Vox Romanica
vox
0042-899X
2941-0916
Francke Verlag Tübingen
Es handelt sich um einen Open-Access-Artikel, der unter den Bedingungen der Lizenz CC by 4.0 veröffentlicht wurde.http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/121
2015
741
Kristol De StefaniGuillaume de Digulleville, Le Dit de la fleur de lis, édité par Frédéric Duval, Paris (École des chartes) 2014, 344 p. (Mémoires et documents de l’École des chartes 95)
121
2015
vox7410315
Besprechungen - Comptes rendus 315 3 On peut s’interroger sur la distinction «roman à insertions» (deux renvois) et «roman». 4 Il s’agit de quatrains d’alexandrins monorimes que l’auteure édite, sans le justifier, comme s’il s’agissait de huitains d’hexasyllabes. Est-ce la disposition du ms.? Ou celle du premier éditeur (Omont)? Le premier volume comporte une abondante bibliographie, un précieux «Index rerum» (pour l’essentiel noms de genres et catégories littéraires 3 ), un «Index nominum» (auteurs, œuvres), un «Index des incipit» classés par genres (chansons, citations latines, motets, refrains et rondeaux). Il contient également un certain nombre d’appendices particulièrement utiles: I. Corpus général des textes munis d’insertions lyriques, avec des indications relatives à la datation, au genre, à l’auteur, au style, à la nature et la forme des insertions, plus le nombre de copies connues; II. Tableau récapitulatif des insertions en situation de divertissement, données pièce par pièce, avec l’indication du chanteur et de l’occasion; III. Transcription des refrains à fonction divertissante de Renart le Nouvel, suivi d’un tableau analytique de ces citations où sont notamment précisées la parenté modale ou la polarité et l’ambitus, ainsi que les autres textes qui contiendraient les citations en question; IV. Tableau récapitulatif des insertions jouant un rôle discursif; V. Tableau récapitulatif des citations musicales du Jeu de Robin et Marion; VI. Transcription des refrains à fonction discursive de Renart le Nouvel, suivi d’un tableau analytique de ces insertions; VII. Tableau analytique des insertions du Ludus, avec indication du modèle et ses caractéristiques musicales; VIII. Tableau analytique des insertions des Miracles de Gautier de Coinci; IX. Tableau des insertions citées à titre d’exemple, précisant chanteur et occasion; X. Caractéristiques musicales des insertions du Rosarius. Plus imposant, le second volume réunit les annexes musicales qui donnent enfin aux chercheurs un accès facile à l’ensemble des mélodies du corpus, inédites ou incomplètement éditées, sous la forme d’éditions critiques. Ces annexes traitent d’abord des refrains, puis des «citations longues». Suivent d’abondantes annexes improprement appelées «littéraires». La première décrit dans l’ordre chronologique pièce par pièce la situation des insertions: il s’agit d’index donnant leur place dans l’œuvre et la référence éventuelle au répertoire de van den Boogard, identifiant le chanteur et l’occasion et indiquant le cas échéant les autres localisations. La seconde décrit les choix métriques et prosodiques des insertions. La troisième donne des «analyses prosodiques générales»: en fait ni plus ni moins la description métrique et rimique des insertions, vers par vers, avec chaque vers en regard. On y trouve enfin l’édition de deux textes courts, L’Abeïe dou Chastel amoureus et le salut d’amour «Dame plesant et sage» 4 . Une table de concordance clôt ce volume, établissant le lien entre les numérotations des répertoires de Raynaud-Spanke, Linker, Tischler et Mölk/ Wolfzettel (le premier répertoire sert d’entrée). Dominique Billy H Guillaume de Digulleville, Le Dit de la fleur de lis, édité par Frédéric Duval, Paris (École des chartes) 2014, 344 p. (Mémoires et documents de l’École des chartes 95) C’est un véritable défi philologique que Frédéric Duval a relevé en rééditant le Dit de la fleur de lis de Guillaume de Digulleville; nouvelle, cette édition l’est de plusieurs points de vue, après celle fournie par Arthur Piaget en 1936 (R 62; numérisée en mode texte, sans apparat critique, Garnier électronique; en mode image, complète, dans Gallica): approche littéraire et historique du contenu, attention philologique aux deux manuscrits conservés, Besprechungen - Comptes rendus 316 et surtout choix méthodologiques rénovés et établis sur la base de la transmission même du texte, constituent les fondements d’un travail que l’on peut considérer exemplaire. L’Introduction, très développée mais non bavarde, fournit tous les éléments essentiels, à partir de la justification de l’édition (9-14), avec une critique motivée mais jamais acérée à l’égard de Piaget, et de la présentation de l’œuvre (14-27), où des remarques judicieuses portent sur le choix du titre (Roman de la Fleur de lis dans l’édition Piaget) et sur la structure interne du texte; le chapitre le plus substantiel (23-90) se concentre sur l’interprétation du Dit, poème de 1336 octosyllabes à rimes plates dont le sens est loin d’être partout facile à discerner si l’on dépasse à peine une lecture superficielle. Œuvre de circonstance, composée dans un contexte politique - les prodromes de la guerre de Cent Ans - et intellectuelles discussions sur la place respective du pouvoir de l’Église et du pouvoir de l’État - dont il faut nécessairement tenir compte, le Dit est encadré par Frédéric Duval dans un panoramique complet, qui rappelle de façon particulièrement claire et circonstanciée les évènements politiques et militaires des premières décennies du XIV e siècle, mais aussi l’évolution de la pensée politique de Guillaume de Digulleville entre le Pèlerinage de l’âme (1 re rédaction: 1330-31) et le Dit (1338), et les difficultés que soulève l’interprétation d’un «signe» apparemment aussi simple que la fleur de lis, représentant, plutôt qu’un roi de France - Clovis ou Philippe VI, premier des Valois -, la dignité royale elle-même. C’est là un aspect que Frédéric Duval approfondit tout particulièrement, en proposant une «exégèse des lis» (53) qui tient compte des différentes traditions médiévales rattachées à cette fleur - lis biblique, lis naturel, lis héraldique - et qui permet de reconnaître que le poème de Guillaume est «le premier texte daté à mentionner la légende de la dévolution des armes aux fleurs de lis à Clovis» (63), une primauté qui ne constitue cependant pas le seul intérêt du texte ; celui-ci s’exprime aussi dans la complexité de l’édifice allégorique bâti par Guillaume, qui comprend - outre le motif su songe initial et le rôle attribué à Grace Dieu, Sapience, Raison - toutes les composantes héraldiques du signe royal français: le nombre des fleurs, le champ, les couleurs, les brisures éventuelles. Qui plus est, les fleurs de lis sont mises en rapport avec deux autres dons surnaturels confirmant la dimension très chrétienne du roi de France, la sainte ampoule et le pouvoir guérisseur, alors que la concession de l’oriflamme, liée à Charlemagne, ne pouvait pas être intégrée dans le poème. Selon Duval, cependant, la véritable nouveauté de l’œuvre de Digulleville réside dans la réflexion qu’elle recèle sur l’écriture allégorique elle-même: discours complexe qui mériterait d’être repris à l’intérieur d’une étude prenant en compte l’ensemble des Pèlerinages. C’est muni d’un tel arsenal d’informations que le lecteur parvient à la présentation philologique du texte: ici encore, Frédéric Duval donne preuve de son savoir et de son aisance à le transmettre. La description des deux manuscrits (90-95), A qui contient les œuvres de Guillaume de Digulleville (mais le Dit est copié sur un cahier à part), et B, recueil moderne dont le Dit constitue la dernière unité, précède une étude linguistique importante (96-125), dont les principes sont exposés très clairement. En effet, d’une part, la langue de Guillaume exigerait d’être étudiée dans son ensemble, et non pas sur la base d’un poème d’étendue limitée, d’autre part la nécessité s’impose d’équilibrer plusieurs exigences: cerner la langue de l’auteur au-delà des modernisations introduites par les deux copistes, mais aussi «conforter l’établissement du texte» (96) et fournir aux lecteurs les éclaircissements utiles à la compréhension d’une langue parfois obscure («graphie» 97-111, «morphosyntaxe» 112-24, «lexique» p. 124-25). Dans le paragraphe consacré à la versification (125- 31), ce sont surtout les questions rattachées au comptage des syllabes qui sont examinées, les irrégularités métriques constituant une difficulté majeure pour l’éditeur, toujours partagé entre la tentation de corriger et le respect d’un texte et d’une langue beaucoup moins réglementée que le français moderne. La dernière section de l’«Introduction», consacrée aux principes d’établissement du texte, constitue une véritable leçon de méthode: confronté à deux manuscrits indépendants l’un de l’autre et qui transmettent tous les deux un texte corrompu Besprechungen - Comptes rendus 317 et souvent fautif, l’éditeur ne peut qu’hésiter, non pas quant au choix du texte de base (des critères philologiquement sûrs imposent de choisir B: lectiones difficiliores, archaïsmes, respect de l’usus scribendi de Guillaume), mais quant au type d’«orientation» à adopter: «vers le ou les manuscrits, ... vers l’auteur, ... vers le lecteur» (135); c’est ce tiraillement qui a déterminé Frédéric Duval à offrir tant la transcription synoptique des deux manuscrits (162-243), qu’une véritable édition critique (247-309) basée sur B et accompagnée de notes qui illustrent tous les problèmes textuels et discutent les variantes et les choix opérés par l’éditeur; lorsque ceux-ci vont à l’encontre des leçons des deux copies, ils se justifient par une profonde connaissance tant du moyen français que de la langue de Guillaume attestée dans les Pélerinages. Répondant à deux buts clairement exposés - rendre service aux lecteurs, mais aussi aux lexicographes, et enrichir le DMF -, le «Glossaire» (311-34) tient compte aussi des dépouillements qui en ont été faits jusqu’ici dans Gdf, GdfC, DMF, et dans la thèse de Béatrice Stumpf (consultable en ligne sur le site du DMF). Il est suivi d’un «Index nominum» sélectif, relatif à l’«Introduction» (335-38), et d’un «Index rerum» (338-41), renvoyant à des notions historiques, linguistiques et littéraires, dans l’«Introduction» et les notes critiques. La bibliographie, très vaste, comprend plusieurs sections (145-60): éditions des œuvres de Guillaume de Digulleville et études sur l’auteur, textes antiques et médiévaux, bibliographie critique (histoire; littérature, histoire de l’art, philosophie; langue; philologie éditoriale). Un tel ouvrage, qui permet de redécouvrir une œuvre certainement peu connue de Digulleville, rendra d’utiles services non seulement aux spécialistes du moine de Chaalis - qui, soit dit entre parenthèses, sont devenus plus nombreux ces deux dernières décennies - mais aussi aux éditeurs de textes médiévaux confrontés à des traditions textuelles lacunaires, corrompues ou de toute manière lointaines de l’«original». Maria Colombo Timelli H Valérie Guyen-Croquez, Tradition et originalité dans les Chroniques et Conquestes de Charlemaine de David Aubert, Paris (Honoré Champion) 2015, 466 p. (Bibliothèque du XV e siècle 79) Conservées dans un somptueux manuscrit unique (KBR 9066-9068), les Chroniques et Conquestes de Charlemaine de David Aubert furent éditées en trois volumes par Robert Guiette entre 1940 et 1951 (Bruxelles, Palais des Académies); depuis, elles ont fait l’objet d’une bibliographie critique importante, qui s’est cependant attachée à une section ou à l’autre de cette énorme compilation en prose. Le livre de Valérie Guyen-Croquez, issu d’une thèse de doctorat soutenue en 2008, constitue en revanche la première monographie entièrement consacrée à cet ouvrage. Après une «Présentation générale» (première partie, 13-44) centrée sur l’auteur, les commanditaires (le premier prologue est dédié à Jean de Créquy, le second à Philippe le Bon) et la cour de Bourgogne, le texte (dont est donné un utile résumé), on entre dans le vif du sujet. De fait, une des difficultés de l’analyse est représentée par le nombre et la variété des sources utilisées par David Aubert dans le but de fournir une biographie complète - en même temps historique et littéraire - du grand empereur; comme le titre l’indique, le compilateur fait à la fois œuvre d’historien, en rédigeant des Chroniques, et d’auteur épique, en présentant les Conquêtes de Charlemagne. Si l’identification des sources de David Aubert et le traitement qu’il leur a réservé constitue un terrain déjà bien balisé (voir surtout B. Boussmanne/ G. Palumbo dans La Librairie des Ducs de Bourgogne IV (2009): 127-58), Valérie Guyen-Croquez apporte sa pierre à l’édifice en analysant comment l’auteur a organisé la matière en idéalisant la figure d’un héros dont il souligne la vertu guerrière, la légitimité lignagère, une jeunesse qui semble éternelle (deuxième partie, «Des sources
