Vox Romanica
vox
0042-899X
2941-0916
Francke Verlag Tübingen
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2007
661
Kristol De StefaniLes Chansons de Colin Muset. Textes et mélodies éditées par Christopher Callahan et Samuel N.Rosenberg, Paris (Champion) 2005 (Les Classiques français du Moyen Âge 149).; Les Chansons de Colin Muset. Traduites en français moderne par Christopher Callahan et Samuel N.Rosenberg, Paris (Champion) 2005 (Traductions des Classiques du Moyen Âge 71)
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2007
Dominique Billy
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ses Buch guten Gewissens empfehlen sollte. Normalerweise überlasse ich meine Rezensionsexemplare der Bibliothek unseres Seminars. Bei dem vorliegenden Band kommt mir spontan eine ganz andere Idee. Thomas Städtler ★ Les Chansons de Colin Muset. Textes et mélodies éditées par Christopher Callahan et Samuel N. Rosenberg, Paris (Champion) 2005 (Les Classiques français du Moyen Âge 149). Les Chansons de Colin Muset. Traduites en français moderne par Christopher Callahan et Samuel N. Rosenberg, Paris (Champion) 2005 (Traductions des Classiques du Moyen Âge 71) Colin Muset a bénéficié d’une édition collective dès 1850, mais son œuvre sera longtemps accessible à travers la seconde édition corrigée et complétée de J. Bédier parue en 1938, 26 ans après la première (1912), préparée par sa thèse latine de 1893. Callahan et Rosenberg (= CR) ont relevé le défi de donner une nouvelle édition qui présente de réels atouts: ils intégrent les apports critiques de la recherche, proposent diverses améliorations du texte, publient les mélodies conservées selon des critères modernes plus acceptables que ceux que J. Beck avait retenus pour la première édition de Bédier, et l’accompagnent d’une traduction, publiée à part. L’ordre retenu dans la présentation des pièces suit dans les grandes lignes la logique de Bédier, en fonction directe de la crédibilité des attributions, mais présente des différences de détail parfois notables 1 : la v e de Bédier se trouve ici en huitième position; la xiii e , en dix-neuvième; les pièces xvii et xviii (n° 14 et 13 de CR) sont déplacées entre les groupes vi-xii et xiii-xvi, eux-mêmes réarrangés. Les critères retenus diffèrent quelque peu: 1°) attribution interne (n° 1-4 = i-iv); 2°) trois caractéristiques communes: attribution dans une source au moins, forme métrique unique (sauf n° 12 = x), thématique colinienne (n° 5-12 = groupe v-xii); 3°) versification et thématique coliniennes (n° 13-19 = xiiixix). Il convient toutefois d’apporter une rectification: le descort (au sens strict) n° 6 (vii) ne présente que deux des caractéristiques visées: l’attribution dans C - dont on connaît le peu de fiabilité - et l’originalité formelle dont il faut rappeler qu’elle est inhérente au genre employé et ne prouve par conséquent rien. Tant la thématique que le style n’y ont rien de colinien, ce qui semble ne pas avoir frappé Bédier lui-même, et à la doncele, damoisele, blonde, blondete, pucelette, douce amie ou fame ordinairement chantée par Colin (ou pseudo-Colin) se voit substituer la douce dame de l’amour courtois, sans qu’y transparaisse la «voix de jongleur quelque peu désabusé» que CR relèvent dans les n° 10 et 11 (25). Suivent deux pièces sur lesquelles plane un doute «considérable» (29): xx (n° 21: Hidousement), rejetée récemment avec quatre autres par Chiamenti 2 et dont l’attribution de C (qui le contient seul) à un certain Ancuses de Monveron - dont Bédier estimait qu’il ne pouvait s’agir d’un «nom de chrétien», imaginant alors une ingénieuse machination philologique pour justifier l’indication du ms. - a depuis pu trouver une certaine caution dans les archives 3 , et xxi (n° 22: De la procession). À ces deux pièces, CR ajoutent Je chant conme desvez 4 301 Besprechungen - Comptes rendus 1 CR ont numéroté les pièces au moyen de chiffres arabes, contrairement à Bédier. Nous donnerons en général les numéros des deux éditions. 2 M. Chiamenti, «Cinque testi non attribuibili a Colin Muset», Studi mediolatini e volgari 47 (2001): 239-49. Nous y ajouterons au §4 un argument métrique. 3 M. Parisse, La noblesse lorraine. xi e -xii e siècles. Thèse, Nancy II, 1975. 4 Non Je chante. (RS 922) (n° 20) qui suit immédiatement dans les mss. (KNPX) les pièces 1 (RS 966) et 8 (RS 476) attribuées à notre trouvère, et «dont l’originalité même rappelle la pratique de Colin Muset» (28), sans être pourtant attribuable avec quelque certitude à Colin comme le souhaiterait D. A. Fein 5 . Cette nouvelle pièce est cependant attribuée à Jacques de Hesdin, mais CR (19) tirent argument de «la dissimilitude notable entre RS 922 et la seule autre pièce connue comme étant attribuée à ce trouvère (RS 1252)» pour rejeter l’attribution de KNPX. Il faut cependant bien reconnaître que cet argument ne vaut rien puisque CR reconnaissent ailleurs (29 N1) que RS 1252 est plus vraisemblablement attribuable à Gilles de Viés Maisons sur la foi d’autres mss. CR donnent une présentation des traits linguistiques de l’auteur et des copistes, une autre des formes lyriques (technique poétique et musique). Dans leur étude linguistique, CR examinent les traits lorrains des mss. CU, tout comme Bédier, avec un classement un peu différent (35-37). Bédier invoquait en outre le cas de consoil, le w de transition de loweir et le maintien du c final de po(u)c. On constatera que les traits lorrains attestés à la rime ne se trouvent que dans les n° 8 (mesnie, pigne), 18 (-elx pour -eaus ou -ieus; vermués, escurués), 21 (ostaul, roiaul) et 22 (sie, changie), soit une seule pièce où l’attribution est étayée par la tradition manuscrite (KNPX). Pour l’établissement du texte, K a été retenu dans les quatre pièces conservées par le groupe KNPX; U a été préféré à C dans le cas des quatre pièces que transmettent seuls ces deux mss., mais dans le cas du n° 21 (xx) conservé dans COU, C qui en donne la version la plus complète a été préféré: on peut ici préciser que tels étaient déjà les choix de Bédier. La numérotation des vers est de type relatif: 2.3 désigne le troisième vers du second couplet; E.2 (6) le second vers de l’«envoi» correspondant au sixième vers de la strophe employée. Pour la mélodie, N a été préféré à K, jugé moins satisfaisant, à deux reprises (n° 1 et 3). CR ont procédé à une certaine régularisation dans l’usage de c et s initiaux souvent interchangés dans C, pour discriminer les déterminants ou la conjonction selon eux en cause, mais la substitution n’est pas toujours signalée dans les leçons rejetées. Les résolutions d’abréviations ne sont pas signalées. Les points d’enclise ont malheureusement été remplacés par des points standards. Les interventions personnelles des éditeurs ou leurs émendations à partir d’autres leçons ne sont généralement pas signalées dans le texte quand cela est pourtant possible 6 : ainsi n° 2, 2.6 (lire [a] löer), 4.3 (lire [me] met), n° 5, 1.15 (lire sen[z]), 3.5 (lire [Deus, tres dous] Deus, d’après C) etc. L’utilisation des crochets est pratiquement réservée au signalement de lacunes non comblées (n° 4, 1.3; n° 8, 3.4), comblées par une duplication 7 (n° 1, 1.16; n° 9, 5.9a; n° 16, 3.7-8) ou par emprunts à d’autres sources (n° 21, E). Seules les variantes significatives sont indiquées. C’est par mégarde qu’on les trouve au n° 12, 5.3-4 (cf. §6). La ponctuation est généralement moins expressive que celle de Bédier, au point de supprimer le point d’exclamation à la fin d’énoncés nettement exclamatifs tel que Fous est qui s’i aseüre! (n° 15, 4.11), des interjections telles que Deus! (n° 21, 1.9 et 3.1). CR n’acceptent pas tous les enjambements interstrophiques que Bédier acceptait avec trop de libéralité 8 . 302 Besprechungen - Comptes rendus 5 D. A. Fein, «Evidence Supporting Attribution of a Satirical Song to Colin Muset», Neuphilologische Mitteilungen, 81 (1980): 217-20. 6 Nous ne trouvons guère que [un] plonjon (n° 19, E1.1) comme signalement d’une émendation (par insertion d’un morphème omis). 7 Il s’agit en fait de conjectures que rien ne justifie: où Colin donne-t-il l’exemple de tels procédés? 8 Ils y renoncent dans les n° 8 (V), str. 2/ 3; 7 (viii), str. 9/ 10; 19 (xiii), str. 4/ E1. Ne restent plus que ceux des n° 5 (vi), 13 (xviii) et 17 (xiv). Le format adopté ne se prêtait guère à la transcription des mélodies, mais la disposition de plusieurs vers par portée destinée à mettre en évidence les phénomènes de répétitions peut aboutir à l’alignement de vingt-trois notes sur 8 cm (167), format qui nécessite l’usage d’une loupe pour la lecture des caractères. Le volume est complété d’un index des noms propres 9 et d’un glossaire de près de 400 entrées (celui de Bédier en avait 142). Le volume de traduction se voit octroyé une certaine autonomie avec une introduction donnant des repères biographiques, une présentation du corpus à travers la tradition manuscrite, plus un «essai sur la rhétorique colinienne», le tout complété d’une bibliographie fournie suivant un ordre méthodique (éditions de Colin; éditions collectives; études consacrées à Colin; ouvrages de référence sur la lyrique médiévale; langue et poétique; musique). La traduction est assortie de notes explicatives regroupées à la fin du volume. Nous nous étendrons à présent plus longuement sur les aspects relatifs à la forme, car il s’agit des aspects les plus problématiques: leur sont en effet liées des questions relatives tant à l’établissement du texte qu’à la crédibilité des attributions. Nous terminerons par des remarques relatives au texte 10 . 1. La question des envois CR donnent une étude fouillée de la technique poétique de Colin, que méritait largement son originalité, ainsi qu’une étude conséquente de la musique accessible au non-spécialiste. Prenant à la lettre le terme d’«envoi» auquel ils reconnaissent deux valeurs selon la perspective (formelle ou «sémantique») adoptée, CR (41) en viennent à cette proposition fallacieuse que, chez Colin, n° 19 (xiii) mis à part 11 , les «envois» ne se réalisent que sur le plan formel: au Moyen Âge, seul le point de vue inverse se justifie, et nous dirions plutôt que les «reprises» 12 (les tornadas de la tradition des troubadours) ne contiennent qu’une fois un envoi (au sens strict), ce qui n’a rien d’exceptionnel 13 . Il convient à cela d’ajouter que, chez les trouvères, contrairement aux troubadours, sauf exceptions, l’envoi éventuel était habituellement contenu dans le dernier couplet 14 et que l’on prisait assez peu les reprises. Nous ajouterons que la juste émendation de CR qui refusent l’interprétation de Tyssens 15 dans le dernier couplet du n° 9 (ix), préférant insérer le refrain après 5.9, oriente l’interprétation formelle du couplet de 15 vers qui en résulte non comme une forme amplifiée du douzain utilisé par Colin, mais comme un dernier douzain suivi d’une reprise (sans envoi) de trois 303 Besprechungen - Comptes rendus 9 On ne peut voir dans Eloir une simple «variante graphique» d’Eloi (220), et il faut revenir au point de vue de Petersen Dyggve qui y voit une altération pour la rime. 10 On apportera quelques corrections. 19: De la procession est la pièce n° 22 (non 21). - 32: la table présente six erreurs, avec notamment des déplacements d’une colonne à l’autre. Le n° 2 se trouve dans O 52 (non 152); le n° 6 se trouve dans C 170 (non X 179 [sic]) et U (non C) 77; le n° 7 se trouve dans C 226 (non X 226) et U (non C) 78. - 37: «Le pronom relatif ke s’emploie au casrégime tout comme ki»; il s’agit en fait du cas-sujet (ajoutons avec Bédier que ke est la forme courante). - 45: n. 3: il s’agit des str. 3, 5 et 6 (non 1, 2, 4) du n° 3; n. 4: il s’agit des str. 3 et 7 du n° 6 (non du n° 7). - 67: trois couplets du n° 3 et non tous sont composés d’une rime unique. 11 En ce qui concerne les chansons strophiques, car le «lai-descort» n° 3 se termine sur un tel envoi (plus précisément une adresse). 12 Le terme est peu courant, mais il existe; cf. U. Mölk, «Deux remarques sur la tornada», Metrica, III (1982): 3-14, à la p. 6 et N13. 13 Dans le descort (stricto sensu) de Colin (n° 6 = VII), l’envoi (stricto sensu) se situe dans l’avantdernière strophe. 14 Ce phénomène s’observe parfois dans les premières générations de troubadours. 15 Qui suppute la présence en amont d’une editio variorum où les vers 5.10-11 «constitueraient une seconde rédaction d’auteur» (156). vers 16 , ce qui est autre chose qu’«une conclusion analogue à l’envoi de tant d’autres chansons» (156). Jugeant «assez insolite» (159) une structure en coblas doblas suivies de coblas ternas 17 , CR se demandent à propos du dernier couplet du n° 10 (xi) s’il ne s’agit pas «d’un envoi qui serait exceptionnellement long». Nous penserions plutôt à la fusion de deux reprises formellement distinctes, soit, vraisemblablement, 3 + 1 vers, du fait de l’autonomie syntaxique du dernier vers. Au n° 17 (xiv), il s’agit certes d’une prolongation d’un vers de la seconde (et dernière) strophe, prolongation que rejetait Tyssens comme «une lourde glose inutile des vers précédents» (193), mais cette prolongation ne se distingue en rien d’un cas de reprise finale, où le sens apparemment complet des huit premiers vers se complète en une hyperbate plaisante d’un complément circonstanciel suivi d’une apposition (. . . / Ne seroie pas envïous / De chevachier toz besoignous 18 / / Aprés mauvais prince, angoissoux). La situation dans le dernier couplet du n° 8 (v) est analogue (Plus que nus ne porroit dire.), quoi qu’il faille penser des vers 5.4a-b (cf. §2). CR n’éprouvent d’ailleurs aucune gêne à isoler après Bédier - et ceci à juste titre - les deux derniers vers du n° 5 (vi) pour en faire une reprise en dépit de leur lien syntaxique avec les vers précédents. 2. L’hétéromorphisme On sait que le chansonnier de Colin présente un certain nombre de spécificités formelles, dont certaines strictement métriques, mais cette édition a l’avantage de montrer, directement ou non, qu’elles n’ont pas toujours l’importance que Bédier leur accordait. Quatre chansons présenteraient ainsi «un discret emploi de l’hétérostrophie» (41), phénomène que J. H. Marshall caractérisait mieux sous le terme d’«hétéromorphisme» 19 : les n° 8 (v), 9 (ix), 16 (xvi) et 17 (xiv) 20 . Nous avons cependant montré que ces irrégularités résultaient probablement de l’intégration de reprises dans les n° 9 et 17. Celles des n° 8 et 16 relèveraient d’un même procédé d’amplification supporté par la répétition d’une même phrase mélodique. Reste le cas du n° 8 au sujet duquel Tyssens penche pour une erreur de transmission (151). Il faut par contre ajouter les str. 2 et 4 de la «note» (n° 3 = ii) qui est composée de deux modules rimico-métriques ne différant que d’un vers (2: aaabba aaaabba; 4: aaab aab). La question de l’anisosyllabisme, pourtant manifeste dans l’œuvre de Colin, n’est pas évoquée dans l’introduction. CR se montrent sur ce chapitre beaucoup plus exigeants que Bédier qui relevait une vingtaine de cas 21 , en rejetant un grand nombre moyennant une émendation des vers concernés: ils renoncent ainsi à l’adjectif initial de la tenson avec Jacques d’Amiens (n° 4 = iv: Biaus Colins Musés, je me plaing d’une amor), unicum de C, suivant l’avis judicieux de M. Switten; néanmoins, ils acceptent tel quel le décasyllabe qui se présente au v. 37 (5.2) au lieu d’un heptasyllabe, reléguant en note la proposition d’une correction (133). Contrairement au premier, ce vers dont aucun amendement ne s’offre avec évidence, est bien de la plume de Colin, mais la simple résolution mélodique de l’hypermétrie 22 304 Besprechungen - Comptes rendus 16 Soit: 7 aabaabaab[A]ab, plus Aab. 17 La technique qui consiste, dans des compositions à nombre impair de couplets - comme c’est ici le cas - à rattacher par la reprise des mêmes rimes le couplet final à la dernière paire de couplets, est un procédé particulier qui n’a rien d’insolite car il a bien été adopté par quelques trouvères; cf. D. Billy, L’Architecture lyrique médiévale, Montpellier 1989: 99. 18 Besoignous est une conjecture non signalée dans le texte de CR (lire: b[esoign]ous). 19 Hétérostrophie désigne en principe l’utilisation de types strophiques distincts comme dans le descort, non l’utilisation altérée à l’occasion d’un type strophique unique. 20 Pour une raison mystérieuse, Bédier (1938: xix) ommettait de mentionner le n° ix. 21 Bédier 1938: xix; il émendait en fait le vers 2 de iv; nous ne comprenons par contre pas la mention des vers 12 et 13 de X: il doit s’agir d’une erreur pour ii (pour laquelle n’est indiqué que le v. 12). 22 La mélodie n’est pas conservée. nous paraît problématique, et n’a rien à voir avec les cas d’allométrie acceptés par CR. En dehors de ce cas, CR ne retiennent, semble-t-il, l’hypothèse de l’anisosyllabisme que dans les n° 1 et 8. Dans le n° 1, il s’agit du fameux vers initial Volez oïr la muse Muset? où l’octosyllabe normalement requis a une syllabe de plus - phénomène particulièrement frappant en incipit. On peut dès lors se demander si le refus de cas métriquement semblables dans le n° 5 (1.11 et 2.13) - impliquant tous deux un même syntagme la tousete où CR suppriment le déterminant - est bien justifié 23 . Dans le n° 8, il s’agit de la substitution de l’octosyllabe à heptasyllabe à deux reprises (2.6, 2.8) et de celle d’un pentasyllabe à un tétrasyllabe (5.5) pour lequel CR donnent une mauvaise interprétation mélodique 24 . 3. Les «lais-descorts» CR réunissent sous la désignation de «lais-descorts» la «note» n° 3 (ii), le descort n° 6 (vii), le n° 7 (viii) Sospris sui d’une amorette, et le n° 13 (xviii) dont l’incipit Bels m’est li tens rappelle tant celui du descort d’Albertet, Bel m’es oimais (43-46) dont il est vraisemblablement un contrafactum. Ils y rattachent à l’occasion le n° 16 (66) qui est jusqu’à preuve du contraire une composition isostrophique affectée d’un certain hétéromorphisme. Leur étude (43- 46 et 66-69) attire quelques remarques. CR se demandent si l’on ne peut pas voir dans le cas du n° 13, contrafactum d’un descort, «un argument en faveur de l’identité du lai et du descort»; ce point de vue est fondamentalement erroné, et la conclusion comparable à celle qui admettrait l’identité des genres du sirventes, de la canso et de la tenso du fait que maints sirventes et maintes tensons sont des contrafacta de chansons d’amour. Il n’y a pas non plus lieu de s’étonner de ce que ces pièces accordent «une place infime» à la division entre «frons» et «cauda» 25 (45): cette analyse est en effet inadéquate du point de vue terminologique, ces termes ayant été conçus par Dante dans le cadre du De vulgari eloquentia pour le genre de la chanson isostrophique, pour qui frons n’est du reste en rien synonyme de pedes 26 . Mais elle est également inadéquate du point de vue structural: comme pour toutes les formes apparentées à la séquence, les strophes des «lais-descorts» devraient être analysées au moyen du concept de Versikel élaboré par les musicologues allemands 27 auxquels Marshall a emboîté le pas en 1981 (versicle) 28 , et que Canettieri à la suite d’Antonelli désigne sous le nom de periodi 29 . Dans ces genres, les strophes sont en effet composées selon le principe de la répétition, généralement de deux à quatre fois, d’un même module rimico-métrique 30 , le plus souvent de deux ou trois vers, et ceci quelle que soit la solution adoptée au niveau musical, la mélodie pouvant ou non (mélodie éventuellement 305 Besprechungen - Comptes rendus 23 On comprend mieux la nécessité d’une émendation du vers 3.5 où il s’agit d’une base décasyllabique augmentée d’une syllabe, apparemment sur le premier hémistiche, avec un sens peu satisfaisant (Sades cortois deus). 24 Les deux dernières syllabes (-lie) sont en effet regroupées en une seule sous la dernière note; c’est naturellement le mélisme do-si qui doit être dissocié au niveau des syllabes précédentes -janss(e) a-, et -li-e doit être chanté sur les deux dernières notes. 25 Voir le détail p. 83. 26 Cette confusion se trouve dans la définition donnée p. 60 et dans divers emplois, tels p. 80-81 (on a affaire à des versus dans les n° 2, 16 et 17). 27 Voir F. Gennrich, Formenlehre des mittelalterlichen Liedes als Grundlage einer musikalischen Formenlehre des Liedes, Halle (1932): 96-231. 28 J. H. Marshall, «The Isostrophic descort in the Poetry of the Troubadours», RomPhil. 25 (1981): 130-57. 29 Cf. P. Canettieri, «Descortz es dictatz mot divers». Ricerche su un genere lirico romanzo del xiii secolo, Roma 1995: 55; R. Antonelli, Repertorio metrico della scuola poetica siciliana, Palermo 1984: lxiv-v. 30 CR parlent quant à eux d’un «bloc de quelques vers répété une ou plusieurs fois» (83). indivise) se conformer à ce partitionnement, avec parfois des versions contradictoires 31 . Dans certains cas, le troubadour regroupait deux Versikel en une strophe unique; ainsi, dans la str. 1 du n° 3, analysée tantôt comme «pedes cum cauda avec répétitions» (127), tantôt comme «pedes cum versibus avec répétitions» (89) 32 , on a précisément affaire à deux Versikel constitués de deux modules répétés deux fois chacun (7 aa-aa 33 et 7 bba-bba) 34 . La même situation se présente avec les str. 1, 3 et 7 du n° 6 35 . Il en va d’une façon un peu différente de l’analyse en «pedes cum versibus» de strophes telles que la première du n° 13 36 : a 4 b 7 a 4 b 7 a 4 b 7 a 4 b 7 est en fait composé de deux parties de même structure, avec deux fois le module rimico-métrique a 4 b 7 et les mêmes rimes, avec une phrase musicale distincte, phénomène que l’on peut observer dans d’autres «lais-descorts» 37 : la question de la reprise de rimes d’un Versikel à l’autre relève en fait d’une stratégie plus complexe dont il existe une grande variété de réalisations, entre Versikel de même structure ou de structure différente, et que ces Versikel soient contigus comme ici ou non (voir en particulier, chez Colin, n° 3, str. 1 et 2 [ai, er]; n° 6, str. 1 et 3 [ier, ai] ou 8 et 9 [er]; n° 13, str. 3 et 4 [ee, ise]). CR (171) appliquent également la notion d’oda continua, terme conçu par Dante pour désigner une mélodie continue, sans répétitions, dans la description de la chanson isostrophique. Ils parlent même d’oda continua «répétée» dans le cas de la str. 3 (iii) du n° 13, qui est un concept pour le moins contradictoire: la mélodie se déploie ici sur un ensemble de huit vers, constitués de la répétition d’un même module de quatre vers (a 4 a 5 a 5 b 5 a 4 a 5 a 5 b 5 ); cette structure est reproduite une seconde fois sur la même mélodie. On a donc affaire à une strophe quadripartite sur le plan rimico-métrique, c’est-à-dire composée de quatre fois le même module, bipartite sur le plan mélodique: il n’y a là rien de fondamentalement différent de ce qui s’observe dans les quatre premiers vers du n° 3, avec un soi-disant pes en a 7 a 7 . La septième strophe du n° 6, de 12 vers, est composite. Canettieri 38 l’analyse en trois periodi, un de 4 (7 abab, rimes ie, ent), un de 3 (7 aaa, rime ie) et un de 5 vers (7 ccccc, rime ee) respectivement, ce que contredit l’emplacement des petites majuscules initiales en tête des 306 Besprechungen - Comptes rendus 31 Nous contestons ici le parti que CR tirent de la mélodie contradictoire, en oda continua, que W donne de PC 10,45 (67): indépendamment même du caractère tardif et exotique de cette version, nous réaffirmons que le principe fondateur du descort est bien le partitionnement métrique qui ne se trouve remis en cause que dans quelques pièces, dans la strophe terminale, en raison du statut particulier que celle-ci peut jouer, avec un rôle de tornada «discordante». 32 Ce genre d’inconséquence se retrouve ailleurs: ainsi la str. 4 du n° 13 est donnée comme «sans division intérieure» (82), mais comme «pedes cum versibus» (88, 171) (nous ne voyons aucun pes dans cette structure en AB CC’DE etc.). Il en va de même dans le cadre plus approprié de la chanson isostrophique: la structure du n° 2 est ainsi analysée comme «pedes cum cauda» (89, 122), alors qu’on pourrait y voir, à la rigueur, des «pedes cum versibus» (AA’AA’BB’BB’). Celle du n° 8 est donnée tantôt comme «pedes cum versibus» (152), tantôt comme «pedes cum cauda» (90, 150), et bien que la seconde catégorisation soit la seule correcte, cette pièce illustre avec les n° 1 (en fait un Strophenlai) et 16 (d’attribution incertaine) la première catégorisation qui caractériserait la majorité des chansons de Colin (66). 33 Du seul point de vue rimico-métrique, on peut y voir une division quadriparite: 7 a-a-a-a; cependant, la mélodie réunit les vers deux à deux (aa-aa). La seconde partie a une mélodie continue. 34 Cf. Canettieri 1995: 637-38. 35 Sur la 7 e strophe, cf. infra. 36 Le cas de la str. 3 nous entraînerait trop loin. 37 Soit pour les descorts stricto sensu la première strophe du RS 416 de Gautier de Dargies, ou la quatrième de RS 2018 d’Adam de Givenci. Voir aussi pour les lais la troisième strophe d’anon. RS 192a (Ne flours ne glais), pièce liée à Bels m’est li tans, la septième du lais de la pastorele (RS 1695) ou d’anon. RS 1020 qui lui est liée. 38 Op. cit.: 399-400, notes: 637-38. vers impairs dans U, mais il faut à notre avis voir dans les deux derniers (7.5-12) un unique Versikel composé de deux modules conformes: 7 aaab cccb, où c = b; les deux groupes de quatre vers sont en effet sémantiquement autonomes, et ce type de situation est bien attesté dans une pièce anglo-normande, Eyns ne soy ke pleynte fu (MW 272, 9a), avec une strophe en 6 aaab cccb où b = a (ie, ie, esse) 39 . CR voient dans le couplage rime et mètre («le mètre change en parallèle avec la rime») (46) «une tendance stylistique qui distingue ses lais-descorts de ses chansons». Il ne s’agit pas en fait d’une caractéristique stylistique, mais d’une propriété qui résulte de la structure partitive des strophes de «lais-descorts» et de la prépondérance des modules binaires sur deux rimes (ab) que l’on peut observer également chez les autres trouvères à avoir pratiqué ce(s) genre(s) 40 . On précisera que le phénomène ne concerne que cinq strophes (74- 75), soit une sur six. Il n’y a pas davantage lieu de trouver surprenant que deux tiers des strophes soient monomètres et que les strophes hétérométriques ne reposent que sur deux mètres (44-45): ce sont là des caractères typiques des genres concernés. 4. La question de la césure L’analyse des vers césurés (46-47) n’est pas satisfaisante: si l’on ne peut qu’approuver l’idée du «peu d’insistance» de Colin «sur l’immuabilité de la césure», avec «une fluidité qui ne se laisse pas endiguer par le contenu», on ne saurait se contenter de dire que les hendécasyllabes se prêtent à une lecture 7+4 ou au rythme inverse, ou qu’ils semblent «réclamer des coupes différentes» 6+5, 5’+5, 7’+3 etc. qui s’appuient en fait sur la détermination d’une coupe prosodique ne prenant pas en compte son éventuelle fonction structurale. On sait que ce mètre n’accepte les césures féminines qu’avec réticence, sous la forme élidée ou enjambante 41 qui justifient l’idée d’une césure «accentuelle», où c’est moins une frontière morphologique qui définit l’articulation du vers qu’un accent. Ainsi, dans RS 428 (n° 10 = xi: Mult m’anue d’iver . . .) composé uniquement sur ce mètre: - él.: Se me covient ke je soie en cest esteit (1.4; voir aussi 4.5) - enj.: Bone dame belle et blonde l’ait loweit, (2.1; v. aussi 2.5) Selon le texte établi par CR, Colin accepterait même la césure lyrique, mais il s’agit selon le ms. d’une césure épique (2.2: C’est bien drois ke ieu en faice sa volonteit, amendé en ke j’en). Colin va beaucoup plus loin, et accepte des conjonctions à la césure (#), à commencer dans l’incipit qui affiche d’emblée la singularité métrique de notre trouvère: Mult m’anue d’iver ke # tant ait dureit, (1.1); Jai de joie faire ne # serai eschis, (3.1). Mieux encore, il accepte que la césure tombe au sein d’un mot avant la syllabe tonique: Ke li siecles n’est maix cor- # -tois ne jolis, (4.2). CR admettent au demeurant que, «Dans l’exécution, le chanteur . . . n’aurait pas eu de mal à aligner les trois vers 42 exceptionnels sur le rythme des autres, en scandant de façon syncopée» (159). Si l’on admet ces décalages illicites de la syntaxe par rapport à la césure, on n’a plus de raison de refuser des phénomènes de compensation interstichique comme aux deux premiers vers du n° 19 (xiii) où le ms. (U) donne: Qant je voi 307 Besprechungen - Comptes rendus 39 S. N. Rosenberg/ H. Tischler (ed.), Chanter m’estuet. Songs of the Trouvères, n° 70, London/ Boston 1981: 143-46. Cette strophe semble présenter une mélodie continue, contrairement aux autres, mais la mélodie des vers 5-6 est une nette variation de celle des vers 1-2, et le 7 e a la même attaque que le 3 e . 40 La consultation du répertoire de Canettieri s’impose. 41 Cf. D. Billy, «L’analyse distributionnelle des vers césurés dans la lyrique française et occitane du Moyen Âge», dans Contacts de langues, de civilisations et intertextualité, t. 3, Montpellier 1992: 805-28. 42 Soit 1.1, 3.1 et 4.2 auxquels ils ajoutent peu après 2.2. lou 43 tans refroidier/ et geleir, suivi par Bédier mais non par CR qui adoptent la correction de Jeanroy et Långfors: Qant je lou t. r./ Voi et geleir qui donne une syntaxe quelque peu acrobatique, me semble-t-il, pour Colin. Le problème métrique est en effet ici articulé sur un hendécasyllabe sous-jacent, et la situation est en tout point comparable à celle du vers 4.2 du n° 10, le seul problème étant le déplacement du site de la rime sur une position inadéquate. À ceci il convient de rappeler que le site des rimes internes a pu connaître de tels aléas: on en a des exemples divers tant chez les troubadours que chez les trouvères, et l’on trouve même un décasyllabe sous-jacent semblablement traité dans la pastourelle anon. RS1508a (4 + 6 5+5) 44 . Nous ne croyons pas pour notre part que Colin ait une pratique plus sage de la césure dans le cadre du décasyllabe commun. Mais les libertés qu’il prend y sont de nature différente, ce qui est normal, car la question de la césure dans le cadre du décasyllabe commun n’a rien à voir avec celle de l’hendécasyllabe / 7 + 4/ : Colin accepte en effet la césure enjambante (n° 5: 1.7, 2.1, 2.5 et 2.7), y compris dans le descort (stricto sensu) qui lui est attribué (n° 6 = vii: 2.4), contrairement à l’usage général 45 . Il emploie la césure élidée, déjà marginale dans la pratique usuelle des trouvères bien qu’elle soit plus acceptable que l’enjambante (n° 4: 4.5; n° 5: 1.1). La césure lyrique, seule vraiment pleinement admise par la tradition médiévale ne se rencontre que deux fois: l’une dans le n° 6 juste avant un vers à césure enjambante, l’autre dans Bel m’est li tans (n° 13 = xviii: 4.6) dont on rappellera qu’il s’agit d’un contrafactum de descort, d’attribution au demeurant incertaine. En revanche, elle se trouve à quatre ou cinq reprises 46 dans Hidousement (n° 21) où cet usage métrique conventionnel contribue à dénoncer sa douteuse authenticité, d’autant plus que la forme strophique n’est «ni unique ni caractéristique de Colin» (30), avec un huitain de décasyllabes. Colin n’emploie ce mètre qu’en mélange dans ses chansons isostrophiques 47 , alterné avec l’heptasyllabe dans le n° 4 dont la forme a été choisie par son interlocuteur, avec l’octosyllabe dans le n° 5 (vi). La dilection qu’avait Colin pour la césure enjambante se manifeste également dans la piécette emblématique Volez oïr la muse Muset? où le décasyllabe est divisé par la rime interne 48 , s’offrant aussi bien à l’élision (1.11: Une dancele avenant et mult bele,) qu’à l’enjambement (2.11: Mon cuer sautele pour la damoiselle; ), avec deux cas de chaque 49 , mais on verra au §6 que le phénomène n’y a sans doute pas la même signification. 308 Besprechungen - Comptes rendus 43 Et non le donné dans l’apparat critique (200). 44 Cf. D. Billy (1989: 40-41); nous reconnaissons volontiers que le déplacement de la rime dans le cadre d’un vers de sept syllabes est exceptionnel. Marcabru qui utilisait également des hendécasyllabes sous-jacents ne présentait un site incertain pour la rime interne qu’au sein de l’hémistiche heptasyllabique, jamais en sa fin. Cependant, un cas tel que la chanson RS 738 de Thibaut de Blaison où le seul ms. O (i et iv 5-6) substitue 6 + 5 à 7 + 4 en contradiction avec les autres manuscrits, montre que l’hypothèse d’une altération ne peut pas pour autant être complètement écartée. 45 Il est cependant intéressant de savoir que les trouvères picards ont tendance à admettre plus facilement ce type de césure dès Conon de Béthune, et que la tendance s’est considérablement accentuée chez Guillaume le Vinier avant de conquérir le cercle de Jehan Bretel. 46 Le ms. O qui ne transmet que deux couplets plus la reprise en contient deux nouvelles dans sa version du 4 e couplet, soit en tout cinq césures lyriques pour seulement 20 vers. 47 Il est employé sans mélange dans deux strophes de ses pièces hétérostrophiques (n° 6, 2 et n° 13, 4). 48 Une césure lyrique aurait naturellement eu une incidence sur la rime en en déplaçant le site d’une syllabe vers l’arrière, mais cette situation ne fera aucune difficulté aux poètes du XV e siècle dont la poésie, certes, n’était pas chantée. 49 Le phénomène y est encore plus marqué que ne le croient CR qui ne reconnaissent que 4 cas de décasyllabes sous-jacents au lieu de 16; cf. infra, §6. 5. Rime et assonance L’étude de la rime s’appuie sur une démarche parfois novatrice. CR proposent ainsi un classement original des rimes selon leur richesse: les rimes léonines (au sens moderne, c’est-àdire sans prise en compte de la syllabe post-tonique) sont en partie rattachées aux «rimes riches» (types VV, VCV, VVC, avec ou sans posttonique 50 ), mais il convient de faire remarquer ici que, dans la poésie lyrique en particulier, la richesse phonétique des rimes est un critère secondaire au regard de considérations volumétriques, une rime léonine ajoutant toujours un temps supplémentaire, avec au moins une note, quel que soit le nombre de phonèmes impliqués. CR envisagent par ailleurs l’existence de «degrés intermédiaires» de richesse avec divers cas de paronymie. On ne peut attribuer à Colin une grande liberté dans le traitement des consonnes finales sans s’interroger sur ce qui lui appartient vraiment, et CR ont tendance à traiter le corpus réuni comme un tout indivis, avec des analyses quelque peu superficielles. Le rimaire de Colin témoignerait ainsi de l’amuïssement de [s], [r], [t] et [l] (48), mais l’examen des cas montre que [t] est vraisemblablement hors de cause, étant exclues les graphies conservatrices en -eit pour -é du ms. C dans le n° 10 (xi) (Mult m’anue . . .). Le cas de [t] s’appuie sur deux éléments, à commencer par l’association de -ez et -et dans le n° 2 (iii), où une unique forme en -ez (rossignolez cas-sujet singulier), curieusement dans l’incipit, s’oppose à pas moins de 20 formes en -et, ce qui ne permet pas d’y voir simplement une confusion des deux formes, et ne signifie aucunement l’amuïssement de [t], -z représentant vraisemblablement l’affriquée [ts]: on pourrait plutôt évoquer l’amuïssement éventuel du [s] final. Le mélange -ans (-ens) (graphie en fait en -z) et -ant (-ent) qui se trouve dans le n° 20, pièce rajoutée au corpus par CR, n’est qu’apparent, car les formes en -ant sont strictement sectorisées au sein du schéma rimique, affichant ainsi leur singularité: le schéma aabaabbbaab distribue en effet la première rime par groupes de deux vers, et dans le quatrième couplet, les formes en -ant correspondent au troisième groupe qui est situé dans la cauda (4.9-10: vaignanz: argenz). Cet isolement est d’autant plus significatif que, dans le couplet précédent, les deux premiers groupes riment en -ant/ -ent, le dernier associant chascun: nul 51 . L’amuïssement de [r] après [e] ne se trouverait que dans le n° 16 (xvi) (Il me covient renvoisier), d’attribution incertaine, composition singulière à bien des points de vue: la str. 1 associe estey : deporter : trovey : enamoré : grever : dessevrer dans un schéma rimique en ababbbbb (mais voir §6), mais les autres pièces du corpus distinguent bien -er 52 de -é 53 , y compris dans le n° 8 (v) qui présente une assonance féminine caractérisée. On a par contre dans le n° 18 (xix) (Devers Chastelvilain) une combinaison de -é avec -ai (prét. 1 en -ai, donné) qui la démarque ainsi du corpus. L’amuïssement de [r] après [i] serait attesté dans les n° 3 (ii) et 17 (xiv) (Quant je voi yver retorner). Toutefois, dans le n° 3, le mélange se limite à l’utilisation d’amis à la fin d’une strophe alignant quatre infinitifs en -ir plus plaisir, et l’on trouve deux autres infinitifs en -ir dans la str. suivante: on est par conséquent davantage porté à voir ici une assonance ponctuelle, et donc davantage une négligence qu’un procédé de composition comme dans le n° 17 (autresi: mariz: plesir: partir). Partout ailleurs, -ir rime isolément (n° 5, 6, 21). On a donc ici des arguments pour douter de l’authenticité du n° 16 et du n° 17 - qui, rappelons-le, adoptent la forme du n° 2 (iii) (mélodie différente). 309 Besprechungen - Comptes rendus 50 V = voyelle; C = consonne. Les voyelles nasales sont analysées comme VC. 51 À corriger vraisemblablement en nun: cf. p. 205 (on trouve nuns au sein du vers dans les n° 5, 2.6 (CU) et 14, 3.3 (U) d’attribution incertaine). 52 Dans les n° 2, 3, 6, 8, 11 (graphie -eir; ms. C), 17, 19 (graphie -eir; ms. U), 20 et 22. 53 Dans les n° 1, 10 (graphie -eit -atum ou -atem; ms. C) et 22 (XXI) (graphie -ei/ -ey, dont le prét. 3 mandey; ms. O). Le n° 8 inclut ostel (cf. infra), conmandez et donez parmi des formes en -é mais rime -er à part. L’amuïssement de [l] final ne s’observe que dans le n° 8 (v), mais il faut remarquer qu’il ne concerne que le seul ostel, à deux reprises (1.2 et 4.1) en rime avec -é. La question de l’amuïssement de [s] final est par contre plus pertinente: il s’observerait dans les n° 2 (ii), 3 (ii), 8 (v), 9 (ix), 15 (xv), 17 (xiv), 18 (xix), 19 (xiii) et 20 (RS 922). Nous avons déjà vu ce qu’il fallait penser des occurrences visées dans les n° 2, 3 et 20, ainsi que la str. 2 du n° 17. Dans les n° 9 (-el(s/ x/ z)), 15 (-ie(s)), 18 (-el(x)), 19 (-on(s)), ainsi que la str. 1 du n° 17 (-on(s)), il s’agit de l’s de flexion nominale, mais le phénomène n’affecte que le dernier couplet du n° 18 54 , et il en va de même du n° 15, avec un regroupement qui réduit la portée de la disparité (ababbbccccc, vers 7/ 8); on peut toujours s’interroger sur l’authenticité de ces couplets marginalisés par leur position et ces irrégularités. Dans le n° 16, c’est le singulier a grant bandon qui se démarque parmi des formes verbales en -ons, plus dons. Dans le n° 4 (-or(s)), le phénomène est limité à l’emploi de l’adverbe aillors parmi des formes en -or, et il est imputable à Jacques d’Amiens, non à Colin. Dans le n° 8, attribué à Colin par KNPX, on a la désinence -ez en rime avec volenté, gré (str. 2), et cette pièce présente d’incontestables assonances (ville: -ie, -ise: -ie, pigne et -ire: -ie) qui, il faut bien le dire, lui confèrent une allure à part dans le corpus colinien. L’s de flexion est par contre bien pris en compte dans les n° 6 (-iez), 10 (-is), 11 (-is), 13 (-anz plus tens), 14 (-etes, -ors, -eus), 22 (-is), ainsi que 20 (-ez) 55 , sans parler des pièces restantes qui peuvent employer des rimes dépourvues de s final de flexion: il s’agit donc bien de voir des licences plutôt que l’amuïssement des consonnes finales dans les cas où l’attribution à Colin est bien fondée (rimes imparfaites), avec dans le n° 8 la recherche d’un style nettement négligé («jongleuresque») recourant délibérément à l’assonance. L’appendice E: «Timbres rimiques» (85-87) procède à des regroupements trompeurs. La confusion «ant/ anz/ ent» est ainsi inexistante: sur les huit pièces indiquées, seul le n° 20 pourrait être invoqué, mais nous avons vu que -anz (-enz) était strictement circonscrit au sein du couplet, ainsi isolé de -ant (-ent). Le groupe «ete/ etes» ne correspond à aucune confusion dans les deux pièces indiquées (n° 7 et 14). Le groupe «ier/ iez» ne correspond à aucune confusion dans les 7 pièces citées. Le groupe «or/ our/ ors/ ort» (7 pièces indiquées) n’est pas justifié: our n’est du reste qu’une variante graphique de or (n° 1, 4, 9), et la confusion avec ors ne s’observe que dans le n° 4 (avec aillors) 56 . Le groupe «é/ er/ et/ ez» n’est pas justifié: sur les 13 pièces indiquées, il y a deux cas de confusion, limités à -et/ -ez dans le n° 2, et -é/ -er (-é graphié -ei/ y) dans le n° 16, ce qui aurait tout au plus justifié la création de deux groupes distincts. Il est par ailleurs faux de prétendre à propos du n° 20 (RS 922), en se référant à «la liberté avec laquelle Colin Muset a tendance à traiter les consonnes finales», que «les timbres er et ez pourraient s’interpréter comme interchangeables», aux seules fins de trouver des coblas doblas au caractère approximatif (205). Les cas de confusion sont ainsi très circonscrits, comme on peut le voir dans les autres groupes proposés par CR: le groupe «i/ ir/ is/ iz» ne donne lieu à confusion que dans le n° 17 sur les 9 pièces citées, et le n° 3 mêle seulement -ir/ -is; le groupe «ie/ ies» ne donne lieu à confusion que dans le n° 15 sur les 8 pièces citées; le groupe «el/ elx» ne correspond à une confusion que dans les n° 9 et 18 sur les quatre pièces indiquées; la confusion «on/ ons» ne s’observe que dans les n° 16, 17 et 19 sur les 6 indiquées. Ces éléments amènent là encore à s’interroger sur la prétendue négligence de Colin auquel on attribue trop volontiers les irrégularités que présentent des pièces dont on mentionne parfois à l’occasion qu’elles sont d’attribution plus ou moins douteuse. 310 Besprechungen - Comptes rendus 54 Où -ez pour -é/ ai est circonscrit dans le schéma rimique (aabaabbaab, vers 8/ 9). 55 Anz/ enz est bien circonscit dans le schéma rimique comme on l’a vu supra. 56 On précisera qu’une série en -oie du n° 12 inclut la forme voise. 6. Remarques ponctuelles sur l’édition CR apportent diverses améliorations au texte de Bédier (B.), mais, sans prétendre à l’exhaustivité, on peut relever une soixantaine de divergences entre le texte des deux éditions, plus une quinzaine au niveau de l’apparat critique, où l’absence d’indications explicites ne permet pas de savoir chez qui se trouve la mauvaise lecture, absence qui surprend d’autant plus qu’il s’agit souvent d’unica. Dans la moitié des cas, il s’agit d’un rétablissement de la forme du manuscrit 57 , mais dans les autres cas il s’agit bien d’une erreur 58 . N° 1 (i): CR font correspondre les notes des syllabes -se Mu- (de muse Muset) du v. 1 à celles, unies, de ma- (de matinet) au v. 2, mais il convient de préciser que selon J. Beck, il s’agirait des notes correspondant à muse (voir Bédier 1938: 42). En ce qui concerne la disposition des vers, là où Bédier allait à la ligne après chaque terminaison rimée, CR réunissent les v. 11 et 12 de Bédier qu’ils considèrent ainsi comme un décasyllabe à rime interne: on ne comprend pas alors pourquoi ils n’ont pas procédé de la même façon pour les paires de vers suivants 12 et 13, 14 et 15, 16 et 17, d’autant plus que leur transcription mélodique les dispose bien par paires, et que leurs vers 14 et 15 sont chantés sur une variante mélodique de leur vers 11 composite. Il fallait reprendre la disposition de Bédier ou adopter une forme réduite reconstituant les quatre décasyllabes sous-jacents: CR: a 8 a 8 a 8 b 4 a 8 b 4 a 8 b 4 a 8 b 4 c 10 c 4 d 5 c 4 c 5 c 4 d 5 d 5 (var. c 4 c 6 et c 4 d 6 par «synaphie» 59 ) Bédier: a 8 a 8 a 8 b 4 a 8 b 4 a 8 b 4 a 8 b 4 c 4 c 5 c 4 d 5 c 4 c 5 c 4 d 5 d 5 (var. c 4 c 6 et c 4 d 6 ) Forme réduite: a 8 a 8 a 8 b 4 a 8 b 4 a 8 b 4 a 8 b 4 c 10 d 10 c 10 d 10 d 5 La structure du vers, un pentasyllabe, montre que la décomposition du décasyllabe sousjacent se fait davantage sur une base 4’+5 que 4(’)+6, cette dernière forme se présentant comme une alternative, interprétation que renforce l’hiatus médian en 3.14-15: Je n’en prendroie/ Avoir ne mounoie, hiatus difficilement concevable dans le décasyllabe commun, indiquant que l’on a affaire à deux segments jouissant d’une autonomie plus grande que deux hémistiches authentiques: cet argument est favorable au découpage de Bédier. N° 2 (iii): 1.2 boissonnet: corr. boissonet. Leçons rejetées: ajouter 1.6 de flor. N° 3 (ii): 3.4 plaisir: corr. plesir. - 5.3: la conpaignie a plus de chance de se situer desouz l’ente florie que la rose de s’y espanir, comme l’avait bien compris B. - 6.4 conpaignie: corr. conpagnie. Manuscrits: supprimer la mention «(str. 6)» après N 161v. Leçons rejetées: ajouter 4.3 doig. Variantes: 1.9 et de flor (+ 1): corr. de flour sans et: on est en présence d’un jambage barré auquel ne correspond aucune note, vraisemblable anticipation de porter. - 2.1 l’eucre: corr. leuere. - 2.2 entroubliai N: corr. entrobliai. - 2.3 s’il donne bien ades au lieu de 311 Besprechungen - Comptes rendus 57 Sans compter les variantes, nous relevons: n° 4 (iv), 1.6 (ce vs se), 4.7 (garnie vs gairnie), 6.2 (chaipons vs -pp-), 6.4 (boen vs bon); n° 6 (vii), 3.1 (qant vs qu-), 5.4 (li vs lui); n° 7 (viii), 9.4 (Q’encor vs Qu-); n° 8 (v), 5.9a (nus vs nuls); n° 9 (ix), 4.9 (bone vs -nn-), 5.2 ([air]brexelz vs -els), 5.11 (meir vs mer); n° 10 (xi), 5.1 (ieul vs eul), 5.3 (estei vs -eit); n° 12 (x), 7.3 (Lo vs Le); n° 13 (xviii), 1.1 (Bels vs Bel), 4.9 (Nou vs Non; cf. notre commentaire au §6); n° 14 (xvii), 3.12 (Gratïous vs -cious); n° 17 (xiv), 2.6 (lessast vs lai-); n° 18 (xix), 3.4 (seignor vs -eur), 3.7 (ce vs se); n° 21 (xx), 3.1 (Deuz vs Deus), 4.7 (poront vs -rr-); n° 22 (xxi), 4.3 (Vilemurvi vs -ll-), 7.6 (marrien vs mairien), 8.1 (filz vs fils). 58 Nous n’avons pas eu le temps de vérifier certains cas que voici: n° 3 (ii): 2.4 voi vs vois; n° 5 (vi) Var. 2.13 (blonde(- 1) vs blondete), 3.3 (trouvai vs trovai); n° 11 (xii) Leçons rejetées; 3.3 (B. ne iert); n° 12 (X), 5.3 (plux vs B. plus). 59 Synalèphe ou élision (dans le cas présent) entre deux vers consécutifs. ains, ce vers n’est pas pour autant hypermétrique dans N qui donne pensai au lieu de penserai. N° 4 (iv): Les retraits d’alinéas ont été omis pour la démarcation des heptasyllabes. - 1.4 trouveir: corr. troveir. - 4.2 que: corr. ke. - 4.6 amerait : il convenait de signaler que l’on a ici affaire au futur lorrain. - 4.7 garnie; B. gairnie. - 6.2 chaipons; B. chaippons. - 6.4 boen; B. bon. N° 5 (vi): 3.14 lo mentir: corr. lor m. Variantes: 1.3 en ai amoreit: corr. enamoreit. - Il faut supprimer la note à 1.11 (il s’agit d’un doublon provenant des Leçons rejetées). N° 6 (vii): L’alignement des vers 3.5-8 est à revoir. - 6.6 debonairement: corr. -ant. N° 7 (viii): 2.6 doncele: le c est cédillé dans le ms. - 4.5 doinst: corr. doist. Variantes: 2.2 si La manque effectivement, le vers n’est pas hypométrique pour autant, car le ms. C donne fille est a roi, au lieu de La fille au roi. - 3.5 vi ke fuisse: corr. vi fuise (soit - 3 syll.). - 5.1 J’en: le ms. donne Ieu. - Ajouter: E.1 k’il m’en. - B. donne des indications supplémentaires qui auraient dû être prises en compte (sinon contestées). N° 8 (v): 2.5 cortoisie: corr. courtoisie. - 2.8 j’i: corr. g’i. - 3.1 le surnom Engelé méritait du moins le rappel de la note de Bédier (1938: 64). - 3.7 vant: corr. vent. Variantes: 2.8 l’hypermétrie n’est qu’apparente, car l’absence d’apostrophe dans je i vois n’implique pas l’absence d’élision. Mélodie: le vers 7 est chanté sur une expansion de D (v. 5): la-si-do-ré-do si la-sol-sol au lieu de la-si-do si -la-sol. - Si nous avons bien compris la manière de noter les motifs, il faut lire F 4 D’ 3 (non D’ 4 ) au v. 7. N° 9 (ix): 2.11 Plus: corr. Plux. N° 10 (xi): 5.2 plus: corr. plux. N° 12 (x): 2.7 Que: corr. Ke. - 5.3-4 supprimer les crochets et corr. 5.3 quant plux en kant plus. Leçons rejetées: 5.3-4 sont bien présents dans U. Variantes: 4.8 la variante jeus u. pour Geus k’usure n’implique aucune hypométrie. Musique: il s’agit moins de pedes (notés ABAB) qu’un punctum (apertus plus clausum) tel que le décrit Jehan de Grocheo, les vers 2 et 4 (heptasyllabes) n’ayant que le chant des deux premières syllabes en commun (mifa sol ). N° 13 (xviii): 4.9 Nou: bien que la lecture soit bonne, il faut amender avec Bédier en Non, et signaler le rejet de la leçon du ms. - Nous ne comprenons pas le refus de CR (172) de scinder la dernière strophe en deux comme l’a fait Marshall, puisque cette pièce n’est pas un «lai-descort» original mais un contrafactum: sa structure est nécessairement inféodée à celle de son modèle. Leur base métrique identique (décasyllabes monorimes) n’est pas un critère suffisant, et CR distinguent bien deux strophes distinctes dans une situation semblable que présente la «note« (n° 3). N° 14 (xvii): 1.2 aquoison: corr. aqoison. N° 15 (xv): 1.2 novelle: corr. novele. - Il convient naturellement de rectifier le vers 6.1 (Je ne quier aler) pour rétablir la rime en transposant l’infinitif: Aler je ne quier (cf. n° 5, 1.4), plutôt que d’imaginer que Colin se soit «écart[é] de son propre usage» (181) avant d’envisager sans plus la possibilité d’une erreur de copie (Bédier reproduisait de même la leçon du ms. [U], mais sans le moindre commentaire). Leçons rejetées: 1.2 nouiele: corr. novele. - 2.6 an la fontelle. N° 16 (xvi): 2.4 grans: corr. granz. Nous comprenons que CR aient été tentés de fragmenter le v. 16 décasyllabe de Bédier, Solaçons et deportons! Bons poissons, en trois trisyllabes, en supprimant la conjonction, encore que, si l’on reconnaît à Colin l’usage de l’anisosyllabisme, la suppression ne se justifie pas vraiment, d’autant que l’on a quatre notes disponibles. Nous ne voyons toutefois pas de raison de ne pas diviser le vers en question en un heptasyllabe suivi d’un trisyllabe, en chantant la strophe 2 en ABABCDECD, où E correspondrait très exactement au premier hémistiche de l’hendécasyllabe chanté sur D: l’enchaînement mélodique ne nous semble poser aucune difficulté. La question des rimes 312 Besprechungen - Comptes rendus internes ne justifie pas en effet la fragmentation extrême que préconisent CR: CR signalent eux-mêmes (188) la présence d’une rime interne à la césure des hendécasyllabes 2.8 et 3.8. Cette question des rimes internes amène d’ailleurs à se poser la question de la structure strophique: ces vers longs se subdivisent en effet alors en 7a4b, où l’on retrouve très précisément la forme et les rimes des pedes; la structure métrique de la pièce doit donc être réanalysée en: - Ia 7 b 4 - a 7 b 4 - b 3 x 7 b 4 - b 3 x 7 b 4 ier, ey/ é/ er - IIa 7 b 4 - a 7 b 4 - b 3 x 7 b 4 - b 7 - b 3 a 7 b 4 eaus/ iaus, on(s) - IIIa 7 b 4 - a 7 b 4 - b 3 a 7 b 4 ier, ey/ é 60 L’intermittence de la rime au niveau de la césure des hendécasyllabes 7+4 sous-jacents n’est pas surprenante, mais on ne peut pour autant prétendre que cette forme soit satisfaisante en l’état, et l’on peut à bon droit suspecter dans l’hétéromorphisme la conséquence d’une corruption du texte dont l’étendue serait malheureusement impossible à déterminer. N° 17 (xiv): 2.8 chevachier: corr. chevau-. Leçons rejetées: ajouter 1.5 monton. Bédier acceptait la forme qui se retrouve au n° 22 conservé dans le même ms. O, et lui réservait une entrée dans son glossaire. Musique: l’analyse des motifs en A 5 B 3 n’est pas justifiée, la phrase mélodique A étant composée de la répétition d’un même motif (sol-fa-mi ré -mi); on lira donc A 4 A 4 (et on rectifiera ensuite l’ordre alphabétique). - E 3 est identique à C 3 . N° 18 (xix): 4.4 Rignel: cette émendation pour Rignez n’est pas pertinente (cas-sujet). N° 19 (xiii): 2.5 CR amendent inutilement acoillir en acoillier pour la rime: le mot apparaît à la césure d’un heptasyllabe sous-jacent, lieu propice à l’intermittence de la rime dont on a maints témoins chez les trouvères (voir ici même le n° 16), et CR reconnaissent deux vers non rimés, dans les n° 1 (2.5 cuer au lieu de -et, dans un 8 + 4 sous-jacent) et 18 (3.1 Soilli au lieu de -ai, en tête d’un module 6 aab). N° 20 (RS 922): 1.1 chante: corr. chant (de même p. 28 et 240). - 3.10 nul: cf. notre N51. Variantes: 3.10 nus X seul (nul N). N° 21 (xx): 1.7 formant: corr. -ent. - 2.6 le: corr. les. - 2.8 et 3.4 ferait: il n’aurait pas été inutile de signaler qu’il s’agit ici du futur lorrain. - 4.8 L’interligne a été omis avant la reprise. Version O du dernier couplet (209): 4.1 obedïent: corr. -iant. Musique: il nous paraît difficile de voir dans la mélodie du v. 4 une simple variante de celle du v. 2: la situation dans les quatre premiers vers est à rapprocher de celle du n° 12. N° 22 (xxi): 3.9 vaincra: corr. veincra. - 7.9-10 l’utilisation de l’italique ne se justifie pas: que ces vers aient un caractère parémiologique n’implique en rien qu’il s’agisse d’un proverbe. CR acceptent la perturbation de l’ordre des rimes dans ce couplet, refusant le réarrangement proposé par Tyssens (vers 9, 10, 8, 7); nous remarquerons pour notre part qu’une simple transposition rétablirait l’ordre attendu (Fous est qu[i] le pasquiz/ Enseingne au viel oison.), d’autant plus que le relatif sujet n’a pas ailleurs d’autre forme que qui dans cet unicum de O, sans élision susceptible de trahir une forme en que primitive (cf. 2.4 qui ot; 8.8 qui entende). On remarquera que la restauration du schéma rimique crée un lien de coblas capcaudadas avec le couplet suivant, lien déjà établi avec le couplet précédent (ois, is; is, on; on, er). Leçons rejetées: 8.4 monton (cf. supra n° 17, 1.5). Dominique Billy ★ 313 Besprechungen - Comptes rendus 60 Nous ne prenons pas en compte la répétition de 3.5-6 à laquelle procèdent CR, qui ne s’impose pas, comme il est dit dans le commentaire (188) qui parle d’«hypostrophie» sans guillemets.
