eJournals Vox Romanica 66/1

Vox Romanica
vox
0042-899X
2941-0916
Francke Verlag Tübingen
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2007
661 Kristol De Stefani

Adolfo Murguía (ed.), Sens et références/Sinn und Referenz, Mélanges Georges Kleiber/ Festschrift für Georges Kleiber, Tübingen (Gunter Narr) 2005, 255 p.

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2007
Olga  Inkova
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culture de la langue» (289). Partant de la constatation - qui était aussi celle de Vézina (267- 80) - que le français est une langue pluricentrique, Lebsanft brosse deux tableaux différents: alors que «certains pays francophones créent leurs propres ouvrages de référence pour décrire le ‹bon français›», en France, il semble qu’il y ait «beaucoup plus de difficultés à admettre une norme régionalisée» (296). Si certains lexèmes bénéficient cependant en France d’une légitimité - comme l’indiquent certaines citations métalinguistiques présentes dans le DFR - les questions qui restent ouvertes, selon Lebsanft, sont notamment celles «du respect qu’une norme locale inspire . . . chez les locuteurs exogènes» et des facteurs de normalisation et de diffusion. L’honneur de la clôture de ce volume revient à Pierre Rézeau lui-même (299-300) qui a souhaité insister sur trois mots clé pour la recherche en lexicographie différentielle: «approfondir», «poursuivre» et «valoriser». Ce mouvement d’approfondissement, de poursuite et de valorisation est déjà amorcé, comme le prouve ce volume de discussion réunissant des communications à la fois plurielles et complémentaires qui dialoguent et se répondent. Elles ouvrent des perspectives claires pour la lexicographie différentielle mais posent peut-être aussi, dans une optique plus large, des questionnements pour la lexicographie générale. Dorothée Aquino/ Christel Nissille ★ Adolfo Murguía (ed.), Sens et références/ Sinn und Referenz, Mélanges Georges Kleiber/ Festschrift für Georges Kleiber, Tübingen (Gunter Narr) 2005, 255 p. Cet ouvrage collectif en hommage à Georges Kleiber réunit dix contributions qui abordent les domaines d’intérêt qui sont les siens. Le tout est précédé d’un prologue Sémantique et logique du sens dans lequel Adolfo Murguía esquisse le portrait de G. Kleiber, homme et savant. La contribution Référence physique et construction du sens dans la linguistique naturaliste au XIX e s. de Jean-François P. Bonnot, qui ouvre le volume, se donne comme objectif l’analyse de l’activité linguistique de dénomination. Dans un style qui se veut désinvolte, l’auteur étudie la construction des dénominations catégorielles dans la science de la seconde moitié du XIX e siècle. Malheureusement, il est parfois difficile de discerner, sous une averse de faits, de noms et de citations qui témoignent certes de l’érudition de l’auteur, le fil conducteur de l’étude. J.-F. P. Bonnot semble vouloir démontrer essentiellement trois choses, du reste assez bien connues: que le rapport entre le signifié et le signifiant d’un terme n’est jamais stable et intangible, que les conditions mêmes de la production du savoir (le fait que le chercheur «agit dans un temps social dont il ne saurait s’abstraire» (17)) ont des retombées sur la construction des hypothèses et qu’inversement les classifications et les typologies structurent l’univers mental. L’étude de Injoo Choi-Jonin et de Véronique Lagae est une tentative de décrire le fonctionnement de il y a dans les constructions du type Il y a des gens ils ont mauvais caractère attestées surtout à l’oral. Au terme d’une analyse comparée de l’emploi «standard» de il y a et de son emploi «oral», analyse fondée sur plusieurs paramètres (type d’emploi de il y a, type de SN introduit, type de relative), les auteurs arrivent à dégager les contraintes spécifiques qui régissent le fonctionnement de il y a «oral» dans ses deux emplois: comme un introducteur de thème (avec un SN indéfini à lecture partitive ou avec un pronom en) et comme introducteur de topique (dans les autres cas). Les différences dans la distribution de il y a «standard» et «oral» ne se résument donc pas en une différence de registre, ce qui permet aux auteurs de conclure que les deux constructions ont «toutes deux leur raison d’êt- 348 Besprechungen - Comptes rendus re» (64). Il s’agirait alors, pour ce qui est de il y a «oral», d’une nouvelle unité linguistique issue de la grammaticalisation (les auteurs notent en effet le figement de la forme du verbe dans l’emploi oral) et son analyse sous cet angle ne pourrait qu’enrichir l’étude. Les anaphores associatives et leurs concurrentes possessives sont étudiées dans la contribution de Danielle Crévenat-Werner. En analysant les possibilités de remplacement de l’article défini par un possessif dans différents types d’anaphore associative, l’auteure cherche à définir la spécificité fonctionnelle de la détermination possessive, mais subit un échec qui est dû, en majeure partie, au caractère plutôt négligé de son étude. Côté forme, le texte abonde en répétitions (ainsi, les exemples «un livre a un auteur» et «un village a une église» balisent tout le texte, à tel point que le crime et son auteur de l’exemple [7] (70) deviennent le livre et son auteur dans les commentaires qui suivent); des segments de phrases manquent (75), alors que d’autres sont mal placés (70, 74, comme, d’ailleurs, dans d’autres contributions au volume), sans parler de points en milieu de phrase (73). Côté contenu, l’auteure semble exposer ses idées telles qu’elles lui viennent à l’esprit, sans se soucier de leur place dans l’argumentation générale (pour guider un peu le lecteur, elle signale ses révélations par un point d’exclamation, et c’est bien sûr ce signe de ponctuation expressif qui clôt l’article! ); les interprétations de certains exemples sont parfois un peu naïves (79), parfois plus que discutables (70, 77); enfin, dans les conclusions, elle résume les hypothèses de Kleiber, Clark et Bartning, et l’on se demande quelle est sa contribution personnelle dans l’étude du phénomène en question. L’étude De la double référence du langage en sémantique génétique (presque 40 pages) de Jean-Pierre Durafour est d’un tout autre calibre. En s’inspirant des travaux de Husserl et de Heidegger, l’auteur y propose une «nouvelle sémantique génétique» appelée à remplacer les théories actuelles de sens, incapables, à son avis, de fournir une description sémantique, adéquate à la nature historique, sociale et culturelle du langage «en tant qu’activité créatrice universelle, historique et individuelle de l’homme» (89). Cette incapacité réside, selon l’auteur, dans «la malformation théorique du modèle duel ou ‹étapiste› de la formation du sens» (89). Le triangle sémantique de la tradition métaphysique devrait être remplacé dans la sémantique génétique prônée par J.-P. Durafour par un modèle plus complexe où la référence ontologique mentale, advenante au signe (qui se compose du signifiant, du signifié et de l’invariable), et la référence ontique mentale, advenante au mot en discours, se trouvent en rapport génétique. Le signe de la langue est ainsi le «précurseur ontologique, un et ouvert» (108) des sens variables du mot et déterminables, à partir du signifié indéterminé du signe, par le système temporel du contexte mental. «Nous interprétons l’être à partir du temps», écrivait Heidegger. Laissons donc dire au temps si cette nouvelle sémantique génétique arrivera à séduire les linguistes comme l’a fait en son temps la sémantique «triangulaire». L’article de Pierre Frath Pour une sémantique de la dénomination et de la référence alimente la polémique sur la nécessité de transformation dans la théorie linguistique. Après avoir passé en revue la référence telle qu’elle est perçue «par les approches du sens les plus marquantes du XX e siècle, à savoir la philosophie du langage, le structuralisme et le cognitivisme» (121), l’auteur pose la notion de dénomination à partir de la sémantique référentielle de Kleiber et celle de signe interprétant à partir de la sémiotique de Peirce. Tout en restant au sein de la sémantique triangulaire, P. Frath privilégie un point de vue nominaliste: en valorisant le troisième sommet du triangle sémiotique - l’objet réel - souvent écarté, implicitement ou explicitement, de l’étude du sens, la sémantique pourra sortir «d’une confrontation stérile entre le signifiant et le signifié, entre la forme et le concept» (145). De plus, si nous définissons le concept comme un signe interprétant, «une construction linguistique à propos de l’objet» (134), nous lui donnerons un véritable statut sémantique, ce qui permettra de mieux le saisir dans sa dimension mentale et linguistique et de le rendre accessible à une description rigoureuse. 349 Besprechungen - Comptes rendus Dans sa très courte contribution À propos de l’historicité des textes, Johannes Kabatek soulève des questions, d’ordre théorique et méthodologique, liées à l’étude des traditions textuelles. Il s’applique, en particulier, à définir la place des théories discursives dans la théorie linguistique. Pour ce faire, l’auteur s’appuie sur la typologie conceptuelle de l’historicité proposée par Coseriu: l’historicité linguistique au sens restreint (historicité de la langue particulière); l’historicité en tant que tradition de certains textes ou de certaines formes de textes (c’est-à-dire en tant que possibilité de les répéter); l’historicité générale au sens de «faire partie de l’histoire» (151). L’auteur rattache les traditions textuelles à deux types de traditions: à celles d’une communauté linguistique d’une part, et à celles d’une communauté textuelle qui ne correspond à aucune communauté linguistique d’autre part (152s.). Il met par ailleurs l’accent sur la spécificité et la primauté de l’historicité linguistique qui ne peut être mise sur le même plan que d’autres historicités ou traditions (156). L’étude de Peter Koch Taxinomie et relations associatives analyse les fondements des relations de superordination/ subordination taxinomiques. L’auteur part des trois relations associatives fondamentales introduites dans la pensée occidentale par Aristote, à savoir la similarité, la contiguïté et le contraste, mais n’en retient que deux pour les buts de son analyse, à savoir la similitude et la contiguïté. En effet, selon lui, la similitude et le contraste ne constituent que «deux aspects complémentaires d’un même itinéraire associatif» (165). P. Koch parcourt ensuite différents plans de l’analyse lexico-sémantique (synchronie «externe», synchronie «interne» et changement sémantique) et montre que les relations associatives de la contiguïté et de la similarité traversent toute l’organisation du lexique. L’accent est mis sur la description des relations taxinomiques entre le niveau de base et le niveau subordonné. Selon l’hypothèse défendue par P. Koch, la description conceptuelle d’un concept spécifique, p. ex., tulipe, doit se présenter sous la forme suivante: {[une tulipe est une fleur] a [X + Y etc.] b }. Le module taxinomique se fonde alors sur trois relations: la relation T lie l’hyponyme à son hypéronyme et met en valeur la composante a du concept spécifique; la relation T 1 lie l’hypéronyme à un des hyponymes et met en valeur la composante b; la relation S lie les hyponymes du même hypéronyme. Si cette dernière relation se fonde sur la similarité (d’où S), les relations T et T 1 sont «de nature particulièrement complexe puisqu’elles font entrer en jeu l’antagonisme . . . entre les relations de similarité cotaxinomique (S) et les relations de contiguïté (C)» (182): la relation T résume S, inhibe C; la relation T 1 accentue C, estompe S. La contribution de Adolfo Murguía À propos de la vérité des choses - langage et silence du monde, essaie, de l’aveu de l’auteur, d’«accompagner surtout les premiers travaux de G. Kleiber: sa thèse, ses travaux sur la réalité extralinguistique, sa discussion avec Putnam» (194). Dans un court essai (de quatre pages), l’auteur suit le parcours de la pensée européenne dans sa «quête de la vérité» (195), notamment en analysant les fonctions que revêt la langue dans la «relation entre nous et le monde» (195). Les réflexions théoriques et méthodologiques exposées par Wulf Oesterreicher dans son étude Autonomisation du texte et recontextualisation. Deux problèmes des sciences du texte, portent, dans une optique diachronique, sur une série de problèmes liés à la conceptualisation dans le domaine de l’oral et de l’écrit. Elles permettent de mieux saisir les notions de codage graphique, c’est-à-dire de «tous les faits linguistiques qui sont définis par l’écriture en tant que médium graphique» (202), et de mise par écrit, comprise comme «tous les processus linguistiques qui sont en relation avec le domaine conceptionnel de la distance communicative» (202). À l’aide de ces instruments conceptuels, l’auteur précise le sens des deux termes utilisés dans le titre de sa contribution: l’autonomisation est «le résultat du processus historique de l’émancipation du texte par rapport à l’événement discursif et communicatif d’origine» (210), et la recontextualisation est un procédé qui permet de relier la 350 Besprechungen - Comptes rendus forme graphique du texte avec l’événement discursif d’origine afin de «récupérer les modalités sémiotiques multiples» (210) de la situation communicative authentique. Cette dernière tâche est particulièrement problématique pour la linguistique diachronique. L’étude est suivie d’une vaste bibliographie (de 210 titres) dont le poids contraste avec celui, un peu faible, de l’analyse proposée. La contribution de François Rastier Les mots sans les choses, qui clôt le volume mais qui n’y occupe point la dernière place, commence par une affirmation provocatrice qui va, de toute évidence, à l’encontre des propositions formulées dans la contribution de P. Frath: pour «se constituer véritablement en discipline autonome et achever de définir son domaine propre d’objectivité», la sémantique linguistique, doit «sans doute abandonner la problématique référentielle» (224). Pour l’aider à y parvenir, l’auteur se propose d’expliquer la «remarquable stabilité» du postulat référentiel qui «demeure l’obstacle épistémologique principal au développement de la sémantique linguistique» (225) et de rendre compte des «évidences» qui le soutiennent, ce qu’il fait du reste avec beaucoup d’humour. F. Rastier propose de réduire le problème de référence à celui de «l’impression référentielle» et souhaite que la référence «cesse d’être une évidence de bon sens convoqué à la bonne franquette, pour devenir un problème empirique interdisciplinaire» (250). Mais dans cette vision interdisciplinaire de la référence, il n’est permis à la linguistique que d’«exercer un ‹droit de suite› sur le territoire d’une discipline voisine, la psychologie cognitive, pour y étudier la perception des signifiés sous la forme d’images mentales» (238-9). Reste à savoir si cette proposition de transformation de la théorie linguistique sera acceptée par les sémanticiens, y compris par le «héros de la fête» qui a lui aussi essuyé de sévères critiques, et s’ils seront prêts à abandonner le champ référentiel labouré par plusieurs générations de linguistes. Si, après avoir parcouru l’ensemble des contributions, nous regardons l’organisation globale du volume, nous constatons que les contributions y sont présentées par ordre alphabétique des auteurs, alors qu’une composition thématique (p. ex., théories linguistiques du sens, construction du sens, études empiriques) aurait été, à notre avis, préférable. Olga Inkova ★ Gilles Lugrin, Généricité et intertextualité dans le discours publicitaire de la presse écrite, Bern (Peter Lang) 2006, x + 487 p. (Publications Universitaires Européennes 21/ 288). Gilles Lugrin est à la fois maître-assistant à l’Université de Lausanne et fondateur d’une société de conseil en communication et en marketing. Sur le site de cette société (www.ComAnalysis.ch), on peut trouver les nombreux articles sur la publicité de Lugrin et de ses collaborateurs, ainsi qu’une bibliographie regroupée par matières des publications francophones sur la publicité. Dès lors, il n’est pas étonnant que le livre de Lugrin se signale par une excellente connaissance de la matière, et que son auteur réussisse à illustrer ses propos par des exemples particulièrement bien choisis. C’est surtout la première partie du livre, consacrée à la problématique générale de la communication publicitaire (7-117), qui lui permet d’étaler son immense savoir, qui s’appuie sur une bibliographie (447-76) d’un millier de titres avant tout francophones. Cette introduction ne se limite d’ailleurs pas aux aspects linguistiques de la publicité, mais aborde les aspects les plus divers, à l’exclusion pourtant du marketing. Comme Lugrin ne prend en considération que la publicité de la presse écrite, il est tout naturellement amené à s’intéresser aux deux systèmes sémiologiques qu’utilise ce genre de 351 Besprechungen - Comptes rendus