eJournals Vox Romanica 73/1

Vox Romanica
vox
0042-899X
2941-0916
Francke Verlag Tübingen
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2014
731 Kristol De Stefani

Piera Molinelli/Federica Guerini (ed.), Plurilinguismo e diglossia nella tarda antichità e nel medio evo, Firenze (Sismel) 2013, x + 342 p. (Traditio et Renovatio 7)

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2014
Georges  Lüdi
vox7310265
Besprechungen - Comptes rendus 265 1 W. U. Dressler, «Dallo stadio di lingue minacciate allo stadio di lingue moribonde attraverso lo stadio di lingue decadenti: una catastrofe ecolinguistica considerata in una prospettiva costruttivista», in: A.Valentini/ P. Molinelli/ P. Cuzzolin/ G. Bernini (ed.), Ecologia linguistica, Roma 2003: 9-25. 2 J. N.Adams, Bilingualism and the Latin language, Cambridge 2003. 3 S. Gal, «Linguistic repertoire», in: U.Ammon/ N. Dittmar/ K. J. Mattheier/ P.Trudgill (ed.), Sociolinguistics: An International Handbook of the Science of Language and Society, Berlin 1986: 286-92. tema. Tra i meriti principali dello studio riteniamo di poter indicare il costante sforzo di adottare un approccio di tipo complesso e multifattoriale, accanto alla considerazione attenta portata nei confronti del dato storico e dell’antecedente linguistico del diasistema latino, prezioso fondamento dello studio diacronico e sincronico delle lingue romanze. Marco Maggiore H Piera Molinelli/ Federica Guerini (ed.), Plurilinguismo e diglossia nella tarda antichità e nel medio evo, Firenze (Sismel) 2013, x + 342 p. (Traditio et Renovatio 7) Cela fait de nombreuses années qu’est née une sociolinguistique historique qui applique, en dialogue avec les philologues et les historiens, des questionnements nourris de réflexions de la sociolinguistique moderne à des périodes reculées, ceci afin de mieux comprendre «l’interface entre les structures grammaticales et le contexte» (Dressler 2003: 9 1 ). Le plurilinguisme et les langues en contact sont deux de ses domaines d’étude favoris (voir p.ex. l’œuvre magistrale d’Adams 2003 2 ). Les contributions de ce volume, issues d’un séminaire à l’Université de Bergame en 2007, poursuivent cette réflexion en se concentrant sur la longue période allant de l’antiquité tardive (III e -VI e s.) jusqu’au début du Moyen Âge (aux alentours de l’an 1000). Le livre s’articule en trois parties: «I: Sguardi teorici», «II: Un’area e le sue lingue» et «III: Plurilinguismo e testi». Dans la première contribution (Federica Guerini/ Piera Molinelli, «Plurilinguismo e diglossia tra tarda antichità e medio evo: discussioni e testimonianze», 3-28) les éditrices présentent la thématique et le volume. Un accent concerne la diversité des situations de contact dans l’ère analysée - l’ancien empire romain - et la nécessité d’affiner les outils terminologiques, en particulier autour de la notion de diglossie. On regrettera pourtant l’absence d’une distinction claire entre plurilinguisme social, voire répertoire plurilingue en tant que tel («The totality of linguistic resources available to members of a community for socially significant interactions constitutes the linguistic repertoire of that community. The linguistic resources include all the different languages, dialects, registers, styles and routines spoken by the group.» [Gal 1986 3 ]) et les différentes formes de répartition fonctionnelle entre les variétés («diglossie classique», «diacrolettie» et «dilallie», 71). La deuxième contribution conceptuelle (Carmen Codoñer: «Terminología antigua sobre los hechos de lengua respecto al fenómeno de cambio lingüístico», 29-85) part du stéréotype: «latin vulgaire = langue corrompue» pour analyser systématiquement l’évolution du champs notionnel autour de la paire «bon usage - mauvais usage» dans l’usage métalinguistique de l’époque et le rôle des grammairiens comme gardiens de la langue («custodes latini sermonis», 56). La prémisse de cette réflexion est prometteuse: pour comprendre les usages (en grande partie inobservables) d’une époque, il est nécessaire de connaître les représentations des contemporains telles qu’elles se reflètent dans le discours, normatif et sur la langue («discours sur») plus généralement. Codoñer peut montrer que le terme «vulgo» et sa famille Besprechungen - Comptes rendus 266 ne se réfèrent pas, chez Aulus Gellius, à une variété populaire, sinon à un usage plus relâché, sans doute, mais commun («uulgo dicimus», 55). On retiendra pourtant le fait qu’aux III e -V e siècles, l’influence combinée du christianisme (priorité du sens sur la forme dans la traduction de la parole divine) et du plurilinguisme social (avec le latin comme langue seconde) mène à une reconnaissance du changement linguistique (64). Néanmoins, il continue à exister, à côté du «sermo communis» généralisé, un acrolecte cultivé, acquis à l’école, un «buen latino» par rapport auquel un auteur comme Saint Jérôme perçoit et dénonce l’usage comme «deterioro» (81). Il est significatif que Codoñer évite, à ce propos, le terme de «diglossie» (83). En effet, la première contribution de la deuxième partie (Michel Banniard: «Migrations et mutations en latin tardif: faux dualisme et vraies discontinuités en Gaule (V e -X e siècles)», 89-117») conteste la validité de tout «système binaire» (111) pour représenter les réalités fluctuantes entre le latin classique et l’ancien français. L’auteur considère le latin classique comme un diasystème et le français comme un autre diasystème résultant du premier par une série de «métamorphoses». Pour comprendre ces dernières, il distingue trois «zones» au sein de chaque diasystème (94): (A) un ensemble central constitué d’éléments «de plus haute probabilité d’apparition» dans la parole, (B) «des innovations en mémoire courte en voie d’apparition» formant un ensemble à faible probabilité d’apparition et (C) un troisième ensemble, lui aussi à faible probabilité d’apparition, «formé essentiellement des apports en mémoire à long terme en voie de disparition». «La métamorphose d’un diasystème à l’autre correspond [alors] à un processus de migration entre ces différentes zones» (94). Ce processus est illustré par de nombreux exemples. Dans chacun des diasystèmes, Banniard distingue une série de niveaux de langue ou registres qui «loin d’être séparés de manière étanche les uns des autres s’organisent plutôt en ensembles flous et mobiles en interaction réciproque» (101). À l’époque carolingienne, Banniard distingue au moins cinq niveaux (111), mais qui appartiennent en fait à deux diasystèmes différents, l’un romanophone et l’autre latin (103). Devant cet état de faits, l’auteur refuse avec de bons arguments un modèle dichotomique. Mais ce qui pourrait être d’un intérêt théoriques transcendant, c’est la constatation qu’au niveau des «usages tant non soutenus que soutenus» la frontière entre les deux «langues» (voire diasystèmes) n’est pas nette, mais brouillée, que de nombreuses formes de mélange apparaissent. Ces «discontinuités» mettent en cause l’idée de (dia-)systèmes clairement bornés. Après la Gaule, c’est le tour aux Îles britanniques avec la contribution de Pierluigi Cuzzolin («Bilinguismo e diglossia nelle isole britanniche tra il V e il X secolo: il ruolo del latino», 119-47). Selon l’auteur, le contact entre le latin et le celtique se serait fait en deux temps, le latin figurant une fois comme adstrat (période de bilinguisme), l’autre comme superstrat (période de diglossie) (119 s.). L’étude se concentre ensuite sur deux variétés de celtique insulaire, l’irlandais et le gallois, et pose la question de savoir comment le latin a pénétré (première période) et s’est diffusé (deuxième période) et de quel type de latin il s’agissait (128). Jusqu’à leur retraite de Grande-Bretagne, c’étaient des Romains qui avaient introduit leur latin (pas toujours canonique) en Angleterre où il coexistait comme L1 avec différentes variétés celtiques. À partir du V e siècle, le latin - en général L2 - devint la langue des chancelleries, des classes supérieures et de l’église (134 s.), langue de prestige, donc, entraînant de nombreux emprunts en celtique britannique (138). Par contre, la pénétration du latin en Irlande est plus tardive, surtout dans le monde ecclésiastique (135) et son impact sur l’irlandais par conséquent bien plus réduit (136). Selon l’auteur, les domaines d’emploi auraient été assez séparés (ibid.). Suffisamment pour justifier l’appellation dichotomique «diglossie»? On regrettera, ici, un manque de dialogue entre les différents auteurs de ce volume et l’on se méfiera de conclusions simples en se rappelant les typologies complexes identifiées par Banniard en Gaule, mais peut-être difficilement transférables aux Îles britanniques faute de documentation suffisante. Besprechungen - Comptes rendus 267 4 A. Berrendonner et al., Principes de grammaire polylectale, Lyon 1983. 5 G. Lüdi, «Ein historisches Beispiel für Polyglossie: Stadtsprachen in Fribourg/ Freiburg i. Ue. im XIV./ XV. Jahrhundert», in: P. H. Nelde (ed.), Historische Sprachkonflikte, Bonn 1989: 37-55. 6 G. Lüdi/ B. Py, Être bilingue. 4 e édition ajoutée d’une postface, Berne etc. 2013. La contribution de Roger Wright («Plurilinguismo nella penisola iberica (400-1000)», 149-64) soulève des problèmes théoriques intéressants. Sa thèse principale présuppose en effet la limitation de l’empan des notions de bilinguisme et de diglossie. Contrairement à la définition classique de Ferguson 1959, pour lequel il s’agissait de la relation entre variétés d’une seule et même langue, Wright restreint la notion de diglossie à la relation entre «langues» (150). Une relation tout aussi restrictive concerne la notion de bilinguisme qui ne peut exister qu’entre «langues» (151). C’est sur cette base que Wright peut affirmer qu’avant l’invasion des Arabes au début du VIII e siècle, la péninsule était foncièrement monolingue (à l’exception de la région bascophone) et qu’elle l’est restée en dehors de Al-Andalus jusqu’au XI e siècle (162). Les arguments semblent solides: ni dans la dimension diatopique, ni dans la dimension diastratique, ni en ce qui concerne les relations entre l’écrit et l’oral les différences ne justifient de parler de «langues» différentes. Donc: ni bilinguisme, ni diglossie, mais de la variation à l’intérieur d’une seule «langue» (ce que Banniard appellerait diasystème). Mais qu’est-ce qu’apporte cette simplification? On peut en effet admettre qu’il s’agit de manifestations du potentiel de polylectalité (Berrendonner et. al. 1983 4 ) d’un seul et même (dia-)système linguistique. Or, tout en admettant, avec Wright, que les frontières entre les variétés diatopiques ne sont jamais nettes (150), le phénomène de la bidialectalité et de l’alternance entre dialectes existe, et ceci précisément dans tous les contextes où l’intercompréhension n’est pas menacée (voir l’exemple des dialectes alémaniques en Suisse). Il est d’autre part vraisemblable que des niveaux de langue semblables à ceux décrits en Gaule par Banniard - eux aussi «poreux» (150) - ont existé sur la péninsule ibérique. Certes, la thèse de Wright qu’ils ne justifient nullement la notion dichotomique de diglossie est convaincante. Mais ne serait-il pas utile d’aborder le «monolinguisme complexe» (153, 156, 160 s.) avec des outils terminologiques plus différenciés, au-deçà de la «langue»? On notera par ailleurs avec perplexité que l’auteur parle de Diglossie dans un cas de contact entre multiples variétés: arabe, hébreu, latin écrit, arabe parlé et roman (158). J’aurais plutôt parlé de «pentaglossie» (voir Lüdi 1989 5 ) en admettant explicitement qu’une différentiation fonctionnelle peut aussi exister entre une langue standardisée et des lectes subordonnés. Une dernière remarque concerne les «khardjas», les vers finaux de la dernière strophe d’un muwashshah en arabe ou en hébreu. Selon Wright, il s’agirait de «poesie monolingui arabe, benché si siano evidentemente scritte in un contesto bilingue» (159). Or, une remarque précédente est révélatrice: «Conduce a confusione la mera necessità di classificare le parole come arabe o come romanze, perché molte sono entrambe le cose» (ibid.). Mais d’où vient cette nécessité? Ne seraient-ce pas au contraire des exemples de mélange comme nous les trouvons dans les khardjas - mais aussi, comme le disait Banniard, à la frontière entre les diasystèmes latin et protofrançais en Gaule - qui devraient nous inciter à remettre en cause la notion de «langues» clairement séparables (voir Lüdi/ Py 2013 6 )? La troisième partie aborde en partie des situations impliquant d’autres langues que le latin et les langues romanes émergentes. La longue contribution de Rosanna Sornicola porte le titre: «Bilinguismo e diglossia nei territori bizantini e longobardi del mezzogiorno: le testimonianze dei documenti del IX e X secolo» (167-259) à la frontière entre le monde romain-byzantin et le monde germanique. Dans une première partie, elle problématise à son tour la pertinence des notions de bilinguisme et de diglossie pour des époques reculées (167-81) et en particulier la dichotomie oral/ écrit, notamment pour les actes notariaux, Besprechungen - Comptes rendus 268 en insistant sur la boucle: discussion orale sur l’intention du texte, rédaction du texte par le notaire, lecture à haute voix du texte rédigé (189 et passim). Par la suite, Sornicola se concentre sur deux régions de l’Italie méridionale, les territoires longobards et byzantins respectivement, caractérisés par une complexité sociale, culturelle et linguistique particulière. Méthodologiquement, elle procède par l’analyse minutieuse de deux corpus de textes à la recherche de traces des contacts de langues et cultures dans ces deux régions, par exemple de germanismes ou de grécismes. Ce faisant, elle ne conclut p.ex. pas hâtivement à un bilinguisme gréco-latin à Naples, p.ex., ne sachant pas toujours faire la part entre «una derivazione diretta del greco o una mediazione latina», 199), et admettant «una permanenza ab antiquo di tipi lessicali» (200). Sur la base de considérations fascinantes sur les noms propres, leur distribution et leurs formes hybrides, elle avance pourtant l’hypothèse «che la comunità grecofona della Napoli del X secolo avesse una qualche consistenza» (208). Par la suite, elle applique une méthode comparative pour distinguer des traits du latin non-conventionnel qui sont propres à l’ensemble des territoires analysés et des traits qui manifestent une distribution plus régionale. Ainsi, certaines erreurs de morphologie verbale pourraient être les indices d’un bilinguisme dans l’aire longobarde: «Il contrasto che emerge al riguardo potrebbe forse trovare giustificazione in un modello che opponga il latino lingua seconda (acquisita in maniera più o meno imperfetta) dai notari longobardi al latino lingua madre dei curiales e scribi delle città stato della costa» ou soit «la testimonianza tangibile degli effetti a lungo termine di una condizione di bilinguismo» (236). La méthode comparative permet par ailleurs de distinguer des niveaux de style à l’intérieur de corpus (240 s.) et d’identifier un «abbassamento del livello stilistico», surtout dans certains documents longobards (246). En conclusion, les questions à propos du bilinguisme et de la diglossie restent largement ouvertes, voire demandent un travail ultérieur. Sornicola insiste sur la nécessité de toujours prendre en compte l’ensemble des traits en coprésence et conclut que «i documenti altomedievali dei domini bizantini e longobardi dell’Italia meridionale meritano il lavoro che ci aspetta» pour manifester toute la complexité des dynamiques linguistiques et culturelles qui ont eu lieu à la frontière entre les mondes romano-byzantin et germanique (248). Avec les contributions de Maria Vittoria Molinari («Processi di interazione linguistica nell’area germanica di età carolingia», 261-88) et Maria Grazia Cammarota («Latino, tedesco e anglosassone nell’area germanica continentale dell’VIII secolo», 289-316) nous pénétrons définitivement dans le monde germanique. Un intérêt de la contribution de Molinari consiste dans la recherche de traces textuelles de différentes formes d’un bilinguisme latin-germanique - ainsi que d’un trilinguisme latin-germanique-galloroman à l’époque des Serments de Strasbourg - dans les aires longobarde et carolingienne. On retiendra p.ex. la fonction de «marca etnica» de germanismes dans un Codex latin du VII e siècle (263), l’analyse fine de binômes lexicaux latins-germaniques, qui mène à une interprétation différente selon l’ordre des langues à intérieur des binômes (264), l’identification de la «dignità di una lingua di portata ‹internazionale›» de l’allemand dans la partie occidentale du règne carolingien au IX e siècle (279) et l’attribution de la fonction pratique de manuel pour l’acquisition de l’allemand L2 des Althochdeutsche ou Pariser Gespräche (280 s.). La contribution de Cammarota nous fait découvrir le rôle des moines et missionnaires anglo-saxons (et irlandais) dans l’évangélisation de l’ouest du continent à travers la création d’importants centres monastiques. Elle insiste sur le plurilinguisme et pluriculturalisme qui régnait dans ces monastères et dont font preuve des glossaires et des traductions. Ils seraient le résultat d’une «giustificazione teologica della varietà linguistica» dans le domaine du sacré par Bède le Vénérable selon laquelle toutes les langues auraient la même dignité devant Dieu, conception qui anticiperait les dispositions prises en faveur des langues vulgaires par Charlemagne (311). On retiendra une coexistence de formes anglo-saxonnes et haut-allemandes dans les glossaires - souvent provenant de mains différentes - qui témoignent de la diversité Besprechungen - Comptes rendus 269 7 G. Lüdi, «Le ‘parler plurilingue’ comme lieu d’émergence de variétés de contact», in: R. Nicolaï (ed.), Limits of Contact, Contact at its Limits. Questioning Language Contact, Leiden 2014. linguistique parmi les moines et leurs élèves. Cammarota nomme en particulier le Harburger Evangeliar, produit à Echternach dans les premières décennies du VIII e siècle, dans les gloses duquel il serait parfois difficile d’attribuer clairement une forme à l’anglo-saxon ou au haut-allemand, phénomènes que l’auteur appelle «oscillazioni grafico-fonetiche» (300), «glosse di cui e difficile stabilire l’appartenenza al germanico continentale o insulare» (301), «fenomeni di interferenza linguistica» (ibid.), voire «forme linguisticamente ibride» (302). Une fois de plus, on se demandera pour quelle raison il serait si important d’attribuer chaque forme à une «langue» plutôt que d’admettre que les frontières entre les variétés s’estompent dans différentes formes de mélange, très typiques de situations de langues en contact (p. ex. Lüdi 2014 7 ). Les différentes contributions de ce volume ne partagent pas - et c’est parfois gênant - un cadre théorique commun, et les références mutuelles entre les chapitres font défaut. Pourtant, les apports à la méthodologie de l’analyse de contextes plurilingues dans le passé, mais aussi à la connaissance de la situation linguistique dans les différentes régions prises en compte sont très considérables et fournissent des pistes de recherche prometteuses. Il reste à espérer que cette mosaïque fascinante suscite l’intérêt des scientifiques et les incite à d’autres recherches avec l’objectif d’obtenir une vision approfondie d’une époque caractérisée par une diversité linguistique remarquable et par une dynamique particulièrement complexe des langues en contact. Georges Lüdi H Kirsten Jeppesen Kragh/ Jan Lindschouw (ed.), Deixis and Pronouns in Romance Languages, Amsterdam/ Philadelphia (John Benjamins) 2013, vi + 289 p. (Studies in Language Companion Series 136) L’ouvrage présenté ici est né à la suite du colloque «Deixis and Pronouns in Romance Languages» qui s’est déroulé en mai 2011 à l’Université de Copenhague. Il se compose de cinq parties, précédées d’une introduction de Kragh et Lindschouw. La première partie du livre est consacrée aux rapports entre la deixis et les paradigmes grammaticaux. La deuxième porte sur «Deixis and impersonality», la troisième sur la dimension diamésique de la deixis, la quatrième sur la deixis dans le système verbal; la dernière partie enfin a pour titre «Deixis in a metalinguistic perspective». C’est dire l’ampleur des thèmes proposés, et il est en effet difficile de trouver un fil rouge qui mènerait d’un sujet à l’autre. Face cette diversité, la seule stratégie, à mon avis, pour se tirer d’affaire était sans doute de regrouper les contributions en sections (quoique parfois les regroupements n’étaient pas faciles). Et c’est la raison pour laquelle je commencerai ce compte rendu en évoquant certaines difficultés terminologiques. On sait bien que Ferdinand de Saussure déjà supportait mal l’«ineptie absolue» de la terminologie linguistique (lettre à A. Meillet, 04.01.1894). Et c’est un fait que l’on peut constater couramment: tout terme nouveau introduit en linguistique subit au fur et à mesure qu’on l’emploie, une espèce de «semantic bleaching», une extension sémantique qui en réduit l’efficacité, l’intention. Les éditeurs de ce volume ont donc bien fait d’employer pour titre les deux substantifs «deixis» et «pronoms» et de ne pas superposer les concepts de «deixis» et