eJournals Vox Romanica 73/1

Vox Romanica
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0042-899X
2941-0916
Francke Verlag Tübingen
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2014
731 Kristol De Stefani

Julián Muela Ezquerra (ed.), Le locus terribilis. Topique et expérience de l’horrible, Berne (Peter Lang) 2013, 285 p.

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2014
Laurent  Bozard
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Besprechungen - Comptes rendus 322 Galloromania Julián Muela Ezquerra (ed.), Le locus terribilis. Topique et expérience de l’horrible, Berne (Peter Lang) 2013, 285 p. Riche en points de vue complémentaires, l’ouvrage édité par Julián Muela Ezquerra est le résultat de trois ans de travail et permet d’élargir les perspectives d’interprétations de ce qui pourrait n’être au départ qu’un simple contrepoint du locus amoenus. De celui-ci, on connaît les composantes traditionnelles: un paysage idéal (souvent un jardin clos qui permet d’échapper aux vicissitudes de la ville), mélange de paradis, d’asile et d’instincts naturels contrôlés par la raison; c’est aussi un cadre favorable pour l’éclosion de l’amour, la relaxation ou le repos. Les quatre éléments contribuent à forger ce cadre idyllique: eau (cours d’eau fraîche), terre (pré verdoyant), feu (coins d’ombre provenant des arbres qui atténuent la luminosité), vent (brise rafraîchissante). À l’opposé, le locus horridus (expression privilégiée dans les textes de l’Antiquité grécolatine) ou locus terribilis voire locus horribilis (dans la littérature moderne) sert à créer une atmosphère inquiétante qui provoque tant «une réaction défensive du lecteur» que son intérêt. Ses caractéristiques premières sont souvent un négatif de celles du locus amoenus mais elles surgissent aussi de l’intervention des personnages. Les treize (symbolique du nombre s’il en est! ) contributions du recueil parcourent ainsi les siècles, du Moyen Âge des romans de la Table ronde jusqu’aux errances houellebecquiennes du XXI e siècle, en passant par les ailleurs des Lumières ou les lieux glauques et interlopes du roman populaire et policier. Un constat s’impose d’emblée à la lecture de cet étonnant et brillant ouvrage: ces loci terribili comportent, pour la plupart, une triple caractéristique narrative liée à leur géographie (isolement, claustration), leur verticalité (tour, caves) et leur météorologie (tempête, obscurité). Le premier terme du topos, le locus, entraîne de facto le lecteur dans une géographie voire une topographie de l’horreur. María Jesús Salillas Paricio constate que dans les deux parties de Berinus, roman du XIV e siècle, deux types de lieux - correspondant aux deux parties du texte - jouent avec ce topos. Dans la première série (espaces éloignés, inconnus, merveilleux et terrifiants: île, mer, montagne), le personnage est mis à l’épreuve mais ces étapes sont indispensables à sa formation et à sa progression. Dans la deuxième partie, les endroits sont plus proches et mieux connus (notamment Rome) mais moins décrits, sans doute pour laisser plus de place à une accumulation d’aventures du héros. C’est encore une île, perfide Albion, qui est au centre des maux et horreurs de Rousseau. Irene Aguilà Solana remarque ainsi que le séjour (janvier 1766-mai 1767) de l’auteur outre-Manche, considéré par lui au début davantage comme un asile, va se convertir petit à petit en une expérience carcérale où tout est fait pour lui nuire (mauvais fonctionnement de la poste, coût de la correspondance, violation du courrier, ignorance de la langue, trahison des amis). Rousseau va alors développer une rhétorique plaintive, presque construite autour du vers de Phèdre (I, 3): «Tout m’afflige et me nuit et conspire à me nuire». Au fur et à mesure de son séjour, il déplore les préjugés, la mentalité étroite et l’inhospitalité des Anglais; quant à leur climat, il ne fait que renforcer son état maladif et dépressif. Si le locus amoenus est clos et horizontal, le locus terribilis est, lui, souvent vertical. Là où la fermeture du premier impliquait la sécurité et le repos, le second joue sur la claustrophilie et abonde de cavités, conteneurs, malles et trous qui renforcent le sentiment d’oppression et d’insécurité. Virginie Fernandez revient sur Maximilien Heller, le premier roman d’Henry Cauvain, sorte de précurseur de Conan Doyle. Les lieux sont symboliques: le Paris du personnage est obscur et reculé mais, espace du crime et de l’injustice, c’est aussi une ville corrompue et menaçante (influence du roman gothique). Quant à la province, où se trouve Besprechungen - Comptes rendus 323 l’antre du criminel, elle se révèle tout aussi trouble: le face à face entre l’enquêteur et le criminel se fera dans un espace clos (château isolé et difficile d’accès) qui contribue à forger chez le lecteur une sensation d’insécurité à la limite du surnaturel. La violence et l’horreur résident aussi dans le traitement que font la police et les médecins des cadavres considérés comme des objets. Enfin, le héros habite en haut d’un immeuble, ce qui lui permet d’avoir certes une vision au-dessus du commun des mortels mais pour le trouver, il faudra gravir les escaliers (lieux de passages, cf. épreuves des héros du Moyen Âge), et ne pas s’effrayer des jeux de lumières qui «entretiennent le fantastique de l’atmosphère». L’isolement et la hauteur se retrouvent aussi dans la contribution d’Ana Alonso. La Tour d’amour de Rachilde, roman qui fit scandale dès sa parution (1899) notamment pour ses thématiques évoquant la nécrophilie et la perversion sexuelle, utilise toute la symbolique du phare d’Ar-Men (Bretagne) pour isoler ses deux protagonistes principaux tant pour se focaliser plus profondément sur l’intériorité humaine que pour en faire un lieu d’abominations et de meurtres (animalisation du phare et de son gardien). Le lieu réel et mythique se convertit progressivement en lieu de l’horreur et de la décadence. La ville dans le roman policier forme pour Julián Muela Ezquerra une sorte de chronotope autour de la polis et de la nuit. De sa lecture de Fred Vargas, Frank Thilliez, Thierry Jonquet ou Jean-Christophe Grangé, il retire quelques constantes comme la verticalité souterraine des caves ou l’atmosphère lugubre des hangars. Tous ces lieux clos jouent sur les stéréotypes du labyrinthe, de l’angoisse et/ ou de la descente aux enfers. Il distingue aussi plusieurs motifs récurrents comme la descente (menaçante et périlleuse), l’absence de lumière (l’obscurité concourt à l’impression d’un univers inconnu et maléfique), la désorientation (fonction labyrinthique), la solitude (qui abolit la logique du policier) et l’odeur (infernale, pestilentielle). Narrativement, ces décors «montrent l’impuissance initiale du héros face au Mal et la nécessité de l’itération de la volonté comme réparation des erreurs ou des limitations du début». En outre, si la cave apparaît comme un «enfer domestique», repaire de monstruosité, les entrepôts (espace de travail désinvestis de leur fonction symbolique créatrice de richesse) se muent en endroits marginaux où se cachent l’enfer industriel et le diable moderne sous les traits du serial killer, se doublant par là-même d’une certaine connotation sociologique. Aux critères géographiques et de verticalité se superposent aussi les dimensions météorologiques de l’horrible. C’est ainsi qu’Esperanza Bermejo Larrea souligne que les lieux de l’horreur dans les romans du Graal, outre leur dénomination symbolique (chapelle de la main hideuse dans La Continuation Gauvain, le Mont Douloureux dans la Deuxième Continuation, le Siege Perilleux dans La Queste ou le château du Noir Ermite dans Perlesvaus) font presque tous l’objet de descriptions météorologiques qui en renforcent les aspects infernaux: tonnerre, foudre, tempête. Bien plus, tous jouent un rôle d’épreuve «qualifiante» pour les personnages: ils marquent la «reconnaissance d’un chevalier élu et simultanément un locus horribilis» pour tous les autres. Isolement, enfermement, claustration et climatologie adverse sont également au cœur de l’effroi selon Azucena Macho Vargas et Ana Soler. Dans L’invitation chez les Stirl de Paul Gadenne, tout concourt à renforcer l’incommunicabilité et l’inactivité des êtres dans un espace cloisonné, qui transforme les personnages et les pousse vers des personnalités malsaines. Intérieur et extérieur (serre, étang, garage où tout semble croupir) de la villa aux dimensions démesurées se révèlent de plus en plus violents pour l’invité et cet espace ne sera jamais pour lui le refuge chaleureux, accueillant et reposant qu’il attendait. Outre les différentes dimensions déjà abordées, il faut souligner l’importance de l’onomastique de ces loci terribili. Cette rhétorique peut aussi avoir un impact sur la poétique et la signification d’une œuvre, comme le montre Christine Ferlampin-Acher. Dans Artus de Bretagne, «l’auteur renouvelle le locus horribilis en l’enrichissant de représentations Besprechungen - Comptes rendus 324 tirées de sa réalité». Les lieux sont déterminés par des appellations significatives (Val Perilleux, Porte Noire, Tour Tenebreuse ...) et possèdent plusieurs points communs (obscurité et amorce de merveilleux, bruit et odeur qui convoquent les sens, bestiaire désagréable composé de vermine grouillante ou de charognards, eau stagnante et odorante proche du marais, tempête). Toutes ces composantes, d’abord littéraires et rhétoriques (surenchère narrative, usage massif des chiffres, formulations intensives) «convoquent des éléments connus du lecteur et suscitent une horreur familière». Ces lieux de l’horreur empruntent aussi à certaines réalités historiques (tremblement de terre de Vannes de 1286, apparition des moulins à eau) qui permettent non seulement de dater plus précisément l’œuvre mais aussi d’y découvrir une certaine dénonciation des peurs de l’auteur: mécanisation (moulins à vent et à eau), pollution, modernité, nouveauté. Pour Daniel Compère, on retrouve dans la première partie de Zigomar de Léon Sazie cette importance accordée à la verticalité (Paris souterrain, égouts proches des cavernes et abîmes des romans gothiques). Mais contrairement à d’autres œuvres de l’époque comme Fantômas (où la violence est plus traditionnelle - usage d’armes - et plus collective - attentats, sabotages, accidents), les lieux horribles abondent dans Zigomar. Ils sont parfois soulignés par les commentaires du narrateur. Bien plus, ils correspondent à des moments forts de l’action et apportent au lecteur l’émotion, le pathétique et la surprise qu’il attend. L’absence de référence à une quelconque morale se lit aussi dans l’onomastique développée tant chez les personnages («la lettre z est une lettre marquée par la violence» - notons qu’elle est utilisée chez des personnages en marge comme Zorro ou Zorglub) que dans la dénomination des techniques de torture (la «tombe vampire» ou «le macaroni aux pointes d’acier»). Enfin, ces lieux horribles peuvent avoir d’autres enjeux, proprement narratifs cette fois. Jean Marie Goulemot suggère ainsi que s’il est «peuplé des rêves des lecteurs européens», le sérail sert en parallèle à véhiculer un message de «propagande en faveur du rachat des chrétiens captifs», afin de «susciter la pitié et la générosité des lecteurs». Dans Les lettres persanes de Montesquieu, le sérail est un espace de misères (celle des femmes soumises, celle des eunuques tentés, celle des corps instrumentalisés et torturés). Petit à petit, ce locus horribilis en vient à instaurer une critique de la politique, de la religion voire de la bêtise. Yvon Houssais interroge l’utilisation du motif de la forêt chez trois auteurs (Perrault, Maupassant et Bille). Lieu de refuge et de liberté, la forêt est également liée à la mort ou à l’abandon. Représentée comme un labyrinthe, elle est aussi le reflet de peurs ancestrales (peur du noir, errance de l’homme face à l’univers) mais elle revêt parallèlement une dimension initiatique puisqu’elle est toujours lieu de l’épreuve. Chez Maupassant, la forêt est un espace de liberté où les hommes peuvent s’affranchir du carcan du quotidien, elle devient un lieu de transgression où l’on peut s’égarer (dans tous les sens du terme). En quelque sorte, elle allie les dimensions agréables du locus amoenus et les dangers de son contrepoint. Avec «La Fraise noire» de Corinna Bille (1976), l’imaginaire végétal de la forêt acquiert une dimension érotique. Métaphore du corps féminin, la forêt est associée au désir, à la sensualité; c’est un lieu de régression, de retour à l’état animal qui devient un personnage du drame. Deux études singulières viennent compléter le volume. Blanca Navarro Pardiñas examine le travail d’Antonine Maillet qui veut raconter l’indicible, l’horreur de la déportation des Acadiens en Amérique du Nord. Ce faisant, elle devient «archéologue de la mémoire» et «historiographe de la parole effacée». Pour sa part, Teresa Baquedano Morales montre que l’hostilité de l’espace urbain dans le roman français du XXI e siècle contribue à l’isolement des individus qui y habitent tout en forgeant l’émergence et la prolifération de nonlieux inhabitables (métro, supermarché, cinéma, bureau - qui devient «un espace à conquérir et à maintenir, à sauvegarder les convoitises des autres»). Outre les topiques du genre, on voit que se forge au fil des œuvres une géopolitique narrative de l’horreur. Il semble ainsi que si l’on ne peut négliger la simple dimension rhétorique Besprechungen - Comptes rendus 325 du topos, le locus terribilis, à l’opposé peut-être de son contrepoint, n’est pas qu’un simple artifice. S’il participe évidemment à l’ancrage de l’œuvre dans un genre (de l’épreuve arthurienne à la quête policière notamment), il se double généralement d’autres dimensions - historiques (cf. Artus de Bretagne), symboliques (cf. La Tour d’Amour), voire politiques (cf. Les lettres persanes) - qui permettent d’en renforcer l’intérêt narratif. Preuve s’il en est que, comme le prétend Conan Doyle, «L’horreur ne va pas sans l’imagination». Laurent Bozard H Jacques Elfassi/ Cécile Lanéry/ Anne-Marie Turcan-Verkerk (ed.), Amicorum societas. Mélanges offerts à François Dolbeau pour son 65 e anniversaire, Firenze (SISMEL - Edizioni del Galluzzo) 2013, xiv-1222 p. (Millennio Medievale 96) Nelle 1022 pagine di questo ponderoso volume sono raccolti i 54 contributi che amici e colleghi hanno voluto dedicare a François Dolbeau per il suo 65° genetliaco. La ricchezza dei lavori e l’ampiezza dello spettro di temi e argomenti affrontati, rendono l’idea degli interessi del festeggiato e insieme della estensione della sua fama. I contributi spaziano, infatti, dalla storia dell’Africa cristiana nei primi secoli (giustamente noto è il ritrovamento, da parte di Dolbeau, di 26 nuovi sermoni agostiniani in un codice cartusiano del XV secolo), alle raccolte di leggende medievali, alla agiografia, la liturgia, l’esegesi biblica. Assai utili e interessanti si rivelano però i contributi nel dominio della storia della lingua latina medievale, della semantica ed è soprattutto su di essi che si concentrerà la nostra attenzione. Apre il volume l’articolo di R.Alexandre, B. Bon e A. Guerreau-Jalabert, «Variations graphiques, variations morphologiques et lemmatisation du latin médiéval» (3-18), nel quale i tre operatori del Comité Du Cange affrontano la questione delle variazioni grafiche e morfologiche a partire dall’esperienza maturata in quanto linguisti e storici con il Novum Glossarium Mediae Latinitatis. Ne discende una riflessione sul concetto stesso di lemma e una discussione dei criteri seguiti per stabilire un nuovo lemmario del latino post-classico. Le analisi di M. Banniard, «Sur la notion de latin tardif à la lumière des systèmes langagiers d’Augustin» (26-36) affrontano la questione della lingua nei secoli della Tarda Antichità e in special modo del nesso tra lingua letteraria e lingua vivente, giungendo alla conclusione che la lingua di Agostino d’Ippona, per quanto personale era comunque costruita «dans le cadre normal d’une langue vivante commune, le latin tardif s’inscrivant simplement comme du latin classique ayant vécu quelques siècle de plus» (35). P. Chiesa, «Una misteriosa Vita medievale di papa Celestino I (fra Mantova e Bologna? )», (131-54), studia questo testo agiografico prodotto in Italia del Nord nel pieno Cento, e ne fornisce una pregevole edizione critica. Anche G. Dahan, «Les correctoires du XIII e siècle du livre d’Esther» (165-87), si occupa di questioni filologiche, ma in questo caso si tratta delle esperienze ecdotiche che nella Parigi del XIII secolo furono condotte sul testo biblico, ragguagliandoci così sul fatto che già a quella altezza cronologica si conduceva il confronto tra varianti (168), si ipotizzavano correzioni e aggiunte fondandosi su criteri paleografici, lessicografici, prosodici, grammaticali (169-70 e 175), si conoscevano l’ebraico (170-73), e il greco (173-74). Certo non si può parlare di edizioni criticamente condotte ma rimane il fatto che pur se desiderosi unicamente «de repérer et d’analyser les variae lectiones» (174) quei sapienti maneggiavano strumenti che sono ancora attuali per ogni filologo. Altrettanto interessante risulta l’indagine condotta da J. Dalarun, «Bribes franciscaines et ‹loi de Dolbeau›» (189-208), relativamente a tre leggende inedite francescane. Il nodo della questione, dal punto di vista di Dalarun, è quello relativo alla precedenza delle redazioni lunghe o brevi