (v. 28) et mentovare ‘nommer’ (v. 4) subsistent encore aujourd’hui à Assise ou dans les dialectes centreméridionaux (cf. Baldelli 1983: 570-78); elle relève aussi, cependant, du modèle latin et biblique (cf. Ageno 1959: 407-08). D’un point de vue stylistique, on a remarqué des applications de la technique des cursus (cf. Ageno 1959: 409-10; Contini 1970). L’influence du modèle linguistique et stylistique du Cantico est illustrée par l’apocryphe franciscain (initialement attribué à Saint François même), Audite poverelle, de la fin du XIII e s. Il s’agit de la traduction de la dernière partie de la Legenda Perusina (début du XIII e s.), paraphrase du testament spirituel de Sainte Claire à ses consœurs de Saint Damien. Ce texte a aussi été rédigé en vulgaire d’Assise et anobli par des latinismes, non seulement graphiques. D’un point de vue métrique et stylistique, on y retrouve certains des traits présents dans le Cantico, tels que le cursus et l’anisosyllabisme (cf. Mattesini 1994: 521-22). Pendant les mêmes décennies, dans le Nord de l’Italie, s’affirme une solide tradition de poésie morale et religieuse aux intentions didactiques. On date du début du XIII e s. le Libro de Uguccione da Lodi (cf. Contini 1960/ 1: 597-624), sermon moral en laisses de type français, composé en décasyllabes épiques mêlés d’alexandrins, écrit substantiellement en lombard, malgré des infiltrations vénitiennes (cf. Bongrani/ Morgana 1994: 89-90). C’est aux premières décennies du XIII e siècle que remonte le Splanamento de li Proverbii de Salamone du Crémonais Girardo Patecchio (cf. Contini 1960/ 1: 560-83), et à 1274 le Sermone lombard en vers de Pietro de Bescapé. En se fondant sur ces textes, l’on peut affirmer que la poésie religieuse septentrionale a contribué à l’évolution et à la diffusion d’un lombard oriental, confirmant, au Nord également, la tendance de la littérature religieuse à créer des koinès interrégionales (cf. Contini 1960/ 1: 599; Stella 1994c: 159-60). L’Italie médiane, en revanche, avait, par les textes cités ci-dessus, préparé et anticipé l’explosion poétique des laude. La diffusion de ce type de poésie, dont les origines sont ombriennes et toscanes, se situe dans la seconde moitié du XIII e siècle. Les laude sont le produit des grandes confréries laïques, nées dans le sillage des mouvements spirituels de l’époque. À partir de 1233 (l’année jubilaire de l’Alleluja), commencent à se répandre dans toute l’Italie des processions pénitentielles urbaines, durant lesquelles les participants se flagellent en déclamant des chants (les laude) dont le sujet était la Passion du Christ. Ces mouvements d’une portée sociale énorme ont permis la conservation des textes, en écrasante majori- 77 La langue religieuse italienne avant le Concile de Trente 53 À titre d’exemple: «Laudato si’, mi’ Signore, per sora luna e le stelle . . . Laudato si’, mi’ Signore, per frate vento / et per aere et nubilo . . . Laudato si’, mi’ Signore, per sor’acqua» (Cantico delle creature 10.11-12.15). té anonymes et réunis dans des recueils (les laudari), qui, pour la plus grande partie, datent du XIV e s., avec quelques précieuses exceptions remontant au XIII e s. (les Laudi de Cortone; le Laudario Urbinate). Le fort prestige de cette tradition poétique est à la base de la propagation des caractéristiques linguistiques médianes, même dans les régions du Nord de l’Italie 54 . Le mouvement littéraire et social des laude (avec les présences poétiques religieuses des siècles précédents, les Ritmi et le Cantico) constitue le seul cas où la production poétique religieuse représente l’un des sommets de la production littéraire contemporaine. Parmi les auteurs connus de laude, il y a les plus grands poètes de l’époque: Guittone d’Arezzo (qui pourrait avoir été le premier à utiliser pour ce type de poèmes le schéma métrique de la ballade), mais surtout Jacopone da Todi. Ce dernier, dont la culture religieuse repose sur le milieu bénédictin de Cassin (cf. Ageno 1953; Contini 1960/ 2: 61-166; Bettarini 1969; Mancini 1974), emploie pourtant dans son langage les termes et les syntagmes de la culture de l’amour laïc, à titre d’exemple: «riso et ioco» (laude 39: 23-24); l’épithète «aulente giglio» utilisé pour s’adresser à la Vierge (laude 13: 17) et le syntagme «solazzo e ioco» (laude 83: 19-20) pour une invective morale (cf. Bruni 1990: 133-38). Jacopone se sert d’expressions aussi bien tirées du langage ecclésiastique (comme dans le cas de Boniface viii, «berger», laude 67: 1-2) que d’autres champs sémantiques plus terrestres et concrets (comme par exemple la nourriture: la grâce divine est à goûter avec la bouche et les dents de l’Affection), ce qui rappelle le langage des mystiques, mais aussi s’en distingue, en évitant les images plus «sensationnelles» (cf. Bruni 1990: 141). Vers la fin du XV e siècle, un autre genre littéraire religieux apparaît, celui du mystère (la sacra rappresentazione), qui est un prolongement naturel des laude: on 78 Franco Pierno 54 Voici quelques exemples: un manuscrit lombard contenant des laude de Jacopone est doté d’un petit glossaire ombrien-lombard (cf. Bruni 1990: 143); dans un recueil de la congrégation des «Battuti d’Udine» (Frioul), on reconnaît, sous une couche de vulgaire vénétien, des éléments linguistiques de l’Ombrie et de l’Italie médiane (cf. Morgana 1992: 289); dans l’aire piémontaise circulaient des textes d’origine toscane et ombrienne, adaptés pour le public local par l’introduction de traits septentrionaux (cf. Marazzini 1992: 5). Il ne manque pourtant pas des textes aux caractéristiques étroitement locales: la Lamentazione de Turin (cf. Clivio 1976: 19-38.57) ou bien les laude en dialecte bergamasque (et de Brescia), qui constituent les témoignages les plus anciens de ces parlers (cf. Contini 1935). Pour l’ancien bergamasque, il existe aussi un recueil de la fin du xiv e s. (cf. Ciociola 1979; 1986; Tomasoni 1989a; 1989b) dont les traits caractéristiques ont été résumés par Bongrani/ Morgana 1992: 93-94 et Stella 1994c: 170-74). Plus fragmentaires sont les témoignages de la production des laude en ancien génois et en ancien ligure occidental (cf. Stella 1994b: 134-37). D’autres exemples de poésie religieuse ne s’inscrivant pas dans le genre des laude, paraissent bien ancrés, d’un point de vue linguistique, dans leur provenance géographique: de la Campanie provient Il detto dei tre morti e dei tre vivi, le pisan Segni del giudizio, le lucquois Serventese contro i frati (cf. Maraschio/ Matarrese 1998: 36-39, 55-57); de la Vénétie, surtout de l’aire véronaise, une production aux allures eschatologiques, dont se détache Giacomino de Verone, frère franciscain auteur de poèmes en alexandrins (cf. Contini 1960/ 2: 625-25; Tomasoni 1994: 229-34). Enfin, on observe la présence de poèmes religieux dans les rimes de l’Anonyme génois du milieu du XIII e s. (cf. Nicolas 1994: xi. cxxx-cc; Petracco Siccardi 1980: 5-8). était passé d’une simple lecture (ou récitation) publique à une véritable dramatisation du texte 55 . Les mystères, spectacle complet, grâce à l’impact visuel et émotionnel du genre théâtral, constituaient de véritables occasions d’éducation religieuse et linguistique pour un public populaire dialectophone, d’autant plus que leur langue était souvent le résultat d’un effort de «dédialectisation» visant à réduire les traits les plus idiomatiques et ayant souvent comme point de repère la langue toscane (cf. pour le milieu florentin Newbigin 1983; pour l’aire piémontaise cf. Cornagliotti 1976a) 56 . S’il subsiste toujours un intérêt scientifique (moins linguiste que littéraire) pour l’influence exercée par la religion et la Bible sur la littérature (médiévale, mais aussi des siècles suivants) 57 , il faut relever l’absence complète d’études sur la production littéraire religieuse des siècles postérieurs au XV e s., une production constituée surtout d’hymnes sacrés ou de psautiers revisités, destinés aux rites de la communauté en prière 58 . 2.9 Les traits caractéristiques dans la poésie et les autres écrits religieux Dans les écrits religieux, poésie religieuse incluse, on constate la tendance fondamentale à la formation de langues interrégionales. La plus grande partie de cette production provient de zones non toscanes et, n’ayant pas de soucis d’ordre littéraire, favorise la diffusion des parlers locaux tout en provoquant la perte des particularités les plus idiomatiques en faveur d’une meilleure circulation des textes (cf. Bruni 1983: 3-4). Par ailleurs, malgré le nombre et la disparité des textes et la diversité de leur provenance géographique, il nous semble que l’on peut isoler quelques tendances intéressantes: 79 La langue religieuse italienne avant le Concile de Trente 55 Entre les laude et les mystères il y eut de véritables cycles paraliturgiques, qui s’intercalèrent dans le déroulement des rites à l’intérieur des églises: à Noël «L’adoration des bergers» et «La naissance de Jésus» (Representacio Pastorum); à Pâques «la visite au tombeau» (Visitatio sepulchri). Le passage de la paraliturgie au théâtre religieux proprement dit était facile (cf. Chelini 1968: 467). 56 Cf. cependant la récente édition critique d’un mystère d’origine sicilienne ayant comme sujet la Passion et la Résurrection du Christ (Del Popolo 2000), rédigé entre 1418 et 1434 par Marcu di Grandi qui a vécu à Syracuse et dont la langue (un sicilien interrégional) ne semble pas influencée par le toscan, mais est enrichie de latinismes bibliques et religieux. 57 Cf. les études du «pionnier» Erich Auerbach (Auerbach 1968) ou celles, fondamentales, de l’école nord-américaine: du canadien Northrop Frye (notamment Frye 1984); de l’américain Harold Bloom (par exemple: Bloom 1999). En littérature italienne, il existe des études traitant de l’influence de l’écrit biblique sur les plus grands écrivains: à titre d’exemple, pour Dante, cf. Rigo 1994; pour Pétrarque, cf. Pozzi 1989; pour Foscolo, cf. Terzoli 1988; pour Leopardi, cf. Rota 1998; pour Manzoni, cf. Torchio 1975. 58 On mentionnera pourtant l’ouvrage de Leri 1994, qui traite des traductions littéraires des psaumes entre 1641 et 1780, ainsi que celui de Commare 2003. Ce dernier consiste en une étude lexicographique et sémantique des poèmes de David Maria Turoldo (notamment le recueil O sensi miei publié en 1990), frère franciscain qui a vécu au XX e s. (mort en 2001). - au niveau phono-morphologique, on observe trois types de koinès interrégionales: a) koinès qui semblent réfractaires au modèle toscan, avant le XVI e siècle 59 ; b) koinès à base toscane, mais qui ne cèdent pas à l’influence du toscoflorentin littéraire 60 ; c) koinès ouvertes aux influences du tosco-florentin littéraire, surtout à partir du XVI e siècle 61 ; 80 Franco Pierno 59 Pour les koinès septentrionales, cf. p. ex. les textes des XIV e et XV e siècles qui illustrent les diverses formes de la koinè padane tels que la Vita di san Petronio, de l’aire bolonaise, et l’Interrogatorio volgare compendioso et copioso. Sous la couche bolonaise, ces documents révèlent des emprunts à d’autres villes ou régions (Mantoue, Ferrara); le Grisostomo, provenant de l’aire de Pavie, est ouvert aussi aux influences de l’aire milanaise et piémontaise (cf. Bongrani/ Morgana 1992: 92-93; 1994: 105-08; Stella 1994c: 180-84); dans la Vénétie et en Frioul les textes de dévotion sont les seuls à véhiculer une koinè extrarégionale (cf. Morgana 1992: 290-91); en Ligurie, le Dialogo de sam Gregorio en vorgà, dont la langue est un ligure-piémontais, témoigne d’une circulation des textes et de l’existence d’une koinè commune à la Ligurie et au Piémont méridional, ce qui est d’autant plus flagrant que la langue du modèle est le florentin (cf. Porro 1972; 1979; Petracco Siccardi 1980: 5; Stella 1994b: 122). La formation des langues interrégionales, indépendamment de la toscanisation, est encore plus significative dans l’Italie du Sud, notamment en Sicile, où, à partir du milieu du XV e s., le mouvement de l’Osservanza et l’activité de l’ordre franciscain (cf. Bruni 1983; Alfieri 1992: 809-12; 1994: 795-98) avaient suscité une circulation intense de textes religieux et, par conséquent, la formation d’une koinè méridionale sicilienne (cf. le Libru di lu transitu et vita di misser sanctu Iheronimu; Bruni 1983: 3-4; Di Girolamo 1982; et la Leggenda della Beata Eustochia). Ces textes, tout en étant écrits en sicilien, montrent un effort de «dé-sicilianisation» vers une koinè méridionale (certains textes siciliens circuleront aussi dans les Calabres), mais gardent une certaine distance vis-à-vis du modèle toscan (cf. pour le Libru: Di Girolamo 1982: 346-50; Tavoni 1992: 45; pour la Leggenda, cf. Tavoni 1992: 351-54); la Leggenda circulera aussi dans la zone médiane de l’Italie dans des manuscrits présentant, sous une couche sicilienne, des traits ombriens et ferrarais (cf. Bruni 1983: 10-12; Alfieri 1994: 800-03). Il est intéressant de constater que cet effort linguistique dépassant les frontières dialectales a lieu même dans les textes relatant des visions mystiques; comme dans les Visioni de Mattioti, où des formes verbales romaines alternent avec les formes toscanes correspondantes (staco ‘sont’, aco ‘ont’ avec stanno et ànno; cf. Bruni 1983: 16). 60 Ainsi, le Libero de frai Gilio est rédigé dans une langue à la structure phonomorphologique toscane où paraissent des traits ligures, ce qui démontre la pénétration, même dans les couches les moins importantes des ordres mendiants, d’un italien régional à base toscane (cf. Coletti 1983: 10), sans qu’une supériorité grammaticale du florentin ne soit sensible (cf. Stella 1994b: 132). Le Giardino di orazione est écrit dans un italien de base toscane, mais avec des caractéristiques phonétiques, morphologiques et lexicales manifestement septentrionales (cf. Trovato 1994: 215-16). On signalera aussi un texte poétique, Gli Quattro Evangelii concordati in uno de Jacopo Gradenigo, édité (avec commentaire linguistique et glossaire) par Gambino 1999. Ce texte date d’entre la fin du XIV e et le début du XV e s. et provient de la Vénétie. Sa langue est le toscan d’un écrivain septentrional, toujours ouvert pourtant aux dialectalismes et aux latinismes. 61 Comme dans les textes datant du début du xvi e s. et provenant de l’aire de Savona (Ligurie): la Lamentazione de la gloriosa Matre di Cristo d’Urbano Vigerio, le Trattatello sulla Messa de Giacomo Traversagni, la Leggenda de Sancta Elizabeth figlia de lo re de Ungaria. Ces textes témoignent d’un taux de toscanisation très élevé. Il en va de même pour un autre texte provenant de l’aire ligure et appartenant à la même période, la Via de lo Paraiso, qui montre une forte tendance vers une langue toscane et littéraire (cf. Tavoni 1992: 290-95). La Legenda aurea de Malerbi présente un nombre élevé de traits florentins, conformément aux intentions manifestées par l’auteur, qui, dans l’introduction, avoue avoir profité de l’aide d’un correcteur «fiorentino» (cf. Marucci 1993). - à l’instar des traductions bibliques, dans ces textes qui, assez souvent, sont euxmêmes des traductions du latin, il subsiste un rapport d’interaction, voire de dépendance, avec le latin. Cela se produit surtout au niveau lexical, dans la création de latinismes qui servent à suppléer l’absence de technicismes religieux dans les langues vulgaires 62 ; - au niveau syntaxique, on peut constater la présence de marqueurs de l’oralité, ce qui est dû, très probablement, à l’influence exercée par la prédication 63 ; - comme on l’a déjà noté, la poésie religieuse des premiers siècles contribue de manière déterminante à la formation ainsi qu’à la diffusion de langues interrégionales. Ce sont surtout les recueils de laude qui véhiculent des langues dont les traits de la zone médiane jouent un rôle prépondérant, même dans le Nord de l’Italie. 3. Conclusion Nous pensons que les données présentées ici nous permettent de fonder une première vision systèmatique de la langue religieuse italienne avant Trente. Nous avons repéré quelques structures générales qui peuvent nous aider à comprendre le système en diachronie, à l’instar des «paragoni a vasto raggio» envisagés par Matarrese/ Maraschio 1998: ii (cf. la citation reproduite dans l’Introduction, cidessus) et qui pourraient être considérées comme les caractères généraux de cette «langue de spécialité». Nous avons organisé la présentation de ces traits caractéristiques autour de trois catégories: les facteurs sociolinguistiques qui ont déterminé la langue religieuse; les modèles linguistiques qui ont influencé ou interagi avec la langue religieuse, en instaurant aussi un rapport d’échange avec elle; les traits caractérisant la langue religieuse. 3.1. Facteurs sociolinguistiques: On peut retenir deux facteurs sociolinguistiques majeurs: a) le rôle de l’autorité ecclésiastique et b) la communauté des croyants 64 ; et un facteur sociolinguistique mineur: les différents courants de la Réforme. 81 La langue religieuse italienne avant le Concile de Trente 62 Ceci se trouve surtout dans des textes de nature juridique-religieuse, donc où l’apport ponctuel du latin est encore plus nécessaire; cf. l’Interrogatorio volgare compendioso et copioso (Bellotti 1994: 229-32) ou bien le Vocabulista ecclesiastico. Mais aussi dans le genre des exempla: la Legenda aurea présente un nombre élevé de latinismes lexicaux ainsi que syntaxiques (cf. Marucci 1993). Dans la Vita di san Petronio, l’interpénétration du latin et du vulgaire se produit surtout au niveau stylistique (cf. Corti 1962: ix-lxxvii; Foresti 1994: 386; Maraschio/ Matarrese 1998: 89-91). 63 Par exemple, dans la Vita di san Petronio il y a plusieurs marqueurs d’oralité, voire des allusions explicites à un public. Cependant, on peut constater la présence de vraies situations d’oralité dans les textes des mystiques, marqués surtout par une syntaxe fragmentaire, des propositions courtes et juxtaposées (cf. par ex. l’analyse des textes de Maddalena de’ Pazzi chez Pozzi 1988: 32-33). 64 La communauté des croyants a toujours eu un rôle incontournable dans la communication verbale religieuse, non seulement en tant que public passif, auquel les autorités ecclésiastiques devaient 3.2. Modèles linguistiques: Selon le genre, le contexte et les locuteurs/ destinataires, la langue religieuse sera davantage déterminée tantôt par le modèle linguistique préexistant (qui est surtout celui constitué par le latin biblique et liturgique), tantôt par la langue littéraire, tantôt par la langue commune, voire par la langue orale. Pour chacun de ces principaux modèles, on a choisi de parler soit d’influence, lorsque il s’agit d’un mouvement unidirectionnel (du modèle à la langue religieuse), soit de rapport, lorsque le mouvement est manifestement bidirectionnel (modèle ↔ langue religieuse), car il existe des échanges à tous les niveaux linguistiques entre les deux entités. On a retenu quatre modèles: influence du latin; rapport avec la langue littéraire 65 ; influence du langage parlé 66 ; rapport avec la langue communément utilisée. 82 Franco Pierno s’adapter pour lui enseigner les vérités divines, mais aussi en tant que facteur actif dans la production de la langue religieuse: «Nel linguaggio religioso cristiano la parola parlata e i suoi riferimenti non possono astrarre dall’istituto che ne regola l’attuazione e li trasforma in uno schema di comportamento. Ciò è vero della preghiera liturgica, ma anche di quella privata, in quanto non esiste una Chiesa passiva che solo riceve e una attiva che solo crea, checché ne sia dei conflitti che talvolta provoca un simile artificioso dualismo. Ogni suo membro è di volta in volta ricevente e rielaboratore di parole, e questo perchè le parole della Chiesa si riferiscono a un’altra parola che sta dietro tutti i testi elaborati: la parola di Dio, della quale ogni testo rielaborato non è che un riconoscimento » (Pozzi 1997b: 50). L’Église chrétienne tout entière (membres du clergé et laïcs) constitue donc ce que l’on pourrait appeler une «communauté linguistique», à savoir un groupe de locuteurs qui se reconnaît en tant qu’unité sociale partageant les mêmes expériences et utilisant le même langage (cf. Berruto 1995: 70-71), car il s’agit d’une communauté «naturelle» au sein de laquelle on naît, selon les fondements posés par Weber dans l’Ethique (cf. Hervieux-Leger, D. 1999: 176). 65 Au début de la langue vulgaire, les premiers textes littéraires coïncident pratiquement avec les productions poétiques religieuses, ce qui amène à constater d’abord une forte influence exercée par les textes religieux sur la production littéraire italienne des premiers siècles. Ces textes proviennent de la zone médiane de l’Italie et fournissent un modèle où la langue vulgaire locale s’amalgame à des structures syntaxiques et à un lexique latins: une sorte d’anoblissement des parlers locaux préparant et anticipant l’explosion poétique des laude. Ces dernières, étant l’expression des grands mouvements religieux de l’époque (l’Alleluia) et, donc, des grands mouvements sociaux, acquièrent un prestige qui permet l’exportation des caractéristiques linguistiques médianes, jusque dans les régions du Nord de l’Italie. Ensuite, à partir du XIV e , grâce au prestige et à l’autorité des tre corone, mais aussi au rôle politique et économique de Florence, la langue toscane constituera pendant plusieurs siècles la langue littéraire par antonomase et, par conséquent, un modèle influençant la langue religieuse. Cette influence avait entraîné la société religieuse dans tous les débats et les querelles sur la langue vulgaire à utiliser: du florentin du XIV e s., ‘cristallisé’ par la suite dans le Vocabolario degli Accademici della Crusca, au florentin contemporain (du XVI e s.), ou bien au toscan commun, qui, ayant aussi acquis certains caractères d’autres dialectes italiens, était appelé aussi «italien». 66 On fera d’abord une distinction entre les textes religieux nés d’un contexte oral et les caractères typiques du langage parlé. Dans le premier groupe, on inscrira non seulement les genres tels que les sermons ou les discours tirés des visions mystiques, mais aussi les textes des liturgies communautaires, la plupart des poèmes religieux etc., qui, malgré leur origine, constituent désormais des textes tout court. Pour ce qui concerne les traits caractérisant l’oralité, on les retrouve dans les sermons qui, bien qu’ils nous aient été transmis par des reportationes, gardent quelques traces de la langue parlée, les écrits mystiques où le contact linguistique se déroule entre la divinité et l’être humain, ce dernier s’adressant directement à son interlocuteur, quelques formes de liturgie privée telles que les oraisons d’origine populaire, quelques textes appartenant à la littérature de dévotion. 3.3. Traits caractérisant la langue religieuse: Pour ce qui est des traits caractérisant la langue religieuse, avant même de les énumérer, il faut constater l’interpénétration et l’interaction constantes entre langue religieuse d’un côté et parlers locaux (et langue commune) de l’autre. Il s’agit d’une situation d’interdépendance pas toujours facile à démêler, due à l’importance de la présence ecclésiale (et religieuse) dans la société italienne, ce qui ne permet pas toujours un traitement séparé des deux systèmes linguistiques. En deuxième lieu, on peut constater que: - il existe un comportement biunivoque général de la langue religieuse: à l’égard du modèle du latin biblique et liturgique qui a engendré diglossie, dépendance, dichotomie; à l’égard des parlers locaux, avec une valorisation des niveaux les plus bas de l’échelle diastratique, mais, en même temps, une tendance au nivellement des caractères les plus idiomatiques pour un plus vaste rayonnement; - au niveau de la syntaxe, ce comportement biunivoque présente, d’un côté, un certain intérêt pour les structures compliquées, voire littéraires; de l’autre, une simplification qui vise même à recréer les structures de l’oral. À ce dernier propos, grâce surtout à la prédication, on retrouve dans plusieurs genres religieux les marqueurs typiques de l’oralité; - au niveau du lexique, on remarque d’une part une certaine tendance à la conservation du lexique «technique» des sources par le biais de calques, d’emprunts et de néologismes (sur la base du latin et, plus rarement, du grec et de l’hébreu) et, de l’autre, la récupération de termes de la langue parlée (dans la prédication et dans les écrits spirituels de toute époque, mais aussi dans les nouvelles traductions bibliques et liturgiques dans les langues minoritaires); - au niveau aussi bien phonétique que morphologique l’influence du latin paraît moins prépondérante; la recherche d’uniformité se fonde d’abord sur les traits typiques de la zone médiane, ensuite sur le toscan commun. Strasbourg Franco Pierno Bibliographie Ageno, F. 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