Vox Romanica
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Francke Verlag Tübingen
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Kristol De StefaniGabriela Tanase, Jeux de masques, jeux de ruses dans la littérature française médiévale (XIIe-XVe siècles), Paris (Honoré Champion) 2010, 384 p. (Nouvelle Bibliothèque du Moyen Âge 101)
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Marie-Claire Gérard-Zai
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moins à la littérature moderne. Une curieuse erreur nous montre d’ailleurs qu’il est des domaines qu’H. B. maîtrise moins bien: p. 27, la phrase de Samson déclarant aux Philistins que «de celui qui mange est sorti ce qui se mange, et [que] du fort est sorti le doux» est attribuée à Salomon, ce qui est d’autant plus absurde que la référence au Livre des Juges est correcte. On croit d’abord à un simple lapsus mais la reprise de la même attribution fautive en p. 71 confirme qu’il s’agit bien d’un défaut de culture biblique. Autre exemple moins flagrant mais significatif tout de même: H. B. semble persuadée que l’utilisation dans le Perlesvaus de l’image de la Fortune chauve par derrière provient de la lecture du Conte du graal de Chrétien de Troyes, ce qui est bien sûr possible, mais nullement certain, car ce vieux cliché antique traîne partout au Moyen Âge. Peu de choses, bien sûr, pour un livre dont il faut comprendre l’optique «résolument comparatiste» (22) dans un sens restreint, mais non moins intéressant: en montrant que la question du graal participe d’une plus vaste poétique de l’énigmatique, H. B. renouvelle notre intérêt pour un art romanesque retors et conscient de ses pouvoirs sur le lecteur. Alain Corbellari ★ Gabriela Tanase, Jeux de masques, jeux de ruses dans la littérature française médiévale (XII e -XV e siècles), Paris (Honoré Champion) 2010, 384 p. (Nouvelle Bibliothèque du Moyen Âge 101) Cet ouvrage prometteur est le fruit d’une thèse coordonnée par Brian Merilees et dirigée par Madeleine Jeay. L’ouvrage comprend cinq chapitres: 1. Masques trompeusement dégradants; 2. Le travestissement et ses ambiguïtés; 3. Disparaître sous masques [chapitre consacré à Villon]; 4. Le marchand, le jongleur, le fou et 5. Paradoxes de la vérité. Le sujet est vaste, récurrent, complexe, la période analysée étendue, les textes variés et nombreux. Le topos du masque conduit à une interprétation plurivalente; les nombreuses œuvres recensées conduisent à une réflexion sur les valeurs du déguisement par rapport à la symbolique médiévale. L’auteure choisit des exemples de masquages dans les textes épiques et hagiographiques: Le Charroi de Nîmes, La Prise d’Orange, Les Enfances Vivien, La Vie de Saint Alexis, La Belle Hélène de Constantinople. Le topos de la «sainte travestie» est illustré par Le Roman de Silence, dans lequel s’inscrit le déguisement en garçon de l’héroïne. G. Tanase analyse le «masque viril» et le motif des Amazones dans des ouvrages à caractère didactique de Christine de Pizan: La Mutacion de Fortune et La Cité des Dames, dans lesquels le modèle masculin suggère, selon l’auteure, une réhabilitation de l’image féminine; dans les poèmes de Villon choisis par G. Tanase et dans La farce de Maître Pathelin «le déguisement coïnciderait en dernière instance avec la structure du texte» (9); à cette liste s’ajoutent les nombreux parallèles avec les personnages de Tristan, de Trubert et de Renart. On ne peut évidemment pas considérer le déguisement que sous l’angle étroit du rire, il faut prendre en compte le caractère angoissant du masque (larva daemonum). L’exemple tiré de La Vie de Saint Alexis laisse un peu dubitatif: peut-on réellement parler de «saint déguisé» (62), de «déguisement» quand Alexis abandonne, le jour de ses noces, sa jeune épouse et ses parents pour mourir au monde et prendre la mer, devenant le mendiant que l’on sait? Peut-on utiliser ici le concept de «masque de la pauvreté» (63)? Les exemples cités dans ce cas précis passent allègrement de la première version française assonancée de 1040 environ aux rédactions rimées du XIII e siècle, les versions tardives ajoutant certains éléments - comme la description des vêtements - inexistants dans les versions primitives françaises. L’utilisation du terme descarnés (vers 845, version du manuscrit L) pour qualifier le corps mourant d’Alexis est considérée comme choquante, car «il rapproche le dé- 333 Besprechungen - Comptes rendus guisement en pauvre du spectre de la décomposition» (66). Une analyse sémantique de povre et povreté à propos d’Alexis eût évité certaines confusions et généralisations. Pour François Villon, G. Tanase avoue l’impossibilité d’en faire un portrait: l’auteur médiéval se dérobe sans cesse; l’œuvre du poète «résiste à toute interprétation univoque, autant par son message que par les circonstances de sa genèse» (187). Son langage dissimule la signification à travers la polysémie, les calembours, la paronymie et l’antiphrase, pas très éloignés de l’hermétisme du trobar clus. Ses vers hantés par le froid, par l’obscur, par la maigreur et la pauvreté tiennent d’une poétique de la feinte et découle «d’un discours fondé sur des oppositions» (247). L’auteure conclut par la théâtralité et par le jeu verbal, le masque se révélant être la condition même de la réalisation du texte littéraire, car «le topos du déguisement permet le passage entre l’écrit et l’oral» (353). Elle admet que le procédé n’est pas valable pour les œuvres de Christine de Pizan mais il est probant pour l’épopée médiévale, le roman et la farce. Quant à la poésie lyrique, nous sommes moins convaincue de la pertinence de cette hypothèse de lecture. Le dédoublement inhabituel des entrées dans l’Index des noms propres et des œuvres (371-82) peut dans un premier temps déconcerter. Dans la bibliographie (355-70), les mentions de l’élémentaire dictionnaire abrégé Lexique de l’ancien français de F. Godefroy (362) et celle de l’usuel Dictionnaire de l’ancien français d’A. J. Greimas (362) semblent superflues; l’ordre alphabétique a joué un mauvais tour à l’entrée «St Paul», Première et Seconde Lettres aux Corinthiens (368); pour François Villon, le titre exact de l’édition de Claude Thiry est Poésies complètes et non Poèmes complètes; la mention et l’utilisation de l’édition bilingue de Mühlethaler et Hicks, Lais, Testament, Poésies diverses. Ballades en jargon, Paris 2004, auraient été bienvenues. On pourra noter quelques coquilles: pre pour père (64), galement pour également (66), Menegalado pour Menegaldo (251, 378), Eglise pour église (294), analyss pour analysés (353), entre autres, mais cela n’altère pas le plaisir de la lecture de cette étude. Marie-Claire Gérard-Zai ★ Eglal Doss-Quinby/ Marie-Geneviève Grossel/ Samuel N. Rosenberg (ed.), «Sottes chansons contre Amours». Parodie et burlesque au Moyen Âge, Paris (Honoré Champion) 2010, 242 p. (Essais sur le Moyen Âge 46) Les trois auteurs sont avantageusement connus pour leurs publications sur les trouvères, dont Chanter m’estuet: Songs of the Trouvères (1981), édité par S. N. Rosenberg, professeur émérite d’Indiana State University, anthologie reprise partiellement en 1995 (collection Lettres gothiques) avec la collaboration d’H. Tischler et de M.-G. Grossel; cette dernière, professeure à l’université de Valenciennes, a rédigé, entre autres, un ouvrage important sur Le milieu littéraire en Champagne sous les Thibaudiens (1200-1270) (2 vol., Orléans 1994) et E. Doss-Quinby, professeure à Smith College, a longuement étudié le chansonnier Douce 308, de la bibliothèque bodléienne d’Oxford (The Old French Ballette, Genève 2006) et publié diverses études concernant ce même manuscrit, entre 2007 et 2010. Jusqu’à aujourd’hui, à part quelques études isolées, aucune monographie n’a été consacrée au genre littéraire des «sottes chansons», et les éditions disponibles sont vieillies (Hécart 1834), diplomatique (Steffens 1900) ou incomplète (Långfors 1945). Les trois auteurs nous offrent donc ici une édition bienvenue, accompagnée d’une substantielle introduction (9-118). Le sommaire donne les titres de vingt-neuf pièces, mais en fait, il ne s’agit que de 334 Besprechungen - Comptes rendus
